Les défis

Plusieurs défis ont été rencontrés par les participants. Ces défis touchent essentiellement trois axes :  La contrainte du temps

 L’ampleur de la tâche

 La résistance au changement

5.6.2.1 La contrainte du temps

Bien qu’ils accordent de l’importance aux bienfaits qu’a une CAP sur leur équipe et aux résultats positifs qui en découlent, la période de temps que demandent la création et l’ancrage d’une CAP est vécue comme un défi par certains participants.

Au secondaire, on arrive, on commence et c’est beaucoup plus difficile parce qu’au secondaire, pour les gens, parler, ça paraît tout de suite comme une perte de temps. Alors la communauté d’apprentissage, il faut leur montrer que ça vaut la peine de prendre du temps pour échanger, pour partir plus riche, pour faire des actions plus signifiantes. Alors qu’eux aimeraient mieux avoir le « p’tit kit » puis repartir avec dans leur classe. [DA3 77;77]

Il peut s’agir du temps à investir d’abord pour atteindre ensuite un certain niveau d’efficacité par la suite.

Ça me rappelle combien le temps est important et combien on court tout le temps après notre queue finalement. C’est le dilemme efficacité versus temps investi. (…) La richesse de la communauté c’est très positif, mais le rapport au temps est moins positif mettons. [CP2 96,98]

Je crois que ça demande plus de temps et de travail pour la simple et unique raison… c’est qu’avant, je trouvais que j’étais le décideur. (…) fonctionner en travail d’équipe demande que tu te rencontres plus souvent, plus de réunions de discussion. C’est plus long. Je temps que je sauvais avant, la décision se prenait plus rapidement et ça me donnait le temps de faire mes autres choses. Asteure, je m’aperçois que je souffre peut- être de « réunionite » dans le sens que je dois rencontrer plusieurs groupes de discussion alors j’ai moins de temps pour accomplir les autres tâches qui viennent avec la direction (…) [DP1 98;98]

Ou la mise en place qui parait inutile, mais qui laissera entrevoir les résultats des discussions partagées et du travail collaboratif plus tard.

Au début je pense qu’ils ne savaient pas trop comment faire pour se parler et sur quoi ils devaient se parler. C’est quoi qu’ils devaient faire exactement lors de ces rencontres-là? On avait préalablement tout expliqué. Mais expliquer pis le vivre, c’est pas la même chose. Donc, juste le fait de se rencontrer, il y en a qui ne se connaissaient pas nécessairement. Pis il y a eux autres qui voyaient ça comme une perte de temps. Sauf que les rencontres, par la suite, où ils ont davantage parlé sur les différents éléments que j’ai énumérés tantôt, les évaluations communes, l’analyse des résultats, etc. Ils ont commencé à voir les résultats des élèves s’améliorer. Ça leur a donné le goût de continuer. [DP2 76;76]

5.6.2.2 L’ampleur de la tâche

Devenir membre d’une CAP implique un investissement de la part de ses membres, un engagement tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel. Cela requiert de se rendre disponible pour se retrouver, discuter, réfléchir, puis pour apprendre et mettre en place des méthodes pédagogiques adaptées aux besoins des élèves. Or, tout cela peut être vécu, dans un premier temps, comme une charge supplémentaire.

C’est en lien si je prends avec les enseignants de 2e année, on a fait une rencontre il y a trois semaines environ pour regarder tout le monde ensemble l’évaluation de fin d’année de 2e année pour avoir une lecture commune et pour l’aborder de la même façon, l’ensemble des enseignants. (…) au début de la rencontre il y a eu comme un vent de panique en voyant l’ampleur de la tâche pour les élèves (…). [DAP1 27;27] Euh la… Beaucoup beaucoup de détresse, han, psychologique, de fatigue. Donc, on rentre ça aussi là. Faut dire que ça freine certains élans mais le fait de travailler en équipe, ils s’aident aussi ces gens-là. Ils s’aident beaucoup… Ça évite probablement des burnout là à la maison pendant des semaines là… [D1 64;64]

5.6.2.3 La résistance au changement

La création d’une CAP n’attire pas tout le monde spontanément. Certains membres ne s’investissent pas complètement, se montrent frileux face à l’innovation, à la coopération ou à la remise en question de leurs pratiques professionnelles.

Je prends comme exemple une enseignante qui était venue nous voir par rapport à un petit garçon qui se masturbait en classe et dont les comportements avaient changé et tout ça, puis elle est venue nous demander conseil, qu’est-ce qu’elle devrait faire. Alors c’est sûr qu’après, ses interventions en classe étaient différentes que si elle n’avait pas obtenu de conseil. Mais il y a d’autres enseignantes, peu importe ce qu’on leur disait, par la force de leur expérience, pour eux ce qu’ils pensaient, c’était la seule bonne chose à faire. On ne peut pas tout changer. [PP1 42;42]

Ça fait dix ans que je suis dans l’école et on a jamais eu de conflit majeur entre les équipes de travail, les gens savent comment on fonctionne, on innove quand même. Il y en a qui sont un peu contre ça, mais quand le bateau passe, ils embarquent et on est capables d’avancer quand même. [DAS4 26;26]