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Couplage d’approches diphasiques 2 : Résolution transitoire de grandes

2 Modélisation numérique des écoulements diphasiques

2.2 Turbulence et couplage d’approches diphasiques

2.2.3 Couplage d’approches diphasiques 2 : Résolution transitoire de grandes

On détaille dans cette section quelques développements sur le couplage d’approches de calcul diphasique dans les régimes ségrégué et dispersé, qui entreprennent une méthodologie distincte de celle des modèles présentés dans la section 2.2.2. Ici, la plupart du temps, la principale préoccupation est de bien distinguer, au sein du système diphasique, les zones où il faut représenter l’écoulement local de façon ségréguée ou dispersée. La modélisation du phénomène d’aération ne se base alors sur aucun ajout de terme source de volume d’air dans le système, notamment parce qu’il est espéré que la simulation reproduise, au moins en partie, les mécanismes majeurs d’entraînement d’air. Ceci ne peut être obtenu que si on adopte une stratégie de gestion transitoire de la turbulence, avec la résolution effective des grands tourbillons. Un autre facteur clé pour le développement de cette approche est la définition des critères de transition d’un régime à l’autre. Idéalement, ces critères doivent être fonction de la morphologie locale et instantanée de l’écoulement, et indiquer l’approche de fermeture du système d’équations de la

En dernier lieu, on cherche lors d’une simulation de ce type à ce que les grandes interfaces relatives à la densité du maillage – comme la surface libre et les plus grandes bulles et gouttes – soient effectivement résolues, avec une interface nette et les fermetures adaptées, notamment avec la modélisation de la tension de surface. Les plus petites structures, que le maillage n’est pas suffisamment fin pour résoudre, doivent alors, à leur tour, être modélisées en adoptant une fermeture incluant des termes moyennés de transfert de quantité de mouvement entre les différentes phases. Cette approche est alors aussi appelée LEIS (Large Eddy & Interface Simulation), Lakehal (2018), librement traduite ici comme « résolution transitoire de grandes interfaces ».

Un nombre considérable de solveurs a été développé sous différentes plateformes dans l’objectif d’effectuer ce couplage d’approches. La méthode TFM nommée AIAD implémentée dans ANSYS CFX, saisit cette problématique en définissant des fonctions de transition (Eq. (66)), qui détectent la morphologie de l’écoulement (bulles dispersées dans l’eau, gouttes dispersées dans l’air ou surface libre) en fonction de la fraction volumique locale.

{

𝑓𝐷 = (1 + 𝑒𝑎𝐷(𝛼𝑒𝑎𝑢−𝛼𝑒𝑎𝑢,𝑙𝑖𝑚)−1 𝑓𝐵 = (1 + 𝑒𝑎𝐵(𝛼𝑎𝑖𝑟−𝛼𝑎𝑖𝑟,𝑙𝑖𝑚)−1

𝑓𝐹𝑆 = 1 − 𝑓𝐷− 𝑓𝐵

(66)

Où 𝑓𝐷 est l’équation de transition pour les gouttes, 𝑓𝐵 pour les bulles et 𝑓𝐹𝑆 pour la surface libre. Les paramètres 𝑎𝐷 = 𝑎𝐵 = 70 définissent la vitesse de transition de la courbe, et 𝛼𝑒𝑎𝑢,𝑙𝑖𝑚 et 𝛼𝑎𝑖𝑟,𝑙𝑖𝑚 sont les fractions volumiques qui détermineront la transition. D’après quelques études expérimentales ( Höhne & Mehlhoop (2014)), la concentration moyenne de la phase dispersée reste typiquement en-dessous des valeurs et autour de 30%. Les paramètres 𝛼𝑒𝑎𝑢,𝑙𝑖𝑚 et 𝛼𝑎𝑖𝑟,𝑙𝑖𝑚 sont alors établis à 0,3. Finalement, le coefficient CD local paramétrant la force de traînée décrite dans l’Eq. (28) est défini dans chaque cellule en fonction des équations de transition, en accord avec la morphologie de l’écoulement suivant l’Eq. (67).

𝐶𝐷 = ∑ 𝑓𝑗𝐶𝐷,𝑗

𝑗=𝐹𝑆,𝐵,𝐷

(67) Où chaque 𝐶𝐷,𝑗 est modélisé avec une expression propre à la morphologie.

La méthode LSI (Large Scale Interface) implémentée par Gada, et al. (2017) dans le logiciel STAR-CCM+ emprunte à la méthode AIAD le concept des fonctions de transition, et ajoute en plus des termes de transfert de masse, ainsi que la résolution de l’équation de conservation d’énergie pour prendre en compte le phénomène de changement de phase.

Remarque : Les deux études citées précédemment et utilisant les méthodes

AIAD et LSI effectuent les simulations avec une modélisation de turbulence de type RANS. En principe, ce fait contredirait l’affirmation que l’approche de résolution d’interfaces nécessite une méthode de fermeture de la turbulence qui permette de détecter les perturbations du champ de vitesses et des interfaces, ainsi générant les mécanismes d’entraînement d’air. On note néanmoins que, lors des deux études, un terme d’amortissement de la turbulence a été ajouté dans les modèles originaux, dans l’objectif de réduire la valeur de viscosité turbulente générée aux voisinages de l’interface. En effet, la surproduction d’énergie cinétique turbulente non-résolue proche des interfaces par les modèles de turbulence est une problématique récurrente dans la simulation des écoulements diphasiques ( Frederix, et al. (2018)), augmentant ainsi la dissipation due au modèle et annulant les possibles perturbations. L’ajout d’un modèle d’amortissement de viscosité turbulente au niveau de l’interface entrepris par Höhne & Mehlhoop (2014) et Gada, et al. (2017) est donc l’une des manières possibles d’atténuer la sur-dissipation des perturbations d’interface, et pourrait permettre au modèle numérique de résoudre l’aération.

D’autres méthodologies plus complexes comme le LBM (Large Bubble Model), implémentée dans le Code_Saturn ( Denèfle, et al. (2015), Mer, et al. (2018)), et le GENTOP (Generalized Two-Phase Flow) au sein du logiciel ANSYS CFX ( Hänsch, et al. (2012)) font la distinction entre les champs d’air continu et dispersé au sein du système diphasique. On retrouve alors une représentation de l’écoulement en trois champs. La conservation de la masse pour la phase gazeuse impose la définition d’une expression pour le transfert entre les champs d’air continu et dispersé. L’équation de transport des fractions volumiques devient alors :

{

𝜕𝜌𝛷𝛼𝛷

𝜕𝑡 + ∇. 𝜌𝛷𝒖̅𝛷𝛼𝛷 = 𝛤𝛷 ∑ 𝛤𝛷= 0

(68)

Différentes expressions pour 𝛤𝛷 sont déduites par Denèfle, et al. (2015) et Hänsch, et al. (2012), et leurs spécificités peuvent être trouvées dans les articles respectifs. Les expressions ont néanmoins des points communs, notamment en ce qui concerne le déclenchement du transfert de masse. De manière similaire à ce qui arrive dans l’Eq. (66), 𝛤𝛷 suppose des valeurs non-nulles lorsqu’une concentration d’air seuil 𝛼𝑎𝑖𝑟,𝑙𝑖𝑚 est dépassée.

Par ailleurs, dans les deux modèles, on retrouve une procédure numérique dans le but de compresser la diffusion des interfaces, et avoir ainsi une transition nette des phases continues liquide et gazeuse.

Le principal atout de cette approche à trois champs par rapport aux méthodes AIAD et LSI est un plus grand contrôle sur la modélisation de la transition des régimes avec la définition du terme 𝛤𝛷, qui pourrait éventuellement être amélioré de façon à intégrer des aspects physiques encore inconnus à l’heure actuelle. En plus, le terme 𝛤 correspondant au transfert de la phase gazeuse continue vers la phase gazeuse dispersée constitue une condition limite adéquate pour l’injection d’une distribution de taille des bulles prédéfinie, si l’on souhaite effectuer un calcul polydispersé.

On note que les concepts des termes source 𝛤𝛷 et Ɛ𝑏 sont fondamentalement différents. Alors que 𝛤𝛷 exprime la transformation de la représentation numérique de l’air d’une fraction ségréguée vers une fraction dispersée, et impose par conception le principe de conservation de la masse, Ɛ𝑏 représente un vrai ajout de masse d’air dans le système, et ne requiert aucune vraie résolution d’interfaces.

Finalement, on fait mention à l’approche implémentée dans le solveur

multiphaseEulerFoam (MPEF) dans OpenFOAM® introduite par Wardle & Weller

(2013) et Shonibare & Wardle (2015). De façon similaire aux méthodes AIAD et LSI, la MPEF établit à partir d’un cadre de modélisation TFM le couplage des régimes ségrégué et dispersé en appliquant des fermetures adéquates aux termes de transfert de quantité de mouvement suivant le régime d’écoulement. Plus de détails sur l’implémentation de cette approche seront donnés dans le prochain chapitre.