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CHAPITRE II : ETAT DE L’ART SUR LA GESTION DES

II- 1-3 Cycles de gestion des connaissances

(Reix 2004) distingue cinq qualités applicables aux connaissances: leur obtention par un apprentissage ou un raisonnement, leur validation par une épreuve ou par l'action critique de l'entité qui la détient, leur insertion dans un ensemble caractéristique de connaissances maîtrisées par une entité, leur stabilité, enfin leur caractère modifiable. Le mode de construction de la connaissance la rend fragile. Elle cherche sans cesse des preuves qui la justifient ou qui la renouvellent. Cette approche illustre la double dimension de la connaissance d'une part dans son processus de production et d'autre part en tant que socle de savoirs. Cette dualité de la connaissance introduit son caractère cyclique: les nouvelles connaissances ont besoin de connaissances pour être produites. Nous aborderons successivement les cycles de gestion des connaissance proposés par (Grundstein 2000a), (Nonaka et Takeuchi 1995) puis (Ermine 2007a).

A Le cycle de gestion des connaissances de Grunstein

(Grundstein 2000a) a identifié quatre étapes dans le cycle de gestion et de capitalisation des connaissances: repérer, préserver, valoriser, actualiser. Elles sont présentées dans la Figure II-1. Ce cycle est lui-même managé. Les connaissances sont valorisées par l'action. L'action peut conduire à une mise à jour des connaissances.

Figure II-1: cycle de capitalisation des connaissances (Grundstein 2000a)

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(Reix 2004; Rasovska 2006) mettent en exergue l'ontologie comme condition du développement de la gestion des connaissances. Les quatre étapes décrites du cycle bénéficient de cette dynamique d'une vision professionnelle commune et partagée. Ce cycle ne traite pas de la dynamique de création des savoirs tacites et explicites au sein d'une organisation comme le proposent (Nonaka et Takeuchi 1995) ni des interactions de la gestion des connaissances avec le monde extérieur développées dans (Ermine 2007a).

B L'approche japonaise de la gestion des connaissances

La déclinaison des connaissances tacites et explicites dans une organisation conduit à identifier quatre natures de transformation des connaissances (Nonaka et Takeuchi 1995). La Figure II-2 reprend ces quatre modes de transformation en les associant aux structures d'acteurs successivement concernées à savoir les individus, les groupes et l'organisation elle-même. Ils sont décrits ci-dessous:

De tacite en tacite par la socialisation: l'interaction entre individus provoque ce transfert des connaissances tacites comme les tours de main. Elle se transmet de visu dans le cadre d'un apprentissage. La personne qui recueille la connaissance la transforme (Hatchuel, Le Masson et al. 2002) par le jeu des interactions avec les personnes qui la détiennent. La connaissance est à la fois partagée et développée (Nonaka 1994). A ce stade, elle est une matière "molle".

De tacite en explicite par l'externalisation: les groupes formalisent une partie des connaissances tacites des individus pour les évaluer et les transmettre sous forme de connaissances explicites. Elles s'expriment avec différentes formes: site Web, périodique, brochure, etc.

D'explicite en explicite par la diffusion et la combinaison: les groupes reconstruisent et enrichissent des connaissances explicites.

D'explicite en tacite par l'internalisation: l'individu intègre un certain nombre de savoir-faire au contact des autres individus et des groupes de l'organisation.

Figure II-2: spirale de conversion de connaissances ou modèle SECI (Nonaka et Takeuchi 1995)

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Les savoirs tacites et explicites se distribuent au sein d'une organisation. Ils sont complémentaires et se nourrissent mutuellement. La connaissance tacite est portée par les individus. Si l'information structure l'organisation, plus précisément la connaissance tacite d'un individu légitime son appartenance à cette organisation. L'organisation fait émerger la connaissance explicite et la structure. Ces connaissances fondent l'une des composantes de sa richesse. (Nonaka et Toyama 2003) formalisent le processus de création de connaissances comme une démarche volontaire de dépassement des contradictions portées par les individus, une organisation et son environnement. La nouvelle connaissance est l'aboutissement d'un processus dynamique de synthèse. L'un des reproches qui est fait par (Gourlay 2006) à ce modèle est de majorer l'importance des dirigeants dans la création des connaissances. (Nonaka 1994) propose pourtant un "middle-up-down-management" qui donne sa place à chaque acteur dans l’entreprise. Au niveau des moyens à déployer pour chacun des quatre modes de transformation des connaissances, (Nonaka et Konno 1998) ont signalé l'importance d'une plateforme de partage: le "Ba"55. Le "Ba" est contextuel. Il comprend un temps, un espace et des acteurs qui lui sont spécifiques. Un langage commun y est également nécessaire pour échanger. Cet espace est physique comme un bureau ou bien virtuel comme un forum. Il est associé également à une notion de projet. Le "good Ba" est animé d'une ambiance propice aux échanges. Les interactions y sont dynamiques et positives (Fayard 2007). Des récompenses sont attribuées aux acteurs les plus engagés dans la gestion des connaissances. Le système fonctionne également sur le système de don et de contre-don c'est-à-dire qu'il met en valeur la réciprocité. Ce concept de réciprocité a été introduit par l'ethnologue français Marcel Mauss. Ces échanges créent du lien social. Ils supposent de la confiance en soi et dans les autres. La confiance en soi permet d'affronter le regard des autres par rapport à la qualité de ce que l'on produit et expose. La confiance dans les autres assure le partage des connaissances sans avoir peur de perdre une parcelle de son identité. En effet, le modèle SECI met en évidence qu'une partie de l'identité personnelle d'un individu est dépouillée au profit de son appartenance à l'identité collective.

Même si le monde extérieur stimule la création de la connaissance au sein d'une organisation (Nonaka 1994; Nonaka et Toyama 2003), la spirale de Nonaka et Takeuchi ne distingue pas les connaissances externes des connaissances internes. Une connaissance externe n'a de sens pour une organisation que si celle-ci a les compétences requises pour l'utiliser. Dans ce cas, elle est directement internalisée et participe au capital de connaissances de l'organisation. Nous allons voir qu'il en est différemment dans le modèle de la marguerite.

C Le modèle de la marguerite de Jean-Louis Ermine

Pour sa part, Jean-Louis Ermine propose un modèle dit de la marguerite (Ermine 2007a) dans la Figure II-3. Cette marguerite comprend quatre pétales. Chaque pétale est lié à un

55

"Le "Ba" est un idéogramme dont la partie gauche est assimilée à la terre, à l'eau bouillante ou à ce qui soulève et dont la partie droite signifie ce qui rend possible" d'après Fayard, P. (2007). La voie japonaise de la création du savoir.

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processus. Deux processus sont endogènes à l'organisation et deux interagissent avec l'extérieur.

Figure II-3 : le modèle de la marguerite d'après (Ermine 2007b)

Les deux processus endogènes recoupent les quatre modes de transformation présentés ci-dessus dans la spirale de conversion des connaissances de (Nonaka et Takeuchi 1995):

Le premier processus porte sur la capitalisation et le partage des connaissances. Cette étape part des savoirs accumulés dans l'organisation. Elle constitue la première étape de la création de la connaissance. Cette phase est celle de l'explicitation des connaissances tacites et de leur partage.

Le processus de création des connaissances et d'apprentissage recoupe trois modes de transformation proposés dans le modèle SECI.

Les deux autres processus sont les suivants:

Ce processus "interne" est initié par l'organisation. Il traite de ses interactions avec l'environnement extérieur. La veille technologique et l'intelligence économique recherchent extra-muros les connaissances utiles à l'organisation.

Le dernier processus "externe" est davantage subi. Il est spécifique à l'interaction de l'environnement opérationnel avec l'organisation comme dans le cas d'une entreprise avec ses clients, ses fournisseurs et l'administration. Il illustre la capacité de l'organisation à s'adapter à son environnement.

Ces quatre processus alimentent le patrimoine des connaissances. Celui-ci peut être évalué.

II-1-4 Dimension humaine ou technologique de la gestion des