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Les conséquences du congé parental

1. Problématique

1.4. Les difficultés rencontrées par les parents

1.4.1. Les conséquences du congé parental

L’impact d’une naissance sur les revenus des femmes par rapport à celui des hommes est régulièrement évoqué au Québec comme l’une des causes de l’inégalité des salaires, car la plupart du temps : « […] la répartition des responsabilités parentales entre les mères et les pères a eu tendance à peu bouger au cours des dernières décennies, le modèle dominant demeurant une présence accrue des hommes sur le marché du travail et un surinvestissement féminin dans les tâches domestiques; seuls les soins directs aux enfants tendent à échapper à cette disparité stéréotypée » (Pronovost, 2015 :49). Une recherche documentaire réalisée par l’OIT a réuni les résultats de différentes études pour faire un portrait mondial de l’inégalité des salaires due à la maternité (maternity wage gap) qui montre que devenir mère amène des pénalités qui varient non seulement selon les pays, mais aussi selon le nombre d’enfants, leur âge et, dans les pays en développement, selon leur genre (Grimshaw et Rubery, 2015 :15).

Pour le père toutefois, plusieurs études menées à l’international tendent à montrer qu’habituellement, la naissance d’un enfant était plutôt associée à une « bonification » (wage premiums), ce dernier étant perçu par son employeur comme un homme mature, qui prend des responsabilités et qui est stable. Ainsi, un homme sans enfant gagnera moins qu’un père, instaurant une « prime à la paternité » (Grimshaw et Rubery, 2015 :20, Bumpass et al., 2009 : 219; Gadéa et Marry, 2000 :113).

Une étude française concluait en 2006 que « […] seuls 20% des pères qui travaillent avant une naissance déclarent un changement professionnel l’année suivante, qu’il s’agisse d’un changement de statut, d’horaire ou d’intensité du travail, alors que la moitié des mères sont dans ce cas » (Pailhe et

al., 2006 :258). La mère a toujours été la principale visée par les conséquences négatives des congés

de maternité, car non seulement elle s’absente longtemps après la naissance d’un enfant, mais elle sera davantage portée, après son retour en poste, à refuser des heures supplémentaires par obligations familiales ou à s’absenter pour prendre soin des enfants lorsqu’ils sont malades. Le père est donc perçu comme le « parent stable », un employé plus sécuritaire à engager et à former pour un employeur (Grimshaw et Rubery, 2015 :26).

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Il est important de mentionner qu’au Québec perdre un emploi à cause d’une naissance à venir est illégal. Le site internet des normes du travail québécoises répond d’ailleurs clairement à la question, dans la section traitant des congés de maternité :

Au retour d’un congé de maternité, l'employeur peut-il affecter une salariée à d’autres tâches que celles qu’elle exerçait auparavant, peut-il modifier son horaire, réduire ses heures ou la congédier parce qu'il préfère sa remplaçante ?

Non. À la fin d’un congé de maternité, l’employeur doit réintégrer la salariée dans le poste qu’elle occupait au moment de son départ. Elle conserve les avantages qu’elle possédait, y compris le salaire auquel elle aurait eu droit si elle ne s’était pas absentée. Cela pourrait inclure les augmentations de salaire dont elle aurait bénéficié. Si le poste habituel n’existe plus à son retour, elle doit bénéficier de tous les droits et privilèges existant auparavant, comme si elle n’avait pas été absente. (Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2016a)

Spécifiquement pour les pères, le site précise :

À la fin du congé de paternité, l’employeur doit réintégrer le salarié dans son poste habituel et lui donner le salaire et les avantages auxquels il aurait eu droit s’il était resté au travail. Si son poste a été aboli, le salarié conserve les mêmes droits et privilèges que ceux dont il aurait bénéficié s’il était demeuré au travail. (Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2016a)

Puis on rappelle la Loi québécoise, valide pour les trois formes de congé (maternité, paternité et parental) :

Les absences pour congé parental sont protégées par la Loi sur les normes du travail. L’employeur ne peut pas vous congédier, vous suspendre, vous déplacer, ni vous faire subir des mesures discriminatoires parce que vous vous êtes absenté pour congé parental. Si l’une de ces situations se produit, vous pouvez déposer une plainte pour pratique interdite. (Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2016a)

Pourtant, cela ne signifie pas que les conséquences négatives n’existent pas. En avril 2016, un père de la région de Shawinigan faisait la manchette de Radio-Canada, car il avait été congédié au retour de cinq mois de congé parental, son employeur ayant décidé de conserver son remplaçant (Radio- Canada, 2016). Dans les neuf premiers mois de 2015, ils étaient 42 pères à porter plainte pour « pratique interdite » à cause d’un « retour de congé de paternité » et il y avait sûrement quelques

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pères aussi dans les 136 plaintes liées au congé parental (Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2016b). C’est peu comparé aux 153 mères comptabilisées dans les plaintes relatives au retour du congé de maternité (qui s’additionnent à une large part des plaintes liées au congé parental), mais c’est un motif nouveau pour les pères depuis l’instauration du RQAP. Et ces plaintes ne sont que la pointe de l’iceberg, car pour les employés qui estiment avoir été mis de côté à cause de leur congé, il est extrêmement difficile de prouver que cette mise à pied était véritablement liée à son absence parentale.