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l’interaction verbale

3.2.1 Constitutions des groupes expérimentaux

La population de cette recherche est constituée de 30 participants, 18 hommes et 12 femmes (âge : 41.5 + 16). Tous les sujets participant à l’étude sont majeurs et sont de langue maternelle française. De façon générale, notre population se répartit selon deux grands groupes de participants.

Un premier groupe, constituant notre groupe expérimental, est composé de vingt deux participants présentant un diagnostic de schizophrénie (SCH par la suite), dont 14 hommes et 8 femmes (âge : 45.0 + 15.4). Le diagnostic de schizophrénie est posé par des médecins

psychiatres ne participant pas à la recherche selon les critères du DSM-IV (APA, 1994). Les participants schizophrènes ne présentaient aucun syndrome neurologique, ne souffraient pas d’intoxication alcoolique et n’avaient pas fait usage de substances toxiques dans les mois précédents.

En fonction des objectifs que nous proposons de suivre, le deuxième groupe de participants constitue notre groupe contrôle (HC par la suite). Il est composé de huit individus - dont quatre hommes et quatre femmes (age : 32.1 + 14.3) - ne présentant pas de diagnostic psychiatrique ni d’antécédent de cet ordre et ne prenant aucun traitement psychotrope.

Notre groupe expérimental (SCH) peut lui-même être décomposé en deux sous-groupes expérimentaux en fonction de « la forme clinique de la pathologie schizophrénique » (cf. chapitre 1, § 1.2.2.) qu’ils présentent. La répartition en fonction des sous-types cliniques du DSM-IV (1994) pour les patients schizophrènes est la suivante : 14 schizophrènes de type paranoïde (SCH-P par la suite) et huit schizophrènes de type désorganisé (SCH-D par la suite). Les caractéristiques sociodémographiques sont présentées dans le tableau 3.1. ci-dessous.

Tableau 3.1. - Caractéristiques sociodémographiques de la population étudiée. nombre de patients ; M : moyenne ; DS : déviation standard.

Pour ce qui est des variables sociodémographiques, les comparaisons entre nos trois populations (SCH-P, SCH-D et HC) n’indiquent aucune

différence significative en ce qui concerne le nombre d’années d’études (F

= 1,813 ; p = .189), l’âge (F = 2,060 ; p = .147) ou le sexe (Khi-deux corrigé

= 0,454 ; p = .80). Les facteurs ‘âge’, ‘sexe’ et ‘niveau d’éducation’

n’interfèrent donc pas avec les résultats.

Par ailleurs, nous nous sommes attachés dans ce travail de recherche à contrôler la variable indépendante « médication antipsychotique ». En effet, parmi les 14 schizophrènes de type paranoïde (SCH-P), neuf prenaient quotidiennement depuis au moins trois ans un traitement neuroleptique (SCH-P-A) et cinq n’en prenaient pas et n’en avaient jamais pris par le passé (SCH-P-S). Parmi les huit patients schizophrènes de type désorganisé (SCH-D), six prenaient quotidiennement depuis au moins trois ans un traitement neuroleptique (SCH-D-A) et deux n’en prenaient pas et n’en avaient jamais pris par le passé (SCH-D-S).

Ainsi, la comparaison des deux populations de schizophrènes (SCH-P et SCH-D) quant aux traitements neuroleptiques auxquels elles sont soumises (moyenne en équivalent chlorpromazine en milligrammes par jour35) ne montre aucune différence significative (F = 0,113 ; p = .740).

Chacune de ces deux populations comprenant des patients traités par neuroleptiques et des patients non traités, la comparaison entre les populations schizophrènes de type paranoïde avec traitement (SCH-P-A) et schizophrènes de type désorganisé avec traitement (SCH-D-A), ne montrent pas non plus de différence significative (F = 0,588 ; p = .711) (cf.

Tableau 3.2.). Le facteur ‘médication’ n’interfère donc pas avec les résultats.

35 La comparaison des doses de neuroleptiques en équivalent chlorpromazine a été effectuée sur la base des travaux de Woods (2003) dont la table est présentée en annexe 1.

Tableau 3.2. – Dosage du traitement neuroleptique en équivalent chlorpromazine en mg/jour.

SCH-P

(SCH-P-A / SCH-P-S)

SCH-D

(SCH-D-A / SCH-D-S) Equivalent Chlorpromazine

en mg

173 + 164 (281 + 107 / 0)

200 + 183 (280 + 148 / 0) Note : SCH-P : schizophrènes de type paranoïde ; SCH-D : schizophrènes de type désorganisé ; SCH-S : schizophrènes sans traitement ; SCH-A : schizophrènes sous traitement.

Enfin concernant le type de traitement neuroleptique administré aux 15 patients schizophrènes avec traitement, il peut être qualifié : soit d’atypique (ou de deuxième génération) (n = 9), de conventionnel (ou de première génération) (n = 2), soit de combiné, c'est-à-dire comprenant un traitement antipsychotique atypique et un traitement antipsychotique conventionnel (n = 4).

3.2.1.1. La thérapeutique pharmacologique

L’arrivée des traitements psychopharmacologiques a sans doute constitué l’une des principales révolution des dernières années dans le domaine de la prise en charge des patients présentant cette pathologie.

Nombreuses sont les données qui indiquent que des perturbations dans l’activité chimique du cerveau dans la schizophrénie contribuent au développement des symptômes et peuvent être corrigés par des médicaments qui affectent les mécanismes chimiques du cerveau.

De ce point de vue, les psychotropes offrent non seulement une solution « technique » à certaines pathologies mais également une manière de penser le psychisme (Widlöcher, 1990).

3.2.1.1.1. les neuroleptiques conventionnels

De nos jours, la chimiothérapie comme traitement de la pathologie schizophrénique demeure essentiellement fondée sur la prescription de

neuroleptiques36 qui restent des médicaments de référence. Les effets des neuroleptiques de première génération (conventionnels) sur les systèmes neurotransmetteurs de la dopamine ont été découverts en 1952 par Delay et Deniker avec la mise à jour des propriétés antipsychotiques de la chlorpromazine, sans que l'on puisse pour autant expliquer les mécanismes d'action de ce produit. Cet abord chimiothérapique fait suite aux thérapeutiques de choc utilisées jusque-là comme l’insulinothérapie (ou cure de Sakel) et l’électroconvulsothérapie. Le premier neurotransmetteur (messager chimique permettant aux cellules de communiquer les unes avec les autres) dont on a découvert l’implication sur les symptômes de la schizophrénie a été la dopamine. Ces observations ont permis à l’« hypothèse dopaminergique de la schizophrénie » de voir le jour (Carlsson & Lindqvist, 1963). Les données pharmacologiques accumulées qui étayent cette hypothèse sont nombreuses et convergentes (Costentin, 1981). Au niveau de leur mode d’action sur les neuromédiateurs, toutes les molécules à visée antipsychotique ont en commun un effet de blocage des récepteurs dopaminergiques post-synaptiques. Des substances qui stimulent le système dopaminergique, comme les amphétamines, exacerbent les symptômes psychotiques chez les schizophrènes et provoquent leur apparition chez les sujets normaux. Inversement, la symptomatologie des patients diminue s’ils prennent des médicaments qui bloquent les récepteurs dopaminergiques. Cette propriété a donc prévalu comme hypothèse dopaminergique de la schizophrénie (cf. chapitre 1, § 1.3.3.1.).

Néanmoins, les traitements neuroleptiques de première génération (conventionnels) ont montré leur limite dans le traitement des signes négatifs et cognitifs de la schizophrénie. Par ailleurs, ces médicaments ont également des effets secondaires contraignants comme celui d’induire des effets secondaires tels que le parkinsonisme ou la dyskinésie tardive (troubles dans l'accomplissement des mouvements), effets participant certainement à la mauvaise observance des patients à ces traitements, d’où le nombre important de rechutes.

36 Les neuroleptiques ou antipsychotiques sont des psychotropes se caractérisant par leur activité thérapeutique dans les psychoses.

3.2.1.1.2. les antipsychotiques atypiques

Les limites d’efficacité des neuroleptiques conventionnels et leurs effets secondaires ont donc incité les chercheurs à trouver de nouvelles molécules ayant une efficacité au moins comparable tout en évitant la plupart des inconvénients des molécules conventionnels. C’est ainsi que, de nombreux neuroleptiques ont été mis sur le marché, dont les propriétés vont des plus sédatifs, destinés à diminuer l'agitation et l'angoisse, aux plus antiproductifs destinés à amender les hallucinations et les délires. Plus encore, l’essor de la neurobiologie a permis à la recherche pharmacologique de mettre l’accent sur l’implication de la sérotonine dans les troubles schizophréniques (cf. chapitre 1, § 1.3.3.3.) et de développer des molécules actives sur les deux pôles - positifs et négatifs - de la maladie avec une meilleure tolérance neurologique. Ces médicaments sont appelés antipsychotiques atypiques (de deuxième génération). Ces nouveaux neuroleptiques ont la particularité d’entraîner moins d’effets secondaires (pas d’effets extrapyramidaux ni sous-corticaux) que les molécules de la génération précédente et, par conséquent, d’être bien mieux tolérés tout en restant efficaces sur les symptômes de la maladie. Leur efficacité sur les symptômes négatifs a été mis en évidence pour la première fois par Kane et collaborateurs (1988).

Cette découverte importante est venue modifier la vision communément admise à l’époque, vision compatible avec l’hypothèse de Crow (1980) selon laquelle les symptômes négatifs étaient sous-tendus par des dommages cérébraux et structuraux, et donc immuables au changement thérapeutique. C’est dans cette voie que de nombreuses recherches ont été effectué pour rendre compte de l’impact différencié de ces molécules au profil différent.

L’efficacité de ces molécules de nouvelles génération serait supérieure vis-à-vis des signes négatifs et positifs, et même cognitifs et serait sous-tendue par un profil d’action originale des molécules avec un antagonisme au niveau d’autres récepteurs cérébraux que sont les récepteurs de la sérotonine. Cependant, les résultats des recherches s’attachant à étudier les bénéfices supposés de ces nouvelles molécules restent encore

largement contradictoires (Daban et al., 2005 ; Meltzer & Gurk, 1999 ; Cuesta, Peralta & Zarzuela, 2001 ; Purdon, 2000 ; Sumiyoshi, Jayathilake

& Meltzer, 2002 ; Verdoux, Magnin & Bourgeois, 1995).