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3. ANALYSE DES EXPERIENCES EUROPEENNES DE BHNS

3.2 Contexte urbain (par le GT4)

1.- Prise en considération de la forme et de la taille de l'aire urbaine

La section qui suit aborde la prise en compte des performances des transports publics et du contexte urbain. Cela nous permet d'examiner la relation entre l'aménagement urbain, les choix modaux, les coûts des transports et leurs impacts ou leurs externalités pour la communauté. Selon cette perspective, la densité urbaine explique (en partie) les performances des transports publics dans différentes aires urbaines, dans lesquelles le nombre de trajets par jour varie considérablement d'une ville à l'autre.

Les villes visitées présentent des variations substantielles en matière de population et de part modale des transports publics. Les villes d'Europe de l'Ouest, en particulier en France, en Angleterre, aux Pays-Bas et en Allemagne, présentent un paradoxe opposant la demande et la qualité de service. Dans ces villes, les performances des transports publics sont très élevées malgré une fréquentation relativement faible. Et ce en dépit des investissements conséquents réalisés pour atteindre ces performances, y compris dans la mise en œuvre de systèmes de BHNS. À l'inverse, les villes de l'Europe de l'Est et du Sud bénéficient d'une meilleure fréquentation, malgré des investissements plus faibles.

Ces considérations ne viennent pas démentir les politiques et les mesures mises en œuvre dans les villes pour améliorer les performances des transports publics, pas plus qu'elles ne sapent la compréhension globale des conditions favorables aux décisions de politique en matière d'investissements en BHNS. En réalité, toutes ces villes sont à la recherche d'une politique de transports publics capable d'améliorer les performances de leurs réseaux de transports en commun et de la mobilité durable dans leurs aires urbaines.

Le contexte urbain et des transports associé à la mise en œuvre de systèmes de BHNS est variable ; les solutions recherchées pour le système dans son ensemble le sont donc tout autant : fréquence, régularité, gestion de la qualité, vitesse commerciale, ponctualité, marketing et capacité. Les études de cas examinées ont conduit aux constats suivants :

- des villes petites à moyennes équipées de réseaux de BHNS complets (p. ex.

Almere)

- une hiérarchie intégrant les BHNS au niveau le plus élevé sous formes de lignes structurantes (p. ex. Jönköping, Lund)

- des BHNS en complément du réseau ferré et de tram (p. ex Essen, Nantes, Trans-Val-de-Marne, Hambourg)

- des BHNS remplissant plusieurs fonctions opérationnelles (lignes transversales, radiales, tangentielles, principales ou même périphériques).

Nous observons que la part modale des transports publics est la plus importante lorsque la politique, la planification et la mise en œuvre des transports envisagent les transports publics comme un mode prioritaire par rapport aux voitures. Zurich (50%), Stockholm et Barcelone (env. 40%), ainsi que les grandes capitales telles que Madrid (32%) ou Athènes, constituent des exemples pertinents de ce choix. Ce phénomène peut également être observé dans les capitales d'Europe centrale et de l'Est (p. ex. Prague et Bucarest), où les transports publics ont bénéficié d'une intégration importante. Il est à noter que la part modale n'est pas uniquement liée au nombre d'habitants d'une agglomération. Par exemple, les 20 % de part modale des transports public de Jönköping, une ville peu peuplée (125 500 habitants), sont comparables aux 28 % constatés dans la ville suédoise de Göteborg (530 000 habitants) ou aux 20 % atteints par le TVM à Paris.

2.- Concept pour une typologie du réseau fondé sur le bus

Depuis quelques années, on peut observer en Europe une tendance au développement d'une

« hiérarchie » au sein des réseaux de transports publics. La hiérarchisation des modes (p. ex.

métro, tram et bus) a toujours existé, mais nous sommes actuellement témoins de l'émergence de hiérarchies au sein même du mode bus. Cette « hiérarchisation » se manifeste dans les mises en œuvre récentes de systèmes de BHNS offrant des niveaux de service différenciés et souvent distingués par des stratégies d’identification spécifiques. Cette tendance est principalement appliquée dans les réseaux les plus vastes.

Nous observons qu'une classification des lignes de bus peut être établie selon leurs différentes fonctions au sein même du réseau, comme l'illustre la figure 9 ci-dessous. Elles sont alors exploitées dans différents contextes urbains présentant des besoins de capacité, et parfois des exigences opérationnelles, distincts.

Figure 9 : Typologie des études de cas de BHNS (source : 35 études de cas de l'action COST BHNS)

1. Itinéraires urbains (hypercentre) : exploités au cœur des aires urbaines.

5. Itinéraires périphériques / tangentiels : liaisons entre zones périphériques sans desserte du centre.

Cette classification est particulièrement pertinente pour les BHNS car les caractéristiques techniques et de performance de ces systèmes tendent à refléter la spécification fonctionnelle de l'itinéraire. Les 35 échantillons issus des études de cas ont été classés parmi les 5 types d'itinéraire qui suivent. Ils forment la typologie des systèmes de BHNS européens tels qu'ils sont mis en œuvre à l'heure actuelle. Les première et troisième catégories rassemblent la majorité (68 %) des cas étudiés.

- Type 1 : les lignes intra-urbaines desservant l'hypercentre représentent 37,1 % des échantillons, soit les 13 cas suivants : Lisbonne (ligne Junqueira), Utrecht, Prague (ligne 213), Bucarest, Jassy, Brescia, Prato, Madrid (ligne 27), Hambourg (Metrobus), Castellón, Nantes (Busway), Barcelone (ligne 64) et Stockholm (bus bleus).

- Type 2 : itinéraires locaux ou de distribution, qui regroupent deux cas : Almere et Kent (Fastrack).

- Type 3 : itinéraires radiaux ou de rabattement reliant une zone périphérique au centre-ville, qui regroupent 31,4 % des échantillons, soit 11 cas : Dublin Malahide (QBC), Oberhausen, Essen, Athènes (airport line), Madrid (lignes VAO), Lund (ligne Lundalänken), Manchester, Purmerend et Zurich (ligne 31).

- Type 4 : lignes transversales, soit 7 cas et 20 % de nos échantillons : Lorient (Triskell), Rouen (TEOR) et Göteborg (ligne 16), Jönköping (Citybussarna), Leeds, Twente et Cambridge (Busway).

- Type 5 : itinéraires périphériques ou tangentiels, soit 3 lignes de BHNS (8,5 %) : Paris (TVM), Amsterdam (Zuidtangent) et Helsinki (ligne Jökeri).

3.- Pratiques et données relatives à l'organisation hiérarchisée des réseaux fondés sur le bus

Une enquête a été réalisée au sein du GT4 afin de comprendre les éléments suivants : - objectifs ou raisons du lancement d'une telle hiérarchisation

- structure et hiérarchie fonctionnelle

- type, ou nombre, et description de la différentiation des lignes de bus dans le réseau urbain - description de la typologie actuelle et, le cas échéant, de sa forme future

- identification des différents acronymes utilisés

- motifs de la hiérarchisation des lignes de bus par rapport au rôle fonctionnel attribué à chaque (type de) ligne de bus. À l'inverse, raisons motivant la décision de renoncer à la hiérarchisation des lignes de bus

- au sein de cette typologie, caractéristiques principales définissant les différents types concernés orbitaux en matière d'investissements, car ils sont des éléments essentiels aux mouvements de la population. GMPTE (l'autorité organisatrice) reconnaît les restrictions imposées au financement de l'amélioration des autoroutes ; elle cherche donc à investir dans les itinéraires présentant les taux d'utilisation les plus importants.

- Hambourg : rendre le réseau de bus plus évident, concentrer la demande. Il s'agit principalement Le BHNS

comme outil de hiérarchisation du réseau de TC.

transversales desservant plusieurs stations de métro et gares ferroviaires de migration pendulaire, de relier les banlieues au centre grâce à des itinéraires directs, d'attribuer des numéros de ligne spécifiques pour faciliter leur identification et de mettre à disposition un plan spécifique. Le réseau Metrobus n'utilise pas de couloirs bus spécifiques (il fait appel aux couloirs existants), pas plus qu'il n'a recours à des arrêts dédiés. Le concept de Metrobus mis en œuvre à Hambourg a ensuite été adopté à Berlin (depuis 2004) et Munich.

- Prague : améliorer la ponctualité et la vitesse et répondre à la capacité limitée des transports en commun dans certains corridors (p. ex. absence de transports publics ferroviaires) ; les raisons sont économiques.

- Nantes : la hiérarchisation a fait son apparition avec le renouveau du tram dans les années 1980 et s'est étendue au secteur du bus (schéma directeur d'implantation de lignes « Chronobus » jusqu'à l'horizon 2030) ; objectif : créer une ville de « distances réduites » ; raisons économiques : suppression passée et future de certaines lignes de bus peu efficaces.

- Göteborg : réduire la congestion ; objectif environnemental.

- Zurich : les principales raisons de l'établissement d'une hiérarchie sont le nombre de voyageurs utilisant les lignes de bus (problème de capacité) et la longueur de ces lignes. Une répartition de la demande n'est pas nécessaire dans cette ville qui impose des restrictions aux voitures depuis longtemps. L'adoption récente de couleurs pastel dans la carte topologique des principales lignes de bus visait à les démarquer des autre lignes de bus et à les rendre identifiables par les usagers.

Une carte topologique est planifiée pour illustrer les modifications entreprises à l'horizon 2025.

Elle se conformera au modèle topologique actuel et inclura les nouvelles lignes de tram et de bus, ainsi que les extensions et modifications des lignes actuelles.

- Barcelone : améliorer la lisibilité du réseau de bus ; raisons économiques.

4.- Observations, résultats et leçons tirées de la hiérarchisation des bus

Les principales raisons identifiées comme motivations/objectifs de la hiérarchisation du réseau de bus sont les suivantes :

- Rendre le réseau de bus plus clair et plus facile à appréhender.

- Réduire la congestion et contribuer à la lutte contre les problèmes environnementaux.

- Pour les investissements dans l'infrastructure, établir une échelle de priorité qui adopte la capacité potentielle comme critère principal (une capacité/un débit plus important justifiant un investissement plus substantiel en faveur d'un itinéraire donné).

- Concentrer la demande afin d'optimiser le taux d'occupation sur l'ensemble du réseau de bus (nombre de voyages par km parcouru).

- Augmenter le taux de couverture des coûts (suppression en conséquence de certaines lignes de bus peu efficaces).

- Définir des produits distincts au sein du réseau en relation avec les objectifs principaux.

Nous observons néanmoins que les motifs financiers demeurent en pratique prédominants dans toutes ces approches « hiérarchiques » (notamment à Nantes, Hambourg, Prague, et Barcelone). Les premières expériences menées à Nantes et à Hambourg, en service depuis quelques années, démontrent un impact très positif sur la fréquentation et la couverture des coûts. L'investissement dans les infrastructures (voies réservées, priorités aux carrefours, etc.) demeure l'outil fondamental permettant de parvenir au succès financier et de susciter l'intérêt des voyageurs (grâce à une amélioration de la régularité et de la rapidité du service).

Certaines hiérarchisations, accompagnées d'éléments dédiés et uniques (p. ex. le Busway à Nantes), aboutissent à une identification plus forte des lignes de BHNS par rapport aux systèmes (notamment le « Metrobus » de Hambourg) dans lesquels aucune véritable différence ne vient distinguer les véhicules et les arrêts des autres lignes de bus. Cependant, nous remarquons que l'exploitation de bus dédiés sur une ligne clairement identifiée s'accompagne effectivement de coûts supplémentaires.

Nous observons une tendance consistant à offrir aux voyageurs une solution permettant d'améliorer la « lisibilité » du réseau de bus grâce à une identification indexée sur la fonction

ou sur le niveau de service de chaque itinéraire. Les mesures d'identification représentent des outils efficaces pour soutenir les activités de marketing.

Les villes intéressées par la hiérarchisation conçoivent plusieurs types de solutions fondées sur le bus : un éventail s'étendant des lignes locales aux systèmes de BHNS complets offrant une qualité de haut niveau.

Néanmoins, la hiérarchisation peut parfois conduire à des effets négatifs. Par exemple, on note une augmentation de la proportion de correspondances à Jönköping. Une étude menée par l'université de Lund a mis en évidence la disparition de liaisons directes particulièrement appréciées de certains résidents suite à la mise en place du nouveau réseau de BHNS. Cette situation peut être rendue moins désagréable/décourageante s'il est possible de garantir le niveau de qualité, un objectif réalisé grâce à l'adoption d'une approche de BHNS.

Chaque contexte urbain étant unique, il est finalement possible de dégager les conclusions suivantes :

- En matière de transports publics, il revient à chaque autorité de définir et d'établir sa propre hiérarchie par l'intermédiaire de l'aménagement urbain adopté. Le concept de BHNS doit être perçu comme une méthode ou une directive à destination des décideurs locaux visant à la conception de solutions diverses fondées sur le bus.

- L'identification des différents niveaux de service peut s'avérer fructueuse pour les voyageurs, tandis que la qualité du confort et des informations aux voyageurs doit atteindre un niveau élevé uniforme sur l'ensemble du réseau de transports en commun.

BHNS : un large éventail de solutions