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La masse commune, une propriété collective ? – Dans le même ordre d’idée, la masse commune semble présenter les mêmes caractères que l’indivision Définie comme la

B. Les universalités juridiques innommés

88. La masse commune, une propriété collective ? – Dans le même ordre d’idée, la masse commune semble présenter les mêmes caractères que l’indivision Définie comme la

propriété exercée par plusieurs dans la poursuite d’un intérêt collectif, la propriété collective ne se confond ni avec la propriété individuelle du groupement personnifié, ni avec la

335 Ainsi, DE PAGE &DEKKERS, Traité de droit civil, Tome IX, Partie III et Partie IV ; A.C. VAN GYSEL, th.

préc., p. 232 et p. 239.

336 L’autonomie de la masse existe qu’importe que l’héritier soit tenu intra vires cum viribus ou pro viribus puisque c’est le principe de distinction des dettes qui est ici garanti. Les créanciers personnels de l’héritier n’ont donc jamais accès à l’actif de la masse successorale et ne seront donc, sur ces biens, jamais en concours avec les créanciers successoraux. En ce sens, B.BEIGNIER, Libéralités et successions, LGDJ-Lextenso 2016, n°588 et s., p. 276 et s. ; PH.MALAURIE &CL.BRENNER, Droit des successions et des libéralités, LGDJ-Lextenso 2016, n°251 et s., p. 155 et s. ; FR.TERRÉ,Y.LEQUETTE &S.GAUDEMET, Droit civil – Les successions, les

libéralités, Précis Dalloz 2013, n°972 et s., p. 857 et s. ; M.GRIMALDI, Droit civil – Les successions, Litec 2017, n°617 et s., p. 490 et s. ; CH.JUBAULT, Droit civil – Les successions, les libéralités, Montchrestien 2010, n°1019 et s., p. 685 et s. ; A.M. LEROYER, Droit des successions, Dalloz 2014, n°389 et s., p. 296 et s. ; A.M. LEROYER, « Réforme des successions et des libéralités », comm. de la loi n°2006-728 du 23 juin 2006, RTD Civ. 2006, p. 612 et s. : l’auteure remarque une évolution dans la politique législative des successions puisque le droit encourage désormais l’héritier à accepter la succession à concurrence de l’actif net. Cette évolution a pour effet de transformer le droit des successions en un système de succession aux biens plutôt que celui de la succession à la personne.

337 A cette différence que la séparation des patrimoines n’opère pas de plein droit, elle doit être invoquée par le créancier qui entend en bénéficier (art. 878, C. Civ.). Par ailleurs, elle ne concerne pas l’ensemble de la masse successorale puisque le créancier qui l’invoque doit préciser le bien qu’il entend protéger de la confusion résultant de l’acceptation pure et simple, par l’héritier, de la succession (art. 879, C. Civ.).

338 La masse est rattachée à l’héritier puisqu’il n’est plus question de considérer le défunt comme propriétaire du patrimoine. Il est donc bel et bien titulaire de la masse successorale et se retrouve donc effectivement à la tête de deux universalités le temps de la liquidation. V. sur ce point, G. WICKER, op. cit.

339 Cf. infra (n°515)

340 À ce titre, le Professeur LEQUETTE a d’ailleurs fait remarquer que la séparation de patrimoines (dans le cas d’un héritier unique) semble poursuivre le même objectif que l’article 815-17 (dans le cas d’une succession à plusieurs héritiers) : v. Y. LEQUETTE, « Le privilège de séparation des patrimoines à l’épreuve de l’article 815- 17 du Code civil », in Mélanges Alex Weill, Dalloz-Litec 1983, p. 371 et s.

propriété indivise, gouverné par les intérêts individuels de chaque indivisaire341. Cette forme particulière de propriété serait issue de la Gesammte Hand, de la propriété en main commune du Droit allemand. Certains auteurs ont proposé de voir dans la masse commune, une forme de propriété collective dans la mesure où les biens qui s’y trouvent, les biens qualifiés de communs, sont la propriété des deux époux, lesquels ne sont pourtant pas titulaires de quote- part. Ils pourraient donc exercer leurs droits sur ces biens de manière concurrente, ce que confirme l’article 1421 du Code civil et, par exception de manière conjointe, sans que les actes ainsi accomplis ne puissent être remis en cause342. Que l’on soit d’accord ou non avec cette analyse343, la propriété collective n’explique que la technique, le moyen de parvenir à la masse commune et ne permet pas de déterminer sa nature. Les régimes matrimoniaux communautaires font naître une masse commune, aux côtés de deux masses propres à chaque époux. Or la masse commune ne semble pas correspondre à une indivision ou à un patrimoine344 – social si l’on considère la personnalité juridique du couple ou d’affectation. 89. La masse commune, une universalité juridique. – La communauté du régime matrimonial légal a fait l’objet de nombreuses recherches. Sa nature juridique est encore aujourd’hui discutée et certains ont proposé d’y voir une société345 ou une copropriété

particulière346. Certains y ont vu une véritable masse autonome pouvant être qualifiée de patrimoine affecté347. C’est parce qu’une fois encore, la masse commune, comme toute

341 En ce sens, v. L. JOSSERAND, « Essai sur la propriété collective », in Livre du centenaire du Code civil, éd. Arthur Rousseau, t. I, p. 357 et s. ; FR. ZÉNATI, « La propriété collective existe-t-elle ? », in Mélanges

G. GOUBEAUX, LGDJ-Dalloz 2010, p. 589 ; W. DROSS, Les Choses, LGDJ 2012, n°156 et s., p. 303 et s. ; F. DELHAY, th. préc., n°285 et s., p. 423 et s. V. également A. CHAIGNEAU, « Propriété collective », in

Dictionnaire des biens communs, dir. M.CORNU,F.ORSI &J.ROCHFELD, PUF 2017 : l’auteure fait ici une présentation de la notion sans pour autant la distinguer, à la différence des autres auteurs, des autres formes de propriété plurale.

342 V. notamm. E. MEYNIAL, « Le caractère juridique de la communauté entre époux », RTD civ. 1903, p. 811 et s. ; L. MASSE, Caractère juridique de la communauté entre époux dans ses précédents historiques, th ; Paris 1902 ; L. JOSSERAND, op. cit. ; et dans une certaine mesure, R. LIBCHABER, « Les incertitudes de la communauté », in Mélanges G. CHAMPENOIS, Defrénois 2012, p. 583 et s. ; W. DROSS, op. cit., n°159-2, p. 307- 308 et n°163-4, p. 317-318.

343 Il conviendra de revenir sur cette idée de propriété collective plus tard car le lien, d’une part, entre l’universalité juridique et la personne juridique n’est pas nécessairement le même que le lien qui unit, d’autre part, les biens contenus dans l’universalité et la personne qui en est titulaire : cf. infra (n°490 et s.).

344 R. LIBCHABER, ibid.

345 J. CARBONNIER, Le régime matrimonial, sa nature juridique sous le rapport des notions de société et

d’association, Bordeaux 1933.

346 FR.TERRÉ &PH.SIMLER, Les régimes matrimoniaux, Précis Dalloz 2014, n°268, p. 199 ; R. LIBCHABER, art. préc.; FR.ZÉNATI, ibid.

347 S. GUINCHARD, th. préc, n°375, p. 324 et n°393, p. 337 ; G. WICKER, th. préc., n°359 et s., p. 335 et s. ; v. dans une certaine mesure, N. BARUCHEL, th. préc., n°318 et s., p. 182 et s. ; D. HIEZ, th. préc., n°199, p. 124 ; A.L. THOMAT-RAYNAUD, th. préc., n°452, p. 215.

universalité de droit, comprend un passif qui lui est propre348. Ainsi les créanciers de la masse ne seront pas en concours avec certains autres, les créanciers personnels des époux. Selon Madame BARUCHEL, l’autonomie de la masse commune n’apparait qu’au moment de la

contribution. Il faut pourtant voir qu’elle existe en réalité déjà au stade de l’obligation à la dette349. Il ne faut pas attendre la dissolution du régime matrimonial pour voir apparaître un passif propre à la masse commune. Certes, le fait qu’il existe une distinction entre obligation et contribution à la dette permet d’attester d’une véritable autonomie de la masse commune. Si elle a réglé une dette dont elle n’avait pas définitivement la charge, elle a droit à récompense. Transposé à l’hypothèse où le couple serait doté de la personnalité morale, ce droit à récompense ne s’analyserait pas autrement qu’en une action en remboursement dans le cas du paiement de la dette d’autrui, le couple ayant payé à la place d’un des époux350.

Donc si la contribution à la dette est une preuve ou un symbole de l’autonomie de la masse commune, elle n’en est en revanche pas le fondement. En effet, l’autonomie de toute universalité de droit s’analyse au regard du droit de poursuite des créanciers. C’est donc au stade de l’obligation à la dette qu’il faut rechercher s’il existe ou non une autonomie de la masse, une corrélation actif-passif suffisamment forte pour distinguer ladite masse des patrimoines respectifs des époux. Or l’article 1410 du Code civil prévoit que « les dettes dont les époux étaient tenus au jour de la célébration de leur mariage, ou dont se trouvent grevées les successions et libéralités qui leur échoient durant le mariage, leur demeurent personnelles, tant en capitaux qu'en arrérages ou intérêts. ». L’article suivant énonce à son tour que « les créanciers de l'un ou de l'autre époux, dans le cas de l'article précédent, ne peuvent poursuivre leur paiement que sur les biens propres et les revenus de leur débiteur. ». Ces créanciers,

348 R.T. TROPLONG,Du contrat de mariage et des droits respectifs des époux, éd. Paris Hingray 1857, vol. 2, n°692 et s., p. 8 et s. ; J. BONNECASE, Supplément au Traité théorique et pratique de droit civil de Baudry-

Lacantinerie, 1929, t. IV, n°230 et s., p. 483 et s. ; M. PLANIOL &G. RIPERT, Traité pratique de droit civil

français, t. 8, Régimes matrimoniaux, 2e éd., LGDJ 1957, n°290 et 292 ; J. PATARIN &G.MORIN, La réforme

des régimes matrimoniaux, t. 1, 4e éd., 1977, Defrénois, n°217 ; H., L. & J. MAZEAUD, Leçons de droit civil, t. 4, 1er vol., Régimes matrimoniaux, 5e éd., 1982, par DE JUGLART, Montchrestien, n°216 ; J.FLOUR & G. CHAMPENOIS, Les régimes matrimoniaux, Dalloz 2001, n°428 et s., p. 401 et s. ; PH.MALAURIE &L. AYNÈS,

Régimes matrimoniaux, LGDJ-Lextenso 2013, n°502, p. 202 ; I. DAURIAC, Droit des régimes matrimoniaux et

du PACS, LGDJ-Lextenso 2015, n°442 et s., p. 237 et s., spéc. n°448, p. 241-242 ; R. CABRILLAC, Droit des

régimes matrimoniaux, LGDJ-Lextenso 2017, n°141, p. 116 ; W. Dross, Les Choses, LGDJ 2012, n°163 et s.,

p. 318 et s. ; G. YILDRIRIM, Répert. Civ. Dalloz, V°Communauté légale (3° répartition des dettes) ; R. TENDLER, « La protection des époux mariés sous le régime de la communauté légale face à leurs créanciers », in Mélanges

D. HUET-WEILLER, PUF 1994, p. 477 et s.; L. JOSSERAND, art. préc. ; FR. ZÉNATI, « La propriété collective existe-t-elle ? », art. préc., spéc. p. 605 ; FR. DELHAY, th. préc., n°273 et s., p. 404 et s. ; B.FROMION-HÉBRARD,

th. préc., n°214, p. 180.

349 N. BARUCHEL, th. préc., n°319, p. 183.

350 Sur les fondements bien connus du régime général de l’obligation en commençant par la subrogation légale des articles 1346 et s. du Code civil, d’autant que celle-ci est désormais ouverte à quiconque avait un « intérêt légitime » au paiement de la dette, ce qui aurait toujours été le cas du couple qui paye pour l’un de ses membres.

qualifiés expressément par la loi de personnels, ne peuvent donc entrer en concours avec les autres créanciers du couple sur les biens communs. Entrent également dans la catégorie des créanciers personnels, le prêteur ou le créancier bénéficiaire d’un cautionnement qui n’a pas obtenu l’accord des deux époux à l’opération. L’article 1415 du Code civil n’offre en effet à ces créanciers que la même assiette que celle de l’article 1411. L’exclusivité du droit de gage général des créanciers communs est donc indiscutable et la masse commune correspond alors bel et bien à une universalité de droit351.

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