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Difficultés d’apprentissage de la fraction

1.3 Cadre d’investigation

1.3.2 Difficultés d’apprentissage de la fraction

Les bonnes réponses des élèves que l’enseignant perçoit lors de la réalisation de son cours peuvent lui donner une satisfaction, alors qu’elles peuvent ne pas être le signe de développement de connaissances sur le concept étudié. En effet, la connaissance d’une procédure mémorisée ou l'application d'une procédure sans comprendre le sens, est souvent plus rapide et moins exigeante

que le développement d'une compréhension. Pour Gould (2005), les résultats d’une compréhension instrumentale28 sont plus immédiats et plus apparents à travers des réponses correctes en moins de

temps. Dans l’apprentissage de la fraction, selon M. J. Behr et al. (1983), la fraction « partie-tout » est souvent introduite très tôt dans le cursus scolaire. C’est plus tard (quatrième année de scolarité) que la notion de fraction est systématiquement traitée et c’est en huitième année que les élèves explorent et étendent les notions de nombre rationnel. Ces savoirs sur les nombres rationnels sont ensuite appliqués en algèbre élémentaire.

M. J. Behr et al. (1983) concluent que de nombreuses difficultés des élèves en algèbre remontent à une compréhension incomplète des notions antérieures des fractions. Les élèves éprouvent des difficultés importantes dans l’apprentissage et l'application des concepts de la fraction (Tanner, 2008); des difficultés qui vont au-delà de l’utilisation des algorithmes. Nous relevons en cinq points des aspects qui semblent constituer des difficultés de compréhension aux élèves.

Premièrement, les fractions sont complexes parce qu’elles ont différentes significations dans différents contextes (M. Behr, J. et al., 1992; Osana & Rayner, 2012) comme nous l’avons vu plut tôt. L’introduction et l’ordre de présentation des différents sens de la fraction constitueraient des sources de difficultés pour l’élève, notamment à cause des différences de procédures en jeu. Deuxièmement, dans le contexte nord-américain, M. J. Behr et al. (1983) indiquent dans leur étude que la plupart des jeunes de 13 et 17 ans réussissent l’addition des fractions ayant le même dénominateur. Toutefois, un tiers des jeunes de 13 ans et les deux tiers de ceux de 17 ans arrivent à effectuer correctement l’opération 2 1 + 3 1

. Même à plus de trois ans d’apprentissage sur les fractions, un tiers des élèves ont des difficultés à développer une bonne compréhension du calcul de la somme des fractions ayant des dénominateurs différents. Au Burkina Faso, les opérations

5 4+ 5 2 et 4 7- 4 3 sont réussies respectivement par 87% et 78% par les élèves de 6e (13-14 ans) (MESSRS/DIFPP/DM, 1995). Il

s’agit d’opérations sur les fractions ayant le même dénominateur.

28 Une compréhension instrumentale des mathématiques est la manifestation d’une capacité à traiter un problème

mathématique en appliquant une règle appropriée, mémorisée, ou en suivant une procédure initiale utilisée pour la construction d’un concept, sans comprendre pourquoi la règle ou la procédure fonctionnent (Herscovics & Bergeron, 1982b)

Les élèves semblent ne voir dans les fractions que des entiers juxtaposés. Ils utilisent lorsqu’ils effectuent une addition des fractions le plus souvent, des procédures spontanées, comme la procédure qui consiste à ajouter les numérateurs d'une part et les dénominateurs d’autre part, et celle qui consiste à garder le numérateur 1 et à additionner les dénominateurs dans la somme des fractions de numérateurs 1. Les procédures de calcul développées dans les entiers naturels seraient ainsi des sources d’obstacles épistémologiques lors des calculs sur les fractions (DeBlois, 2011; Ni & Zhou, 2005; Perrin-Glorian, 1986).

L’addition développée dans les décimaux pourrait aussi constituer un obstacle pour l’élève. En effet, cette confusion pourrait amener l’élève dans le calcul

3 1 + 3 1 à trouver 6 2 . Selon Perrin-Glorian (1986), seuls les nombres entiers auraient vraiment le statut de nombre pour beaucoup d’élèves. Ces derniers se ramènent donc par des moyens divers aux entiers naturels et à leurs opérations lors des calculs sur les fractions.

Troisièmement, une étude réalisée par Rosar, Nieuwenhoven et Jonnaert (2007) dans une classe dont les élèves sont âgés de onze ans, montre qu’au début de l’apprentissage de la fraction, ces élèves ont des difficultés à lire certaines fractions. Par exemple, des élèves lisent « seize huitièmes » pour 8/16 et « cinq demis » pour 2/5. En outre, 80 % des élèves de l’échantillon ne parviennent pas à placer une fraction sur une droite numérique. Ils positionnent sur la droite numérique, entre autres, 2/5 à 2,5 ou 2/5 soit à 0,1, à 0,25, ou à 0,5. Enfin, ils confondent par exemple 7/8 et 7,8 en justifiant qu’on a remplacé la barre de fraction par une virgule. Cette étude montre « la précarité des représentations construites par les élèves autour de la notion de nombre et de fraction-nombre » (p. 14). Pour plusieurs élèves, seuls les nombres entiers auraient vraiment le statut de nombre. Quatrièmement, les élèves éprouvent des difficultés à comprendre les fractions impropres, car le sens commun de « fraction » est celui d’un partage de l’unité. Selon Ambrose (2004), des stagiaires observent lors de leur première session de formation que des élèves âgés de 10 ans penseraient que 1 est supérieur à

4 4

. De plus, ces élèves ne seraient pas familiers avec la conversion des fractions impropres et des nombres fractionnaires. La plupart de ces élèves affirment n’avoir jamais vu des fractions impropres et ne sachant pas comment les interpréter. Certains élèves arriveraient à partitionner les ensembles, mais ils auraient du mal à nommer les parties qu'ils tireraient (Ambrose,

2004). Selon l’auteur, l’expérience sur l’enseignement de la fraction menée par ces stagiaires amène la plupart de ces derniers à reconnaître que l'enseignement exigerait plus que la simple présentation de l'information aux élèves.

Cinquièmement, les élèves manifestent des difficultés à résoudre des problèmes de la vie quotidienne sur la fraction. Un élève peut diviser correctement une fraction par une fraction et ne pas être capable de trouver le nombre de recettes nécessitant trois quarts de tasse de lait pour une recette lorsqu'on dispose de trois tasses de lait (Gould, 2005). À propos de la proportion inverse, des élèves de secondaire II (13-14 ans) ont eu après enseignement des difficultés à utiliser le produit croisé, par exemple, dans la résolution du problème suivant : «4 machines prennent 300 jours pour fabriquer toutes les briques qui vont être utilisées dans la construction d’une maison. En combien de jours 8 machines identiques fabriqueront la même quantité de briques?» (I. Oliveira, 2008) (p. 128). En effet des élèves (10/33) ont fait : 8 300 8 4 600

300 4       n

n . Au Burkina Faso, l’étude

menée par l’inspection de mathématiques (1995) montre que les élèves de 6e éprouvent des

difficultés dans le calcul de la quatrième proportionnelle. En effet, l’exercice ci-dessous obtient un taux de réussite de 15% (échantillon : 4537 élèves).

Énoncé : Le tableau ci-dessous représente une situation de proportionnalité. Trouver le terme manquant.

1,2

5 4

Dans les classes du primaire et dans la classe de première année du post-primaire [secondaire], les problèmes se ramènent le plus souvent aux questions d’ajout, de soustraction, d’augmentation, de diminution, de gain, de perte, de partage, de remise, d’intérêt et de comparaison. Les problèmes à résoudre sur les fractions se complexifient avec les propriétés algébriques développées dans les nombres rationnels et les problèmes de géométrie portant, entre autres, sur les rapports de projection, les homothéties, les similitudes.

Les erreurs algorithmiques, les erreurs sur les opérations formelles des fractions, l’incompréhension des écritures symboliques des fractions et l’incompréhension du problème sont des types d’erreurs commises par des élèves de sixième et septième année lors de l’enseignement de la multiplication des fractions (Isiksal & Cakiroglu, 2011). Face aux difficultés que les élèves ont à apprendre les

fractions, il devient possible de mettre en lumière les pratiques des stagiaires, et ce pour les deux ordres d’enseignement.