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: Fixation des modalités d’apurement du passif

Partie II : Détermination de la modalité de redressement

Paragraphe 2 : Fixation des modalités d’apurement du passif

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Donc le tribunal a tous les pouvoirs pour modifier les statuts, pour changer un ou plusieurs dirigeants qu’ils soient de droit ou de fait, tout en prenant en comptes les pouvoirs conférés aux associés qu’il doit entendre et convoquer à cet effet. Le tribunal peut aussi décider la non cession des actions et des parts sociales.115

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Le débiteur devra s’acquitter des obligations du plan selon les termes du jugement. Il ne pourra pas payer plus rapidement sous peine de sanctions pénales atteignant également le créancier.

De plus, l’article 575 accorde un traitement prioritaire aux « créances nées régulièrement après le jugement d’ouverture ». Si elles ne sont pas payées à leur échéance au cas de continuation, elles ont payées par priorité à toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou de suretés. Ainsi, les créanciers dont le droit nait du fait de l’activité du débiteur, après le jugement qui arrête le plan, doivent subir la priorité de la catégorie précédente, ainsi que la priorité résultant des privilèges et sûretés régulièrement constitués sur le patrimoine du débiteur.

Autrement dit, ils ne peuvent invoquer l’article 575 qui ne leur est pas applicable.116

2- Règles particulières d’apurement du passif

a- L’interdiction des remises et délais pour certains créanciers :

L’article 598 du Code de Commerce indique que « Le tribunal donne acte des délais et remises accordés par les créanciers au cours de la consultation. Ces délais et remises peuvent, le cas échéant, être réduits par le tribunal ».

Ainsi, lorsque les créanciers consultés par le syndic117ont envisagé l’octroi de délais et de remises, le tribunal leur en donne acte. Le cas échéant, il peut réduire les délais et remises acceptés par les créanciers, pour rapprocher les sacrifices consentis par chacun.118 Quant aux créanciers qui n’ont accepté ni délai ni remise, le tribunal ne peut pas leur imposer de remise contre leur gré.

116 Le Droit Commercial, Hassani a CHERKAOUI, Imprimerie Najah Al Jadida, 3ème édition 2010

117 Article 585 Alinéa 1 du Code de Co mmerce.

118 Article 598 du Code de Co mmerce.

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b- Les créances ayant accordé des délais conventionnels plus longs que les délais du plan :

Après avoir posé le principe du traitement égalitaire entre les créanciers n’ayant pas accepté les délais du plan, le Code de Commerce pose une restriction pour les créanciers à terme ayant stipulé des délais plus longs que ceux du plan.

Les délais conventionnels plus longs que les délais imposés aux créanciers n’ayant pas accepté les délais du plan qui resteraient à courir au jour du plan seront maintenus.

Le tribunal peut imposer à tous, qu’ils soient privilégies ou chirographaires, des délais uniformes de paiement sous réserve, en ce qui concerne les créances à terme, des délais supérieurs stipulés par les parties avant l’ouverture de la procédure.119 Ainsi à la différence de la cession d’entreprise, la continuation de l’entreprise n’entraîne pas l’exigibilité anticipée des créances à terme, qui sont payables aux échéances convenues. Les délais imposés par le tribunal peuvent même excéder la durée du plan.120

Le premier paiement doit ainsi intervenir dans le délai d’un an. Ceci implique que si un créancier refuse les délais et remises proposés par le syndic et le chef de l’entreprise, le tribunal ne peut contraindre ledit créancier à consentir que des délais. Il ne peut, par exemple, lui imposer un abandon de créance, même partiel. Le tribunal ne peut agir que sur les délais (rééchelonnement de la dette ; octroi d’un différé de paiement).

c- Le paiement du premier dividende :

Le législateur ne réglemente pas la périodicité des dividendes du plan de continuation.

119 Article 598 Alinéa 2 du Code de Co mmerce.

120 Idem.

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Il a cependant posé en règle que le paiement du premier dividende ne pourrait intervenir plus d’un an après la décision arrêtant le plan.121

De plus l’article 598 al 3 stipule que « le montant des échéances ne peut être progressif. Dans ce cas, leur montant annuel ne peut être inférieur à 5% de leur montant total retenu pour le plan ».

d- La vente de biens grevés de suretés pendant l’exécution du plan :

Si, en phase d’exécution du plan, intervient la vente d’un bien grevé d’une sûreté spéciale, l’article 600 du Code de Commerce a vocation à s’appliquer.

Deux règles sont alors posées par le texte :

- Selon cette disposition, « en cas de vente d’un bien grevé d’un privilège spécial, d’un nantissement ou d’une hypothèque, les créanciers bénéficiaires de ces sûretés ou titulaires d’un privilège général sont payés sur le prix après le paiement des créanciers qui les priment». Il faut donc comprendre que les créanciers titulaires de sûretés seront classés sur le prix de vente du bien et qu’ils seront payés après le super privilège des salariés.

- L’alinéa 2 de cet article poursuit en indiquant que « Ce paiement anticipé s’impute sur le principal des premiers dividendes à échoir ; les intérêts y afférents sont remis de plein droit ». Ils seront donc payés plus rapidement que ce que prévoit le plan.

L’article 601 du Code de Commerce ajoute que « Si un bien est grevé d’un privilège, d’un nantissement ou d’une hypothèque, une autre garantie peut être substituée en cas de besoin, si elle présente des avantages équivalents »

Par exception, les créanciers titulaires de la sûreté ne percevront pas immédiatement ce qui leur est dû, si le tribunal leur impose une substitution de

121 Article 598 Alinéa 2 du Code de Co mmerce

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garantie, laquelle, comme, en période d’observation, devra être équivalente pour les créanciers. En l’absence d’accord, le tribunal peut ordonner cette substitution.

e- L’interdiction bancaire atteignant le débiteur :

Selon l’article 593 du Code de Commerce, lorsque l’entreprise a fait l’objet d’une interdiction d’émettre des chèques en raison de faits antérieurs au jugement d’ouverture, le tribunal peut prononcer la suspension des effets de cette mesure pendant la durée d’exécution du plan et du règlement du passif.

La décision du tribunal prononçant la résolution du plan met fin de plein droit à la suspension des effets de l’interdiction. En effet, pendant l’exécution du plan, le tribunal peut ainsi prononcer la suspension de l’interdiction bancaire pendant les délais de remboursement du plan. Le débiteur devra payer les bénéficiaires de ces chèques selon ce qui est prévu par le plan.122En cas de résolution du plan, la suspension de l’interdiction disparaît. Il y a réactivation de l’interdiction.

Le respect des échéances et des modalités prévues par le plan vaut régularisation des incidents.123

f- La levée d’option du crédit-bail pendant l’exécution du plan de continuation :

Par une clause de style, les contrats de crédit-bail prévoient que la levée d’option (c’est à dire la possibilité pour le locataire de devenir propriétaire à l’issue de la période de location), ne sera possible que si le locataire paye la totalité de ce qu’il doit au crédit - bailleur au titre du contrat. Une difficulté surgit si parmi les

122Article 593 Alinéa 2 du Code de Co mmerce

123 <<Le plan de continuation>> ; Expose réalisé par Hatim Nsiri ; Module Droit des Entreprises en difficulté ; Master Juriste d`Affaire : Faculté Mohammed V- Souissi Rabat ; 2014/2015

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sommes dues, figurent des créances antérieures au jugement d’ouverture, que le débiteur, par principe, ne peut payer plus rapidement que ce que prévoit le plan.

Ainsi, le maintien des contrats qui unissent le débiteur à ses fournisseurs, ses banquiers et ses clients, peut être utile à la continuation de l’entreprise. Pour sortir de l’impasse, le législateur a inséré indirectement, dans l’article 573 du Code de Commerce une solution en donnant au syndic le droit d’option entre l’exécution et la continuation du contrat. Le droit d’option est réservé au syndic seul, quelle que soit d’ailleurs l’étendue de sa mission.

Cette solution s’impose donc en présence d’une disposition légale contraire et, à plus forte raison, pour les contrats prévoyant une résolution de plein droit de la convention au cas de redressement judiciaire. Cette dérogation au droit commun se justifie par des considérations pratiques évidentes. La disparition immédiate de nombreux contrats compromettrait certainement la continuation de l’exploitation et placerait les cocontractants dans une position de force leur permettant de rompre en leur faveur la règle de l’égalité.

L’article 573 s’efforce, par ailleurs, d’équilibrer l’intérêt de l’entreprise et celui de son cocontractant. Ainsi, la renonciation à la continuation du contrat est présumée si le cocontractant a adressé au syndic une mise en demeure qui est restée plus d’un mois sans réponse. Cette présomption est irréfragable car le contrat est résilié de plein droit dans ce cas.

Section 3 : Modification et résolution du plan de continuation

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Selon les dispositions de l`article 597 ; une modification dans les objectifs et les moyens du plan ne peut être décidée que par le tribunal à la demande du chef de l'entreprise et sur le rapport du syndic.

L’article 595 réglemente les modalités de cette procédure. En effet, le syndic convoque, dans les formes prévues par les statuts, l’assemblée compétente pour mettre en œuvre les modifications prévues par le plan.

La décision qui interviendra sera un jugement modificatif de plan, obéissant aux mêmes voies de recours que le jugement arrêtant le plan, sous réserve de l’impossibilité pour le représentant des créanciers de faire appel.

Le tribunal statue après avoir entendu ou dûment appelé les parties et toute personne intéressée. Il peut aussi prononcer la résolution du plan dans les formes et avec les effets prévus à l'article 602.