renforcement sur cavité dans le cas d’un sol cohésif
Pour étudier le comportement des remblais cohésifs renforcés sur cavité, un travail
expérimental a été effectué dans le cadre de la thèse de Huckert (2014) et du projet GeoInov
sur les ouvrages renforcés par géosynthétique au-dessus de cavités potentielles. Un des
objectifs du projet GeoInov était de faire évoluer les méthodes de dimensionnement existantes
pour tenir compte du caractère cohésif du sol à renforcer. Une approche expérimentale en
vraie grandeur a été mise en œuvre pour répondre à l’objectif fixé. Les expérimentations ont
été effectuées en vraie grandeur pour permettre la représentativité des mesures. Les
expérimentations ont permis de simuler de manière originale la formation d’un fontis sous un
remblai cohésif renforcé ou non par un géosynthétique. Il a été possible d’observer le
comportement du remblai cohésif et son mode de rupture pour différents cas de charge. Sans
surcharge en surface, la couche de sol cohésif (dans les conditions d’essai) ponte la cavité
sans aucun tassement significatif en surface, la couche de sol se comporte dans ce cas comme
une dalle en flexion. Un chargement important en surface conduit à une rupture brutale,
l’effondrement est représenté par la chute en un ou plusieurs blocs de la couche de sol. La
zone d’effondrement est limitée en surface par la surface de chargement et par le diamètre de
la cavité (Figure 2.14).
Figure 2.14. Modélisation de Huckert et al. (2014) du comportement d’une couche de sol cohésif au-dessus d’une cavité
L’approche analytique proposée par Huckert et al. (2014) suppose un effondrement en
blocs de la couche de sol cohésif soumise à un chargement localisé en surface. Le problème
est supposé plan, la nappe géosynthétique est unidirectionnelle et le bloc effondré est
considéré rigide et indéformable. Le principe de ce modèle est de transférer le poids du bloc
de sol effondré et de la surcharge en surface à la nappe de renforcement géosynthétique au
moyen de deux forces verticale (2P) définies par mètre de largeur de nappe (Figure 2.15).
Ceci conduit à une déformée aplanie du géosynthétique dans la zone centrale.
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Figure 2.15. Equilibre des efforts exercés sur la nappe géosynthétique au droit de la cavité dans le cas d’un sol cohésif (Huckert et al. 2014)
Le modèle analytique proposé consiste à résoudre l’Eq. 2-12 qui permet de calculer la
tension horizontale T
h.
𝑈𝐴+ [√1 + (𝑃 𝑇ℎ) 2− 1] (𝐵 2− 𝑙) = 𝑇ℎ 𝐽(𝜀) [(1 + ( 𝑃 𝑇ℎ) 2) (𝐵 2− 𝑙) + 𝑙]Eq. 2-12
Huckert a proposé que la longueur 2𝑙 entre les forces représentant l’effet du bloc effondré
sur le renforcement géosynthétique soit définie par : 2𝑙 = (𝑙1 + 2𝐻 tan), où 𝑙1 est la base
supérieure du bloc effondré qui pourrait être approchée par la longueur d’application de
charge en surface. U
Aest le glissement de la nappe au bord de la cavité.
Le comportement de la nappe de renforcement au-dessus de la cavité, est alors donné par
les expressions de déflection maximale, tension et déformation du renforcement, calculées
comme suit :
𝑓 = 𝑃 𝑇ℎ ( 𝐵 2− 𝑙)Eq. 2-13
𝑇𝑚𝑎𝑥 = 𝑇𝐴= 𝑇𝐵 = 𝑇0√1 + (𝑃 𝑇ℎ) 2Eq. 2-14
𝜀𝐴= 𝑇𝐴 𝐽(𝜀) ⁄ 𝜀𝐵 = 𝑇𝐵 𝐽(𝜀) ⁄Eq. 2-15
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Pour résumer, les travaux réalisés dans le cadre de la thèse de Huckert (2014) sur la
thématique du renforcement des cavités ont permis de préciser l’effet de la cohésion sur le
mécanisme d’effondrement d’un remblai de sol cohésif au-dessus d’une cavité. A l’issue des
expérimentations en vraie grandeur effectuées, Huckert et al. (2014) ont proposé une
approche analytique pour dimensionner le renforcement géosynthétique dans le cas d’un sol
cohésif. Cette méthode de calcul proposée reste très réductrice puisqu’elle est basée sur les
résultats d’une seule expérimentation. Il convient donc de tester plusieurs autres
configurations et matériaux pour confirmer les tendances observées et ce afin d’améliorer les
méthodes de dimensionnement.
Le travail de thèse dans sa globalité s’inscrit donc dans la continuité des différents travaux
antérieurs, et a pour but essentiel de valider et d’améliorer les développements analytiques
pour les deux types de sol cohésif et non cohésif à partir d’autres expérimentations et cas
d’étude.
2.8 Synthèse des hypothèses et domaines de validité
des méthodes de dimensionnement existantes
Des méthodes analytiques ont été développées pour différents modèles d’effondrement. Le
Tableau 2-6 présente une synthèse des principales hypothèses employées par les méthodes
d’analyse les plus connues (citées précédemment).
Tableau 2-6. Synthèse des hypothèses et limites d’application des méthodes de dimensionnement existantes H/B Géométrie de la zone effondrée Nom de la méthode de dimensionnement Caractéristiques de la méthode Type de sol Effet
d’arche
Réaction
latérale Foisonnement Contrainte
𝑯 𝑩 ⁄ < 3
Cône tronqué
BS 8006 Granulaire Non Non Non Uniforme
BGE Granulaire Non Possible Oui Uniforme
Cylindrique RAFAEL Granulaire Non Oui Oui Uniforme
Trapézoïdale Huckert et al. (2014)
Cohésif
Non Non Non Ponctuelle
𝑯 𝑩
⁄ > 3 Sphérique BGE Granulaire Oui Non Oui Uniforme
Les méthodes de dimensionnement usuelles prennent en considération une géométrie
d’effondrement du sol sur la nappe qui permet ou pas une réduction des contraintes sur la
nappe. Cette réduction de contraintes est fonction des caractéristiques mécaniques et
géométriques du site à renforcer : diamètre de la cavité, hauteur et frottement interne du
remblai. La cohésion du remblai n’est en général jamais prise en considération pour le
dimensionnement. Les derniers travaux sur l’amélioration des méthodes de dimensionnement
d’une nappe géosynthétique sur cavité, ont permis récemment de proposer une méthode
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(Huckert et al., 2014) dédiée principalement au cas d’un sol cohésif. Dans les deux cas de sol
granulaire et cohésif, des hypothèses fortes sont émises quant à la répartition des charges sur
la nappe (uniforme dans le cas granulaire et ponctuelle dans le cas cohésif) et quant au
comportement de la nappe géosynthétique en traction (comportement élastique linéaire). Le
type de sol et la répartition de charge sur le renforcement géosynthétique, sont les points les
plus discutés dans ce mémoire. Pour un comportement de la nappe géosynthétique fortement
non linéaire, le recours à un calcul itératif est nécessaire pour faire correspondre une raideur
tangente du géosynthétique J (𝜀) aux déformations obtenues (𝜀) (Figure 3.7, Chapitre 3). Les
méthodes de dimensionnement citées ci-dessus ne prennent pas directement en compte
l’augmentation des contraintes verticales dans les zones d’ancrage près du bord de la cavité,
notamment pour le calcul de la longueur d’ancrage. Les travaux de thèse s’orientent donc vers
une meilleure estimation des mécanismes de report de charge et notamment de la géométrie
de la distribution des contraintes verticales sur la nappe géosynthétique, principalement dans
le cas d’un sol cohésif (Chapitre 4).
2.9 Comparaison des méthodes de dimensionnement
des géosynthétiques sur cavités
Les différentes méthodes de dimensionnement sont comparées entre elles sur la base de
l’application présentée dans le Tableau 2-7. L’application consiste à vérifier selon les
différentes méthodes de dimensionnement qu’un géosynthétique bidirectionnel de raideur J
(dans chaque direction) est capable ou non d’assurer l’exigence spécifique du projet fixée par
le maître d’œuvre. Le projet consiste à renforcer une zone où 𝑑𝑠/𝐷𝑠 ne doit pas excéder 5%
(Tableau 2-4). Le calcul est fait à court terme sans tenir compte du changement des propriétés
mécaniques du renforcement ou du sol avec le temps, aucun coefficient de sécurité n’est donc
pris en compte. Deux types de sol de remblai ont été pris en considération (cohésif et non
cohésif) pour déduire l’effet de la cohésion selon l’approche de Huckert et al. (2014).
Tableau 2-7. Paramètres de calcul relatifs au renforcement en base de remblai sur cavité
Paramètre Description Unité Valeur
Cavité B Diamètre de la cavité circulaire M 2 Remblai H Hauteur m 0,75 𝛾 Poids volumique 𝑘𝑁/𝑚3 18 𝑐 Cohésion 𝑘𝑁/𝑚2 0/10 ∅ Angle de frottement interne ° 30 𝐶𝑒 Coefficient de foisonnement - 0/1,03 Géosynthétique J Raideur du renforcement biaxial isotrope 𝑘𝑁/𝑚 1500 Chargement P Surcharge en surface 𝑘𝑁/𝑚2 0
Tableau 2-8. Synthèse des résultats de l’application des différentes méthodes usuelles de dimensionnement
34 Méthode Raideur (kN/m) Flèche maximale (cm) Tension maximale (kN/m) Déformation maximale (%) Tassement en surface (cm) 𝒅𝒔 𝑫𝒔 (%) BS8006 (𝜽 = 𝝋) 1500 41,23 28,34 1,89 3,18 0,7 BGE (2004) (𝜽 = 𝟖𝟓°) 1500 15,22 23,17 1,54 10,72 5,03 RAFAEL (1997) 3000* 14,50 42,10 1,40 10,00 5 Villard et Briançon (2008) 3000* 18,63 33,58 1,12 14,13 7,06 Huckert et al. (2014) Sol Cohésif 3000* 6,13 17,76 0,59 6,13 3,06
*En considérant une rigidité équivalente à l’ensemble de raideur du géosynthétique dans les deux directions
Si l’on compare ente eux les résultats obtenus, on constate qu’il existe de fortes disparités
entre les méthodes proposées. Les écarts obtenus sont importants sur l’ensemble des variables
étudiées (tension, flèche et déformation), d’où les difficultés rencontrées pour envisager un
dimensionnement et choisir la raideur convenable du géosynthétique de renforcement. De
plus, le critère dimensionnant qu’est le tassement en surface est respecté selon des méthodes
mais pas selon d’autres.
L’amélioration de la méthode RAFAEL par Villard et Briançon (2008) par la prise en
considération du glissement de la nappe en ancrage, donne lieu à une déformation maximale
du géosynthétique plus faibles mais à une flèche plus importante que la méthode RAFAEL
classique. Le tassement de surface est par conséquent augmenté.
La méthode BGE aboutit à des résultats assez semblables à ceux de la méthode RAFAEL,
dont les recommandations allemandes se sont inspirées. Pour H/B = 0,375, la méthode BGE
ne tient pas compte du report de charge au sein du remblai et fournit un calcul légèrement plus
conservateur que celui de RAFAEL.
Le calcul selon la méthode BS8006, montre qu’un effondrement tronconique d’ouverture
égale à l’angle de frottement interne du sol de remblai conduit, compte tenu de l’hypothèse
d’un gros volume de sol effondré, à une flèche et une déformation importantes du
géosynthétique. Au contraire, le tassement en surface reste extrêmement faible.
La prise en compte de la cohésion du sol de remblai dans le dimensionnement du
géosynthétique de renforcement conduit logiquement à des résultats significativement
différents de ceux donnés par les méthodes utilisées dans le cas du sol granulaire (non
cohésif). Le calcul selon la méthode de Huckert et al. (2014) est effectué en considérant un
bloc effondré de forme trapézoïdale de dimension égale à 0,5 m en tête et égale au diamètre
de la cavité à la base. Le poids du bloc effondré est supposé agir sur une longueur de 1,35 m
(2𝑙 = 𝑙1 + 2𝐻 tan).
Les disparités entre les résultats sont liées principalement à la nature de sol (cohésif ou
pas), à la détermination du volume de sol impliqué dans l’effondrement et à la géométrie de la
répartition de la charge agissant sur la nappe géosynthétique qui varie selon le mécanisme de
transfert de charge adopté par chaque méthode. Ceci justifie pleinement l’intérêt des
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