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IV. Croyance et lien social, une idylle infinie

3)   Croire en l'incroyable

Entre la croyance et délire, la frontière semble parfois floue. Nous disions précédemment que le contexte culturel est nécessairement à prendre en compte pour déterminer plus ou moins dans quel registre nous nous situons, mais cela n’est évidemment pas suffisant. Au-delà du contexte, c’est la manière dont le sujet se positionnera dans son discours qui orientera sur la nature de sa croyance mais également sur son organisation structurale.

Croyances névrotiques, le pire n’est pas toujours sûr

Nous l’avons vu, la croyance, rassure le sujet en lui donnant l’étau dans lequel il peut fixer son angoisse. Devant l'angoisse existentielle et la réalité de la mort, le sentiment religieux et la nécessité de l'existence d'un dieu ou d’esprits protecteurs et ordonnateurs du monde peuvent constituer pour le sujet une solution satisfaisante. C'est une mise en ordre collective du monde pour le bien être de ceux qui y adhèrent. L'individu y adhère par conviction ou par éducation. De nos jours la croyance ne se limite plus au domaine de la magie ou de la religion, la science est devenue pour certains le nouveau modèle auquel se référer. Les énoncés produits par le discours scientifique entretiennent l’illusion d’une condition plus enviable. Et les nouveaux rites proclamés par les médecines alternatives laissent envisager au sujet une fin plus tolérable que celle redoutée.

Dans la névrose, le doute est manifeste, c’est pourquoi J. Lacan parle d’une « position

d’heureuse incertitude »304, du sujet névrosé. Celui-ci vivant sous le régime de la croyance et se complaisant dans l’illusion d’une existence où les réalités trop menaçantes sont tenues à distance par des mécanismes de doutes et de questionnements. S. Freud s’est très tôt intéressé à la question de la croyance, notamment concernant la religion et son lien avec la névrose. Dans Totem et Tabou il nous livre une interprétation saisissante de la fonction de la religion, mise en corrélation avec les origines de la civilisation. Selon lui, la religion est à considérer comme une névrose universelle. En effet il faut admettre qu’il n’y a pas plus obsessionnel que la religion, puisque s’originant du pêché et de la culpabilité, elle se manifeste sous forme d’actes compulsifs pris sous le joug d’une pensée toute puissante.

Les rituels et les prières ont alors une fonction rassurante et déculpabilisante permettant de conjurer l’angoisse inhérente au sujet. Par le refoulement de certaines pulsions et désirs, elle assure une cohésion communautaire puisqu’elle permet de vivre les choses collectivement et sous la protection d’un discours reconnu et respecté. De la même façon, S. Freud avançait que la névrose obsessionnelle est une religion privée, dans le sens où elle se joue dans l’intimité de l’inconscient. C’est au sujet d’en délimiter lui-même ses propres normes, « construite[s] dans le dialogue du sujet avec l’Autre »305.

Tandis que le névrosé se fait le sujet du doute, dans la psychose il en va d’un tout autre fonctionnement. La certitude étant l’alliée du psychotique, celui-ci tentera de mettre en forme la réalité selon les moyens dont il dispose.

Croyances psychotiques, le délire est mon salut

Dans le Séminaire III – Les Psychoses306, J. Lacan s’interroge que la question de la croyance chez le sujet psychotique. Selon lui, dans la psychose le sujet se positionnera à partir d’une certitude inébranlable, elle sera « radicale »307. Néanmoins, cette certitude ne se situe pas tant du côté de la réalité des phénomènes qui l’assiègent, mais elle se focalise plutôt sur le fait que le psychotique se sent directement concerné par ce qu’il perçoit :

« en vérité, le fou, il n’y croit pas, à la réalité de son hallucination […] Il en admet même jusqu’à un certain point l’irréalité. Mais contrairement au sujet normal pour qui la réalité vient dans son assiette, il a une certitude, qui est que ce dont il s’agit - de l’hallucination à l’interprétation - le concerne »308.

J. Lacan note le caractère « élémentaire »309 de ces phénomènes qu’il range sous la dénomination de « croyance délirante »310.

305 Marie-Jean SAURET, « Topologie, religion, psychanalyse », Psychanalyse, vol. 11, no. 1, 2008.

Disponible sur <https://www.cairn.info/>, consulté en mai 2017.

306 Jacques LACAN, Le Séminaire Livre III - Les psychoses, op cit., 307 Ibid. p.88.

308 Ibid. p.87-88. 309 Ibid. p.88. 310 Ibid.

La linguistique lacanienne nous enseigne que le propre du signifiant (S1) est de produire un effet de signification en s’articulant à un autre signifiant (S2) et ainsi de suite, ce qui produit une chaîne signifiante et donc un discours. Dans la psychose, la certitude est une signification qui advient dans le réel mais ne renvoie à rien, « c’est une signification qui

renvoie avant tout à la signification en tant que telle »311. C’est cela qui donne à cette certitude son caractère indiscutable, radical, dans le sens où elle ne rentre pas dans une logique de dialectique. J. Lacan dira que le psychotique utilise le langage d’une façon particulière, propre à lui et que le sens lui semble toujours se dérober. Cette certitude peut prendre des formes d’expressions diverses, et notamment conduire à la formation d’un discours délirant. Ainsi Michel Laxenaire nous dit que « la croyance pose la certitude

comme un horizon qui toujours se dérobe. Elle ne devient délirante que lorsque cet objet, cessant de se dérober, se pose comme existant, la mettant par là en certitude pseudo- scientifique »312.

L’origine du mot « délirer », remonte au 16ème siècle, et nous vient du latin délirare. Composé du dérivé du latin lira, voulant dire sillon, délirera au sens propre signifie « sortir du sillon ». Ce mot était à l'époque employé pour parler des bœufs qui en traçant le sillon s'écartaient des raies déjà tracées. Par la suite ce terme a été adapté à l'esprit.

À partir du cas du Président Schreber, S. Freud conceptualise le délire comme un mécanisme de défense du sujet. Selon lui, face au morcellement du Moi et à la perte de signification du monde extérieur, le Moi va créer une défense qui consistera à rebâtir un monde plus tolérable. Le délire vient se loger à cette place, venant colmater la brèche dans la réalité du sujet.

« En ce qui concerne les délires, quelques analyses nous ont appris que la folie est employée comme une pièce qu’on colle là où initialement s’était produit une faille dans la relation du Moi au monde extérieur »313.

311 Ibid. p.43

312 Michel LAXENAIRE, « Croyance et psychologie des foules », Revue de psychothérapie

psychanalytique de groupe, n° 49, 2007/2. Disponible sur <https://www.cairn.info/>, consulté en juin

2014.

313 Sigmund FREUD, Névrose, psychose et perversion, Éd. Presses Universitaires de France, Paris,

Pour reprendre le cas princeps, la psychose de Schreber décompense lorsque celui-ci est nommé en tant que Président de chambre à la cour d’appel auprès du tribunal de Dresde. Cette nomination le convoque à une place symbolique dont la référence lui fait défaut d’où l’installation d’un délire qui s’organisera en plusieurs temps : d’abord autour du thème « devenir femme », à partir de l’idée « que, tout de même, ce doit être une chose

singulièrement belle que d’être une femme en train de subir l’accouplement »314. Il en vient ensuite à considérer son corps comme lieu de jouissance de Dieu et finira par se conforter dans l’idée « d’être la femme de Dieu ». Véronique Villier écrit à son propos que :

« Cette rencontre avec un signifiant énigmatique (celui de la procréation), précipite Schreber dans un chaos sans nom, d’où émerge le nom de Dieu, un père imaginaire monstrueux, à partir duquel il tentera de faire tenir un monde qui a volé en éclat. Cette sensation de fin du monde, point vif de son délire, témoigne de la projection de cette catastrophe intérieure. Par son délire, le paranoïaque va donc tenter de réédifier un monde tel qu’il puisse « de nouveau y vivre »315.

S. Freud nous informe au sujet de Schreber que « le président du sénat Schreber trouva la

guérison lorsqu’il se résolut à abandonner sa résistance vis-à-vis de la castration et à se plier au rôle féminin que Dieu lui avait réservé »316. C’est dans cet esprit que S. Freud

pose le délire comme tentative d’auto-guérison :

« et le paranoïaque rebâtit l’univers, non pas à la vérité plus splendide, mais du moins tel qu’il puisse de nouveau y vivre. Il le rebâtit au moyen de son travail délirant. Ce que nous prenons pour une production morbide, la formation du délire, est en réalité une tentative de guérison, une reconstruction »317.

Ces considérations permettent à la psychose de ne plus être perçue comme un déficit, mais plutôt comme l’aspiration vers une reconstruction subjective.

314 Daniel Paul SCHREBER, Mémoires d’un névropathe, Éd. Seuil, Coll. Essais, Paris, 1975, p.63-64 315 Véronique VILLIER, « Le cas Schreber. Bref aperçu sur la logique et la fonction du délire ».

Disponible sur <https://psychanalyse-map.org/>, consulté en juin 2014.

316 Sigmund FREUD, Le président Schreber, un cas de paranoïa, Éd. Payot, Coll. Petite bibliothèque,

Paris, 2011.

Lacan reprend le cas de Schreber pour développer son concept de forclusion. Bien qu’il admette la fonction d’auto-guérison du délire, il précise que le sujet psychotique tente de construire par le délire une signification qui ne lui serait pas garantie par une filiation symbolique. Lorsque le sujet décompense, un bouleversement advient dans l’usage des signifiants, donnant lieu à une autonomie du signifiant. Le signifiant et le signifié viendraient alors se stabiliser dans une métaphore délirante. Ainsi, le délire aurait une fonction de stabilisation dans la psychose puisqu’il viendrait lier le désordre structural du sujet. Car dans la psychose, ce qui échoue se joue au niveau symbolique. Le Nom-du-père ayant une fonction de nomination et de conjonction entre le réel et le symbolique, s’il se trouve forclos, alors les trois dimensions que sont le réel, le symbolique et l’imaginaire ne peuvent se nouer selon le modèle borroméen que nous évoquions précédemment. Le sujet devra user du sinthome pour suppléer à la carence paternelle et réinventer son propre nouage.

Dans le cas de Schreber, il manque un opérateur symbolique qui viendrait occuper le vide laissé par l’absence d’un signifiant dont la fonction à travers le langage le soutiendrait et le situerait dans une position sexuée. L’impossibilité radicale et structurale de répondre à la question fondamentale « qui suis-je ? » le mène à compenser l’absence de ce signifiant primordial par une construction imaginaire. Celle-ci tentera de répondre à l’énigme de son existence et lui procurera un ordre nouvellement établi dans lequel il puisse s’inscrire durablement. Schreber en témoigne lui-même dans ses Mémoires, où il manifeste non pas la véracité de ces phénomènes, mais leur caractère salvateur en ce qui le concerne subjectivement :

« Je serais curieux qu’on me montre quelqu’un qui placé devant l’alternative soit de devenir fou en conservant son habitus masculin, soit de devenir femme mais saine d’esprit, n’opterait pas pour la deuxième solution »318.

Pour J. Lacan, le délire a une fonction d’objet a, en ce sens que le sujet psychotique entretient avec son délire le même rapport que le névrosé avec son objet dans le fantasme. Le délire en tant que remplacement d’une réalité insupportable par une autre plus acceptable est à considérer comme une reconstruction individuelle et donc subjective d’un système de relations avec une réalité éclatée. Le délire est donc intimement lié au sujet, c’est pourquoi on parle de sa singularité.

Dans un autre registre, J. Lacan évoquait également le délire commun, en tant que construction délirante partagée par un ensemble. Il ne s’agit plus alors de la question de la structure du sujet, mais de la structure d’un discours social auquel le sujet aura le choix d’adhérer ou pas. Ces phénomènes peuvent provoquer un effet de masse, ou tous les individus collent alors à ce discours sans réelle distinction subjective.

Rétrécisseurs de sexes, exorcisme et temple du peuple : l’au-delà de la croyance

Dans le langage courant, nous disons de quelqu’un qu’il est fou, lorsqu’il ne partage pas le sens commun. Et nous pouvons considérer que le sens est commun à partir du moment où il est partagé par un nombre suffisant d’individus à l’intérieur d’un ensemble donné. Cet ensemble constituant un groupe, une communauté, voire une société. Alors que penser quand l’ensemble se rallie à un discours aux allures de délire ? Lorsque l’idée est partagée et admise sans pour autant qu’elle semble rationnelle ou qu’elle soit soutenue par un ordre déjà établi comme la religion ? Ces croyances partagées aussi irrationnelles qu’elles puissent paraître existent dans chaque société et participent à lier certains individus entre eux, à créer du lien.

Le premier exemple que nous proposerons illustre ce que parfois nous nommons « délire populaire ». Il s’agit d’un fait qui marqua l’Afrique dans les années 1990.

En été 1997, apparaît dans les rues de Dakar des rétrécisseurs de sexe. Ce phénomène va envahir tous les esprits en peu de temps et se répandre au-delà des frontières du pays. En tout dix-sept pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale seront touchés. La scène se déroule toujours de la même façon : un individu après être entré en contact physique avec un inconnu (poignée de main, bousculade, etc.), croit sentir son sexe rétrécir jusqu’à disparaître complètement. La supposée victime crie alors au vol et répand la panique sur les passants qui se jettent alors sur le présumé sorcier voleur de sexe afin de le rouer de coup jusqu’à la mort. Ce tragique phénomène entraînera la mort d’une dizaine d’Africains. Le vol de sexe en Afrique rappelle le syndrome culturel koro, répandu en Asie, qui désigne une sensation de rétractation du pénis dans l’abdomen, associée à une angoisse de mort.

En Afrique subsaharienne, la sorcellerie se focalise traditionnellement sur la sexualité. Généralement du côté de la virilité masculine et la fécondité féminine. Le sexe représente le symbole du potentiel vital, donc en volant le sexe, c’est la vitalité des individus qui est menacée et ainsi la communauté toute entière. En 1965, H. Collomb et al. écrivent que la fonction sexuelle du mâle doit être correctement assumée car, selon un fondement religieux, elle vise un double but : assurer la pérennité de l’espèce ainsi que la satisfaction mutuelle des deux partenaires. L’impuissance poserait donc un problème non seulement pour l’individu car il y a insuffisance de plaisir et de devoir, mais également pour le groupe car le sujet deviendrait alors inutile pour la reproduction de l’espèce et parce que l’impuissance est une cause de divorce et donc une menace pour la cohésion du groupe. Nous comprenons ainsi qu’un homme ne puisse accepter que l’on s’en prenne à ses attributs phalliques.

La seule impuissance qui puisse se raconter est celle qui provient d’un xala. Le xala est un sort souvent jeté par une femme déçue et qui se dit trahie par un homme ayant épousé une autre femme. Cela peut également être l’œuvre d’un ex-amant ou d’une femme jalouse. Cette impuissance est sociale, environnementale et répond du collectif. Le réel de la castration se manifeste au travers de la croyance, mais peut être aussitôt pris en charge par la fonction symbolique de celle-ci et permettre au sujet de le traiter sans difficulté.

Prenant leurs sources dans des représentations culturelles partagées, ces phénomènes, au- delà de leur étrangeté, constituent des faits socialement admis. Ils se répandent à travers le discours de la croyance qui touche alors la communauté toute entière. Il ne s’agit pas ici d’une construction subjective du sujet, mais de son adhésion à un discours social établi et dont la véracité n’interroge pas, celui-ci témoignant d’un ordre symbolique porteur de sens et d’autorité. La folie apparaît souvent dans le regard de celui qui l’observe. Nos représentations occidentales ont souvent du mal à se détacher du prisme culturel à travers lequel nous observons l’autre. Ne devrions-nous pas pourtant nous interroger sur la façon dont certains Sénégalais, Nivats ou Amazoniens perçoivent nos styles vestimentaires, nos robots ménagers high-tech, nos sites de rencontres ou la popularité des émissions de télé- réalité ? De plus, dans notre culture, outre l’excès de modernité, les exemples d’irrationalité ne manquent pas. Sorciers, voyants, esprits, démons, etc. font partie de notre patrimoine et nombreux sont ceux qui s’y réfèrent encore. Les médiums à qui l’on attribue des pouvoirs d’interprétation et de divination connaissent un franc succès de nos jours, et nombreux sont les individus qui se rendent chez ces nouveaux thérapeutes de l’âme pour saisir les mystères de leur existence.

À la différence des sociétés traditionnelles qui interrogent les voyants dans l’espoir de se rassurer sur un avenir prometteur, les sujets occidentaux vont plutôt consulter ces orateurs pour répondre à des questions sur leur passé. Généralement, la motivation est à chercher du côté d’un traumatisme antérieur que le sujet tente de rectifier par la mise en mot de ses émotions et de ses actes du quotidien. Les solutions préfabriquées que vendent ces pratiques permettent au sujet de faire l’économie d’un travail subjectif. En ce qui concerne les interrogations liées à l’avenir, le discours de la science semble encore plus prometteur. L’ouvrage d’Anne Juranville, Figures de la possession, s’intéresse particulièrement à ce retour de l’irrationnel avec ce goût pour l’occultisme et la magie, le développement des sectes, de la parapsychologie et du néo-spiritisme. Ce retour vers le sacré se rencontre dans la clinique contemporaine. C’est ce que nous verrons dans notre partie clinique, au travers de plusieurs cas dont l’intérêt pour des pratiques que nous qualifieront de post- traditionnelles témoigne des réminiscences d’un sacré oublié, que le sujet tente de faire exister à nouveau face au discours délétère de la science et des nouvelles technologies. Un exemple de folie partagée mérite que l’on s’y intéresse. En 1974, le révérend Jim Jones fonde la communauté du Temple du soleil et réunit autour de sa foi environ 900 adeptes. Se disant l’incarnation de figures telles que Jésus, Bouddha, Lénine et bien d’autres, il promet d’accomplir des miracles et déploie rapidement un discours insensé prenant appui sur la religion et sur une revendication d’égalité et de justice sociale. En 1977 il convainc ses adeptes de le suivre au Guyana où il crée la communauté Jonestown au cœur de la jungle. Un an plus tard, suite aux demandes des familles, le gouvernement américain envoie le député Léo Ryan ainsi qu’un groupe de journalistes sur place afin de s’assurer que les membres ne sont pas détenus contre leur gré. Cette rencontre se solde par une émeute où le député et d’autres personnes se font tuer. Une fois le calme rétabli, sachant que la communauté ne survivra pas à cette tuerie, le révérend J. Jones donne l’ordre à tous ses adeptes d’ingurgiter un mélange de cyanure et de somnifères dans l’idée d’accomplir un suicide collectif. Si certains opposants se font abattre, la majorité boit volontairement cette potion mortelle. Les 908 membres de la communauté dont 300 enfants meurent ce