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Le dispositif expérimental est décrit sur la Figure II-3. Des gouttes millimétriques d’huiles silicones (voir caractéristiques à la section II.2.3) sont émises à la fréquence de 0,5 Hz grâce à un pousse-seringue « Génie » de la « KENT SCIENTIFIC CORPORATION ». Elles sont lâchées sur la partie haute d’une plaque de dimensions 22x22 cm, inclinable de 0 à 90°. Les gouttes atteignent leur vitesse limite quelques millimètres seulement en dessous de l’impact. Elles dévalent alors la pente à vitesse (et forme) constante.

Figure II-3: Description du dispositif expérimental pour l’étude des gouttes ruisse- lant sur un plan incliné. (a) Schéma explicatif. (b) Photographie du dispositif.

Le substrat est une plaque de verre enduite d’une fine couche de FC725, fluoropoly- mère commercialisé par 3M. Il s’agit d’un vernis très visqueux que l’on étale sur la plaque en le dissolvant au préalable dans cinq fois son volume d’acétate d’éthyle (voir détails de la méthode décrits dans l’Annexe C). Le solvant s’évapore ensuite et laisse une fine couche de fluoropoly- mère sur la plaque. Ce traitement permet de rendre la plaque de verre partiellement mouillante pour les huiles silicones, les angles de contact statiques étant aux alentours de 50°.

II.2.2 Contrôle de la vitesse des gouttes par inclinaison du

substrat

Le paramètre gérant les transitions entre les différents régimes de gouttes est leur vitesse U. Cette dernière peut être contrôlée soit en changeant le volume des gouttes, soit en modifiant l’inclinaison α de la plaque par rapport à l’horizontale [PODGORSKI (2000)]. En effet, des considérations physiques simple (écoulement de STOKES) impliquent que le nombre capillaire :

Ca = ηU / γ ( II.4 )

est à peu près proportionnel au nombre de Bond :

Bo= (V2/3sin α) / lc2 ( II.5 )

où V représente le volume de la goutte et lc = γ / (ρg ) la longueur capillaire. Plus précisé- ment, cette loi linéaire résulte d’un équilibre entre le poids et les frottements visqueux, l’hystérésis introduisant un léger effet de seuil [PODGORSKI et al (2001), LE GRAND et al (2005)].

Comme il est beaucoup plus simple en pratique d’incliner la plaque que de changer le volume des gouttes, nous avons préféré utiliser l’inclinaison α comme paramètre de contrôle et travail- ler à volume de gouttes fixé à V=(6,0±0,2) µL.

Aux très faibles inclinaisons, les gouttes restent en fait accrochées à la plaque sans se déplacer, à cause de l’hystérésis de mouillage. Comme l’hystérésis est assez faible sur les subs- trats utilisés, les gouttes se mettent en mouvement pour des inclinaisons raisonnables de la

plaque. Des détails sur le seuil de mise en mouvement sont disponibles dans LE GRAND et al

(2005), dont une copie est jointe dans l’Annexe F de ce manuscrit.

II.2.3 Description des huiles silicone

Les huiles 47V, commercialisées par RHODORSIL, sont composées de PDMS (PolyDi-

MéthylSiloxane) de formule chimique indiquée sur la Figure II-4. Les groupements méthyle leur confèrent des propriétés d’hydrophobie et d’anti-adhérence. Elles sont transparentes, inertes chimiquement, et ne vieillissent pas sous l’effet de l’air, l’eau ou la lumière, même ultraviolette.

Figure II-4: Molécule de PDMS. L’indice n représente le degré de polymérisation.

Nous avons choisi d’utiliser ces huiles car elles présentent de nombreux avantages. Elles sont fabriquées par polycondensation, ce qui permet de disposer d’huiles de viscosités variables sur plusieurs ordres de grandeur (de η=2 cP à plusieurs centaines de milliers de centipoises6)

par simple variation du degré de polymérisation, tout en conservant une densité d proche de 1, et surtout une tension superficielle γ quasi-constante, de l’ordre de 20 mN/m (voir Tableau II-1). Comme leur tension superficielle est basse, il n’y a pas de risque d’abaissement de la ten- sion superficielle par contamination, contrairement au cas de l’eau. De plus, les huiles silicone sont très peu volatiles dès que le nombre de monomères vaut quelques unités.

HUILE n η (cP) d γ (mN/m)

47V10 9 10,0 ± 0,2 0,936 20,1

47V100 75 103,7 ± 0,2 0,964 20,9

47V1000 338 1035 ± 5 0,970 21,1

Tableau II-1 : Propriétés des huiles utilisées : degré de polymérisation n, viscosité η (mesurée avec un viscosimètre à capillaire), densité d et tension superficielle γ. Les données proviennent de la documentation Rhône-Poulenc [RHODORSIL].

L’ensemble des propriétés de ces huiles fait qu’elles sont très utilisées dans l’industrie, aussi bien comme lubrifiant, que comme isolant, agent anti-mousse, ou additif tensioactif pour peintures ...

6 Le poise (P) est une unité « cgs » : 1 P=1 g.cm-1.s-1. On utilise généralement le centipoise car 1 cP

correspond à la viscosité dynamique de l’eau. L’unité « SI » de la viscosité dynamique est le poiseuille (Pl), 1 Pl=1 kg.m-1.s-1. Au lieu de quantifier les viscosités en centipoises, comme cela se fait encore de

II.2.4 Technique de visualisation

Les gouttes sont filmées de côté par une caméra, placée à environ 20 cm du train de gouttes, et dont l’axe est perpendiculaire à la plaque (voir Figure II-5). Afin d’obtenir une image satisfaisante, nous avons adapté un zoom 12,5-75 mm et une bague allonge de 10 mm sur la caméra. PODGORSKI ne disposait que des vues de dessus des gouttes. Nous avons ajouté un

miroir suspendu au-dessus du dispositif et orienté à 45°, ce qui permet d’obtenir simultanément une vue de côté (en direct) et une vue de dessus des gouttes (à travers le miroir), et d’en extraire des informations sur leur forme tridimensionnelle.

Figure II-5: Technique de visualisation des gouttes avec vue simultanée de dessus et de côté et maximisation du contraste.

Reste à régler le problème de l’éclairage. En effet, l’huile silicone est transparente ce qui rend difficile l’obtention d’un bon contraste sur la plaque de verre. PODGORSKI plaçait un mas-

que de gradients de niveaux de gris sous le substrat, ce qui donnait une impression de relief aux gouttes (voir Figure II-1). Par contre, cette visualisation était peu commode pour l’extraction de contours car le contraste avec la surface non-mouillée s’annulait vers la pointe des gouttes, zone qui justement nous intéresse particulièrement. Comme nous disposons dorénavant de deux vues orthogonales des gouttes, nous n’avons plus besoin de cette sensation de relief et nous avons plutôt cherché à maximiser le contraste des gouttes pour bien distinguer ce qui se passe à leur pointe. Pour cela, nous avons placé deux sources lumineuses « à l’infini », derrière et sous les gouttes (voir Figure II-5). Les sources sont suffisamment étendues pour produire un fond lumineux autour des gouttes, mais également suffisamment ponctuelles pour que les rayons lumineux qui arrivent sur la goutte soient quasi-parallèles et se réfractent hors du diaphragme de la caméra. Ainsi, les gouttes apparaissent sombres sur un fond clair, sauf au centre des gout- tes sur la vue de dessus, où l’on perçoit une image de la source lumineuse (voir Figure II-6b).

II.2.5 Méthode de mesure des angles de contact et des angles

d’ouverture du coin

Les vues de côté des gouttes permettent d’en extraire les angles de contact dynamiques d’avancée θa et de reculée θr. Plutôt que de déterminer ces angles par ajustement d’un dièdre

formé de deux segments de droites, nous avons préféré ajuster le contour des gouttes par des cercles, soit sur la partie avant pour obtenir θa, soit sur l’arrière des gouttes pour en déduire θr

(voir Figure II-6a). Les cercles sont déterminés en définissant trois points sur le contour des gouttes, proches de la ligne de contact. Les points peuvent éventuellement être déplacés pour obtenir un meilleur ajustement. L’angle entre les tangentes à l’intersection des cercles définit l’angle de contact dynamique. Cette technique de mesure améliore la précision et donne une meilleure reproductibilité que la mesure par des segments de droites. Les angles de contact mesurés par la « méthode des cercles » sont obtenus avec une précision de 1° à 2°.

Figure II-6 : Ajustements du contour des gouttes par des cercles pour mesurer les angles caractéristiques. (a) Goutte ovale vue de côté, accompagnée de son reflet dans la plaque de verre. Mesure des angles de contact θa et θr. (b) Goutte en coin

vue de dessus (partie gauche) et vue de côté (partie droite). Mesure des angles d’ouverture du coin ϕ et Ω.

Il faut noter que l’angle qui est mesuré ici est un angle de contact défini à une échelle macroscopique, de l’ordre du quart de millimètre. Des valeurs différentes d’angles de contacts peuvent être attendues à des échelles plus petites [NGAN & DUSSAN (1982), RIO et al (2005)].

Les résultats présentés dans ce manuscrit n’engagent donc que les angles de contact macrosco- piques.

La même technique de mesure des angles avec ajustement de contours par des cercles est également utilisée pour caractériser le régime en coin. Les mesures des angles d’ouverture du coin vu de dessus (ϕ) et vu de côté (Ω) sont effectuées par cette méthode (voir Figure II-6b).