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La deuxième étape de la réaction concerne la cycloaddition entre une oléfine et le dipôle 1,3 préalablement formé lors de l’activation par un acide de Lewis. Ce processus peut se faire à priori soit de manière concertée avec la formation simultanée des liaisons C-C et C-N soit en deux étapes.

3. a. Approche orbitalaire

L’oléfine réagissant en tant que nucléophile et le dipôle 1,3 en tant qu’électrophile, nous nous limiterons à l’étude des interactions HOMO (oléfine)-LUMO (dipôle (III-s)). Nous remarquons que la LUMO de l’intermédiaire (III-s) représentée sur la Figure 18 est quasi exclusivement développée sur l’atome de carbone du dipôle 1,3 (coefficient quasi nul sur l’atome d’azote). De plus, nous pouvons remarquer que la HOMO du

63 Ceci est confirmé par la deuxième partie du profil réactionnel via les calculs théoriques réalisés pour la cycloaddition [3+2] avec méthylènecyclobutane.

méthylènecyclobutane présente le plus gros coefficient sur l’atome de carbone exocyclique. Cette réaction conduit à un seul et unique produit, résultant du recouvrement maximal des orbitales; elle est régiosélective. Ainsi, la cycloaddition se fait alors de manière séquentielle; la liaison Cdipôle 1,3-Cexocyclique est la première à se former.

Figure 18 : LUMO du dipôle 1,3 (III-s) et HOMO du méthylènecyclobutane

Nous nous sommes ensuite concentrés sur le profil réactionnel de la cycloaddition [3+2] à partir du dipôle 1,3 préalablement formé.

3. b. Profil réactionnel

La deuxième partie du profil réactionnel de la réaction a été calculée en prenant comme oléfine modèle le méthylènecyclobutane, comme représenté sur la Figure 19.

La formation de la liaison C-C lors du passage de l’intermédiaire (IV-s) au dérivé (V-s) au cours de laquelle la molécule d’éther diéthylique est remplacée par le méthylènecyclobutane nécessite l’apport de 9,0 kcal/mol. La fermeture du cycle à cinq chaînons (passage de (V-s) à (VI-s)) se fait spontanément, sans aucune barrière énergétique à franchir. La décomplexation de la molécule de BF3 sur l’atome d’azote s’accompagne de la complexation avec la molécule d’éther diéthylique; elle permet d’obtenir le cycloadduit (VII-s) avec un gain de 0,8 kcal/mol.

Nous remarquons sur ce profil réactionnel que le gain énergétique global de la cycloaddition est relativement important (42,5 kcal/mol). Ceci peut s’expliquer par la formation des deux nouvelles liaisons C-C et C-N s’accompagnant de la disparition des tensions importantes liées à la double liaison exocyclique.

Ainsi, l’étape de cycloaddition constitue la force motrice de la réaction alors que l’étape cinétiquement déterminante est la formation du dipôle 1,3 (III-s). L’étude mécanistique de la réaction par des calculs DFT a permis de mettre en évidence la formation d’un intermédiaire dipôlaire 1,3. Le passage par un intermédiaire de type carbocation restreint fortement les possibilités en terme de transfert de chiralité de l’aziridine vers le cycloadduit.

Conclusion

Les aziridines sont des petites molécules très réactives pouvant notamment être engagées dans des réactions de cycloaddition afin de synthétiser des azaspiroalcanes.

Lors de cette étude méthodologique, nous avons pu mettre en évidence le rôle crucial joué par le trifluorure de bore en tant qu’acide de Lewis dans la cycloaddition [3+2] entre une aziridine N-protégée et une oléfine exocyclique (Schéma 61).

Schéma 61 : Synthèse d’azaspiroalcanes par cycloaddition [3+2]

Nous nous sommes intéressés à la tolérance de cette cycloaddition vis-à-vis du groupe protecteur présent sur l’atome d’azote de l’aziridine. Les rendements se sont avérés être du même ordre de grandeur que le substituant soit un groupe sulfonyle ou un sulfamoyle. Les cycloadduits N-Tces ayant pu être déprotégés dans des conditions douces avec des rendements corrects, nous avons poursuivi l’étude avec des N-(Tces) aziridines.

Nous avons ensuite étudié les limites de cette réaction en faisant varier la nature de l’alcène exocyclique mais aussi en engageant des aziridines diversement substituées afin d’obtenir une librairie variée de composés spiro (Figure 20). La faible disponibilité des oléfines exocycliques ainsi que les difficultés de préparation des N-(Tces) aziridines ont considérablement limité le champ d’application. Toutefois, il est à noter que cette réaction est compatible avec des N-(sulfamoyl) aziridines bicycliques, permettant ainsi d’accéder rapidement à des squelettes tricycliques originaux de type spiro. De plus, nous avons montré qu’il était possible d’étendre cette réactivité aux N-(Tces) azétidines, conduisant alors à des azaspiroalcanes [5.n].

Figure 20 : Diversité des composés spiro synthétisés

Par ailleurs, nous avons essayé de mettre au point une version diastéréosélective de la réaction de cycloaddition [3+2] en exploitant la présence de centres asymétriques sur le groupe protecteur de l’atome d’azote de l’aziridine (atomes de carbone ou de soufre). À ce jour, aucun transfert de chiralité n’a pu être réalisé avec succès à partir de

N-(sulfamoyl) aziridines. De plus, les N-(sulfonimidoyl) aziridines semblent être incompatibles avec la réaction de cycloaddition étudiée (Schéma 62).

Schéma 62 : Cycloaddition [3+2] à partir de N-(sulfonimidoyl) aziridines

Enfin, l’étude théorique nous a permis d’approfondir nos connaissances sur cette réaction et d’expliquer un certain nombre de résultats expérimentaux assez surprenants à première vue. De plus, les calculs DFT ont montré que cette cycloaddition se faisait en deux temps : l’ouverture de l’aziridine conduit tout d’abord à l’obtention d’un intermédiaire dipolaire 1,3 plan puis la cycloaddition [3+2] avec l’oléfine a lieu (Figure 21). L’étape cinétiquement déterminante de la réaction s’est avérée être la formation du dipôle 1,3 alors que l’étape de fermeture du cycle à cinq chaînons constitue la force motrice de la réaction. Le passage par un intermédiaire plan de type carbocation limite considérablement les possibilités de contrôle de la stéréosélectivité de la réaction via des transferts de chiralité à partir de l’aziridine de départ.

Figure 21 : Profil réactionnel de la réaction de cycloaddition [3+2] à partir de la N-(tosyl)phénylaziridine

C

HAPITRE

2

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Synthèse totale de la pactamycine et

d’analogues

Structure et Propriétés biologiques