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Des processus de paix pour tous les goûts

2.2. Colombie entre les processus de paix (de 1982 jusqu’à présent) et l’Assemblée

2.2.1. Des processus de paix pour tous les goûts

On commence à analyser les processus de paix à partir de la cinquième tentative que Mario Ramirez Orozco (doctorat en études latino-américaines et auteur de « La paz sin engaños ») a appelé « la paix objective » qui a eu lieu en 1982, sous la présidence de Belisario Betancur (de 1982 à 1986). Dans ce cas, comme presque toujours, le rapprochement avec les guérilleros a commencé avant l’élection présidentielle. Ainsi, lorsque le nouveau président a pris ses fonctions, il y a eu quelques avancées entre le 20 juillet et le 7 août 1982, jour où le

gouvernement a présenté au Congrès trois projets d’amnistie (Afanador, 1993). De là, est venu la loi 35 de 1982 : cette loi a donné le pardon et l’oubli automatiquement et sans conditions à tous les rebelles, et la cessation de toutes les procédures judiciaires contre eux, en plus de la libération immédiate de tous les prisonniers politiques. Il n’était pas nécessaire que ceux-ci exprimassent leur acceptation, il leur suffisait de solliciter la liberté à la Cour Supérieure du district judiciaire auquel ils appartenaient afin de profiter de la libération inconditionnelle (Afanador, 1993). De là, est né un nouveau parti politique, l’Union Patriotique (UP – formé par des anciens rebelles démobilisés), lequel a par la suite presque disparu après l’assassinat de plus de 3000 de ses militants entre 1982 et 1986 (Verdad Abierta, non daté1).

Selon la source, le nombre de bénéficiaires de la loi 35 de 1982 est différent. Selon le rapport du général Vega Uribe à la chambre plénière, 31 rebelles des FARC ont été libérés grâce à l’amnistie, 265 rebelles du groupe M-19, 35 rebelles du groupe ELN, 6 du groupe EPL, 30 originaires du mouvement PLA, 6 du groupe ADO, soit un total de 373 libérations (El Tiempo, Bogota 31 août 1984, Dans: Ramirez et Restrepo, 1991). Toutefois, dans son livre, le général Landazábal a des chiffres plus élevés. Selon lui 535 personnes ont été exonérées de la responsabilité et libérées grâce à cette loi: 417 du mouvement M-19. 23 de l’ELN, 60 des FARC, 31 du mouvement PLA et 4 de l’ADO (Landazábal Reyes, Fernando au: Ramirez et Restrepo, 1991).

Le mouvement révolutionnaire M-19 a déclaré : « La loi d’amnistie n’a pas fini avec les problèmes sociaux, économiques et politiques que connaît le pays et n’a pas mis fin aux maux qui sont à l’origine de la guérilla ». Enfin, Le M-19 a déclaré qu’ils accepteraient l’amnistie et se réjouiraient quand il n’y aura plus un seul prisonnier politique dans les prisons (Ramirez et

60 Restrepo, 1991). Selon Socorro Ramirez , le M-19 a déçu la nation. D’un côté, ils ont bénéficié de la loi d’amnistie lorsque de nombreux détenus ont recouvré la liberté, mais d’autre part, ils se sont réunis à Panama et décidèrent de redémarrer la lutte armée, à l’encontre du processus de paix. Finalement, ce processus s’est achevé par un échec.

Par la suite, Virgilio Barco (de 1986 à 1990), n’a pas souhaité étendre les négociations, il voulait simplement négocier des mesures de désarmement et l’intégration ultérieure de guérilleros dans la vie politique. L’objectif était d’institutionnaliser la paix pour la mettre dans des structures établies selon la Constitution. Ainsi, les premières négociations entre Rafael Pardo, Conseiller de la Réconciliation, de la Normalisation et de la Réadaptation, Carlos Pizarro, commandant du M-19, ont été conduites de manière quasi clandestine, entre janvier et mars de 1989. Bien que des contacts permanents et discrets aient été mis en place avec certains parlementaires de manière consultative tout au long du processus, le pouvoir exécutif (le Président de la République) assurait la gestion exclusive des négociations avec les rebelles (Garcia-Peña, 1993).

La devise de ce processus était: « La main tendue mais ferme ». Cette stratégie a fonctionné en partie seulement ; en effet, en 1989, elle a permis la démobilisation de certains groupes de la guérilla, y compris le mouvement M-19, la plupart des membres de l’EPL et le groupe autochtone Quintin Lame. Les grands groupes, comme les FARC et une partie de l’EPL, ont décidé de rester mobilisés (Chernick, 1999).

Les négociations définitives pour signer la paix avec le groupe armé M-19 ont commencé avec l’enlèvement par ces-derniers du leader conservateur et directeur du journal El Nuevo Siglo,

2 Professeure de l’Instituto de Estudios Políticos y Relaciones Internacionales (IEPRI) de l’Universidad

Alvaro Gomez Hurtado, le 29 mai 1988. Les négociations de paix ont continué avec la Constitution de 1991, qui a donné naissance à une constitution libérale et démocratique, résultat d’un consensus entre les différents partis, impliqués ou non dans le processus de paix (Hernández, 2013).

En 1990, César Gaviria Trujillo (de 1990 à 1994) a été élu Président de la République, et est arrivé au pouvoir juste après la mort du candidat libéral Luis Carlos Galán Sarmiento, assassiné sous les ordres du narcotrafiquant Pablo Escobar (El Tiempo, 16 août 20143). Le

jour de l’enterrement de Galán, son fils Juan Manuel a demandé à Gaviria de reprendre les idées de son père et de poursuivre son projet politique (Semana, 19974). Ainsi, Gaviria a

facilement remporté l’élection et, après la signature de la paix par le Président Barco, a travaillé pour avoir une Assemblée Nationale Constituante. Par la suite, en 1991, ont commencé à Caracas les négociations pour la paix avec les FARC et l’ELN ; négociations qui, comme ce fut le cas presque à chaque fois précédemment, n’ont pas abouti.

De 1994 à 1998, Ernesto Samper Pizano est Président de la République. Au cours de son mandat, il a dû repousser l’un des plus grands scandales politiques vécu dans le pays, appelé ‘processus 8000’. Ce scandale concernait l’infiltration de l’argent de la drogue dans la campagne présidentielle colombienne, en particulier dans la campagne du candidat Samper. Selon le magazine Semana (le 23 juin de 19975), citant des procureurs, les narcotrafiquants ont réussi à introduire 4 000 millions de pesos dans la campagne, afin de prendre la présidence.

3 Galán, 25 años de un magnicidio con la verdad incompleta. El Tiempo, 16 de agosto de 2014) Consulté le17

avril de 2015: http://www.eltiempo.com/multimedia/especiales/galan-25-anos-de-un-magnicidio-que-unio-al-

pais-contra-la-mafia/14390861/1

4 César Gaviria Trujillo. Semana, 23 de junio de 1997. Consulté le 17 avril de 2015:

http://www.semana.com/especiales/articulo/cesar-gaviria-trujillo/32878-3

62 Durant toute cette période, ce scandale a mis de côté le thème des négociations de paix. Ainsi, Juan Manuel Santos, sans l’autorisation du Président, a organisé une rencontre hors la loi avec des groupes armés illégaux. L’objectif était d’entamer un processus de paix, lequel a échoué car le gouvernement Samper a pris cette initiative comme une conspiration contre lui (Hernandez, 2014).

Par la suite, de 1998 à 2002, Andrés Pastrana Arango fut au pouvoir. Les négociations avec les FARC ont commencé le 7 janvier 1999 (El Espectador, le 6 Janvier de 20096). Ce processus a

été appelé « El Caguán » et était long, tortueux et comme d’habitude, fut sans résultat. En fait, Pastrana a gagné cette élection car deux jours avant le second tour des élections présidentielles, les FARC lui ont donné un coup de pouce en disant de lui, le candidat conservateur, qu’il était le meilleur pour négocier la paix avec eux. L’opinion publique colombienne, à ce moment-là, a cru en l’espoir d’une paix négociée et Pastrana a remporté l’élection (El Tiempo, le 7 janvier, 19997).