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Vers un diagnostic précoce ?

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I. Données cliniques et épidémiologiques

5. Vers un diagnostic précoce ?

L’apparition des symptômes maternels de la PE est relativement tardive, par rapport à

la placentation, dont des anomalies sont à l’origine du syndrome. Il semble par ailleurs que tous les traitements prescrits une fois ces symptômes apparus aient une efficacité limitée.

C’est pourquoi un diagnostic plus précoce permettrait sans doute d’améliorer l’efficacité de

ces traitements. Par exemple, si un marqueur sérique détectable avant 16 semaines

d’aménorrhée prédisait de manière fiable l’occurrence d’une PE, on pourrait initier un traitement à l’aspirine chez les primipares. De plus, un diagnostic précoce permettrait

également un meilleur suivi des femmes à risque.

En ce sens, la recherche de marqueurs précoces de la PE est le challenge de ces prochaines années. Ces marqueurs précoces seraient libérés dans le sang maternel suite à la mauvaise implantation/placentation qui serait associer à une érosion placentaire et/ou une libération de microparticules/facteurs produits par les trophoblastes en situation de stress.

Jusqu’ici, les marqueurs les plus prometteurs sont : la protéine placentaire 13 (PP-13), la sous- unité libre de l’hCG, des sélectines, l’inhibine A, l’hémoglobine fœtale libre (HbF), l’alpha-

1-microglobuline (A1M), le PlGF et l’endogline soluble (sEng) (Anderson et al., 2012; Masoura et al., 2012). Les modifications de ces principaux marqueurs précoces sont synthétisées dans le Tableau 3.

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Tableau 3 : Les principaux marqueurs précoces du futur développement d’une PE

PP-13, la protéine placentaire 13 est une galectine (de la famille des lectines, les

galectines contiennent un domaine de reconnaissance des carbohydrates qui leur permet de

lier les –galactosides) avec une activité lysophospholipase. Il a été montré que sa

concentration plasmatique est plus basse chez les femmes qui vont développer une prééclampsie (d’environ 4 0%, sachant que sa concentration varie de façon plus conséquente entre 8 et 13 semaines pour des femmes qui auront une gestation normale). Ces mesures ont été réalisées sur des prélèvements obtenus entre 8 et 13 semaines de grossesse (Akolekar et al., 2009; Romero et al., 2008).

La sous-unité β libre de l’hCG a été montrée comme plus abondante au premier trimestre dans le sang des femmes qui vont développer une PE (Mikat et al., 2012). C’est également le cas de la E-sélectine et de la P-sélectine (molécules d’adhésion notamment présentes à la surface des cellules endothéliales) (Akolekar et al., 2011; Bosio et al., 2001; Carty et al., 2012; Poon et al., 2010).

76 L’inhibine A est produite par le placenta et a une concentration plasmatique plus

élevée (mesures faites entre 10 et 16 semaines d’aménorrhée) chez les femmes qui vont

développer une prééclampsie (Sebire et al., 2000; Yu et al., 2011). C’est également le cas de l’activine A (Poon et al., 2010; Yu et al., 2011).

L’hémoglobine fœtale libre (HbF) et l’alpha-1-microglobuline (A1M) sont également augmentées, respectivement d’un facteur 3 et 1,2, dans le sérum des femmes qui

vont développer une PE (sang prélevé entre 11 et 16 semaines d’aménorrhée) (Anderson et al., 2011).

Le PlGF a une concentration plus faible dans le sang des femmes qui vont développer une PE, et ce, dès le premier trimestre. Il semble avoir une assez bonne valeur prédictive, en

association avec d’autres marqueurs (Boucoiran et al., 2013; Foidart et al., 2010; Poon et al., 2010; Shokry et al., 2010; Yu et al., 2011). D’autres facteurs angiogéniques et anti- angiogéniques ont été étudiés : ainsi, la concentration du récepteur soluble du VEGF (sFlt1) est plus élevée chez les femmes qui vont développer une PE (Baumann et al., 2008; Shokry et al., 2010) et celle du VEGF(165)b, un inhibiteur du VEGF, est plus élevé au 1er trimestre

(Bills et al., 2009), le VEGF libre étant, quant à lui, non détectable (Akolekar et al., 2010). La valeur prédictive de ces facteurs semble cependant insuffisante pour les utiliser en pratique clinique (Akolekar et al., 2010; Jacobs et al., 2011).

L’endogline soluble (sEng) est une glycoprotéine transmembranaire et un corécepteur

du TGF ( 1 et γ). Il a des propriétés anti-angiogéniques. Sa concentration dans le sang des

femmes enceintes au premier trimestre est plus élevée lorsque celles-ci vont développer une PE (Baumann et al., 2008; Foidart et al., 2010).

Il faut cependant noter que, globalement, la concentration de ces facteurs varie

beaucoup entre les femmes et en fonction de la date de prélèvement (qu’elles aient par la suite

une grossesse normale ou prééclamptique), et il n’existe donc pas de valeurs seuils permettant de distinguer clairement les femmes qui développeront une PE des autres.

La quantification d’ARNm circulant (correspondant à différent marqueurs tels que

l’endogline, le VEGF, sFlt1) à partir du sang maternel (obtenu entre 15 et 20 semaines d’aménorrhée) est également un moyen relativement efficace de prédire la survenue d’une PE avec une détection d’environ 84% des cas pour un taux d’erreur de 5 % dans la cohorte

77 Des approches à haut débit sans a priori ont également fait leur preuve : ainsi, des échantillons de plasmas obtenus entre 14 et 16 semaines d’aménorrhée chez des femmes qui ont eu par la suite une grossesse compliquée par la PE ou une grossesse normale ont été analysés par spectrométrie de masse couplé à une chromatographie liquide à haute performance, et leur comparaison a permis d’établir un modèle prédictif basé sur 14

métabolites, tels que notamment la bilirubine, l’hème, les dérivés de vitamine Dγ ou encore

la sphingosine-1-phosphate. Ce modèle a pu être ensuite validé avec d’autres échantillons et donne une bonne prédiction (Kenny et al., 2010).

En plus de ces marqueurs sériques, les techniques échographiques, et en particulier le

doppler des artères utérines, peuvent également apporter une valeur prédictive de bonne

qualité au futur développement de la PE (Carbillon, 2012; Scazzocchio et al., 2013).

Globalement, l’apport prédictif de chacun des marqueurs est faible. Cependant, les

combiner et les associer aux facteurs de risque liés à la mère permet d’atteindre de bons

modèles prédictifs et de prédire jusqu’à 95% des PE précoces avec un taux de faux positif de 10% environ (Poon et al., 2013). Évidemment, plus ces modèles combinent de marqueurs,

plus le coût augmente et moins l’utilisation en routine semble réaliste. Le progrès dépendra donc de l’optimisation de ces modèles prédictifs sur les marqueurs les plus discriminants.

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