• Aucun résultat trouvé

1.5 Le modèle ΛCDM

1.5.7 Discussion

Il apparaît de l’ensemble des résultats de ces sondes que les observations convergent vers le modèle ΛCDM, cette concordance est illustrée par la figure 1.5.2. Cette figure montre comment la combinaison de trois sondes : le fond diffus cosmologique (WMAP [111]), les oscillations baryoniques acoustiques (SDSS-DR7, 2dFGRS [148]) et les su- pernovae Ia [169] brise la dégénérescence entre les densités réduites ΩΛ,0 et Ωm,0. Les

contours combinés sont en accord avec le modèle ΛCDM à 68% de niveau de confiance. La figure 1.5.3 de gauche représente la combinaison du fond diffus avec les données de Planck [156], aux petites échelles de SPT [174] et ACT [112], des oscillations acoustiques (SDSS DR7 [148], WiggleZ [29], BOSS DR9 [4]). La dégénérescence géométrique entre

1.5 Le modèle ΛCDM les paramètres Ωm et ΩΛ est partiellement brisée par cette combinaison de données. La

contrainte est considérablement améliorée avec l’ajout de la reconstruction du spectre lentillé fourni par Planck et les oscillations acoustiques baryoniques comme le montre la figure de droite. Le tableau 1.2 donne des contraintes sur les paramètres cosmologiques des paramètres libres du modèle standard [156], obtenues de la combinaison des données en température du satellite Planck, des données en polarisation de WMAP aux grandes échelles angulaires (basL), des données des expériences ACT et SPT aux petites échelles angulaires (hautL) et des oscillations baryoniques acoustiques (BAO). Le paramètre θ représente la taille angulaire de l’horizon sonore au moment de la dernière diffusion.

Figure 1.5.2: Contrainte sur le paramètre de l’énergie noire en fonction du paramètre de densité de la matière en combinant divers jeux d’observation (contours à 68%, 95% et 99%), le fond diffus cosmologique (WMAP [111]), les os- cillations baryoniques acoustiques (SDSS-DR7, 2dFGRS [148]) et les su- pernovae Ia [169] [189].

Figure 1.5.3: Combinaison des paramètres Ωm et ΩΛ pour différentes valeurs de H0

obtenue avec le fond diffus. A droite est ajouté la reconstruction du spectre lentillé par Planck et les données des oscillations acoustiques [156].

Paramètres Symboles Planck+basL+hautL+BAO

Meilleur Ajustement 68% d’intervalle de confiance Densité de baryons actuelle Ωbh2 0.022161 0.02214 ± 0.00024

Densité de matière noire actuelle Ωch2 0.11889 0.1187 ± 0.0017

Profondeur optique de la diffusion τ 0.0952 0.092 ± 0.013 Thomson pendant la réionisation

Densité de l’énergie noire divisée ΩΛ 0.6964 0.6914 ± 0.010

par la densité d’énergie critique actuelle

RMS des fluctuations de matière σ8 0.8285 0.826 ± 0.012

actuel dans la théorie linéaire

Décalage spectral auquel l’univers est zre 11.45 11.3 ± 1.1 à moitié réionisé

Constante de Hubble H0 67.77 67.80 ± 0.77

Age de l’univers t ×109 13.7965 13.798 ± 0.037

Taille angulaire de l’horizon sonore 100 × θ1.04163 1.04163 ± 0.00056

Table 1.2: Paramètres cosmologiques obtenus de la combinaison de plusieurs sondes : des données en température des expériences Planck, SPT et ACT et des oscillations baryoniques acoustiques de l’expérience BOSS [156].

Cependant, il demeure un certain nombre de questions, intrinsèques au modèle stan- dard. Nous allons en lister quelques unes :

- preuve de l’énergie noire

De nature inconnue, l’énergie noire est à l’origine de l’accélération de l’expansion de l’univers. Une revue de cette composante est réalisée dans [117]. La nécessité de cette composante est apparue avec l’interprétation des équations de Friedmann-Lemaître. Elle est confirmée, en 1998, par la mesure de la dérivée seconde du facteur d’échelle en considérant les supernovae de type Ia comme des échelles standards [149, 169] .

1.5 Le modèle ΛCDM L’énergie noire pourrait différer d’une simple constante cosmologique et être dyna- mique, comme un champ scalaire (modèle de quintessence), qui évolue avec le décalage spectral. L’équation d’état de ce paramètre peut être contrainte par la mesure radiale du taux d’expansion H(a).

Il existe quatre sondes sensibles à l’énergie noire : le lentillage gravitationnel, les os- cillations baryoniques acoustiques, l’étude des amas de galaxies et les supernovae SNIa. Les sondages d’amas de galaxies mesurent la densité spatiale des galaxies. Cette sonde est sensible à l’énergie noire par l’effet résultant de la combinaison de la distance du diamètre angulaire avec la relation du décalage spectral, l’évolution en fonction de temps du facteur d’échelle et le taux de croissance des structures. Elle a le potentiel statistique de dominer les techniques des oscillations baryoniques et les supernovae, mais est encore affectée par les erreurs systématiques dus aux processus astrophysiques non linéaires.

L’approche des oscillations baryoniques acoustiques est aujourd’hui une sonde puis- sante, moins affectée par les incertitudes astrophysiques que les autres sondes.

Les supernovae de type Ia constituent à ce jour la sonde la plus puissante pour étudier l’énergie noire, mais le résultat de cette sonde dépend fortement de la précision atteinte sur les photo-z, pour un décalage spectral mesuré par photométrie multibande.

La technique de lentillage gravitationnel faible est une technique émergente. Si les effets systématiques sont relativement bien contrôlés, cette sonde peut constituer la sonde la plus prometteuse. Les données du rayonnement de fond diffus cosmologique fournissent aussi une contrainte sur l’énergie noire par l’effet Sachs Wolfe intégré, qui correspond à un décalage spectral des photons, lorsqu’ils traversent des puits de potentiel, à l’entrée et à la sortie du puits. Sans composante d’énergie noire, l’effet observé serait nul, or il a été observé par la corrélation entre le fond diffus et les larges structures à 4σ [81].

- la matière noire

La découverte de Zwicky en 1933 montre que le mouvement des galaxies à l’intérieur de l’amas Coma est très important et donc la masse nécessaire pour confiner les galaxies à l’intérieur du système observé doit être beaucoup plus grande que la somme de la masse des étoiles visibles. Les observations en rayons X dans les années 70 et 80 indiquent qu’une partie significative de la masse manquante est sous la forme d’un plasma chaud diffus qui comble l’espace intergalactique dans les amas. Il émerge alors l’idée que les galaxies individuelles sont entourées d’halos massifs de taille au moins dix fois supérieure à la taille des galaxies visibles. Les premières simulations dans le début des années 80 ont démontré que la matière noire est à l’origine des grandes structures et des halos de matière noire. D’autres preuves sont venues s’ajouter comme les anisotropies du rayonnement de fond cosmologique. Les fluctuations mesurées sont faibles, cette observation est consistante avec l’émergence de galaxies à faible décalage spectral et dans le cas de matière noire non-baryonique.

La nucléosynthèse primordiale permet de contraindre le paramètre de densité Ωbh2. Les

abondances observées du deutérium et de l’hélium 4 donnent des contraintes similaires à celles du rayonnement de fond cosmologique Ωbh2 ≃ 0.02. Cette valeur relativement

basse démontre qu’il doit exister de la matière noire principalement non-baryonique. Il existe différents scénarios sur la nature de la matière noire : de la matière noire baryonique (des nuages moléculaires froids et denses et des MACHOs corps massifs et compacts du halo galactique, des naines brunes, des étoiles à neutrons ... ), de la matière noire non-baryonique dominante (WIMPS particules massives et interagissant faiblement, les axions proposés par Peccei et Quinn en 1977 pour résoudre le problème

de la violation de CP). La matière noire non-baryonique n’existe pas dans le modèle standard et requière une nouvelle physique comme la supersymétrie.

Beaucoup d’expériences ont pour objectif la détection directe de ces particules en mesurant le recul du nucléon après avoir interagi avec le WIMPs : CDMS [3], Edelweiss [64], XENON [17]. Une détection indirecte pourrait être réalisée par les rayons γ qui résultent de l’annihilation des WIMPS, avec les expériences Fermi [114], HESS [2] et MAGIC [120].

Des théories ont été développées pour élaborer des modèles sans matière noire comme la théorie MOND (Modified Newtonian Dynamics) [47]. Cette théorie permet de re- produire les courbes de rotation des galaxies. Mais un certain nombre d’observations astrophysiques remettent en cause cette théorie. Contrairement à la théorie de la ma- tière noire, la théorie MOND ne peut pas expliquer l’aspect de l’amas du boulet [48]. Cette théorie est aussi défavorisée par la cosmologie, par l’observation du pic des oscil- lations baryoniques acoustiques dans le spectre de corrélation des galaxies en fonction de la distance comobile, alors que dans le cadre de la théorie MOND, la fonction de corrélation des galaxies devrait présenter une cassure.

Une liste des incohérences entre les simulations numériques du modèle ΛCDM et les observations est donnée dans [69]. Nous en citons quelques unes

- les vitesses particulières des amas de galaxies sont prédites de l’ordre de 200 km.s−1 dans un modèle ΛCDM. Ces vitesses peuvent être déterminées par l’effet Sunyaev Zel’dovich, qui a montré un flux cohérent de 1000 km.s−1 sur des échelles supérieures à 400 Mpc.

La vitesse de collision de l’amas de boulet est supérieure à 3100 km.s−1 à z = 0.3, ce qui est trop important pour être expliqué par le modèle ΛCDM.

- la découverte d’un amas de galaxies XMMU J2235.3- 2557, à grand décalage spectral, avec une masse d’environ 4 × 1014M

à z = 1.4 indique que la formation des structures

a pris place bien avant et plus vite que les prédictions du modèle ΛCDM.

- le nombre des galaxies naines est inférieur de plusieurs ordres de grandeur aux prédictions du modèle ΛCDM [34]. Des solutions à ce problème sont que les plus petits halos de matière noire dans l’univers sont inefficaces dans le processus de formation des étoiles ou que les simulations numériques ne soient pas représentatives à ces échelles.

- la nucléosynthèse primordiale et les observations sont en très bon accord sur l’abon- dance de l’hélium et du deutérium mais pas pour le lithium. Le lithium-7 est détecté dans le spectre d’absorption de l’atmosphère des étoiles de faible métallicité (de Population II) du halo galactique et dans les étoiles des amas globulaires. Les valeurs obtenues devraient être indépendantes des composants complexes comme le fer, ce qui est confirmé par le diagramme Li/H en fonction de Fe/H qui présente un plateau. La présence de ce plateau signifie que le lithium a du être produit avant le processus de nucléosynthèse stellaire. Cependant, les valeurs de l’abondance de lithium sont incompatibles d’un facteur 2-3 avec les prédictions de la nucléosynthèse primordiale.

Les satellites WMAP [22] et Planck [158] ont peut-être mis en évidence des anomalies du fond diffus. Ces anomalies sont l’alignement quadrupôle-octopôle, la faible variance, l’asymétrie hémisphérique, la modulation de puissance dipolaire, le point froid ... . La puissance du spectre de puissance en température des trente premiers multipôles est plus faible que ce qui est attendu par le modèle ΛCDM. Ces anomalies pourraient cor- respondre à des violations des propriétés fondamentales d’isotropie et de gaussianité des données du rayonnement de fond, qui sont assumées dans l’estimation du spectre de puissance. Le débat se porte principalement sur les méthodes statistiques qui cherchent

1.6 Les limites du modèle