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Le « cycle de Joule-Brayton »

Dans le document Réacteurs nucléaires à caloporteur gaz (Page 88-90)

Ce cycle bien connu est celui universellement utilisé dans les machines utilisant des turbines à gaz, qu’il s’agisse des sys- tèmes de propulsion (avions, bateaux) ou des grandes cen- trales électrogènes à combustible fossile et à cycle combiné. Dans la plupart de ces applications, on utilise un cycle simple (fig. 73) consistant à :

• Aspirer et comprimer de l’air pour le faire pénétrer dans une chambre de combustion (1→2) ;

• brûler le mélange air-combustible dans la chambre de com- bustion (2→3) ;

• détendre les gaz brûlés dans une turbine (3→4).

À la sortie de la turbine, les gaz brûlés sont relâchés dans l’at- mosphère ; ce cycle est donc qualifié d’« ouvert ». Il est com- mode de représenter le « cycle de Joule Brayton » en dia- gramme température-entropie (T, S) [fig. 74]. L’aire du cycle représente, pour des conditions idéales, le travail mécanique

18. Les autres avantages et inconvénients du caloporteur hélium sont détaillés supra, p. 24 et 25, dans l’encadré.

19. Notons que tous les réacteurs à caloporteur gaz (à hélium, mais surtout

Pour des réacteurs nucléaires, la « combustion » est évidem- ment externe et le cycle thermodynamique peut devenir tota- lement fermé. La nature du gaz n’est plus imposée par la com- bustion ; il peut donc être choisi sur d’autres critères. Le schéma de base est toujours celui de la figure 75, à ceci près que la chambre de combustion est remplacée par le cœur du réacteur nucléaire et qu’il n’y a plus de gaz brûlés à rempla- cer par de l’air frais. Il existe de nombreuses variantes à cette configuration. On cherche, en effet, à optimiser le rendement net et le travail spécifique du cycle (en J/kg), sans trop com- pliquer la conception. Par exemple, on évite d’avoir une tem- pérature trop élevée en entrée du cœur du réacteur (une aug- mentation de cette température améliore pourtant le rendement), car celle-ci fixe la température de nombreuses structures et, en particulier, celle de la cuve principale du réac- teur.

Le cycle de référence considéré pour les études du RCG com- prend non pas un seul mais deux niveaux de compression, avec un refroidissement de l’hélium entre les deux compres- seurs. Cette configuration rapproche l’isentrope de compres- sion d’une isotherme, ce qui permet de gagner quatre points de rendement pour une température en entrée du réacteur limitée à 480 °C. Le rendement net atteint alors 47 à 48 % pour

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La conversion d’énergie dans les systèmes

de 4egénération à caloporteur gaz

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Fig. 73. « Cycle de Joule-Brayton » simple, utilisé pour une turbine à gaz à cycle ouvert.

Compresseur Chambre de combustion Combustible Gaz brûlés Entrée d’air Puissance mécanique Turbine

spécifique (en J/kg) fourni par le cycle. Ce travail, multiplié par le débit de fluide circulant, donne la puissance de l’installation. Pour des conditions idéales, ce cycle est constitué d’une pre- mière isentrope (compression 1→2), une isobare (combustion 2→3) et une seconde isentrope (détente turbine 3→4). L’isobare (4→1) représente le refroidissement des gaz brûlés.

Le rendement énergétique de ce cycle idéal s’écrit,

γ étant le rapport des chaleurs spécifiques du gaz à pression constante et à volume constant, soit 1,4 pour de l’air et 1,66 pour de l’hélium. Toutes choses égales, par ailleurs, ce sont donc les grands rapports de détente (P3/P4) qui donnent les meilleurs rendements (ce rapport de détente étant limité par la température à la source chaude).

Lorsque la température en sortie de turbine est supérieure à la température de sortie du compresseur, on peut améliorer l’efficacité du « cycle de Joule-Brayton » en se servant des gaz en sortie de la turbine pour réchauffer le gaz sortant du compresseur, au moyen d’un échangeur dit « récupérateur ».

3 1 4’ 5’ 6’ 3’ 2’ 2 300 400 500 600 700 800 900 1 000 1 100 1 200 4

Fig. 74. Diagrammes (T, S) du « cycle de Joule-Brayton » (avec et sans échangeur-récupérateur). Les points du cycle marqués d’un chiffre renvoient aux points correspondants dans les figures 73 et 75.

Brayton simple Entropie (J / kg / K) Isobare, chambre de combustion P=1 bar

Brayton avec récupérateur Récupérateur T empérature (K elvin) 1 2 3’ 4’ 5’ 6 5’ Compresseur Chambre de combustion Combustible Échangeur-récupérateur Source froide T

raitement gaz (CO

2

)

Gaz brûlés

Entrée d’air

Turbine

Fig. 75. « Cycle de Joule-Brayton » semi-ouvert avec récupérateur. Les points du cycle marqués d’un chiffre renvoient aux points corres- pondants dans les figures 73 et 74.

Cet échangeur chauffe l’air sortant du compresseur avant son entrée dans la chambre de combustion. Par rapport au cas précédent, l’intérêt de cette variante est d’avoir un rendement maximum pour des plus faibles rapports de détente, ce qui limite la taille des turbomachines (fig. 74 et 75 pour le dia- gramme T, S). Il faut alors ajouter un échangeur devenant la source froide du cycle. Le cycle est alors presque fermé. Dans ces deux exemples, les cycles sont « à combustion interne », c’est-à-dire que le combustible est mélangé et brûlé avec le fluide de travail du cycle : l’air.

obtient, de la sorte, un cycle combiné similaire au cycle com- biné conçu pour les turbines à gaz à combustion, mais avec la différence essentielle que le cycle à gaz est fermé (voir

supra, figure 26, p. 41). Le rendement obtenu est excellent,

car le système exploite les avantages du cycle à gaz pour les hautes températures, tout en bénéficiant de ceux du cycle à vapeur pour les basses températures, dus en particulier à sa capacité de condenser la vapeur à la source froide. En raison des difficultés technologiques liées à la conception et la fabri- cation d’un groupe turbocompresseur à hélium, AREVA a adopté ce concept pour son projet ANTARES. Ce dernier met en œuvre un cycle indirect utilisant un échangeur inter- médiaire et un circuit secondaire à l’azote, gaz aux propriétés proches de celles de l’air. Ce concept permet de tirer parti de la technologie prou- vée des turbines et compresseurs à air. Afin d’améliorer les propriétés d’échange de l’azote, AREVA ajoute une proportion de l’ordre de 20% d’hélium à l’azote, ce qui permet d’op- timiser la conception de l’échangeur intermédiaire, sans trop affecter la technologie classique du groupe tur- bocompresseur.

Ce concept permet d’obtenir un excellent rendement, supé- rieur à 50% brut, et supérieur à 46% net, au prix d’une cer- taine complexité apparente comparée à un « cycle de Brayton » récupéré. Comme il fait appel à une technologie prouvée de cycle combiné, cette complexité apparente n’est pas nécessairement plus chère que celle du « cycle de Brayton » récupéré qui reste à développer et dont le coût n’est pas connu.

De plus, ce schéma particulièrement flexible est bien adapté à des configurations de cogénération* qui pourraient repré- senter la majorité du marché de ces réacteurs.

Quelques remarques s’imposent quant au choix du cycle de conversion « Joule-Brayton » à l’hélium :

• L’hélium n’a pratiquement jamais été utilisé dans des « cycles de Joule-Brayton » de grande puissance. Les seules expé- riences significatives sont celles acquises avec la centrale allemande d’Oberhausen II (fig. 77) et les essais de l’instal- lation HHV. Rappelons qu’Oberhausen II était une installa- tion industrielle qui a fonctionné 24 000 heures entre 1974 et 1988 (dont la moitié à 750 °C), alors que HHV était une ins- tallation d’étude de puissance plus faible et qui n’a fonctionné que 1 100 heures (dont 350 heures à 850 °C). Concernant les performances, on constate que le turbocompresseur d’Oberhausen II n’a atteint que 30 MWe au lieu des 50 MWe prévus. HHV a été plus performante. Parmi les autres ensei- une température de sortie de cœur de 850 °C. Des niveaux

de compression supplémentaires pourraient encore être envi- sagés, au prix d’une complication accrue de l’installation.

Les principaux paramètres du cycle à deux niveaux, optimi- sés grâce au logiciel Cyclop développé au CEA, sont donnés figure 76. Compresseur Basse pression Compresseur Haute pression Cœur du réacteur Échangeur- récupérateur Précooler 41,1 bars 123 °C 71 bars 128 °C 40,9 bars 40 °C 24,4 bars 40 °C 24,8 bars 147 °C 70,6 bars 480 °C 70 bars 850 °C 25,1 bars 498,5 °C Intercooler Turbine

Fig. 76. Cycle de conversion d’énergie de référence du RCG-R (ren- dement net 47 %). L’optimisation des paramètres a été faite à l’aide du logiciel CYCLOP développé au CEA.

Même si le cycle direct à l’hélium paraît aujourd’hui le concept le plus prometteur pour les réacteurs à caloporteur gaz, d’autres cycles de conversion d’énergie, toujours basés sur le « cycle de Joule-Brayton », sont envisagés comme alterna- tives à cette référence. Un des plus intéressants consiste en l’utilisation du gaz carbonique supercritique en cycle indirect (le caloporteur primaire étant toujours de l’hélium). Les pres- sions et températures maximales seraient ici de l’ordre de 250 bars et de 650 °C (la pression critique est de 73,8 bars pour le CO2). Selon les calculs menés au CEA, cette alterna- tive présente l’intérêt d’atteindre des rendements presque équivalents aux 47-48 % évoqués plus haut, avec des tempé- ratures en sortie de cœur nettement plus basses (de l’ordre de 700 °C). Néanmoins, ce cycle a l’inconvénient d’être com- plexe et présente des risques de corrosion du circuit secon- daire. En outre, il n’y a aucun retour d’expérience de turboma- chine utilisant le CO2supercritique.

Dans le document Réacteurs nucléaires à caloporteur gaz (Page 88-90)