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Déprofessionnalisation – Prolétarisation – Malaise:

CHAPITRE I. L’ÉVOLUTION DU MÉTIER D’ENSEIGNANT : VERS LA

3. Vers une professionnalisation du métier : réactions et perspectives

3.2. Déprofessionnalisation – Prolétarisation – Malaise:

3.2.1. Déprofessionnalisation

Au cours des dernières décennies, la critique de la rationalisation du travail a conduit à la conviction que l’activité d’enseignement est plutôt limitée à une tâche instrumentale et contrôlée par l’institution, (« institutionnalisation » du métier). Les pratiques et les compétences pédagogiques sont normativement prédéterminées par le curriculum et mécaniquement appliqués par les enseignants/ « employés », soumises au système éducatif. En effet, le curriculum impose une « technicisation » du métier au détriment des capacités intellectuelles et des qualifications réelles (« déqualification ») des enseignants. Du point de vue des auteurs inspirés par le

d’accès et d’exercice, 5. le pôle politique concernant la défense d’une licence existante ainsi que le droit légitime à l’exercice professionnel.

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La mondialisation exige de la part des systèmes nationaux des transformations de leur mode d’administration en vue de l’optimisation de leurs performances. En particulier, ce programme est soutenu tant par les pays industriels et les pays émergents (ONU, OCDE) que par les pays en voie de développement.

marxisme (voir Lessard, 2000 : 98), une telle situation nous renvoie à une « déprofessionnalisation » qui détruit l’action créative et libre des individus. Les mêmes auteurs soutiennent que cette situation conduit directement à une « taylorisation » des tâches « robotisant » et « informatisant » les fonctions. D’après ces auteurs cela se produit dans un cadre capitaliste où la professionnalisation n’est qu’un prétexte et dont le but réel est la disparition des métiers traditionnels et la prolétarisation des ouvriers. Cette thèse de la prolétarisation était l’idéologie essentielle syndicale à une époque où les enseignants exerçaient rigoureusement leur critique contre la professionnalisation comme une démarche du système capitaliste. D’ailleurs, toujours selon eux, il est évident que durant les dernières décennies le métier et le statut d’enseignant se sont dégradés et que les conditions du travail se sont détériorées de plus en plus.

3.2.2. Prolétarisation

En effet, avant les années 1960, le modèle bureaucratique imposait une autorité traditionnellement organisée et les enseignants devaient subir les règles officielles du système éducatif. Les enseignants travaillaient selon un mode ritualiste, «routinisé» et les élèves adoptaient le même comportement que leur enseignant (conformité stratégique et ritualisme). Cependant, l’école actuelle, même si elle s’est libérée des contraintes du noyau dur de la bureaucratie, se trouve confrontée à la sévérité d’un modèle présenté comme « professionnalisant » dans lequel le jeune enseignant est en situation de stress, du fait qu’il doit acquérir non seulement des connaissances disciplinaires, mais également des compétences très exigeantes afin de s’adapter à un monde changeant et à « l’économie du savoir » (« Le modèle bureaucratique, jugé couteux en non pertinent dans le nouvel environnement compétitif international se dégage au profit d’un modèle organisationnel de type managérial »)59. En outre, les classes d’élèves sont de plus en plus hétérogènes et les problèmes plus complexes accroissent dramatiquement le niveau de stress des enseignants du fait de la charge de travail. Bien évidemment, il s’agit en quelque sorte d’un décalage du mode de contrôle d’un type bureaucratique vers un mode plus

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Chapitre I. L’évolution du métier d’enseignant : Vers la professionnalisation

professionnel d’encadrement de son travail60. Autrement dit, comme le souligne Malet (2010 : 95), l’État-nation redéfinit son rôle dans le nouveau cadre de l’économie globale. Les États étant intégrés à ce cadre, les politiques d’éducation et de formation se sont déplacées du cadre national vers le cadre mondial économique, en favorisant la compétitivité entre eux tout en évaluant leurs résultats. Ainsi, l’État ne perd pas totalement son pouvoir d’intervention et de contrôle des systèmes éducatifs, mais il se réadapte tout simplement aux nouvelles conditions.

Par ailleurs, il semble que l’implication puissante du marché régule l’éducation de manière décisive valorisant dans la classe certaines pratiques plutôt technocratiques (par exemple l’introduction des TICE) et gestionnaires, mais qui conviennent aux grandes entreprises et à la gestion économique de l’Etat. Ces dernières favorisent le développement d’une « marchandisation » de l’éducation en marginalisant certaines autres sciences (humaines et sociales). Il s’agit d’une révolution vers une « logique de marché »61 que le personnel éducatif, les parents et les élèves sont contraints comme consommateurs de suivre62. Le marché développe le modèle de la « markétisation » de l’école en tant qu’« achat », comme d’ailleurs il le fait avec les autres marchandises de la société moderne. Ce modèle entraîne la fonctionnalité d’une technicisation du métier et favorise les investissements commerciaux dans le domaine de l’éducation.

Dans son analyse (2000 : 99-100), Dubar encadre l’émergence du pouvoir du marché qui se trouve au cœur du processus de la « modernisation » dont le nouveau stade est la « mondialisation ». Plus précisément, dans ce cadre, les marchés financiers sont dominants en ce qui concerne les échanges à l’échelle mondiale et les capitaux circulent sans frontières. Selon Dubar, ce n’est pas seulement une affaire d’« entreprise » et de « marché », mais c’est aussi une affaire « politique », à savoir une affaire d’État.

Plus spécifiquement, le système universitaire et la formation professionnelle se tournent vers le secteur commercial63 à la suite du déclin du financement des universités par l’État au niveau international. Ainsi, les autorités universitaires doivent

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Il s’agit d’une nouvelle forme d’intervention de l’Etat dans l’école. Michael Apple (1986) souligne que l’Etat a trouvé d’autres moyens de contrôler l’opération de l’école, alors qu’il intervenait directement avec le système bureaucratique. Voir la même opinion à Lessard, 2000 :107.

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Voir Tardif et Lessard, 2004 : 275-279.

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Voir Ballion, 1982

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Voir « Globalisation et Universités. Nouvel espace, nouveaux acteurs » (sous la direction de Gilles Breton et Michel Lambert), 2003, Éditions UNESCO, Les Presses de l’université de Laval.

subir les intérêts commerciaux. La formation est donc destinée à satisfaire les besoins de l’économie de marché.

Dans l’esprit commercial, la marchandisation de curriculum, et plus généralement la privatisation du système éducatif par les grandes entreprises, pourrait conduire éventuellement à la dégradation de la formation64 des futurs enseignants en raison d’une demande de personnel non qualifié ainsi que d’une dégradation des conditions de travail. En d’autres termes, le travail enseignant se trouve confronté au risque de prolétarisation65.

Dans cette situation, l’autonomie des individus serait un problème pour le marché. Elle empêcherait le développement d’une autorité commerciale. Le processus de prolétarisation s’accompagne d’une perte éventuelle et systématique d’autonomie des individus66 (moins d’initiatives, moins de temps libre, moins de créativité, etc.). En effet, la nouvelle réalité des conditions de la profession enseignante a contraint les enseignants à travailler plus intensivement pour devenir « professionnels » (nouvelles compétences pédagogiques, utilisation des TICE, tâches administratives, etc.). Tout particulièrement, pour les femmes, la situation est plus critique, étant donné qu’elles représentent la majorité du corps professoral et le groupe professionnel le plus exploité. De ce fait, les enseignants sont devenus « prisonniers » des consignes du marché, ils perdent donc le contact essentiel avec leur travail. L’aliénation par l’objet de leur travail entraîne une crise identitaire.

Or, le travail enseignant est soumis à une série de conduites en raison des consignes du marché et les nouvelles générations voient l’école comme un « management » pour leur entrée qualifiée dans le monde du travail. Par conséquent,

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Une formation ne pourrait être destinée qu’à la satisfaction des besoins de l’économie de marché.

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Pour certains auteurs, à la place des termes professionnalisation/prolétarisation, «il serait plus juste de dire que le professionnalisme enseignant serait en voie de "transformation" et de "recomposition" : l’ancien professionnalisme est fondé en dernier ressort sur un "ethos de service public" (Lawn, 1996), serait remplacé par un professionnalisme de type "managérial", l’enseignant intégrant dans son identité les nouvelles réalités du marché et du nouveau management éducatif (Orga, 1995)» (voir chez Lessard, 2000:111). De même, pour Perrenoud (1996: 9) «la "prolétarisation" ne va pas ramener les enseignants à la condition ouvrière, ni au niveau de vie des travailleurs manuels. C’est d’une "dépossession" plus "symbolique" qu’il est question».

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Le marxiste Derber (1983) distingue deux types de prolétarisation: a) la " prolétarisation technique " qui comprend le contrôle sur le savoir et le processus de travail, b) la " prolétarisation idéologique ", la perte de contrôle sur les finalités de son travail et la politique de son organisme, toutes choses contrôlées par les gestionnaires (voir chez Bourdoncle, 1993 :93-94).

Chapitre I. L’évolution du métier d’enseignant : Vers la professionnalisation

les élèves (et leurs parents) sont les consommateurs67 de l’école/ « marchand », alors que l’enseignant devient par contrainte le gestionnaire du curriculum. De plus, cette tendance à la markétisation du système éducatif accroît les inégalités sociales entre les élèves. En effet, les producteurs du marché fournissent le modèle de l’acteur social «stratège»68 développant une attitude de «consumérisme» chez les consommateurs, à savoir un comportement de rationalisation des achats de sorte que les mêmes acheteurs croient à leur liberté de choix. Ce «consumérisme» légitime la consommation des produits proposés par le marché et les producteurs l’encouragent de plus en plus. Ils donnent l’impression qu’il y a plus de liberté à choisir des «marchands», même si tous les «consommateurs» n’ont pas réellement la possibilité d’acheter tous les «produits». En fait, la «liberté» et le «choix» dans le marché éducatif est une illusion, car il concerne seulement ceux qui peuvent en disposer. D’ailleurs, tous ne peuvent être réellement acteurs libres, étant donné que des différences socio-économiques affectent profondément l’attitude de chacun. Par conséquent, la «diversité» à l’école est simplement selon l’expression d’Apple (1996 : 38), un terme nuancé69 pour décrire la condition de l’«apartheid» éducatif.

3.2.3. Malaise des enseignants

L’autonomie professionnelle dans le travail enseignant est contestée des lors que certaines personnes et certaines tâches se trouvent impliquées dans un métier structurellement délimité. Dés leur formation initiale les enseignants sont toujours soumis à un modèle de travail prédéterminé par l’Etat, les programmes scolaires, les facteurs locaux de l’établissement scolaire et la stratégie du chef d’établissement. La revendication d’une autonomie dans la dynamique des relations demeure impossible. Autrement dit, c’est un « mythe ». Comme le fait observer Barrère (2002 : 34), la rationalisation croissante « rencontre une série de limites structurelles ». En effet, à partir de 1970, le pôle éducatif élargi (enseignants, CPE, conseillers d’orientation,

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Voir Perrenoud (1996 :11) «Les usagers (élèves et familles) ont des exigences de plus en plus élevées, osent les exprimer et se comportent en consommateurs avisés sur un marché qui met en compétition les établissements ou les professeurs».

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Voir Ballion, 1982:82.

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Apple, 1996 : 38 : « "Diversity " in schooling simply will be a more polite word for the condition of educational apartheid »

psychologues, surveillants, etc.) a empêché la division formelle du travail entre les différents acteurs dans l’établissement scolaire. De ce fait, la confusion des tâches70 dans la relation pédagogique par tous les membres de l’activité d’enseignement pourrait conduire à un malaise et à une démotivation des enseignants.

Il va de soi que les problèmes mentionnés procurent un malaise qui peut rendre insupportable l’exercice du métier. Le malaise ou le terme épuisement

professionnel («teacher burn-out », à savoir « se consumer »)71 est devenu un objet d’étude durant ces trente dernières années72 et les changements sociaux ont influé directement sur la fonction de l’école. Le rôle de l’enseignant devait s’adapter aux nouvelles situations socio-économiques. Mais, étant donné que ces situations sont imprévisibles pour trouver un plan général d’enseignement, l’enseignant débutant qui

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L’imposition de tâches davantage « artisanales » que pédagogiques (surveillance, activités administratives, etc.) a entraîné une dégradation du métier d’enseignant et un déclin du statut enseignant.

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Spécialement, le «burn-out» comme syndrome psychosomatique peut paralyser les mécanismes d’adaptation aux conditions du travail. Le syndrome du “burn-out” apparait comme une série de maladies, névroses, ulcères, maux de tête qui ont une relation directe avec les situations de stress. Sans doute, la profession d’enseignant de chaque niveau (primaire, secondaire, supérieur) est affecté considérablement et dans tous les pays. Notamment, pour le Maslach Burnout Inventory (Maslach, C. & Jackson, S. (1986). MBI: Maslach Burnout Inventory; Manual Research Edition, Palo, Alto, CA: University of California, Consulting Psychologists Press) à travers les déclarations de 1052 personnes de diverses professions (policiers, enseignants, infirmiers, travailleurs sociaux, psychologues, avocats, médecins) et il est établit que le métier d’enseignant fait partie des cinq métiers les plus soumis au stress. De plus, et puis les enseignants sont les premiers à souffrir du syndrome “burn-out”. Dans la bibliographie, l’évaluation du burn-out peut se réaliser par le Maslach Burnout Inventory. En effet, Maslach en collaboration avec Jackson, a inventé cet outil pour mesurer la fatigue sentimentale (emotional exhaustion), la dépersonnalisation (depersonalization) et la faible estime de l’accomplissement personnelle (reduce sense of personal accomplishment).

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L’étude de Georges Fotinos et de José Mario Horenstein (2011 :63) montre que le concept de

burnout, pour lequel il n’existe pas de traduction française a rencontre peu de succès comparativement

aux termes de malaise enseignant et, plus récemment, de souffrance des enseignants .Le dispositif psychiatrique de la MGEN (Mutuelle Générale de l’Education Nationale), par son ampleur et sa politique d’innovation dans le cadre d’une mutuelle professionnelle (65 % d’enseignants) est une spécialité française. La production scientifique du personnel en charge du dispositif nous éclaire sur la vision médicale du burnout en France au regard des enseignants ». En ce qui concerne le manque de recherches en France, Georges Fotinos indique dans un entretien réalisé par François Jarraud : « On

manque de chiffres en France sur le stress et les maladies mentales des enseignants. On ne dispose que de deux statistiques en Hollande et en Italie, des pays suffisamment proches du notre pour que ces indications puissent être prises en compte….. Ainsi 17% des enseignants hollandais souffriraient de burnout. Pourquoi cela serait-il différent en France ? Il serait bon de faire une enquête. ….. ». Par

ailleurs, a propos des facteurs précis qui expliquent le stress des enseignants, Fotinos soutient qu’ « On

demande trop aux enseignants. Ils sont certains de ne jamais atteindre les objectifs des programmes dans certains endroits. On leur impose des horaires impossibles également. Par exemple changer de classe 6 ou 7 fois par jour, chaque heure, avec à chaque fois l'obligation de remotiver les élèves. C'est épuisant même quand tout va bien avec les élèves ! Les enseignants sont souvent victimes d'un conflit de valeurs. Ils sont souvent en désaccord avec ce que leur institution leur demande de faire. On peut parler d'intensification du travail, d'absence de reconnaissance, de montée des contrôles, d'hétérogénéité des classes. C'est l'accumulation de ces éléments qui font que le stress s'installe et que 28% des enseignants veulent quitter l'enseignement ».

Chapitre I. L’évolution du métier d’enseignant : Vers la professionnalisation

a reçu une formation initiale et qui a une image idéale du métier, vit un « choc » lorsqu’il est confronté à la dure réalité de la classe. Notamment, il est difficile pour les jeunes enseignants, dont la première affectation s’effectue dans les écoles «défavorisées», de construire une identité professionnelle sans une expérience et, bien souvent, ces mêmes enseignants ressentent un découragement et une démission par le travail. Les signes d’un malaise incontournable apparaissent et sont actuellement entretenus par certaines situations sociales et structurelles de l’école (voir Esteve et Fracchia, 1988 : 45). D’ailleurs, le professeur n’est pas la seule source d’informations et d’instruction à l’heure actuelle. De plus en plus, les TICE, la télé, la radio et la presse attirent les jeunes et le prestige d’enseignant est en déclin. En même temps, on observe le mépris et la contestation du métier par les parents, les élèves et la société en général, comme travail routinier et moins payé que les autres carrières de la fonction publique.

Il faut également noter comme facteur important du malaise enseignant la crise de la discipline (« le deuil de la discipline», voir Barrère, 2002 : 69-71). Au-delà de la hiérarchie des disciplines dans l’institution scolaire, la matière enseignée perd de plus en plus de sens face aux conditions réelles de travail, à la soumission à un matériel pluridisciplinaire, aux classes nombreuses, hétérogènes, à l’indifférence des élèves, au cadre strictement institutionnel comportant beaucoup de règles et de programmes très chargés, aux tâches administratives, aux réunions avec les élèves, les collègues et les parents, ainsi qu’à la violence croissante73. De plus, il existe un sentiment de non-reconnaissance par les élèves, les parents et, plus généralement, par toute la société à tous les niveaux de l’enseignement. Tout cela engendre chez les enseignants une fatigue et une déception qui les accompagne dans la classe et les empêche de prouver réellement et efficacement leurs compétences pédagogiques. Ils vivent une crise d’identité et une perte d’estime de soi, parce qu’ils ne peuvent pas concilier leur soi-idéal (qu’ils rêvaient de construire antérieurement) avec leur soi-réel dans la classe. Il s’agit plutôt d’un sentiment d’échec par rapport à une réussite personnelle dans son travail, c’est-à-dire d’un sentiment de ne plus pouvoir réaliser ses objectifs. C’est pourquoi, ils éprouvent un « vide » dans leur travail

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Par conséquent, « l’amour de la discipline » qui construisait une vision positive du métier d’enseignant durant la période de la formation universitaire diminue. D’ailleurs selon l’expression de Baumard (2009 : 51) « Si on aime trop sa discipline, on risque d’être déçu ».

(« dépersonnalisation ») et beaucoup d’entre eux quittent ou pensent quitter le métier dès leurs premières années d’affectation74.

D’autres études relatives à l’épuisement professionnel, souvent évoqué en termes de burn out, attribuent aux enseignants les caractéristiques d’une fatigue non seulement physique (maladies cardiovasculaires, problèmes musculaires et vertébraux), mais aussi psychique75(dépression, détresse psychologique, épuisement professionnel). Plus précisément, selon Brunet (1996)76 « l’individu risque de développer des troubles psychiques et/ou physiques et, par conséquent, de sombrer dans l’épuisement professionnel. La profession enseignante est considérée comme étant un emploi à haut risque de stress et d’épuisement professionnel ». L’individu peut notamment épuiser son énergie dans le travail et il peut avoir tendance « à la déshumanisation de la relation, avec notamment une représentation dépersonnalisée et négative des élèves, des parents et collègues ».

Il est cependant significatif que, durant ces dernières années, un nombre élevé d’enseignants éprouvent un sentiment de solitude devant l’évolution des programmes et les nombreuses « réformes ». Notamment, l’institution n’aide pas suffisamment les enseignants à aménager ces « crises ». Plus précisément, Heutte (2007) attribue cette situation « chaotique » au niveau élevé de stress dans l’institution éducative et à la dégradation des relations entre ses acteurs. C’est qui est considéré comme le « burn

out institutionnel »77. Cet auteur précise que cette désaffectation et ce manque de

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Surtout, aux Etats-Unis, « la moitié seulement des diplômées d’un programme de formation d’enseignants accède à l’enseignement. De cette moitié, 50% quittent le métier au cours des cinq premières années de pratique, ce qui est un taux de perdition de 75% » (voir Lang dans Lessard et Tardif, 2004 : 3)

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D'après l'Agence européenne pour la Sécurité et la Santé au travail, « le stress survient lorsqu'il y a

déséquilibre entre la perception qu'une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu'elle a de ses propres ressources pour y faire face. Bien que le processus d'évaluation des contraintes et des ressources soit d'ordre psychologique, les effets du stress ne sont pas uniquement de nature psychologique. Il affecte également la santé physique, le bien-être et la productivité ». D’ailleurs, selon le modèle de Karasek (1979), il existe une corrélation négative entre la

demande psychologique et la latitude décisionnelle. Ce qui signifie qu’un niveau de demande psychologique élevée et une faible latitude décisionnelle peuvent augmenter le risque de troubles physiques et mentaux. Ce risque s’accroît au moment où la combinaison mentionnée est accompagnée d’un manque de soutien social au travail (défini par l’aide et la reconnaissance des collègues et des supérieurs hiérarchiques).

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Voir la recherche deDominique Cau Bareille, 2009.

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Deux autres études (Fotinos, 2005a, 2005b, voir l’article de Heutte 2007, « Le burnout

institutionnel : un chaos psychologique qui altère la créativité de tous les acteurs du système éducatif », http://jean.heutte.free.fr/spip.php?article82) soutenues par la Mutuelle générale de