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§1 Les règles spécifiques aux archives publiques

B. La reprise de l’existant : l’éventualité de la numérisation des dossiers papier.

2) Le devenir des dossiers papier numérisés

202. Une fois les dossiers médicaux papier numérisés, ceux-ci deviennent redondants avec le dossier informatisé. Une suppression de ceux-ci est-elle pour autant envisageable ? Cette question, qui est commune à de nombreuses administrations, a été fréquemment posée aux Archives départementales. Les Archives de France avaient ainsi, dans un premier temps, posé un cadre de commun à l’élimination anticipée d’archives publiques papier qui auraient été numérisées (a). Cependant, face aux nombreuses demandes des établissements de santé, en faveur notamment d’un cadre plus adapté, le législateur s’est emparé du sujet (b).

a) La réponse des Archives de France

203. C’est par le biais d’une instruction de 2005279 relative aux modalités de délivrance du visa d’élimination des documents papiers transférés sur support numérique ou micrographique que les Archives de France ont apporté une première réponse à la question du devenir du papier numérisé. Cette instruction rappelait la nécessité, pour l’administration qui souhaitait détruire ses archives papiers avant la fin de leur durée de conservation, d’obtenir une autorisation d’élimination de la part de la direction départementale des archives, et ce, même

277 Ordonnance n° 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des données de santé à caractère personnel créés ou reproduits sous forme numérique et de destruction des documents conservés sous une autre forme que numérique, JORF n°0011 du 13 janvier 2017, texte n° 21.

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Le nouvel article L. 1111-26 du Code de la santé publique prévoit que « la copie numérique d’un document

mentionné à l’article L. 1111-25, remplissant les conditions de fiabilité prévues par le deuxième alinéa de l’article 1379 du Code civil, a la même force probante que le document original sur support papier. »

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Instruction DITN/DPACI/RES/2005/001 du 14 janvier 2005 sur les modalités de délivrance du visa d'élimination des documents papiers transférés sur support numérique ou micrographique, Archives de France, non publiée au JORF.

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si une copie a été réalisée sur un autre support. Cette instruction précisait les cas (au nombre de trois) dans lesquels cette autorisation pouvait être délivrée. Le premier cas concernait les documents qui sont normalement éliminables au terme de leur durée d’utilité administrative. Dans ce cas, un visa d’élimination anticipé pouvait être accordé. Le deuxième cas concernait les documents qui devaient être conservés en totalité, et de manière définitive, au terme de leur durée d’utilité administrative : pour ces documents, les documents papier, une fois numérisés, pouvaient être versés aux archives départementales de manière anticipée, si leur conservation posait « des problèmes particulièrement aigus » à l’administration concernée. Enfin, si les documents concernés étaient normalement soumis au tri par échantillonnage, une combinaison des deux précédentes règles devait alors s’appliquer : une autorisation d’élimination anticipée pouvait être délivrée pour les documents normalement éliminables à terme, tandis que l’échantillon retenu était conservé en version papier et pouvait être déposé aux archives départementales au besoin.

204. Dans tous les cas, l’autorisation d’élimination anticipée devait être assortie de recommandations. Il était notamment recommandé à l’administration de réaliser, avant d’envisager la destruction des archives papier, une analyse juridique. Celle-ci avait pour but de déterminer les potentiels besoins en matière de preuve, les risques de contentieux et donc chercher à savoir si les copies numérisées qu’elle souhaitait réaliser, respectaient les critères nécessaires afin de conserver une valeur probante suffisante. Les Archives de France précisaient que, pour assurer une meilleure sécurité juridique, il pouvait éventuellement être nécessaire de conserver certaines archives papiers et ce, jusqu’à la fin de leur durée d’utilité administrative. Les Archives de France conseillaient enfin aux administrations qui s’orientaient vers une numérisation de l’ensemble de leurs archives papier, de suivre une procédure rigoureuse garantissant la qualité de leur démarche.

205. Plusieurs possibilités s’offraient alors aux administrations. Celles-ci pouvaient appliquer les principes posés par Dominique PONSOT dans son rapport intitulé « Valeur juridique des documents conservés sur support photographique ou numérique »280 : opérer dans un cadre systématique, c’est-à-dire traiter de la même façon tous les documents appartenant à la même catégorie et/ou remplissant la même fonction probatoire, dater la copie,

280 PONSOT, Dominique, « Valeur juridique des documents conservés sur support photographique ou

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s’assurer d’effectuer une copie reproduisant le plus grand nombre de caractéristiques physiques du document (par exemple les annotations manuscrites), et enfin, dans le but de se pré-constituer une preuve de l’opération réalisée, présenter de manière précise le processus de numérisation mis en place. Les administrations pouvaient aussi s’inspirer de normes existantes. En la matière, on trouvait par exemple la norme AFNOR NF Z 42-013, intitulée «

recommandations relatives à la conception et à l’exploitation de systèmes informatiques en vue d’assurer la conservation et l’intégrité des documents stockés dans ces systèmes ».

La suppression des archives papier qui auraient été numérisées était donc possible. Cependant, les établissements publics de santé devaient rester prudents et réalistes face aux exigences posées par les Archives de France. La loi de modernisation de notre système de santé s’est depuis penchée sur le sujet.

b) Les apports de la loi de modernisation de notre système de santé

206. L’article 204 de la loi de modernisation de notre système de santé prévoyait la possibilité pour le gouvernement de légiférer par voie d’ordonnance afin d’ « encadrer les

conditions de destruction des dossiers médicaux conservés sous une autre forme que numérique quand ils ont fait l’objet d’une numérisation et préciser les conditions permettant de garantir une valeur probante aux données et documents de santé constitués sous forme numérique ». L’ordonnance en question a été adoptée en janvier 2017281 et vient ainsi encadrer la destruction des documents papiers numérisés. Ce texte insère, au sein du Code de la santé publique, une nouvelle section intitulée « conditions de reconnaissance de force probante des documents comportant des données de santé à caractère personnes créés ou reproduits sous forme numérique et de destruction des documents conservés sous une autre forme que numérique ». Ainsi, il est désormais possible, « lorsqu’une copie fiable a été

réalisée »282 de détruire un document original avant la fin de sa durée légale de conservation. A noter toutefois que pour les documents qui relèvent du champ des archives publiques, l’autorisation de destruction sera toujours soumise au visa de l’administration des archives.

281 Ordonnance n° 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des données de santé à caractère personnel créés ou reproduits sous forme numérique et de destruction des documents conservés sous une autre forme que numérique, JORF n°0011 du 13 janvier 2017, texte n° 21.

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Conclusion de la section

207. Même informatisées, les données de santé conservent le statut d’archives hospitalières et, à ce titre, leur archivage doit respecter la réglementation en la matière et notamment, les dispositions du Code du patrimoine. Ces règles ont des conséquences, à la fois sur la gestion de la vie courante des archives numériques, mais également en ce qui concerne leur éventuelle élimination. Nous pouvons, par ailleurs, regretter les difficultés d’interprétation de certaines de ces règles, qui sont parfois contradictoires avec les règles classiques relatives à la gestion des données de santé, telles que celles qui ont trait au secret médical, fragilisant ainsi la sécurité et la confidentialité des données de santé.

208. La conservation des données de santé informatisées a fait, quant à elle, l’objet d’une réelle réflexion de la part du législateur, conscient des enjeux qui entourent la sécurité et la confidentialité de ces données. Cela a abouti aux différents textes et référentiels qui encadrent et organisent aujourd’hui l’hébergement des données de santé. Ce cadre n’est toutefois pas parfait et certains ajustements permettraient d’en améliorer l’efficacité. A l’heure actuelle, un des enjeux essentiels de la conservation informatisée des données de santé reste l’adéquation entre le développement de la technique et l’encadrement juridique mis en place.

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Section 2. Hébergement et communication des données : un cadre

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