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Contexte historique de la bioéthique hispano américaine selon Diego Gracia

L’étude de la culture et de l’histoire des peuples est essentielle si l’on veut comprendre l’éthique d’un peuple ou d’une époque, et encore plus sa bioéthique. Le constat que la culture latino-américaine ne trouve pas ses racines dans la tradition anglo-saxonne mais dans une culture latine et méditerranéenne révèle des particularités très spécifiques et propres à l’histoire de la région. C’est pourquoi il paraît nécessaire de revenir sur les principales étapes d’évolution du continent en mettant en exergue les caractéristiques éthiques propres à chacune d’elles.

§1. La période primitive : l’époque de la conquête

Fondées sur des conceptions religieuses du monde et de la vie à l’instar de toutes les cultures primitives non occidentales, les cultures précolombiennes du continent américain ne représentent pas une exception. Les phénomènes naturels et les événements de la vie sont conçus comme des « dons » provenant d’une divinité ou, au contraire, comme des « dettes » contractées auprès d’elle. L’arrivée des Espagnols n’a guère changé cette interprétation mythico-magique et religieuse chez les indigènes qui ont continué de se fier à leurs croyances.

Cette interprétation religieuse et providentialiste du « fait américain » a eu d’innombrables conséquences. Une première est la mystification de l’indigène dans les sociétés américaines. Dans la correspondance de Christophe Colomb par exemple, on peut déceler une référence constante à ce que l’on peut qualifier de « légende blanche » américaine qui présente les indigènes comme vivant dans un « état naturel » (estado de naturaleza), sans loi ni État, et partageant des conceptions différentes de celles de l’Europe médiévale sur des questions comme la moralité sexuelle par exemple. Dans le même esprit, le conquistador espagnol Francisco de

las Casas a décrit les indigènes comme « le peuple le plus humble et bon du monde, le plus disposé à la conversion à la nouvelle foi »237. Des auteurs de la doctrine politique moderne tels que Thomas Hobbes, Jean-Jacques Rousseau ou Emmanuel Kant ont été influencés par cette vision pour élaborer leurs théories du « contrat social »238.

Deux positions principales s’opposent : la première plaide pour l’idéalisation de l’indigène tandis que la seconde insiste sur les bienfaits de la présence espagnole présentée comme un modèle de conquête.

A. La thèse du bon et du mauvais sauvage

Au fil des années qui ont suivi la conquête du continent américain, les relations entre les espagnols et les indigènes se sont gravement détériorées. La thèse du « bon sauvage» 239 a progressivement laissé place à celle du « mauvais sauvage » qui ne mérite pas le traitement dû à un être doté de rationalité. La force s’est imposée systématiquement en tant que moyen de conversion des indigènes à une « vraie religion » et de soumission au roi d’Espagne. L’indigène vit dans un état de nature qui est présenté comme un état de bestialité, de « guerre de tous contre tous » (bellum

237

BRADING (D.), Orbe Indiano, México Fondo de la Cultura económica, 1993, p. 83, Traduction

Libre.

238 Voir sur ce point DUCHET (M.), BLANCKAERT (C.), Anthropologie et histoire au siècle des

Lumières, Paris : Maspero, 1995, 624 p.

239

Sur la notion du bon sauvage, voir BOULANGER (J.), Le mythe du bon sauvage, [En ligne]:

http://www.cvm.qc.ca/encephi/Syllabus/Litterature/18e/bonsauvage.htm [consulté le 29 février 2012]. « Le mythe du bon sauvage, qui s’est constitué suite à la découverte de l’Amérique, est l’idéalisation des hommes vivant en contact étroit avec la nature. Il répond, entre autres, à la quête de nouvelles valeurs du 18e siècle ainsi qu’à son fougueux débat opposant « nature » et « culture ». Associé à la période de grands bouleversements de la Révolution industrielle- réorganisation sociale, développement technologique, productivité, propriété privée, est…- il représente un havre de paix pour toutes les âmes agitées par un futur incertain. Vivre en d’autres temps, en d’autres lieux où paix et bonheur sont assurés par une Nature bienveillante, voilà ce que propose le mythe du bon sauvage dont l’expression même, très éloquente, mérite qu’on s’y attarde. En effet, qu’est-ce qu’un « mythe » ? Mais surtout, qu’est-ce qu’un « bon sauvage » ? Les réponses à ces questions nous permettront de mieux approcher cette utopie des Lumières qui, malgré les siècles passés, fait rêver encore aujourd’hui ».

omnium contra omnes)240. Finalement, le despotisme et la tyrannie se sont substitués à l’éthique du don.

B. Francisco Vitoria et la théorie de la reconnaissance de la rationalité indigène

Cependant, dans la Relectio de Indis (1539), le théologien espagnol Francisco de Vitoria (1483-1546) soutenu par l’Église tente d’établir les bases de la reconnaissance d’une rationalité indigène et de leur humanité à l’aide d’une comparaison avec les chrétiens. Avec ce raisonnement, est dépassé le discours fondé sur les différences raciales qui légitimait la conquête : « les indigènes sont des hommes, non pas des animaux et par conséquent ils méritent notre respect, nonobstant, il s’agit de barbares desquels il nous faut protéger comme nous pouvons le faire avec les petits enfants ». Dénonçant les excès des conquérants et s’excusant de leur impiété et de leur tyrannie, le théologien propose explicitement d’adopter vis à vis des indigènes une posture paternaliste241.

Encourageant un comportement mesuré et un esprit de conciliation, l’œuvre de Francisco de Vitoria a été critiquée pour son caractère utopique et irréalisable. Mais dans le champ juridique, ses postulats ont eu une influence sur la législation. Citons par exemple les Encomiendas242 suspendues par les Nouvelles Lois de 1542

240 HOBBES (T.), Léviathan, 1651. « Dans cette théorie de la guerre de tous contre tous, Hobbes fait le

postulat qu'à l'état de nature l'homme ne peut pas vivre en amitié avec ses semblables. Il doit, du moins à ce qu'affirment les réflexions préliminaires du Léviathan, tout miser sur sa propre existence : s'il la perd, il perd tout ce qu'il possède. Dans cette situation, aucun homme ne saurait laisser rogner ses droits ou son statut comme ce serait peut-être le cas s'il devait le moindrement se sacrifier plutôt qu'un autre pour le bien commun. Dans son propre intérêt il ne lui reste plus alors d'autre choix que de refuser la vie en communauté et de mener une guerre permanente contre les autres qui ne pourraient lui concéder qu'un statut inférieur dans le groupe, en relativisant son mérite personnel ». L’expression bellum omnium contra omnes est aussi utilisée par le célèbre philosophe allemand Friedrich Nietzsche dans la partie de son livre intitulé : Introduction théorique sur la vérité et le mensonge au sens extra-moral. Il écrit : « l'homme veut se conserver et c'est le plus souvent dans la dissimulation qu'il utilise l'intellect ». Portail de la philosophie. [En ligne]:

http://wapedia.mobi/fr/Bellum_omnium_contra_omnes?t=2. [consulté le 29 février 2012].

241 DE VITORIA (F.), Relectio de Indis (libertad de los indios), Ed. Perena Luciano, Madrid: Corpus

Hispanorum de Pace, CSIC. 1998. Vol. V, p. 139.

242

« Le régime de l’Encomienda : Les premiers colons à avoir foulé la terre du Nouveau Monde étaient mus par un attrait purement mercantile pour l’or, les épices ou les pierres précieuses. Ils se montrèrent donc pour la plupart, totalement incapables d’assurer leur propre subsistance dans un univers manifestement hostile à leur pénétration. Comme leur ravitaillement nécessitait en conséquence l’envoi de navires depuis le royaume d’Espagne et engendrait un surcoût que les expéditions ne pouvaient assumer, Colomb fut le premier à imaginer un système ingénieux pour subvenir aux besoins de ses troupes sans hypothéquer les fonds de l’expédition. Il exigea que chaque indien verse un important tribut en poudre d’or en tant que redevance à l’occupation de leurs propres territoires ; mais les obligations exorbitantes dressées par l’envahisseur

qui, bien que n’ayant jamais été appliquées, avaient pour objet de défendre les droits des indigènes243.

Parmi les justifications de la conquête espagnole présentées par Francisco de Vitoria, on trouve l’idée d’un droit naturel à la communication et au libre établissement pacifique244 qui légitime la permanence de la présence espagnole sur le territoire américain et le développement du commerce à la condition de ne causer aucun dommage quelconque aux indigènes. La doctrine de Francisco de Vitoria met par ailleurs l’accent sur l’éducation des hommes plutôt que sur les questions raciales. Cette posture offre une nouvelle approche de la question des droits des indigènes car une fois leur humanité acceptée, ils se voient reconnaître automatiquement un droit à la liberté et au respect.

§2. La période coloniale : l’éthique du paternalisme

L’idéologie de la période coloniale repose sur un postulat fondamental : mais il doit être traité comme un mineur et donc être placé sous tutelle. Connus sous le nom de « Lois de Burgos », les dispositions relatives aux indigènes portent cette idéologie et l’idée selon laquelle le Roi d’Espagne possède de justes titres de propriété sur le domaine du Nouveau monde mais sans toutefois jouir d’un droit d’exploitation à l’égard des indigènes. En principe, leur qualité d’hommes libres les

conduisirent nombre d’entre eux à s’enfuir dans les montagnes pour se soustraire à l’influence prédatrice et aux désirs inextinguibles des Espagnols ». [En ligne]: http://parallelpage.free.fr/pages/mercantilisme3.htm. [Consulté le 29 février 2012].

243

LOPEZ LOMELI (C.), Origen de los debates sobre derechos y cultura indígena in Derechos fundamentales y Estado. M. CARBONELL, Instituto de Investigaciones Jurídicas de la Universidad Nacional Autónoma de México. 2002, p. 829-830. [En ligne] :

http://biblio.juridicas.unam.mx/libros/libro.htm?l=340 [Consulté le 20 mars 2013]

244

autorise à devenir propriétaire mais la réalité est différente : ils travaillent de fait au service de la Couronne245.

Contrairement à la théorie défendue par Aristote selon laquelle « il y a ceux qui par nature sont esclaves »,246 la théorie du paternalisme défendue par le prêtre dominicain espagnol Bartolomé de las Casas et Francisco de Vitoria dans la Relectio de Indis (1539) n’accepte pas que les indigènes soient traités comme des êtres inférieurs247. Pourtant, ces auteurs rejoignent la position aristotélicienne selon laquelle il existe chez l’esclave un besoin naturel à être gouvernés et soumis à d’autres personnes, comme les enfants ont besoin de se fier à leurs parents ou les femmes à leurs maris.

A. Bartolomé de las Casas et l’Empire missionnaire

Accusé de nier la légitimité de l’Empire espagnol sur le territoire américain, Bartolomé de las Casas (1574-1566) défend l’empire missionnaire tout en plaidant

245 Les Lois de Burgos ont été édictées le 27 Janvier 1512 dans la ville de Burgos en Espagne. Elles

ont été établies par la Monarchie hispanique afin d’organiser la conquête en Amérique. Leur objectif principal consiste à protéger les indigènes d’Amérique des conquistadors.

246 LOICQ-BERGER (M-P.), Aristote et l’esclavage, in Revue Folia Electronica Classica FEC, n° 13

janvier-juin 2007. [En ligne]: http://bcs.fltr.ucl.ac.be/FE/13/esclavage.htm#Indien%20Barbare

[Consulté le 29 février 2012]. « A l’aube des temps modernes, la conquête de l’Amérique déclenche une polémique fameuse entre théologiens espagnols. Fondant sur Aristote et saint Thomas la légitimité de la colonisation et considérant l’infériorité naturelle des Indiens barbares comme une « juste cause » de guerre et d’asservissement, le théologien et historien Sepulveda, le « Tite Live espagnol », fait l’apologie de l’esclavage. En revanche, le missionnaire dominicain Las Casas rejette un « aristotélisme » si scandaleusement opposé au message évangélique et, pour l’honneur de l’Espagne et de la Chrétienté, combat l’assimilation Indien-Barbare et ses implications. Francisco de Vitoria, père du droit des gens et théoricien du droit international, convaincu de l’égalité essentielle des peuples, s’efforcera quant à lui de définir les devoirs des colonisateurs face aux droits de populations conjoncturellement plus faibles. A l’ironie de Montesquieu (on connait sa réfutation célèbre de l’esclavage au livre XV de l’Esprit des lois et à l’indignation de H. Wallon, les exégètes des XIX e et XX siècles ont souvent préféré des « stratégies d’explication : interprétation historicité ou justification socio-éthique du système ».

247

DE VITORIA (F.), op.cit., p.97-99. Traduction Libre. « Il n’existe aucun qualité qui ne peut être affirmée avec certitude et que l’on ne peut discuter tant elle parait légitime pour certains. Je n’ose pas dire qu’elle est juste, ni qu’il faille la condamner dans l’absolu. Cette qualité est celle-ci : ces barbares, malgré ce que l’on a dit, ne sont pas tout à fait incapables et s’éloignent de la catégorie des handicapés mentaux qui a mon avis ne semble pas convenable pour constituer et administrer une république légitime d’un point de vue humain et politique. Pour cette même raison, ils ne jouissent pas de lois adéquates, ni de magistères et ils ne sont pas capables de gouverner leurs familles. Ils manquent de sciences et d’arts, d’une agriculture appliquée, d’artisans et d’autant d’autres conforts qui sont nécessaires pour la vie humaine. On pourrait donc affirmer que les rois d’Espagne pourraient s’occuper de l’administration et du gouvernement de tous ces barbares, les nommer ministres et gouverneurs de leurs peuples et designer de nouveaux princes, tant cela est convenable pour leur bienêtre. Et à vrai dire, cette conduite pourrait se fonder sur le précepte de la charité puisqu’il s’agit de nos prochains et nous sommes obligés de rechercher leur bien….. ».

pour la liberté des indigènes. Ses arguments sont bâtis à partir des Bulas Alejandrinas248, des testaments attribués à Isabelle la Catholique, reine de Castille et Léon (1474-1504) et des opinions des juristes et théologiens exprimés dans les Juntas de Burgos et de Valladolid en 1512 et 1513. C’est en se fondant sur ces documents que Bartolomé de Las Casas conclut à l’absence d’obligation de service aux Espagnols des indigènes, à leur capacité de recevoir la foi catholique et au droit de bénéficier d’une organisation politique. Cette conception s’oppose à la théorie défendue par l’évêque du Darien selon laquelle les indigènes seraient des serviteurs a natura (par nature).

En 1531, dans une lettre adressée au Conseil des Indes, Bartolomé de las Casas commente la nature de la légitimation du domaine des rois de Castille par les Bulles du Pape Alexandre VI. Il y considère que les droits régaliens émanant des Bulas Alejandrinas impliquent l’obligation de mener à son terme l’activité missionnaire : l’évangélisation des indigènes, un droit qui n’a pas été octroyé à tous les princes chrétiens mais au seul Roi d’Espagne. Cette lecture Bulas Alejandrinas fait de ce dernier le seul monarque à pouvoir jouir de droits sur le territoire colonial.

L’exposé juridique de la théorie d’un empire missionnaire est précisée dans d’autres ouvrages de Bartolomé de las Casas tels que ses Treinta proposiciones mas juridicas (Trente propositions très juridiques), son Tratado de prueba del imperio soberano y el principado universal de los reyes de Castilla y Léon tenian sobre las Indias (Traité prouvant l’empire souverain que les rois de Castille et Léon possèdent sur les Indes) ou encore l’étude intitulée Los Tesoros del Peru (Les trésors du Pérou)249.

Autre grand partisan d’un protectorat paternaliste250, le père jésuite espagnol José de Acosta251 (1539-1600) a écrit l’ouvrage De procuranda Indorum salute dans

248 Voir sur ce point GOMEZ MENDEZ (S.), Atlas de Historia de América. Mexico : Limusa, 2003,

p. 32.

249 GONGORA (M.), Estudios sobre la historia colonial de Hispanoamérica, Santiago de Chile: Ed.

Universitaria, 1999, p. 62- 63.

250

DE ACOSTA (J.), De Procuranda Indorum Salute, Madrid, Consejo Superior de Investigaciones Cientificas, 1984, p. 69.

251 Outre la publication des procès-verbaux des conseils de province de 1567 et 1583 et de plusieurs

travaux d'importance exclusivement théologiques, José de Acosta est surtout connu comme l'auteur de De Natura Novi Orbis, De promulgatione Evangelii apud Barbaros, sive De Procuranda Indorum salute et avant tout, de Historia natural y moral de las Indias. Les deux premiers ont paru à Salamanque en 1588, le dernier à Séville en 1590, et ils furent peu après leur publication traduits dans différentes langues. C'est principalement la Historia natural y moral qui a établi sa réputation. Sous

lequel les indigènes sont définis comme des barbares étrangers à la juste raison et à la conduite habituelle que se doivent d’avoir les hommes. Ils sont présentés comme des êtres dotés d’une énergie physique importante mais qui n’auraient aucune propension naturelle à exercer des activités intellectuelles et spirituelles ; une situation légitimant leur mise sous tutelle. Cette doctrine est majoritaire parmi les colons espagnols dès le début de la colonisation en 1550 jusqu'à l’indépendance des États latino-américains au XIXème siècle. Les indigènes sont protégés comme des enfants tandis que l’esclavage continue, comme en témoigne l’important trafic d’africains à cette époque : les lois des Indes ne mentionnent aucune interdiction de ce commerce.

Durant la période coloniale, des droits sont reconnus aux indigènes tels le droit à la vie ou à l’intégrité physique. Toutefois ils ne jouiront pas de droits politiques, ce qui explique une marginalisation sociale qui les enferment dans d’anciennes traditions. Le paternalisme a certes protégé la vie des indigènes mais il n’a pu éviter leur discrimination sociale : « loin de résoudre les problèmes existants, la thèse de l’infériorité naturelle de l’indigène et du besoin d’une tutelle n’a fait que les augmenter, et cela a été surtout prouvé en matière d’assistance sanitaire. La médecine occidentale arrivera à travers des missionnaires, qu’à moyen d’évangélisation, réalisent un important travail avec la création des hôpitaux et une éducation sanitaire de la population »252.

Les bénéfices de la médecine occidentale exportée par les espagnols en Amérique profiterontdonc surtout aux colons européens et aux créoles.

une forme plus concise que celle employée par ses prédécesseurs, Gómara et Oviedo, il a traité l'histoire naturelle et philosophique du Nouveau Monde d'un point de vue plus large. Par exemple, plus d'un siècle avant que les Européens eussent entendu parler du Détroit de Béring, Acosta avait émis l'hypothèse que les populations indigènes de l'Amérique latine avaient migré depuis l'Asie. Il les divisa en trois catégories barbares. La Historia décrit aussi les coutumes et l'histoire des Incas et des Aztèques, donnant également d'autres renseignements comme les pratiques agricoles.

252 GRACIA (D.), El contexto histórico de la bioética hispanoamericana, Perspectivas de la bioética

iberoamericana, Ed. Programa de Bioética de la Organización Panamericana de la Salud, op. cit., p. 30.

B. La médecine espagnole du XVIème siècle

Malgré une évolution marquée sous l’influence de savants arabes et du développement de nouveaux instruments, la médecine espagnole du XVIème siècle est un étonnant mélange de théories scientifiques et de doctrines fondées sur des sciences occultes. Cette situation empêche toute distinction claire entre le médecin scientifique et le médecin populaire ou « guérisseur ».

À l’arrivée des conquistadors en Amérique, cette médecine imprégnée de mysticisme et de christianisme tout en se fondant sur les théories hippocratiques et galéniques essaime rapidement parmi les peuples colonisés. Cette expansion se fait au détriment d’une médecine aborigène reposant sur une vaste gamme de plantes médicinales et de pratiques qui selon de nombreux auteurs sont alors plus crédibles que celles des espagnols de l’époque.

1° La création des hôpitaux

À partir de 1521 un événement grave vient modifier les projets des conquistadors : des épidémies anéantissent la population indigène à tel point que celle-ci est menacée de disparition. Devant le danger de se retrouver sans main d’œuvre, la couronne espagnole donne l’ordre d’envoyer plusieurs communautés religieuses afin de soigner les indigènes souffrants. À leur arrivée, les religieux recommandent la construction d’hôpitaux pour recevoir les malades et permettre leur conversion à la religion catholique. C’est ainsi qu’un nombre important de dispensaires sont construits. Cette époque témoigne pourtant d’une discrimination : certes les indigènes malades sont soignés avec abnégation mais on constate que les espagnols sont soignés par des espagnols et les natifs par des natifs.

2° l’École de médecine

La médecine espagnole, au plus fort de son « âge d’or » au XVIème siècle, s’étend rapidement parmi les peuples colonisés d’Amérique.253