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(consultant du jury 1979-86) fut designer, rédacteur pour la revue Architectural

propres domaines, architecture, affaires, éducation, publication, et culture »

Drexler 2 (consultant du jury 1979-86) fut designer, rédacteur pour la revue Architectural

Forum, puis directeur de la revue Interiors Magazine de 1948 à 1951. Il fut ensuite appelé par Johnson (PP 79) comme conservateur au Department of Architecture and Design du MoMA. En 1956, il succédait à Johnson pour 30 années à la tête de ce même département. Son rôle à ce poste fut décisif pour l’architecture post-moderne, puisqu’il organisa en 1975, sous l’influence de son mentor, l’exposition The Architecture of the Ecole des Beaux-Arts. Drexler sut utiliser le médium de l’exposition pour bouleverser le débat architectural.

Les premiers membres du jury donnèrent donc la direction à suivre. Il s’agissait, avec le prix Pritzker, de poursuivre leur volonté commune d’une architecture populaire et intellectuellement accessible. En majorité américains, ces premiers jurés s’avéraient proches des mouvements archi- tecturaux alors en vogue aux États Unis, proches aussi de leurs représentants.

Le premier architecte à intégrer le jury est le japonais

Arata Isozaki

(1980-84), formé

par Kenzo Tange (PP 87). Puis dans les années 80, ce ne sont pas des critiques d’architecture exigeants qui rejoignent le jury, mais deux entrepreneurs, amateurs seulement, mais généreux.

Thomas J. Watson, Jr.

(1982-86) était un homme d’affaire et politique américain, connu

pour ses activités philanthropiques. Il fut jusqu’en 1971 le vice-président d’IBM, et de 1979 à 1981 ambassadeur des E.U. en Union Soviétique. En 1987, le magazine Fortune le désignait comme « le plus grand capitaliste de l’histoire»3. Il était à ce titre concurrencé par

Giovanni Agnelli

(1984-2003), industriel italien à la tête de la société Fiat dont il fit la plus grande entreprise de

son pays. À l’époque, il était l’italien le plus puissant et le plus connu à l’étranger, propriétaire entre autres de la Juventus de Turin. La fondation Giovanni Agnelli est aujourd’hui encore une des fondations familiales de philanthropie les plus importantes d’Italie, avec 2,6 millions de dol- lars de dons. Dans la même veine, l’architecte mexicain

Ricardo Legorreta

(1985-93) est

issu d’une des familles les plus riches du Mexique, à la tête de la banque Banamex. Selon Anthony C.Antoniades4, cet architecte jouait au tennis au Rancho Santa Fe, avec un certain Jay Pritzker.

Ces trois jurés marquent l’histoire du prix dans la lignée de Jay Pritzker lui-même : il s’agit de personnalités internationales, issues de familles fortunées, et impliquées dans des activités phi- lanthropiques autant que politiques.

Dés 1985, les critiques d’architecture prennent la place qu’ils méritent au sein du jury.

Bren-

dan Gill

( secrétaire du jury 1985-87), tout d’abord, journaliste et critique de cinéma pour

The New Yorker, qui a également présidé à la Andy Warhol foundation for the Visual Arts. Il était alors l’une des figures publiques les plus appréciées de New York. Il a écrit de nombreux livres, dont une biographie de Frank Lloyd Wright, qu’il connaissait personnellement. Puis,

Ada

Louise Huxtable

(1987-2005) prenait sa relève, écrivain et critique d’architecture qui avait

1. J. Paul Getty est le célèbre auteur du livre How To Be Rich

2. Joseph Giovaninni, «Arthur Drexler, 61, authority on architecture», The New-York Times, 17 janvier 1987

3. «the greatest capitalist in history» http://money.cnn.com/magazines/fortune/fortune_ar- chive/1987/08/31/69488/index.htm 4. http://www.acaarchitecture.com/Mag63%281%29.htm

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reçu en 1970 le prix Pulitzer de la Critique. De 1946 à 1950, elle avait été assistante-curatrice du Département d’Architecture du MoMA. Elle avait ensuite participé à la revue Progressive Archi-

tecture and Art in America jusqu’en 1953, puis elle devint la première critique d’architecture au New York Times. Elle y restera jusqu’en 1982. Elle est depuis critique au Wall Street Jour-

nal. L’influence de sa critique est reconnue de tous, son remplaçant au NY Times, Goldberger déclarait : « Avant Ada Louise Huxtable, l’architecture ne faisait pas partie du débat public »1.

Le rôle qu’elle a joué dans la publicité du débat architectural est donc majeur. Et en tant que membre du jury, elle donna au prix une nouvelle légitimité.

En 1987, le Pritzker s’adjoint un dernier milliardaire avec

Jacob Rothschild

(1987-2004),

banquier anglais, issu de la célèbre famille Rotschild. Philanthrope et amateur d’art reconnu, il entamait sa collection à 20 ans avec les sculptures de Giacometti. Son intérêt pour l’architecture s’est affirmé lorsqu’en tant que président du conseil d’administration de la National Gallery de Londres(1985-1991), il choisit Robert Venturi (PP 91), parmi Stirling, Pei, et d’autres, pour réa- liser l’extension du musée en 19862.

Pendant les 7 années qui suivirent, le jury fut rejoint par quelques intellectuels. Historiens, ar- chitectes étrangers et directeurs de revues internationales donnèrent à l’ensemble une crédibilité renforcée. À partir de 1992, la liste des lauréats se fit par ailleurs moins « select », on clôt la série des puissants.

Stuart Wrede

(Acting Consultant to the Jury 1987-88) est un architecte

né en Finlande et étudiant à Yale jusqu’en 1970. Également historien d’architecture spécialiste de l’architecture Nordique, il fut directeur du département d’architecture du MoMA, de 1988 à 1991. Il fut auparavant directeur de l’École de Design d’Oregon, et enseignant depuis 1977 aux écoles d’architecture de Columbia, Yale, et au MIT. En 1975 et 1976, il fit partie de l’IAUS à New York. Le japonais

Toshio Nakamura

(1991-99) est rédacteur en chef de la revue A+U, et

un des critiques d’architecture les plus réputés au monde. Il a, entre autres, rendu célèbre inter- nationalement son ami Ricardo Legorreta, qu’il côtoya deux ans au sein du jury.

Charles Cor-

rea

(1993-98) est un architecte indien, pionnier de l’architecture contemporaine en Orient, et

sensible aux problématiques du Tiers Monde. De 1970 à 1975, il fut l’architecte en chef du New Bombay, et en 1985 le premier ministre indien le nomma directeur de la Commission Nationale d’Urbanisation.

Jorge Silvetti

3 (1996-2004) est un architecte, professeur à l’école d’architec-

ture de l’Université de Harvard depuis 1975, et directeur du département d’architecture de 1995 à 2002. En 1986, il reçut le prix de Rome de l’Académie américaine. Son agence « Machado and Silvetti Associates » est décrite comme la plus influente de Boston. En 1993, il fut choisi pour réaliser la rénovation de la Villa Getty, un des deux espaces du Getty Museum. En 1996, la céré- monie du prix Pritzker eut d’ailleurs lieu dans le Getty Centre, alors que la Villa Getty fermait pour le début des travaux. Enfin,

Carlos Jimenez

(2001-11) est un architecte né au Costa

Rica, travaillant à Houston, États-Unis.

1. «Before Ada Louise Huxtable, architecture was not a part of the public dialogue» : Paul Gold- berger, «Tribute to Ada Louise Huxtable», The New-York Times, 25 mars 1996

2. Paul Goldberger, «Venturi chosen to design extension of the national gallery», The New-York Times, 25 janvier 1986

3. http://archrecord.construction.com/features/boston/emerging/new-1.asp

Partie 1 : Le prix Pritzker

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Avec ces jurés d’origines diverses, le prix Pritzker prenait enfin un rayonnement international. C’est d’ailleurs à partir des années 1990 que les lauréats furent réellement sélectionnés dans le monde entier (Europe, Japon...).

En 2004, après le départ d’Agnelli, le suisse

Rolf Fehlbaum

1 (2004-10) apporta à son

tour au jury sa fortune et ses relations. Entrepreneur intellectuel, fils de Willi Fehlbaum qui créa Vitra en 1934, il prit la tête de l’entreprise en 1977. Vitra produit des meubles de designers et architectes du XXe siècle, et édite les créations de designers actuels. Sous la direction de Rolf Fehlbaum, l’entreprise confia chacune de ses nouvelles constructions à un architecte célèbre. Ainsi, en 1989, le Vitra Design Museum fut réalisé par Frank Gehry (PP 89), en 1993, le pavillon de conférences par Tadao Ando (PP 95) et la caserne des pompiers par Zaha Hadid (PP 04), un atelier de fabrication fut confié à Alvaro Siza (PP 92) en 1994, et le showroom Vitra à Herzog & de Meuron (PP 01) en 2010. Venu d’Angleterre cette fois,

Lord Palumbo

2 (Chairman 2005-

12) est un tout aussi riche promoteur immobilier. Collectionneur de voitures, de tableaux, puis de

maisons, il devint propriétaire de la Farnsworth House de Mies Van der Rohe, de la Maison Jaoul de Le Corbusier et de Kentuck Knob de F.L. Wright. Il embaucha Mies peu avant sa mort pour le projet « No 1 Poultry » sur le site Mappin&Webb, mais c’est finalement James Stirling (PP 81) qui le réalisa. De 1988 à 1993, il fut directeur du Art Coucil of Great Britain, il est aujourd’hui directeur de la Galerie Serpentine. Parmi ses amis haut placés, on trouvait le Prince Charles, coéquipier de polo, avec lequel il rompit définitivement leur amitié en 1984 après un désaccord architectural, mais aussi Richard Rogers (PP 07).

En 2004 et 2005, le jury du prix s’orientait vers le monde de l’édition avec

Karen Stein

(2004-12), des éditions Phaidon, et l’auteure et historienne de l’architecture

Victoria

Newhouse

(2005-08). À la même période, le consultant du jury Bill Lacy est remplacé par

Marta Thorne

(2006-12), auteure de nombreux ouvrages sur l’architecture. Cette améri-

caine fut commissaire associée du département d’architecture de The Art Institute of Chicago de 1996 à 2005. Ayant ajouté à ses diplômes d’urbanisme et d’art des études d’économie, c’est une spécialiste de l’industrie de la culture.

En 2005, l’arrivée de l’architecte indien

Balkrishna Doshi

(2005-07) annonçait une

nouvelle tendance. Celui qui était alors le dernier collaborateur vivant de Le Corbusier fut dans son pays une figure phare du XXe siècle. Internationalement, il fut un pionnier de l’architecture durable et du logement à bas prix. Peu après lui, deux autres architectes devinrent membres du jury, apportant à cette assemblée l’humilité qui lui manquait.

Shigeru Ban

3 (2007-10) est un

architecte japonais, connu pour ses travaux sur l’habitat d’urgence, et spécialiste de l’utilisation de matériaux pauvres. Il est conseiller pour le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés

1. Pascaline Cuvelier, «Rolf Fehlbaum se cache derrière les meubles, cet Allemand discret a fait de son musée un temple à la gloire du design industriel», Libération, 15 juin 1995

2. «Profile: Builder of dreams or monuments? Peter Palumbo, a visionary at the Arts Council», The Independent, 4 décembre 1993

3. http://www.archilab.org/public/1999/artistes/shig01fr.htm

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et membre du comité éditorial de la rédaction de L’Architecture d’Aujourd’hui1, copropriété de

Jean Nouvel (PP 08). Deux années plus tard, c’est l’architecte chilien

Alejandro Aravena

(2009-12) qui fut appelé à participer. Bien que travaillant au Chili, il fut professeur à l’Université

d’Harvard de 2000 à 2005. Il est aujourd’hui directeur de la société Elemental, qui travaille sur les questions du développement durable et du logement social. Issu de la classe moyenne chilienne, il revendique toujours une vie simple, loin du star-system et de l’architecture des Musées2.

Après les milliardaires, les critiques, les directeurs de galeries, voici venue l’ère des champions du low-cost!

En 2012, un juré d’un type inédit intègre le groupe,

Stephen Breyer

3, membre de la

Cour Suprême des États-Unis depuis 1994. Son intérêt pour l’architecture l’a mené à conduire la conception du Palais de Justice John Joseph Moakley à Boston (architecte I.M. Pei - PP 1983). Malgré cette expérience, et un sens incontestable de la justice, sa place dans le jury fait débat. Enfin,

Yung Ho Chang

est un artiste et architecte chino-américain. Il a enseigné 15 ans dans les plus prestigieuses universités américaines avant de retourner en 1997 à Pékin ou il a ouvert l’Atelier Feichang Jianzhu. Sa pratique de l’architecture est tournée vers l’écologie et la récon- ciliation de l’architecture moderne avec les principes traditionnels chinois. Avec Wang Shu (PP 2012), il est l’un de ceux qui font l’architecture contemporaine en Chine4. Sa démarche et son

cursus le rapprochent de l’architecte lauréat cette année.

Les changements successifs dans la composition du jury sont révélateurs eux aussi des muta- tions du domaine architectural. Alternant milliardaires, historiens, directeurs des plus grandes galeries du monde, architectes américains influents et architecte du tiers monde, le jury du prix Pritzker touche à tous les domaines. Il s’agit d’une volonté de la famille Pritzker : « Les membres

sont invités au sein du jury par la famille Pritzker [...] Dans les discussions à propos des nouveaux jurés, on essaie toujours de former un jury équilibré, de penseurs indépendants représentant des points de vue différents. » 5 Chaque nom de juré est important, possédant une influence décisive

sur l’image internationale du prix. Ce beau mélange de culture et d’argent assure au prix une visi- bilité incontestable. Tous les jurés sont des personnalités reconnues dans leurs domaines respec- tifs, et connues des élites de leur pays. Tous sont proches du pouvoir. Ce sont leurs seuls points communs. Issus de milieux éloignés, et liés à l’architecture pour des raisons singulières, les jurés possèdent des opinions forcément très différentes sur les architectes. Cette variété d’approches est maintenue dans un certain équilibre. En effet, rares sont les années où l’un ou l’autre des domaines prédomine : 2012 est une année exceptionnelle, avec 5 architectes sur 9 jurés, pour un milliardaire collectionneur, une éditrice. Le jury est malgré tout maintenu dans cette diversité,

1. http://www.larchitecturedaujourdhui.fr/retro

2. http://claudiovergara.wordpress.com/2009/07/29/entrevista-a-alejandro-aravena-en-vd/ 3. Robin Pogrebin, «Breyer Invited to Make a Case for Architecture», The New-York Times, 6 octobre 2011

4. GA n°112

5. «The members are invited to join the jury by the Pritzker family. [...] In the discussions about who should join the committee, there is always an attempt to form a balanced jury of independent thinkers who represent different points of view.» : «Interview with Martha Thorne, Executive Direc- tor of the Pritzker Architecture Prize», Conditions, 23 aout 2010

Partie 1 : Le prix Pritzker

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cette absence de spécialisation. Est-ce significatif d’une profession qui se veut dorénavant poly- valente et intéressée par tous les domaines ? Les affaires, l’édition, l’écriture, le droit, la finance, l’art, les médias... Ou s’agit-il d’un moyen sûr de diriger le choix vers un lauréat mondialisé, « mainstream » ?

La position du prix Pritzker est en effet significative. D’autres prix, comme le prix Carlsberg, sont décernés par des jurys plus restreints, et constitués seulement d’architectes ou de critiques et historiens d’architecture. C’est ce qu’explique François Chaslin, qui fut membre du jury du prix Carlsberg : « Dans le jury il y avait 4 ou 5 critiques et un architecte: un japonais, Frampton, moi,

le plus grand architecte danois, Henning Larsen, Peter Davey, le rédacteur en chef d’Architectural Review. » 1 Ce choix oppose le Carslberg au Pritzker, puisque la sélection pointue des jurés du

premier affirme une volonté critique, moins présente chez le second. Il s’agit pour le Carlsberg de personnalités porteuses de visions de l’architecture, et de la qualité architecturale, à peu près similaires. Au contraire, le prix Pritzker, remis par des personnalités influentes mais peu concer- nées par le débat architectural, bénéficie plus de leur image que de leurs idées. Les opinions divergentes des jurés concernant l’architecture, ainsi que le nombre important de membres au sein de chaque jury, assurent des choix peu radicaux, que certains pourraient dire consensuels.

1. cf. annexe : Un entretien avec F.Chaslin

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CHAPITRE 5

La cérémonie

La remise du prix se fait lors d’une cérémonie désormais célèbre,

qui se tient