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Dessaler l’eau

Dans le document Réacteurs nucléaires à caloporteur gaz (Page 72-76)

Une autre application intéressante des RHT est le dessale- ment de l’eau de mer à coût réduit. La production d’eau douce est un autre défi pour de nombreux pays, dans les années à venir. Les technologies de dessalement de l’eau de mer exis-

tent et sont déjà en œuvre indus- triellement de par le monde, mais leur coût est élevé. Dessaler l’eau nécessite de l’énergie, soit mécanique, soit calorifique, selon le procédé utilisé. Par exemple, on peut vaporiser l’eau salée et condenser la vapeur obtenue qui ne contient plus de sel. Ce procédé fonc- tionne avec une bonne efficacité au dessus de 120 °C (fig. 58). Or, l’optimisation du cycle thermody- namique d’un RHT conduit à avoir une température basse de 120 à 130 °C selon les circuits utilisés (fig. 59). Cette chaleur est rejetée à l’extérieur et l’interposition d’un circuit de dessa- lement est tout à fait possible. Dans ce cas, seul le coût du cir- cuit de dessalement est à considérer ; la chaleur, inutilisée en temps normal, est gratuite et le coût du dessalement s’en trouve réduit. De surcroît, en élevant la température chaude du RTHT, on augmente aussi cette température basse de quelques dizaines de degrés, rendant le procédé de dessale- ment encore plus attractif.

Extraction d’air

Rejet de saumure Fluide de chauffage

Eau distillée Eau de mer à distiller

Fig. 58. Principe de la distillation à effet multiple de l’eau de mer pour produire de l’eau douce. La chaleur est apportée par le circuit orange à une température de 120 °C environ, typique de la température de rejet d’un RHT.

Fig. 59. Schéma de principe d’un RTHT à cycle direct en hélium. La chaleur à 950 °C alimente une turbomachine performante pour produire de l’électricité avec un haut rendement et aussi une installa- tion de production d’hydrogène par cycle thermochimique.

La chaleur résiduelle du circuit est évacuée vers la source froide à une température de 130 °C et peut être utilisée gratuitement pour dessaler de l’eau de mer.

Alternateur Refroidisseur Récupérateur He/He Production d’eau douce Production d’hydrogène Refroidisseur intermédiaire Compresseur B. P. Compresseur H. P. Turbine Cœur

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Le réacteur à très haute température (RTHT) : monter en température, c’est gagner sur plusieurs points Parallèlement à la structuration internationale de la recherche

sur les systèmes du futur, grâce au forum « Generation IV », le DOE, Département de l’énergie des États-Unis, proposait dès 2003 de réaliser un prototype du RTHT à brève échéance. Baptisé « Next Generation Nuclear Plant », ou NGNP, ce pro- totype devra démontrer sa capacité à produire de l’électricité avec un haut rendement et également de l’hydrogène.

Sa motivation est double : être un prototype qu’une ingénierie pourrait commercialiser tel quel dans un parc électronucléaire ; motiver la recherche et les développements associés dans une optique d’innovation. Très volontaire dans son plan de déve- loppement initial – construction de 2011 à 2015 – les analyses de l’adéquation innovation-planning ont finalement montré qu’il fallait un peu de temps pour passer des technologies connues des RHT à celles plus ambitieuses des RTHT, telles que nous les avons présentées précédemment. Aujourd’hui, l’exploita- tion du NGNP est prévue pour commencer vers 2018.

Le cahier des charges de ce projet de réacteur est décrit dans le document cité en note [1]. Il s’agit bien d’un prototype du RTHT de « Generation IV », mais qui sera financé par le DOE et un consortium, sous bannière américaine, regroupant des centres de recherche et des industriels ; le NGNP sera construit sur le centre de recherche national d’Idaho-INL-, au États-Unis (fig. 60).

Le projet américain NGNP

Les principales caractéristiques de ce réacteur sont les sui- vantes :

• Refroidissement à l’hélium ;

• température de l’hélium en sortie du cœur de 1 000 °C ; • type modulaire de 300 à 600 MWth de puissance ; • un combustible à particules « Triso* » ;

• un cœur en graphite, soit à prismes soit à boulets ; • une coproduction d’hydrogène ;

• des caractéristiques de sûreté attrayantes.

En ce qui concerne la production d’énergie, le NGNP devra fournir de l’électricité à un coût attractif. Grâce à sa tempéra- ture de 1 000 °C, le rendement devrait avoisiner 50 %. En contrepartie, les technologies adaptées pour fonctionner à cette température doivent être développées sur la base des connaissances acquises dans les projets de RHT antérieurs ; d’une part, dans le cœur, où toutes choses égales par ailleurs, l’augmentation de température de 150 °C nécessite d’amélio- rer le confinement des produits de fission au sein des parti- cules multicouches ; d’autre part, sur les composants internes et les circuits où le dépassement des 950 °C est considéré par les métallurgistes comme nécessitant un changement radical dans le choix des matériaux ; finalement, sur les systèmes de conversion d’énergie avec une turbomachine à cycle direct en hélium.

Les démonstrations de production d’hydrogène porteront sur deux procédés : un cycle thermochimique à haute tempéra- ture capable d’utiliser directement la chaleur produite. Le cycle iode-soufre est cité comme référence. Il devrait faire l’objet d’une boucle de pro- duction prélevant 50 MWth sur le NGNP. La production qui en résultera sera d’en- viron 500 kg/h d’hydrogène, soit l’équi- valent de 40 000 litres d’essence par jour. En parallèle, une démonstration de production par électrolyse à haute tem- pérature est également prévue avec un niveau de puissance équivalent, c’est-à- dire 5 MWth et 20 MWe. Finalement, on obtient le schéma de principe du NGNP (fig. 61).

Le choix du type de cœur, à prismes ou à boulets, est reporté après la phase d’avant-projet sommaire, afin de laisser aux différentes ingénieries la possibilité de défendre leur savoir-faire. La R&D sur le RTHT du forum « Generation IV » s’organise aujourd’hui pour apporter son soutien à ce projet.

Fig. 60. Vue d’artiste du NGNP sur le centre d’Idaho, avec ses boucles de démonstration de production d’hydrogène.

Circulateur de la boucle intermédiaire Réacteur modulaire refroidi à l’hélium Échangeur de chaleur intermédiaire Circulateur de la boucle primaire

On le voit, la course à la très haute température ouvre de nou- velles applications à l’énergie nucléaire. La suite de l’ouvrage explore les recherches à réaliser et les techniques à mettre au point pour en garantir le succès.

Références

[1] F. H. SOUTHWORTHet al., « The Next Generation Nuclear Plant (NGNP) Project », Global 2003, November 16-20, ANS (2003),

p. 276-287.

Pascal ANZIEU,

Direction du développement et de l’innovation nucléaires

Fig. 61. Schéma de principe du NGNP.

Réacteur Intercooler Unité de conversion d’énergie Récupérateur de chaleur Réseau électrique Hydrogène Hydrogène Générateur Énergie électrique

pour l’électrolyse Compresseur H. P. Compresseur B. P. Intercooler Intercooler Production d’hydrogène (électrolyse) Production d’hydrogène (cycle thermochimique)

Matériaux pour le réacteur à très haute température

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