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II. Résultats partie qualitative 80 

II.6. La vie après les violences 101 

II.6.4. Connaissance des recours possibles 104 

Place de l’hôpital et des soignants

Ainsi, pour 6 d’entre elles (E1, E2, E3, E5, E6, E9), l’hôpital n’a servi qu’à la réalisation d’un certificat de coups et blessures.

Une femme (E7), métropolitaine d’origine, a trouvé dans le personnel médical (du domaine amical plus que professionnel) une écoute attentive et des conseils précieux E7 : « Ben elle est super ce médecin. Moi elle m’aide, elle a des réponses, elle a une analyse fine des choses. ».

105 Et a eu recours au secteur médical et paramédical pour réalisation d’arrêt de travail dans un contexte de violence conjugale : E7 : « J’ai deux arrêts de travail pour violence conjugale » ainsi que pour une écoute professionnalisée : E7 : « J’ai vu une psychologue » ; « J’ai filé à l’hôpital, aux urgences. Et j’ai tout raconté au médecin » et un travail de médiation avec son conjoint : E7 : « Il y avait aussi un travail de médiation avec mon amie médecin ».

Une seule (E4) est insérée dans le secteur hospitalier afin de recevoir de l’aide et un soutien psychologique a posteriori de toutes les démarches initiées, via un suivi au Centre Médico Psychologique du Centre Hospitalier de Mamoudzou, pour elle et ses enfants : E4 : « Je pensais que comme ça, à l’hôpital, on me connaîtrait très bien, que tous ces coups étaient suivis et enregistrés au cas où il m’arrive quelque chose de plus grave. ».

D’autres parlent de l’hôpital comme un lieu qui n’inspire pas la confiance adéquate à la déclaration d’une souffrance psychologique : E1 : « Non, je n’irai pas spontanément, l’hôpital c’est quand on est malade » avec la problématique du secret médical, qui inspire le doute, dans un contexte insulaire : « Mais le problème c’est le secret médical, Mayotte est petit, moi par exemple si je vais à l’hôpital tout le monde me connait, tout le monde s’interrogera de ma présence. ».

L’hôpital est aussi représenté comme un lieu de potentielle agression par le conjoint manipulateur et calculateur : E4 : « Le problème aussi, c’est que mon dossier n’est pas complet parce que je n’ai pas de certificat médical. Pourquoi ? Parce qu’à chaque fois qu’il me tapait ces derniers temps j’allais à l’hôpital. Mais il m’attendait à la sortie de l’hôpital et il déchirait le certificat. ».

Justice

De par sa position centrale dans le parcours d’une femme victime de violence, la justice, représentée par la police et la gendarmerie ont un rôle prépondérant.

Seulement, les femmes ont des doutes quant à leurs compétences d’écoute et d’orientation, par un désintéressement de la sphère privée : E1 : « La police pff, ils ne font pas leur boulot, on peut se faire agresser, mais quand on les appelle ils nous disent que si c’est un problème de couple, vous allez vous retrouver le lendemain, ça va se passer. », ainsi que des doutes quant à la partialité des forces de l’ordre : E4 : « Mais c’était à l’époque des grèves de 2011 Donc pendant ce temps-là, nos affaires étaient mises de côtés, parce que les affaires de la grève de la vie chère étaient prises en priorité » ; « Vous connaissez la gendarmerie comment ils allègent les choses » ou des avocats : E4 : « Le premier avocat il ne me croyait pas, il me disait que ce n’était pas possible que je reçoive ces violences conjugales. Il me disait que des disputes entre conjoint c’est normal, que ce n’était pas comme si j’étais une fille de 5 ans qui se faisait violer. Donc à un moment donné, il a dit que dans l’affaire, on était quitte. Il était allé en prison et ça suffisait. Que si je n’étais pas contente il fallait que je prenne un autre avocat. ».

Doutes quelquefois liés à un scepticisme rapporté E1 : « Quand je suis allé à la gendarmerie, ils ne m’ont pas cru. Je suis parti en larme du commissariat, et ils sont venus après. » ou absence d’orientation de leurs plaintes : E2 : « La justice ne m’a pas orienté suite à ma plainte », doutes également liés à un abandon judiciaire de l’affaire E3 : « L’enquête de la police a confirmé qu’il n’y avait pas de preuve, ils ont envoyé le dossier au procureur qui l’a classé sans suite parce qu’il n’y avait aucune trace ni de signe de viol. » ou enfin à des délais de réaction particulièrement longs, qui mettent en danger la femme, en situation d’urgence

106 vitale : E4 : « C’était en attente, et c’est resté très longtemps en attente. Du coup, lui il a pensé que c’était bon, vu qu’on n’avait pas de nouvelle de l’affaire, donc il a continué. » ; E5 : « Les voisins ont appelé la police, qui est venue mais qui n’ont pas osé rentrer dans la maison ». La sphère judiciaire a été considéré comme une aide salvatrice pour deux des femmes interrogées, lors d’un épisode de violence : E6 : « La police est venue, ils ont pris des photos et tout. » ; « Je suis sortie de la maison, et je suis directement allé voir la police. Ils sont venus à domicile, ils l’ont menotté et l’ont amené directement en garde à vue » ou grâce à l’orientation des conseillers juridiques : E7 : « Elle (conseiller juridique du CDAD) m’a dit ʺ avec tout ça, on demande le divorce. ʺ ».

Associations

Avant leur orientation, puis insertion dans une structure d’aide, les femmes ne connaissaient pour 7 d’entre elles, aucune structure ou association d’aide aux femmes victimes de violence. Seules 2 connaissaient l’ACFAV et ont donc fait leurs démarches d’insertion elles-mêmes (E4, E9), parmi elles, une femme (E4) connaissait le numéro d’urgence mis en place par l’ACFAV (E4), mais le franchissement de la porte a été source d’angoisse, et n’a pas pu se faire qu’au bout d’un certain temps : E4 : « Quand j’ai appelé le 5555, je suis venu trois fois devant la porte, et à chaque fois que devant la porte je connaissais quelqu’un, je repartais, et les enfants me posaient les questions ʺ pourquoi on n’est pas rentré ʺ je leur disais que j’avais peur que ça se retourne contre moi, j’avais peur que les choses n’aillent pas au bout, j’avais peur que les gens se disent des choses. ».

Une femme (E9), qui a vécu ces situations de violence majoritairement à La Réunion, ne connaissait aucune structure d’aide dans ce département, et est revenue à Mayotte pour porter plainte, auprès des structures existantes. C’est ainsi qu’elle a poussé la porte de l’ACFAV. Les autres femmes ont donc été adressées par la famille pour une femme E2 : « Ma sœur m’en avait parlé de l’ACFAV, elle est venu ici pour m’aider à porter plainte à la gendarmerie », par les instances religieuses pour une femme (E8), par le bouche à oreille pour une femme (E9), par la justice pour 4 d’entre elles (E4, E5, E6, E7) E4 : «Je les ai connu par l’assistance sociale de la gendarmerie. Elle m’a dit de passer voir l’ACFAV pour moi ». Par d’autres structures d’aides pour une femme : E3 : « J’étais allé voir au conseil général, j’ai raconté mes problèmes et après on m’avait donné des papiers pour demander une pension alimentaire et dit d’aller à l’ACFAV pour chercher des conseils. ».