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Les résultats des expérimentations réalisées sur le simulateur en 3D des mouvements de

terrain ont été présentés dans ce chapitre. Ce dispositif expérimental original sur le plan de la

modélisation physique en géotechnique, permet grâce à ses dimensions de modéliser

l’apparition d’une cavité dans des conditions géométriques proches de la réalité, soit 0,5 m de

côté.

Sur ce modèle physique, trois essais ont été réalisés dans les mêmes conditions : le premier

avec un sol purement frottant (sable de Fontainebleau), les deux autres avec un sol cohésif

(mélange sable-kaolin de caractère intermédiaire en termes de cohésion et de frottement

interne). Les nouveaux essais réalisés sur le modèle physique ont permis de préciser la

phénoménologie du mode de rupture d’une couche de sol et son interaction avec le RG.

Les résultats obtenus dans cette étude ont montré que :

▪ Dans le cas d’un sol granulaire

Suite à l’abaissement des vérins, une cuvette d’affaissement en surface est obtenue. La

comparaison du tassement de surface avec le déplacement vertical du RG a montré un

phénomène de foisonnement. Ainsi, l’allure de la déformée expérimentale du RG assez

aplanie au centre de la cavité révèle une décharge du RG dans cette partie. Le déplacement

vertical du renforcement au centre de la cavité est donc moins important que dans le cas d’une

distribution de contrainte uniforme. En revanche, une distribution de contrainte de forme

triangulaire inversée a été démontrée agissant sur le RG au droit de la cavité.

Les mesures des reports de charge dans les zones environnantes de la cavité, ont permis de

détecter une augmentation de charge maximale aux bords de la cavité (de l’ordre de 83 %) qui

diminue progressivement en s’éloignant de la zone d’effondrement pour mesurer 20 % à une

distance de 40 cm du bord de la cavité.

Logiquement, suite aux essais de chargement progressif de surface, la flèche du RG a

augmenté sensiblement. Une surcharge importante en surface au centre de la cavité, modifie

la géométrie de répartition de charge pour être maximale près du centre de la cavité.

▪ Dans le cas d’un sol cohésif

La présence du caractère cohésif dans le matériau de remblai change sensiblement le mode

de rupture de ce dernier. Après abaissement des vérins, la couche de sol cohésif de 12,5 cm de

hauteur ponte la cavité avec un tassement très peu significatif en surface (1,7 ± 0,2 mm). Le

RG dans ce cas se déforme sous son poids propre avec une flèche maximale de l’ordre de 7

mm. L’incrément de contrainte verticale mesuré par les capteurs de contrainte à l’extérieur de

la cavité est localisé majoritairement sur les bords de la cavité avec une valeur maximale de

287 % de 𝛾𝐻. De même, les essais réalisés pendant les phases de chargement ont provoqué

une variation significative de la contrainte verticale à la base de la couche de sol cohésif

principalement sur les capteurs situés au bord de la cavité, où une augmentation de charge

allant jusqu’à 720 % de 𝛾𝐻 a été mesurée juste avant la rupture de la couche de sol.

Lorsqu’une surcharge importante est appliquée en surface, une rupture brutale se produit et

les valeurs de contraintes mesurées à la base de la couche de sol dans les zones d’ancrage

diminuent sensiblement. Le bloc effondré se fragmente en plusieurs parties dont celle

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principale est limitée géométriquement (en tête et à la base) par la surface de chargement. Le

bloc effondré lors de la rupture de la couche de sol cohésif exerce une action ponctuelle sur le

RG qui se déforme en une géométrie particulière aplanie. Les surcharges appliquées seraient

transférées en totalité sur le RG, la comparaison de la déformée expérimentale et celle

analytique proposée par le modèle de Huckert et al. (2014) adapté selon les observations

expérimentales montre que, pour autant qu’on impose la géométrie du bloc effondré, ce

dernier permet d’approcher de façon raisonnable les résultats expérimentaux.

Enfin, les résultats expérimentaux constituent un ensemble de données conséquent portant

principalement sur les mécanismes de rupture et des reports de charge, ont pu être obtenues.

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Expérimentation en vraie grandeur

Résumé --- Pour améliorer le dimensionnement des remblais renforcés par

géosynthétique sur cavité réelle dans le cas de sol cohésif, une expérimentation en vraie

grandeur sur un site de l’agglomération lilloise à Hellemmes (59) a été réalisée. Il s’agit d’une

tête de catiche (cavité souterraine). A défaut d’une méthode validée et convenue, une méthode

de dimensionnement inspirée de la méthode RAFAEL a été utilisée pour le

prédimensionnement de l’expérimentation en vraie grandeur (raideur du géosynthétique,

géométrie du remblai et longueur d’ancrage). Le géosynthétique de renforcement utilisé dans

cette expérimentation est instrumenté par des fibres optiques permettant de localiser

l’effondrement et mesurer la déformation associée au niveau de la nappe de renforcement.

L’expérimentation réalisée s’est déroulée en deux phases. La phase 1 concerne la sécurisation

de la cavité souterraine par la nappe de géosynthétique, et la phase 2 porte sur le chargement

statique en surface. La phase 2 n’a pas pu aboutir à l’effondrement de la cavité à cause de

l’état de stabilité de la tête de catiche. En revanche, l’expérimentation a été l’occasion de

valider les conditions d’installation et le bon fonctionnement du dispositif de mesure dans les

conditions réelles. Ce chapitre présente donc un retour d’expérience (REX) du projet

d’expérimentation réalisé ; il permet de porter un regard critique sur la démarche développée,

les méthodes employées et les outils de mesure utilisés.

6.1 Introduction

L’excavation du sous-sol a souvent accompagné l’histoire et le développement de

nombreuses régions et agglomérations françaises (Figure 6.1(a)). La région lilloise compte

parmi les régions de France les plus concernées par la présence de carrières souterraines

abandonnées. Les cavités souterraines, et leur prise en compte au travers de l’aménagement et

de l’urbanisme, constituent donc un problème préoccupant pour de nombreuses communes

françaises (Bellurot et al., 2013).

Actuellement, 122 communes du département du Nord renferment dans leur sous-sol de

nombreuses exploitations souterraines dont 90% de ces exploitations correspond à des

carrières anthropiques, localement appelées “Catiches” et creusées pour extraire des

matériaux telle que la craie. Une catiche est un terme régional du Nord de la France qui

désigne un ancien type de carrière souterraine d’exploitation de craie. La ville de Lille compte

dans son agglomération une forte concentration de carrières. 158 carrières de craie ont ainsi

été recensées par le SEISM (Service d'Expertises et d'Ingénierie des Sols et Matériaux).

Certaines surfaces sont d’ailleurs interdites de toute activité tant qu’une remédiation n’est pas

réalisée.

Aujourd’hui abandonnées, ces exploitations se rappellent à notre mémoire par l’apparition

d’un désordre du sol irréversible de type affaissement, effondrement ou fontis, ayant pour

cause la rupture des toits des carrières souterraines engendrant des mouvements de terrain,

ayant pour conséquence la formation d’un cratère en surface (Figure 6.1(b)). Ceci pose des

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problèmes de sécurité pour les populations et constitue un frein important au développement

des projets d’urbanisation dans ces régions.

Figure 6.1. (a) Carte de l’aléa lié aux cavités souterraines en France (Source BRGM) (b) Exemple d’effondrement d’une cavité souterraine à Lille Hellemmes (Source SDICS/SEISM : Service

d’inspection des cavités souterraines)

De nombreuses techniques de réduction et de suppression de l’aléa fontis sont

fréquemment proposées (INERIS, 2016): comblement total ou partiel, injection,

consolidation, et réalisation d’une dalle en béton, etc...

L’exécution de ces solutions se heurte à des conditions techniques et économiques (coût,

surface d’intervention, volume et état des cavités). Nous avons montré dans les chapitres

précédents que le renforcement d’un sol cohésif par une nappe géosynthétique, peut être

décrit par les mêmes concepts que ceux développés par Huckert (2014). Reste donc à évaluer

la faisabilité et l’intérêt technique et économique de la mise en œuvre d’un tel renforcement

dans des conditions réelles. Un essai en vraie grandeur a ainsi été proposé sur le site

d’Hellemmes au cours de l’année 2017. Le présent chapitre a pour objet de présenter les

résultats de cette expérimentation.