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Non c’était un diplôme même pas reconnu par l’état mais qui te

5 Fabriquer et exporter sa musique

Prince 2 Non c’était un diplôme même pas reconnu par l’état mais qui te

permettait de prendre un stage dans une boîte et après de continuer dans la boîte. Mais c’était pas mon trip. Je devais avoir 19-20 ans. (Prince 2 est né en

1977).

b) À l’approche du monde professionnel

Jusqu’à maintenant, j’ai décrit des expériences de studio où les groupes enregistrent ce qu’ils jouent en concert. Toutefois, si ce schéma est valide pour les jeunes formations, il n’en va pas exactement de même pour des personnes ayant un peu d’expérience. Et ceci est particulièrement vrai pour les technoïdes ou les amoureux de l’électro pop. Dans ce cas, l’enregistrement peut même constituer les tous premiers pas d’une formation. La chronique qui suit est, d’une certaine façon comparable au “troisième sous-sol“. Non pas que la musique y soit la même, non pas qu’il s’agisse du même territoire (ceux là sont des Yvelines et non pas de Seine-Saint-Denis) mais ce qui les rapproche est de s’assembler autour de “machines à son“.

Trouvant que les compositions de son ami Jean-Bernard valent le coup d’être enregistrées, Marc recrute un groupe pour mener à bien ce projet. Où ? À la campagne.

« Marc On a reformé un autre groupe et là a commencé les vrais enregistrements et le vrai mixage. Alors là c’est la grosse grosse période. (…) Ça doit être l’été, c’est pendant mon armée, c’est en 97. 97 on a décidé avec Jean- Bernard de louer du matériel, de partir une semaine dans la maison de campagne de mes parents, on s’isole avec, on reforme un groupe et là on enregistre

FR Y’avait quoi comme formation alors ?

Marc Alors Jean-Bernard toujours à la basse mais basse guitare, du coup il s’est

mis à la guitare puisque c’est lui qui a tout composé là (guitare = composition), son nouveau copain de Rennes, M…. qui lui chant guitare, ‘fin surtout chant quoi et Marc (c’est de lui dont il parle) toujours à la guitare, 2eme guitare effets on va dire, le batteur c’était G… le clavier de P…(nom d’un autre groupe) maintenant, donc tu vois tout ça est lié, G…, et alors lui il est venu en fin de séjour faire les prises batterie, on avait tout enregistré au click, là c’était un vrai premier travail

Marc Alors, p’tain on avait du matos là, on avait 3 Tascam DA88, tu sais les

enregistreurs 8 pistes, c’est du TDIF non c’est pas de l’ADAT c’est des petites cassettes, c’est HI 8 tu sais (…)

FR Donc 24 pistes là

Marc Ouais 24 pistes, attention ! Et puis la table c’était une 02R à l’époque

donc tu vois

FR Une Yamaha numérique

Marc Ouais la Yamaha, parce que moi je commençais, je l’avais vu un petit peu

au boulot, tout ça, enfin bon … on a loué des effets, on a loué un H3000 Eventide tu sais (…) c’est deux unités en rack, la marque c’est Eventide et H3000 c’est un truc que tu retrouves dans beaucoup, beaucoup de studios de musique (…) ah ouais c’est vraiment une grosse référence

FR Et puis des compresseurs ?

Marc Ouais alors les compresseurs à l’époque, on utilisait ceux de la table, de la

02R, parce qu’y avait un peu tout dedans alors bon ben voilà. On a fait avec les moyens du bord

FR Donc là vous avez enregistré voix par voix ?

Marc Ouais, on a répété en fait, on a fait deux jours avec le batteur de la

répétition, parce que les morceaux, personne les connaissait c’est Jean-Bernard qui les amenait. Le batteur est reparti travailler pendant ce temps-là, nous on a commencé à enregistrer et Gérard (le bassiste et clavier du panel qui jouait des drums à

l’époque) est revenu à la fin pour rajouter batterie et claviers, quelques claviers

aussi. Là y avait des arrangements. C’est la première, là on se faisait chier sur les arrangements. ‘fin les arrangements entre guillemets. »

Deux point méritent d’être plus particulièrement soulignés. Tout d’abord, on doit remarquer que lorsque Marc énumère ce dont il devait disposer pour enregistrer la musique de son ami, il décline dans le même mouvement des outils d’enregistrement et des instrumentistes. Si, Marc décrit des procédures de travail où l’on retrouve les méthodes populaires, notamment le fait d’improviser sur des motifs, le fait est que son projet est bien de fabriquer un monde sonique (par étapes).

Deuxième point, pour ce faire, il faut que Marc dispose d’une temporalité (les vacances) et d’un lieu (la maison de campagne des parents) adéquats. On retrouve ici un point essentiel, à savoir qu’un collectif musical a besoin de plus d’espace et de plus de matériel qu’un DJ (de rap ou d’électro) officiant dans sa chambre pour s’enregistrer. De plus, il a besoin de temps pour évaluer au fur et mesure le travail accompli puis réaliser le mixage. Autant de conditions qui sont difficiles à réunir pour une formation lorsqu’elle n’est pas prise en charge par des structures professionnelles. Deux des membres du panel (précisément les électroïdes Francis et Gérard) ont bien tenté de monter des labels afin de réunir des fonds et de se consacrer à l’enregistrement et à la production de disques, mais sans succès.

Parfois, la débrouillardise, le talent (et un sacré culot) permettent de se faire une petite place dans un studio professionnel

« Louis (…) j’avais (..) des morceaux avec Cubase, je m’étais enregistré, j’avais fait des titres et je voulais les faire masteriser et bien remixer. J’suis allé dans un studio qui s’appelle Radio-Cargo et

F R Où est-ce que c’est Cargo ?

Louis C’est à Montreuil, Limite Montreuil-Vincennes (…)Donc j’suis allé faire

remixer ça par un mec

FR Et donc t’as payé là, comment c’était ?

Louis Non j’ai pas payé en fait. J’suis venu les voir et je leur ai expliqué mon

cas. je leur ai dit : “voilà, j’ai pas d’argent, je suis en auto-prod, j’suis artiste ou un truc comme ça, je fais de la musique et tout, est-ce que vous accepteriez de m’aider, de …voilà de me rendre ce service, plus tard je reviendrai dans vot’ studio (rires), pourquoi pas enregistrer mon album, si vous acceptez de travailler un peu avec moi. Vous me faites ça, moi ça me permet d’aller démarcher en fait“. Et voilà ils ont accepté en fait. C’est la démarche que j’ai eu d’aller les voir et tout et ça s’est bien passé, ils m’ont fait ça pendant deux jours et j’ai rencontré un musicien, un mec là-bas qui bossait, qui était ingéson. Il a bien aimé ce que je faisais donc, ben, il a dit : “vas-y ça te dit qu’on bosse ensemble et tout“, il a proposé et puis voilà p’tit à p’tit comme ça j’suis venu chez lui, il m’a fait écouter des sons, j’lui faisais écouter des trucs et puis l’idée elle est venue d’enregistrer carrément un album. Donc on s’est…lui comme y bossait dans ce studio, finalement il m’a servi à enregistrer un album

FR Alors vous avez enregistré dans les moments où le studio était libre,

comment c’était ?

Louis Ouais »

Remarquez le rôle crucial, que comme souvent dans cette enquête, l’ingénieur du son apprenti ou expérimenté, joue dans l’accomplissement des projets d’enregistrement des musicien-n-e-s.

Les seules formations du panel qui ont pu obtenir de bonnes conditions de travail en studio sont celles qui ont été prises en charge, qui par un label, qui, par des techniciens de Radio France (une fois encore !). Dans les deux cas, la “découverte“ du groupe est effectuée par un parisien

« Sabine Ca a commencé en août 2004, on a fait les cobayes pour Radio France. Ils devaient tester une nouvelle console numérique. C’est notre ingéson qui connaissait une personne qui travaillait à Radio-France et lui a dit “j’ai un groupe, Macthink, qui pourrait, peut-être, être intéressé“. Nous, en contrepartie, on récupérait trois titres. Donc on y est allé. (…)

FR Vous étiez chacun dans des cabines ?

Sabine Non, on a enregistré sur la scène du studio 105 avec des retours. Après

avoir enregistré tout le monde en même temps, j’ai fait des re-re simplement sur deux titres, et puis rajouté des chœurs. (…)

FR Vous avez assisté au mix ?

Sabine Non, on n’a pas assisté au mix.Il a mixé dans la nuit et il est revenu le

lendemain matin à 8 heures, la tête un peu dans le gaz, pour nous annoncer qu’il avait aussi envie de nous produire (rires), essayer de nous faire rencontrer