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Conditions de forme de la cession

Partie II : Détermination de la modalité de redressement

Paragraphe 3: Conditions de forme de la cession

La cession, qui est une forme intermédiaire entre la vente forcée et la vente volontaire aux enchères publiques, est un engagement unilatéral, validé par une juridiction. Ce mécanisme est un bien ajusté à l’aliénation d’éléments complexes, pour lesquels les acquéreurs ne sont pas nombreux141. En outre, ces

141 Bakr Bennani : les procédures de traitement de l’entreprise en difficultés en droit marocain, édition 2008, page 324.

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cessions obligent à prendre en considération, non seulement le prix, mais d’autres éléments, comme le maintien de l’emploi, les perspectives de développement etc.

Le législateur a posé des règles procédurales à respecter pour apprécier la pertinence de celle-ci.

La procédure d’offre est soumise à des modalités très strictes qui prennent en considération quatre points importants :

1- L’auteur de l’offre

Aux termes des dispositions de l’article 582 alinéa 1 du code de commerce « dès l’ouverture de la procédure, les tiers à l’entreprise sont admis à soumettre au syndic des offres tendant au maintien de l’entreprise ». Au sens général, est un tiers toute personne étrangère par rapport au débiteur personne physique et morale soumise à la procédure de redressement judiciaire. Dans le même ordre d’idées, pour garantir une reprise conforme à la morale des affaires. L’article 582-4 dispose « ni les dirigeants de l’entreprise, ni leurs parents ou alliés jusqu’au deuxième degré inclusivement ne sont admis, directement ou par personne interposée à formuler une offre ».

2- Caractères de l’offre

Toute décision judiciaire de cession de l’entreprise intervient sur le fondement d’une offre qui doit être simple et non conditionnelle. Il convient de préciser qu’elle doit comporter plusieurs mentions obligatoires :

a- la nécessité d’un écrit : bien que la loi ne mentionne pas l’exigence d’un écrit mais le recours au support écrit est indispensable pour déterminer l’objet de l’offre, la date, la signature, le prix…en plus, la demande doit

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être un véritable engagement pour acquérir l’entreprise et non pas une simple lettre intention ou demande de renseignement.

b- les indications obligatoires : selon les dispositions de l’article 604 du code de commerce, l’offre concernée doit comporter plusieurs indications :

le prix de la cession et de ses modalités de règlement :

Cette indication est très importante au cas où le prix ne serait pas payé intégralement, ce qui est généralement le cas. Le défaut de paiement du prix de cession aurait pu être sanctionné par la résolution du plan. Mais l’article 614 du code de commerce marocain se contente d’énoncer, qu’en cas de défaut de paiement du prix de cession, le tribunal peut à la demande du syndic nommer un administratif ad hoc.

La date de la réalisation de la cession : Cette précision est importante, notamment lorsque la cession est précédée par une location-gérance. Dans le cas contraire, il y a tout intérêt à ce que la cession s’opère dès le prononcé du jugement en l’objet. Il importe tout d'abord de préciser que la location-gérance est liée au plan de cession142. La location-gérance n’est pas une solution autonome, elle est le préalable de la cession et ne peut être conclue que par celui qui a promis de racheter l’entreprise aux meilleures conditions143.

Le niveau et les perspectives de l’emploi : Il incombe au repreneur d’indiquer s’il entend subordonner la reprise à des licenciements et la façon dont l’emploi évoluera à court et moyen terme. En effet, la reprise pourrait s’accompagner de l’embauche de personnel supplémentaire. A l’instar de la

142Ahmed El Hajjami : le redressement des entreprises en difficultés en droit marocain, thèse pour l’obtention du doctorat d’état en droit privé, soutenu le 3 décembre 1988, université de METZ, page 304.

143 Yves Guyon: Dro it des Affaires, tome 2 entreprises en difficulties: redress ement judiciaire -faillite, 9ème édition, page 327.

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précision d’activité et de financement, seules les prévisions à court terme doivent être prises en considération. En outre, les salariés ne peuvent exiger du cessionnaire que la partie de l’indemnité compensatrice pour congés payés, des primes de vacances et de fin d’années, née postérieurement à la date de la cession. A cet égard, le tribunal de commerce de Casablanca144 dans sa décision du 6 janvier 2003, a précisé que le transfert de propriété des éléments inclus dans la cession partielle, ne pouvait, se produire qu’après conclusion des contrats nécessaires à cette fin.

Les garantis souscrites en vue d’assurer l’exécution de l’offre : Ces garanties sont obligatoires, notamment si la totalité du prix n’est pas payée comptant. Elles sont également utiles particulièrement lorsque le cessionnaire n’exécute pas ses obligations, compromettant par la même occasion le redressement de l’entreprise

Les prévisions des ventes d’actifs au cours de 2 années suivant la cession : Cette indication permet au cessionnaire de vendre les biens inutiles au redressement tout en évitant que le nouveau propriétaire ne liquide l’entreprise au lieu de continuer de l’exploiter.

Par ailleurs, et afin de pouvoir porter une appréciation réelle sur l’offre faite par le cessionnaire, le juge-commissaire peut demander des informations complémentaires conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l’article 606 du code de commerce.

144 Tribunal de commerce de Casablanca, jugement du 06/01/2003, dos. N°433/2002/10.

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De plus, le syndic est chargé d’informer les contrôleurs et les représentants des salariés du contenu des offres conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l’article 606 du code commerce.

Il incombe au syndic de fournir au tribunal tout élément qui permettra de vérifier le caractère solennel des offres, et ce, en application des dispositions du dernier alinéa de l’article 606 du code de commerce.

3- Le dépôt des offres au greffe

La remise de l’offre et soumise à un certain délai, l’article 582 alinéa 1 du code de commerce précise dès l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire les tiers sont admis à soumettre au syndic les offres.

En revanche le second terme c’est-à-dire le date à laquelle il expire dépend de la décision du syndic car il rentre dans ces attributions de fixer le délai de la communication des offres afin de les transmettre dans les 15 jours au minimum avant le déroulement de l’audience au cours de laquelle le tribunal l’examinera.145 Le but du législateur est de laisser le temps au tribunal d’examiner attentivement la véracité et la pertinence de l’offre.

4- La modification de l’offre

Selon l’article 582, l’offre ainsi faite ne peut être modifiée ou retirée après la date du dépôt du rapport du syndic mais le tribunal peut accepter une modification si celle-ci présente amélioration incontestable. En réalité, la position du législateur est contestable car on ne contraint pas une personne contre sa volonté à diriger une entreprise même s’elle s’est engagée à la faire avant le jugement de cession de l’entreprise en difficultés.

145 Article 604 du code de commerce marocain.

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En tout état de cause, le tribunal ne doit opter pour la solution facile. Il doit apprécier l’intérêt global de l’entreprise tant au niveau économique que social et également le recouvrement des créances.146

5- Le jugement se prononçant sur les offres

Le syndic donne au tribunal tout élément permettant de vérifier le caractère sérieux des offres.

Afin d’éviter que des repreneurs potentiels ne soient mis devant le fait accomplir d’un jugement rendu, toute offre doit être communiquée au syndic dans le délai qu’il a fixé et porté à la connaissance des contrôleurs. Sauf accord entre le chef de l’entreprise, le syndic et les contrôleurs, un délai de quinze jours doit s’écouler entre la réception d’une offre par le syndic et l’audience au cours de laquelle le tribunal examine cette offre (article 604).

Par ailleurs, il est possible d’assortir son offre de différentes conditions dont certaines d’entre elles sont de caractère suspensif c'est-à-dire nécessaire à chaque fois que le repreneur entend bénéficier d’aides financières ou fiscales, ou bien encore de caractère résolutoire, peuvent être également être stipulées. Il en est ainsi par exemple, lorsque certains éléments déterminants, n’ont pu être justifiés aux candidats (titre de propriétés ou droits de jouissance, transferts de certains contrats, etc).

En outre, le tribunal retient l’offre qui permet dans les meilleures conditions d’assurer le plus durablement l’emploi attaché à l’ensemble cédé et le paiement des créances (article 605).

En tout état de cause, le tribunal ne doit pas opter pour la solution la plus facile.

Il doit d’adonner à une appréciation d’opportunité économique globale, prenant

146 <<le plan de cession à l`épreuve de la jurisprudence>> exposé réalisé par BENCHEMSI Mona. Master JURISTE d`Affaires. Module Droit des entreprises en difficultés. Université MOHAMMED V Facu lté de Droit SOUISSI RABAT. Année 2014/2015

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en considération la capacité du repreneur à redresser l’entreprise et l’intérêt de toutes les parties concernées.