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CHAPITRE 5 Résultats

5.1 Analyse des thèmes et sous-thèmes

5.3.2 Coopération

Le sous-thème de la coopération apparaît dans un grand nombre d’énoncés. En effet, il revêt une importance centrale et considérable dans le discours des participants et quatre notions particulièrement saillantes en émergent.

 L’alliance avec les collègues

 L’amélioration de la communication et du climat de travail

 L’engagement des membres et la répartition équitable des tâches  L’évaluation formative des collègues

5.3.2.1 Alliance avec les collègues

L’alliance avec les collègues dans un travail d’équipe où l’on s’aide et se soutient mutuellement dans la recherche de solutions. Cette alliance peut se faire sur le plan de la recherche de méthodes :

(…) À un moment donné, y’a une enseignante qui prend la parole et qui dit : « Aujourd’hui, je viens de constater que j’ai jamais enseigné la lecture à mes élèves. Dans le fond ce que j’ai enseigné, j’ai enseigné des mots, des lettres, mais j’ai jamais enseigné le plaisir de lire, de lire pour apprendre. » À partir de là, des témoignages des filles qui étaient à côté d’elle, elle va nommer quelqu’un en exemple, par exemple : « Lise, quand tu parles de la stratégie de la lecture interactive, je pense que j’aurais besoin de mettre ça dans ma classe. Est-ce que tu pourrais me guider là-dedans? Est- ce qu’il y a une possibilité qu’il y ait du modelage? » Y’a une autre enseignante qui dit : « Bin, écoute y’a pas de problème je vais me présenter à telle période. » Ce sont des échanges à ce niveau-là, quand y’a une réaction et un réinvestissement de la personne. [DA3 69;69]

Certains participants perçoivent l’alliance coopérative comme une proximité plus marquée grâce au partage, comme une forme de ressource affective :

(…) Dans ce cas-ci, le fait d’être dans le même bureau nous permet de partager nos réflexions, d’échanger ensemble, de se conseiller, de se partager des ressources comme des livres ou des contacts. On a chacune nos expériences qui peuvent être utiles à l’autre (…)[PP2 27;27]

D’autres identifient plutôt la relation d’aide dans la recherche commune de solutions. On travaille ensemble pour trouver une solution. Dans l’énoncé suivant, la direction n’est plus perçue comme un expert jugeant, mais comme un conseiller, un soutien dont l’objectif est partagé.

Autrefois (…) on était perçu comme des experts, les enseignants quand ils nous voyaient débarquer n’appréciaient pas toujours. Ils se disaient : « Bon, ils vont venir me dire quoi faire, ça m’tente pas! » Tandis que là, la relation est beaucoup plus ouverte. Les enseignants quand ils voient arriver le CP disent : « Ah t’as une idée? Tu viens m’accompagner? Tu viens me conseiller? » La porte est vraiment plus ouverte. Les relations, je vous dirais, même entre les services éducatifs et les enseignants, c’est perçu comme une relation d’aide. (…), tantôt je disais que j’suis un guide, un accompagnateur des CP, mais j’suis aussi un accompagnateur et une mesure de

soutien pour les directions d’école. Dans le fond, ils ne se gêneront pas pour me dire : « Écoute, j’ai une problématique avec telle chose. » On va être capable de regarder ça ensemble, de leur poser des questions. Y’a comme une gêne (…) en moins. Le fait de travailler en collaboration avec eux ça fait qu’on est pas détenteur de la réponse, on est là comme pour les amener à réfléchir pour la trouver et c’est beaucoup plus facile. La relation est harmonieuse et on travaille bien tout le monde ensemble. [DA3 74;74]

L’ « école devient une équipe » dont l’engagement de chacun est observable. Le travail d’équipe est soutenu par la direction.

Le fait de voir que j’ai de l’intérêt pour ce qu’ils [les enseignants] font, que je m’investis avec eux dans les projets de développement au lieu de dire « Allez-vous former, moi je regarde ça d’en haut, je vous libère et je paye. » Donc… et en m’informant quand ils font des choses particulières, en faisant un retour sur l’épreuve, je pense que ça aide à les mobiliser, effectivement [DAP1 37;37]

Dans le cadre de l’ « équipe-école », l’importance de l’échange entre enseignants, de même qu’entre enseignant et direction est également relevée. La hiérarchie devient horizontale. Le leadership est partagé.

Oui absolument. Il faut qu’il y ait un travail au niveau vertical autant que l’horizontal. Les deux sont aussi importants. [DP2 138;138]

5.3.2.2 Amélioration de la communication et du climat de travail

Les participants évoquent l’’amélioration de la communication et du climat de travail en tant que conséquences positives de la coopération.

D’une part, les participants expriment particulièrement le gain en qualité communicationnelle : le discours des enseignants est unifié et les décisions sont prises de concert, ce qui permet qu’une cohésion d’équipe s’instaure.

Peut-être plus le discours pédagogique et plus de collaboration entre enseignantes. Plus d’entraide entre enseignantes. Les gens ont tendance à parler, à avoir un discours davantage sur « combien t’as ciblé d’élèves à ta dernière évaluation toi? » « Moi j’en ai ciblé cinq. » Elles échangent sur ce qu’elles pourraient faire, même si c’est à l’extérieur d’une période d’équipe collaborative c’est un discours qui devient beaucoup plus commun. [DP4 102;102].

(…) on a fait une rencontre il y a trois semaines environ pour regarder tout le monde ensemble l’évaluation de fin d’année de 2e année pour avoir une lecture commune et pour l’aborder de la même façon, l’ensemble des enseignants. [DAP1 27;27]

Le fait que tout le monde marche ensemble ça fait qu’on est… on se tient ensemble. Donc quand quelqu’un dit quelque chose, y’a pas de prof qui va dire l’inverse deux jours après parce qu’on en a parlé, c’est une décision d’équipe. Si y’a pas de décision d’équipe, bien quelqu’un dit de quoi, l’autre dit autre chose, tu arrives en réunion et le monde fait plus s’engueuler que travailler ensemble, puis c’est quelque chose qu’on ne vit pas ici, nous autres. [ES2 33;33]

D’autre part, la mise en commun et une meilleure coordination font gagner du temps et de l’efficacité dans la résolution des problèmes et des difficultés.

C’est beaucoup plus facile la façon dont on gère les cas d’élèves. Tout est plus coordonné. On sauve du temps. On est capable, comme tout est informatisé, on est capable de revenir sur certaines décisions qu’on a prises pour s’aider pour en prendre d’autres pour des cas qui peuvent être similaires. Ça donne plus de temps pour faire autre chose, d’autres tâches… [DA2 76;76]

Sauver du temps aussi. Si tout le monde, on est huit à travailler sur un même élève en même temps, avec une même cohésion, c’est certain qu’on va sauver du temps puis les résultats vont être bonifiés. [PS2 DAS3 46;46]

Enfin, la coopération a une influence bénéfique sur le climat général de l’école, qui s’améliore. (…) le travail d’équipe crée des choses. Ça crée des relations et ça crée le climat, je pense. Sans travail conjoint, sans échange il n’y a pas de climat. C’est juste du silence et des lieux communs. (…)[PP2 28;29]

5.3.2.3 Engagement des membres et répartition équitable des tâches

L’engagement des membres de la CAP, quand elle est bien structurée, est perçu comme solide et ancré, voire source d’une certaine conscience de ce qu’amène cette forme d’apprentissage par et avec les collègues : l’apprentissage mutuel entre pairs se poursuit au-delà de la CAP.

Ce que je m’aperçois c’est que chaque communauté qu’on met en place, quand c’est bien structuré, quand les objectifs sont clairs, quand les gens connaissent bien leur rôle respectif dans ces communautés-là, quand il y a un engagement de chacun, je m’aperçois que ces personnes-là deviennent encore plus engagées, plus responsables dans leur propre milieu et après, même quand la communauté est terminée, ils vont travailler auprès de d’autres collègues, ils vont chercher les ressources. [CP1 71;71]

Cet engagement est soutenu par le fait que les opinions et idées de chacun sont prises en compte et que la hiérarchie ne domine pas tout : le pouvoir est redistribué à chacun.

Je pense que présentement dans mon rôle, je suis devenue plus comme un guide, un accompagnateur pour mes conseillers pédagogiques. Alors, je ne suis pas quelqu’un qui donne des ordres, des consignes, des façons de faire. J’trouve que je suis devenue comme un accompagnateur dans le sens que on s’assoit ensemble, on détermine des choses puis on va de l’avant. Donc, ça nous permet dans le fond de rééquilibrer les choses et de redonner le pouvoir à tout le monde. [DA3 74;74]

Les directions se donnent la possibilité de déléguer le suivi des élèves. Ceci amène un allègement des tâches et un gain de temps par une meilleure coordination, une meilleure répartition, et une meilleure préparation à la poursuite des objectifs communs.

Comme là, j’ai fait les tâches au département de Faune. On le fait tout le monde en équipe puis je laisse une bonne liberté aux gens de s’organiser entre eux, mais il y a du travail que je fais seul dans mon bureau. Les gens prennent part aux décisions puis après, c’est sans équivoque, c’est correct, ça passe bien. [DC1 29;29]

C’est sûr qu’il y a des bienfaits au travail d’équipe. Pour moi, ça me permet de déléguer aux professionnels, parce que si je rencontrais tous les élèves pour toutes les problématiques, je ne serais pas capable, je n’y arriverais pas. Donc ça allège le suivi que j’ai à faire avant les interventions, parce que avant qu’ils rentrent dans mon bureau, il y a toujours un professionnel qui va les voir (…). [DAS4 22;22]

La répartition du travail est jugée équitable par les membres.

Le rôle est plus d’égal à égal avec tous ceux qui vont participer à la communauté (…) avant je détenais un certain savoir comme conseiller pédagogique j’avais à transmettre aux équipes, à diffuser, j’parle d’il y a six ans. Maintenant c’est plus on veut travailler ensemble, on essaie de se définir des objectifs puis des démarches, comment est-ce qu’on va y arriver, quels résultats on prévoit et quels sont nos rôles dans cette démarche-là. C’est tout au niveau du questionnement que ça a changé. La façon d’approcher les choses, de construire des solutions ensemble. [CP1 68;68]

5.3.2.4 Évaluation formative des collègues

Par ailleurs, la coopération en CAP permet l’évaluation formative des collègues par les pairs, ce qui constitue un aspect très apprécié des participants en regard de la méthode d’évaluation sommative.

(…) notre perception de l’évaluation a changé du sommatif au formatif. Pis encore là, on a tellement de chemin à faire là. Mais c’est en évolution et je sens tellement une

ouverture de ce côté-là. Le partage entre les enseignants de leurs pratiques. Qu’est-ce qui marche bien dans les pratiques? Parfois même aller dans les classes des autres [DP1 109;109]

Ils parlent de leurs nouvelles pratiques quant à l’évaluation des enseignants qui ne se fait plus par une seule visite, mais plutôt par plusieurs visites éclairs :

L’évaluation est toujours présente, mais c’est plus dans un climat de collaboration et d’accompagnement. On fait beaucoup plus de visites éclair (…) d’une heure où je m’assois et je regarde ce qui se passe et je fais un rapport avec une pré-rencontre, une post-rencontre sur une durée de cinq ans. On va plus avec un plan de croissance professionnelle.[DP1 112;112]

Les craintes liées à l’évaluation de la pratique sont dépassées à travers l’expérience de la CAP. Le conseiller pédagogique est ici perçu comme une ressource aidante, un guide (et non plus un expert qui juge) qui peut aider à donner du sens aux actions professionnelles par la valorisation de chacun.

Moi j’pense que les enseignants ont souvent senti qu’ils devaient avoir la bonne réponse du premier coup. (…) faut montrer que, dans le fond, les erreurs sont des petites erreurs, parce qu’on sait bien que ça se répare très facilement, qu’on peut faire des choses puis que les p’tites erreurs du début peuvent être corrigées et améliorées, ça fait partie de l’apprentissage, que maintenant ils ne sont pas juste des déverseurs de savoirs, mais qu’ils travaillent auprès de l’élève et qu’ils cherchent à les faire grandir eux autres aussi, qu’ils participent à l’apprentissage des élèves, ça c’est difficile(…) [EP1 81;81]

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