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3. RESULTATS

3.3 Criblage préliminaire des extraits bruts

Tous les extraits préparés (DCM, MeOH s.s., EtOH s.s. et n-BuOH s.s.) ont été soumis à différents tests biologiques, chimiques et biochimiques, dans le but d’orienter nos recherches. Les tests effectués ont tous été réalisés sur CCM. Ce support présente l’avantage de permettre la solubilisation des échantillons dans le solvant le plus approprié, contrairement aux tests en solution souvent réalisés en milieu aqueux. De plus, grâce à leur facilité d’emploi, les tests sur CCM peuvent être utilisés en routine, de manière à effectuer un fractionnement bioguidé. La préparation des tests est détaillée dans les chapitres 5.5.3 à 5.5.7, et les activités suivantes ont pu être évaluées :

• antifongique sur Cladosporium cucumerinum (C.c.) et Candida albicans (C.a.) ; • antibactérienne sur Bacillus subtilis (B.s.) ;

• antiradicalaire avec l’emploi d’un réactif au 1,1-diphényl-2-picrylhydrazyle (DPPH) ; • inhibitrice de l’acétylcholinestérase (AChE).

Les résultats des tests énumérés ci-dessus sont répertoriés dans le Tableau 3.4. L’appréciation des activités a été faite sur la base de l’échelle relative qui a cours dans notre Laboratoire. Elle a donc plus une valeur comparative qu’absolue. Par la suite, lors de l’évaluation de l’activité des composés purs, des résultats semi-quantitatifs pourront être dégagés en testant des solutions de concentration connue pour ces composés.

Tableau 3.4 – Criblage biologique et biochimique des extraits bruts

Nom botanique Organe Extrait C.c. C.a. B.s. DPPH AChE

DCM +++ + +++ + +++ Detarium microcarpum mésocarpe + péricarpe MeOH s.s. - - ++ ++ + DCM +++ - n.d. + + D. senegalense, forme comestible mésocarpe + péricarpe MeOH s.s. - - n.d. ++ - DCM +++ - n.d. + + D. senegalense, forme toxique mésocarpe + péricarpe MeOH s.s. - - - + - DCM + n.d. n.d. + +

Bauhinia reticulata mésocarpe +

péricarpe

MeOH - n.d. n.d. + -

DCM + n.d. n.d. + +

Ziziphus zizyphus mésocarpe +

péricarpe MeOH - n.d. n.d. - - péricarpe n-BuOH s.s. + n.d. - - - Nephelium ramboutan-ake mésocarpe EtOH s.s. - n.d. - - - péricarpe n-BuOH s.s. - n.d. ++ + - Dimocarpus longan mésocarpe EtOH s.s. - n.d. - - - CHCl3 - n.d. n.d. + -

Talisia esculenta péricarpe

n-BuOH - n.d. n.d. - -

- : aucune activité ; + : activité faible ; ++ : activité moyenne ; +++ : activité forte n.d. : activité non déterminée

Avant tout, il est nécessaire de préciser qu’un résultat observé lors de l’évaluation d’un extrait brut ou d’une fraction enrichie est la composante de deux paramètres : l’activité intrinsèque d’un produit, d’une part, et d’autre part, sa quantité relative dans l’extrait. Ainsi, l’activité marquée d’un extrait peut tout aussi bien provenir d’une faible quantité de constituant très actif, que d’une grande quantité de constituants peu actifs. De plus, étant donnée la faible résolution des composés généralement observée sur CCM, il se peut qu’une activité observée résulte de la somme d’activités de plusieurs constituants. Par conséquent, les résultats de telles investigations doivent toujours être considérés prudemment. De plus, il est important de mentionner que la bonne corrélation entre les résultats, obtenus par le biais de tests sur CCM et de tests en solution n’a pas toujours été démontrée. Or, les tests en solution sont de manière générale plus fiables, d’une part à cause de leur nature, en se rapprochant plus des conditions réelles ; et d’autre part, du fait que les résultats sont quantifiables.

Tous les extraits n’ont pas pu être testés avec les souches de C. albicans et B. subtilis pour des raisons pratiques de mise en place de ces tests au Laboratoire.

Les 6 extraits issus des fruits de la famille Sapindaceae (N. ramboutan-ake, D. longan et T. esculenta) ne présentent que très peu d’activités. L’extrait n-BuOH s.s. du péricarpe de N. ramboutan-ake a montré une faible inhibition du champignon C. cucumerinum, tandis que l’extrait CHCl3 du péricarpe de T. esculenta et l’extrait n-BuOH s.s. du péricarpe de D. longan

ont montré une faible activité anti-radicalaire. Ce dernier extrait a de plus inhibé de façon modérée la croissance de B. subtilis. Concernant ce test, la plupart des extraits testés (62.5 %) ont montré une activité modérée à forte. Cependant, cette bactérie est réputée très sensible et de nombreux résultats « faux-positifs » peuvent survenir. Ces résultats sont par conséquent à prendre avec précaution pour la sélection d’extraits prometteurs.

Les extraits DCM de B. reticulata et de Z. zizyphus n’ont montré que de faibles activités inhibitrices du champignon C. cucumerinum et de l’acétylcholinestérase, ainsi qu’un faible effet antiradicalaire sur le DPPH. Quant aux extraits méthanoliques de ces deux fruits, seul celui de B. reticulata a montré un léger effet antiradicalaire. Il faut cependant noter que ces deux extraits méthanoliques n’ayant pas été débarrassés de leurs sucres, il se pourrait que les activités potentielles soient masquées. Malgré cela, et surtout compte tenu des résultats prometteurs des extraits des trois fruits de Detarium spp., l’investigation phytochimique de ces deux fruits n’a pas été poursuivie dans ce travail.

En effet, ce sont principalement les extraits DCM des fruits de Detarium qui présentent le plus d’activités. Ils inhibent tous fortement la croissance du champignon phytopathogène Cladosporium cucumerinum (Figure 3.1). Ce sont également ces extraits qui sont de forts inhibiteurs de l’acétylcholinestérase. Cette enzyme est notamment impliquée dans la maladie d’Alzheimer, caractérisée par un déficit neuronal en acétylcholine. Actuellement, la plupart des inhibiteurs de cette enzyme provenant de source végétale sont des alcaloïdes (physostigmine, galanthamine, et alcaloïdes stéroïdiques (Marston et al., 2002). Or, ces molécules présentent certains inconvénients tels qu’une courte demi-vie et de nombreux effets secondaires. Il serait donc prometteur de découvrir des composés actifs appartenant à une classe chimique différente. Les résultats de ce test doivent cependant être pris avec circonspection car le mécanisme d’action de nombreux insecticides (dérivés organophosphorés, carbamates, etc…) réside justement dans l’inhibition de cette enzyme (Weins et Jork, 1996). Il n’est donc pas à exclure, travaillant sur des fruits comestibles et parfois cultivés, que de tels insecticides aient pu être

employés, expliquant alors l’activité de ces extraits. C’est un aspect qui doit être pris en compte, et ce malgré le soin avec lequel les échantillons ont été choisis.

Tox Com Micro Tox Com Micro

hRf

0 100

a) b)

Tox Com Micro Tox Com Micro

hRf

0 100

a) b)

Figure 3.1 – Activité inhibitrice de Cladosporium cucumerinum des trois extraits DCM des fruits de

Detarium spp.

Echantillons : 100 µg d’extrait DCM : Tox : D. senegalense forme toxique, Com : D. senegalense forme comestible, Micro : D. microcarpum

Support : Silicagel 60 F254 Merck ; Phase mobile : AcOEt-hexane 1:1 ;

Détection : a) extinction de fluorescence à 254 nm ; fluorescence à 366 nm ;

[ ] réactif de Godin

b) inoculum de Cladosporium cucumerinum (conditions décrites sous 5.5.3)

Une activité anti-radicalaire sur le DPPH a de surcroît été montrée par les extraits de Detarium spp., et particulièrement par les extraits MeOH s.s. Ces résultats positifs peuvent s’expliquer par la présence de composés phénoliques, et en particulier de flavonoïdes, dont l’activité anti-radicalaire a déjà été largement documentée (Potterat, 1997). Cette activité indique alors la probabilité d’isoler ce type de composés dans ces extraits.

Parmi les extraits étudiés, ce sont donc les extraits DCM des fruits de Detarium qui présentent le plus d’activités biologiques et biochimiques, et parmi ceux-ci, celui de D. microcarpum semble être le plus prometteur. De plus, ce fruit n’a jamais été investigué d’un point de vue phytochimique. C’est donc tout naturellement sur l’extrait DCM de D. microcarpum que se sont portées en premier lieu nos recherches. Dans un deuxième temps, une

comparaison des extraits DCM et MeOH s.s. des trois fruits de Detarium a été menée par le biais d’une analyse UPLC®/ESI/TOF-MS. Cette comparaison a été menée dans deux buts distincts. Premièrement, évaluer les variations de la composition chimique d’espèces du même genre, et donner une opinion concernant le rang taxonomique des formes comestibles et toxiques de D. senegalense. En effet, rappelons que la question de savoir s’il s’agit de variétés différentes ou de formes différentes reste d’actualité (cf. chapitre 2.3.3.2). Le deuxième objectif de cette comparaison est de tenter d’identifier le ou les composés responsables des intoxications causées par la forme toxique de D. senegalense. En effet, comme nous allons le voir plus loin, un fractionnement bioguidé s’étant avéré difficilement applicable, une approche purement chimique du problème a été menée.

3.4 Investigation phytochimique de Detarium microcarpum Guill.