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La construction d’une théorie générale – Ignorée de la législation pendant longtemps 70 , la notion d’universalité de droit a été façonnée par les auteurs en dehors des

textes qui l’ont créée. Elle a ainsi été conceptualisée à travers ses multiples manifestations sans être reconnue comme une véritable notion. Ce sont ces applications de l’universalité de droit qui doivent constituer le point de départ de notre analyse puisque ce sont elles qui ont permis d’édifier la notion. L’examen de leur apparition, en commençant par celle du patrimoine, fera apparaître les points communs et divergences entre les masses de biens et de dettes, révélant ainsi les caractères essentiels de l’universalité juridique. Cette étape comparative ne peut se faire sans prendre en considération les relations qu’entretiennent ces différentes masses entre elles, d’un point de vue technique mais aussi historique. En ce sens, il s’agit de proposer une théorie générale de l’universalité de droit plutôt que d’en faire une approche purement notionnelle car « la théorie générale répond à l’idée d’une construction intellectuelle, méthodique et organisée, visant à ériger en synthèse cohérente la pensée

70 Hormis les quelques occurrences de l’universel pour désigner le legs ou la transmission et qui traduisent toutes deux l’idée d’un tout, d’une globalité.

relative à une matière déterminée71 ». En ce sens, la théorie générale offre l’avantage d’une vue d’ensemble, d’une prise de recul par rapport à l’objet étudié72. C’est donc une approche

globale de l’universalité de droit que nous proposons et qui traduit l’émergence de la notion (PARTIE 1). Mais appréhender les universalités juridiques sous un unique angle malgré la diversité de ses émanations impose de proposer un régime unique correspondant. Il ne s’agit pourtant pas d’effacer les spécificités de chacune de ces universalités mais de construire un tronc commun de règles applicables à toutes (PARTIE 2).

PARTIE 1–L’EMERGENCE DE LA NOTION D’UNIVERSALITE DE DROIT

PARTIE 2–LA CONSTRUCTION D’UN DROIT COMMUN DE L’UNIVERSALITE DE DROIT

71 D. MARTIN, Préface à la thèse de J. DUCLOS, L’opposabilité – Essai d’une théorie générale, LGDJ 1984. Dans le même sens, v. J. DABIN, Théorie générale du Droit, Dalloz 1969, n°7, p. 8 : pour qui, la théorique générale permet de « dégager la signification de la norme juridique telle que peut la révéler une analyse de sa finalité et de sa fonction d’une part, de sa structure et de ses procédés d’autre part. » ; J.L. BERGEL, op. cit., p. 3 qui écrit : « la théorie général du Droit a pour objet de saisir le phénomère juridique par l’étude de sa raison d’être, de ses finalités, de ses concepts fondamentaux, de sa mise en oeuvre, de ses instruments de sa méthode. En un mot, elle étudie l’ordre juridique dans sa globalité, à travers son ‘pourquoi ?’ et son ‘comment ?’ » ; PH. JESTAZ &CH.JAMIN, La doctrine, Dalloz 2004, p. 230-231. E. SAVAUX, La théorie générale du contrat,

mythe ou réalité ?, LGDJ 1997, n°X, p. 6-7.

PARTIE 1 – L’EMERGENCE DE LA NOTION

D’UNIVERSALITÉ DE DROIT

« La justice sans la force est impuissante ; la force

sans la justice est tyrannique ».

B. PASCAL,

Les Pensées, t. I, éd. Renouard Paris 1670.

17. Patrimoine et universalité, des rapports ambigus. – L’universalité de droit est souvent assimilée au patrimoine ; certains auteurs écrivent d’ailleurs que « l’universalité de droit n’est pas autre chose qu’un patrimoine, (c’est-à-dire un ensemble de droits, tant réels que personnels, constituant un actif, lequel actif servira au besoin à répondre d’un passif spécifique)73 ». Pour beaucoup, ce dernier en est la première, sinon la seule expression74. Cette équivalence unanime entre les notions de patrimoine et d’universalité permet de s’intéresser, dans un premier temps, au seul patrimoine qui, contrairement à l’universalité de droit75, a fait l’objet de nombreuses études. Au-delà de cet avantage scientifique, le patrimoine est présenté historiquement comme la première universalité de droit, de sorte que la confusion dont ces deux notions font l’objet semble avoir offert un terrain fertile pour la création de nouvelles masses de biens et de dettes, sur le modèle du patrimoine. Il paraît alors

73 W. DROSS, Les choses, LGDJ 2012, n°420, p. 775.

74 En ce sens, B. STARCK, Droit civil – Introduction, Paris Librairie technique 1976, n°332 et s., p. 137 et s. ; L. AYNÈS &PH.MALAURIE, Les biens, LGDJ-Lextenso 2016, n°11, p. 8 ; CH.LARROUMET, Droit civil – Les

biens et droit réels principaux, t. II, Economica 2006, n°466, p. 265 ; S. GUINCHARD, L’affectation des biens

en droit privé français, LGDJ 1976, n°384, p. 330 ; R. GARY, Essai sur les notions d’universalité de fait et

d’universalité de droit, th. Bordeaux 1931, p. 250 et s., p. 310 et s.

nécessaire de commencer par l’étude du patrimoine, de son apparition, de sa signification, de sa fonction.

18. Le patrimoine, parangon de l’universalité de droit. – La méthode choisie consiste à partir de la « prétendue » seule application de l’universalité de droit, à savoir le patrimoine. L’évolution des législations, qui admet la pluralité des patrimoines permet de mener à bien cette étude. Il suffit de prendre les points communs entre tous les patrimoines existant pour pouvoir identifier ses critères. De là, il sera possible de déterminer ce qui relève de l’universalité et ce qui relève du patrimoine. L’emploi du même terme pour désigner les deux ensembles doit tendre à une communauté de caractères, de nature et de régime ou du moins, à la création d’un tronc commun de règles. Les similitudes entre deux notions laissent penser qu’il n’en existe qu’une seule ; et à cette notion unique correspond un régime unique et l’unicité de la notion d’universalité de droit peut engendrer une multiplicité d’applications. Pourtant, l’apparition de la notion de patrimoine résulte de travaux bien plus récents que celle d’universalité. Celle-ci peut se présenter, de façon générique, comme l’abstraction nécessaire à une mise en relation entre biens et dettes. Identifier le patrimoine à une universalité juridique semble alors possible mais insuffisant. On peut y déceler une relation de genre et d’espèce qu’il conviendra d’étudier. En d’autres termes, pour définir l’universalité de droit (TITRE 2ND

), il faut au préalable définir le patrimoine et analyser ses relations avec les autres ensembles, de biens et de dettes (TITRE 1ER).

TITRE 1ER –LE PATRIMOINE, MODÈLE D’UNIVERSALITÉ DE DROIT

TITRE 1

ER

– LE PATRIMOINE, MODÈLE DE

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