• Aucun résultat trouvé

Condition relative aux comportements visés

Les agissements pouvant être constatés et donner lieu à l’engagement de la responsabilité fiscale des dirigeants sont des « manœuvres frauduleuses » ou « l’inobservation répétée des diverses obligations fiscales » pesant sur l’entreprise. Ces deux dispositions sont alternatives ; il n’est plus nécessaire d’établir l’existence de manœuvres frauduleuses lorsque l’administration fiscale peut démontrer l’existence d’une inobservation répétée des diverses obligations fiscales205.

204

Emmanuel DUNET, op. cit., pp. 53 et 54.

205C. DAVID, O. FOUQUET, B. PLAGNET, P.-F. RACINE, Les grands arrêts de la jurisprudence

Sous-section 1 :

Les manœuvres frauduleuses

Le législateur n’a pas défini la notion de manœuvres frauduleuses mais s’est contenté de classifier, sans les limiter, les comportements pouvant constituer des pratiques ou des manœuvres frauduleuses. Cette notion n’est donc pas spécifique à la responsabilité fiscale, elle est utilisée exclusivement dans le droit pénal et le droit fiscal206. L’article 36 du C.P.F. classifie les pratiques frauduleuses et dispose que sont notamment considérées comme telles « :

- l’exercice d’une activité non déclarée ;

- la réalisation d’opération d’achats et de ventes sans facture de marchandises, quel que soit leur lieu de détention, de stockage et d’entreposages ;

- la délivrance de factures, bons de livraison ou tout document ne se rapportant pas à des opérations réelles ;

- la passation d’écritures inexactes ou fictives, sciemment dans les documents comptables dont la tenue est rendue obligatoire par le code de commerce ;

- toute manœuvre visant l’organisation de son insolvabilité par un contribuable recherché en paiement d’impôts. ».

En plus de ces cas prévus par le code des procédures fiscales, le législateur fiscal, en vue de la répression de l’infraction de fraude fiscale, dresse une liste non exhaustive des faits pouvant être considérés comme des manœuvres frauduleuses, avec le reproche que ces différents cas sont prévus au sein de chaque code fiscal, parfois répétés, avec utilisation de termes différents pour désigner les mêmes faits. C’est ainsi qu’elles sont prévues aux articles 193 C.I.D., 532 C.I.I., 118 C.T.C.A., 119 1er C. enr. et 34 C.T.

Il apparaît, des moyens mentionnés au sein de ces textes, que ceux-ci ont pour finalité de produire des informations erronées dont le but est de faire échapper les sommes normalement imposables soit par des faits positifs ou par des faits négatifs. Il en résulte que les manœuvres frauduleuses signifient un manquement au devoir de

sincérité du contribuable207. Toutefois, cette notion reste, dans une large proportion, tributaire des éléments de fait soumis à l’analyse souveraine des juges du fond208. Il reste néanmoins, que « en pratique, les manœuvres frauduleuses consistent à avoir organisé sciemment l’insolvabilité de la société » de sorte que « le dirigeant a détourné l’actif à son profit ou l’a transféré à des tiers » ou bien encore celui-ci « peut avoir procédé à la répartition de dividendes fictifs entre actionnaires » 209.

L’administration fiscale française, dans une instruction du 06 février 1980210, a défini la notion de manœuvres frauduleuses comme nécessitant « la mise en œuvre de procédés ayant pour effet soit de faire disparaître ou de réduire la matière imposable, soit d’obtenir de l’Etat des remboursements injustifiés lorsque ces procédés ne peuvent être considérés comme des erreurs excusables ou des omissions involontaires, mais sont au contraire, le résultat d’actes conscients et volontaires destinés à donner l’apparence de la sincérité à des déclarations en réalité inexactes de leurs auteurs, et impliquant l’intention manifeste d’éluder tout ou partie de l’impôt. ». Le Conseil d’Etat français appréhende, quant à lui, les manœuvres frauduleuses à « tout acte, opération, artifice ou manœuvre destiné à égarer ou à restreindre le pouvoir de vérification de l’administration »211 ou d’une manière plus succincte, le simple fait d’empêcher l’Administration d’exercer son pouvoir de contrôle212.

Il en ressort de ce qui précède, que la notion de manœuvres frauduleuses se constitue de deux séries d’éléments : les uns matériels, les autres intentionnels.

Les éléments matériels « sont destinés à masquer l’existence de l’infraction ou à la présenter sous la forme d’une opération parfaitement régulière (tenue d’une double comptabilité, documents falsifiés ou fictifs, etc.».

207 أ ، " # ا $ % ا ) &# ا '( ا ( د " ا ، * ا +, ا ، 1 / 98 ص ، . 20 . ..." نأ 6+% 7 89 و

&# ا م; + ا <+= ن 7 ا >? @ ي ا ق C ا DEا لGHIا ه Jا ق K د C ا

"...

208 M.-C. BERGERES et P. DUPRAT, op. cit., p. 185. 209

P. SERLOOTEN, Droit fiscal des affaires, Dalloz, 8ème éd., 2009, p. 374, n° 579.

210 B.O.D.G.I. 13 L-1-80 ; Dr. fisc. 1980, n° 10 ; ID 6418. Cité par M.-C. BERGERES et P. DUPRAT,

préc.

211 C.E. fr., 7ème et 8ème ss-sect., 31 juill. 1992, req. n° 42280, R.J.F. 1992, n° 10, p. 790. 212 Druon DELOT, op. cit., p. 151.

Les éléments intentionnels résident dans la volonté consciente d’accomplir l’infraction, ces éléments étant à la base de toute infraction fiscale commise de mauvaise foi213.

Sous-section 2 :

L’inobservation répétée des obligations fiscales

Diverses obligations auxquelles est tenu le contribuable sont prévues pour chaque type d’impôts ; elles sont, soit codifiées au sein des différents codes fiscaux, soit non codifiées, parsemées au sein de divers textes législatifs et réglementaires, en grande partie insérées dans les lois de finances. Ces obligations fiscales peuvent être scindées en deux types : des obligations déclaratives qui sont en réalité une obligation de faire et qui peut survenir soit à la création de la société soit au cours de son existence ou à sa fin (déclaration d’existence, déclaration d’activité, déclaration annuelle…etc.), et une obligation de payer l’impôt dû à l’administration fiscale dans les délais de rigueur selon chaque type d’impôts. Ce paiement ce fait désormais214 sous forme spontanée, à l’initiative de la société et en l’absence d’un quelconque formalisme.

Les manquements visés par l’article 155 C.P.F. concernent toutes les obligations fiscales auxquelles est assujettit la société et ne concerne pas uniquement l’obligation de paiement. En effet, plusieurs manquements peuvent déboucher sur une impossibilité de recouvrement, qu’ils s’agissent de manquements à l’obligation de déclaration (1) ou de manquements à l’obligation de paiement (2). L’administration fiscale peut remonter loin dans sa recherche des inobservations qui ont contribuées à l’impossibilité du recouvrement, elle peut même relever des manquements intervenus au stade de l’établissement de l’impôt. En effet, l’inobservation répétée des obligations déclaratives donne lieu à des pénalités considérables pouvant aggraver la situation de la société et faire que cette dernière ne soit plus à même d’être en mesure de payer. A préciser que ce non paiement n’est pas consécutif à un refus mais à une impossibilité de paiement due à l’inobservation répétée des obligations fiscales qui, si elles avaient été respectées, n’auraient pas donné lieu à une impossibilité de recouvrement. Cette liaison établie, le

213

M.-C. BERGERES et Philipe DUPRAT, préc.

214 A noter un autre type de paiements sous forme ordonnée qui touchait quelques types d’impôts, notamment en matière d’I.R.G.

paiement des impôts éludés est demandé au dirigeant, présumé responsable de cette situation.