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Comme indiqué dans le tableau 3.4, la durée de vie de 38Ca a été mesurée précédemment lors de quatre expériences indépendantes [Kav68, Gal69, Zio72, Wis80]. Cependant, dans aucun des cas cités, la mesure réalisée n’a été effectuée avec un échantillon d’activité 38Ca pure. La procédure adoptée par les quatre auteurs consistait à déterminer cette observable en se servant de la raie γ à 1568 keV, émise suite au dépeuplement du 3éme état excité dans le noyau fils 38mK (cf. figure 3.16). En effet, 21% de la décroissance β+ de 38Ca procède via une transition de type Gamow-Teller et l'état 1+ peuplé lors de cette transition se désexcite en émettant le rayonnement γ en question (à 1568 keV). Par ailleurs, la décroissance β+ de 38mK vers l’isobare stable 38Ar ne s’accompagne d’aucune émission γ, à l’exception de la raie à 511 keV qui signe l’annihilation du positon émis dans la matière. En utilisant ces faits, le conditionnement du spectre d’événements β par la détection du signal γ à l’énergie 1568 keV permettrait de s’affranchir de toute la contribution due à la décroissance de 38mK. La courbe de décroissance ainsi constituée devrait donc reflétée uniquement la décroissance de 38Ca. L’ajustement de cette courbe, à l’aide d’une exponentielle reposant sur un fond constant, suffirait alors à extraire la période β du noyau précurseur.

Avec la durée de vie déterminée lors de cette thèse : T1/2(38Ca) = 445.8 (10) ms, nous avons également mentionné à titre comparatif (cf. tableau 3.4), le résultat préliminaire obtenu par l’étude des données de l’expérience IS437a [Bla07]. Celle-ci précéda l’expérience analysée ici, avec qui elle partage la particularité d’être menée auprès de la même installation (ISOLDE) où la technique de séparation employée fournissait à l’étude une activité (38CaF+) isotopiquement pure. Les deux durées de vie déterminées atteignent des précisions comparables à 3.5 et 2.3‰ ; reste que notre mesure est de 3.8 ms plus courte que la valeur proposée par B. Blank et al. [Bla07]. Cependant, les deux résultats sont compatibles avec la valeur expérimentale de référence, donnée par J.C. Hardy et al. [Har05], compte tenu de la grande imprécision sur cette dernière : T1/2(38Ca) = 440.0(78) ms.

195 3.5 Conclusion et perspectives

Fig. 3.16 : Schéma de décroissance de l’isotope 38Ca. La transition super-permise (0+ → 0+) de Fermi domine à raison de 76.1% la décroissance β+ de ce noyau. Cette transition est mise en évidence avec un trait épais et une couleur différente sur la figure.

Les données actuellement disponibles sur la période β de la transition super-permise (0+ → 0+) de l’émetteur 38Ca sont reportées sur la figure 3.17. Le résultat préliminaire établi au cours de cette thèse est relativement en accord avec les quatre valeurs répertoriées dans la littérature, vu les grandes incertitudes qui pèsent sur ces mesures. Les durées de vie établies récemment au CERN constituent pour le moment les estimations les plus précises de l’observable T1/2(38Ca).

Tab. 3.4 : Valeurs de la durée de vie de l’isotope 38Ca répertoriées dans la littérature. Ces valeurs sont comparées au résultat expérimental préliminaire établi dans le cadre de cette thèse. La valeur moyenne indiquée a été obtenue par pondération des incertitudes du fait que l’ensemble des mesures présentées sont statistiquement indépendantes.

En moyennant par pondération des incertitudes l’ensemble des données connues sur la durée de vie de 38Ca (cf. figure 3.17), nous obtenons la valeur suivante : T12(38Ca) = 446.8(11) ms. Le χ2 normalisé associé à la moyenne ainsi faite est de 1.54. Cette valeur raisonnable accrédite notre résultat et montre par ailleurs que l’accord avec les autres mesures est globalement appréciable. La nouvelle valeur moyenne déduite de cette façon améliore la précision sur la durée de vie mesurée d’un facteur de 8.

Ainsi, au regard des objectifs fixés pour l’expérience IS437b : la production est l’étude de la décroissance β de l’isotope 38 du calcium, la campagne expérimentale menée auprès d’ISOLDE a aboutit à des résultats satisfaisants. La méthode de production alliée à la

Référence [Kav68] [Gal69] [Zio72] [Wis80] [Bla07] Ce travail Moyenne 38Ca −T1/2

séparation isotopique assistée par REXTRAP a fourni à la mesure et pour la première fois une activité 38Ca hautement pure. L’utilisation de détecteurs à gaz standards a permis, du fait de la grande sélectivité de la ligne de séparation, de constituer les spectres des événements de radioactivité du noyau d’intérêt et d’accéder ainsi directement à la période β recherchée.

Fig. 3.17 : Comparaison des valeurs connues sur la durée de vie de 38Ca au résultat établi dans le cadre de cette étude. Les durées de vie représentées sont résumées dans le tableau 3.4. La ligne horizontale indique la valeur moyenne de toutes ces mesures : 446.8(11) ms. Le χ2 normalisé associé à cette moyenne est de 1.54.

Reste que la précision souhaitée sur la période β de 38Ca n’a pas été atteinte. L’imprécision pesant encore sur cette observable est causée par deux facteurs. Le premier est d’ordre statistique : le taux de production de l’isotope d’intérêt (38Ca) était beaucoup plus faible par rapport à celui initialement espéré. Le second est systématique : la dépendance de la durée de vie déterminée vis-à-vis des conditions de détection se trouve à l’origine des effets systématiques présumés. Certes, la précision de 2.3×10−3 sur la valeur T1/2(38Ca) n’est pas encore suffisante pour tester notre compréhension de l’interaction faible ou encore des corrections radiatives et nucléaires. Cependant, notre but final d’inclure la transition super-permise (38Ca → 38mK) dans la systématique des valeurs Ft (0+→ 0+, T = 1), qui requiert un effort de longue haleine, se trouve désormais amorcé grâce au protocole expérimental développé par nos travaux. En effet et comme nous venons de le voir, la qualité d’ensemble de la méthode de production, l’acquisition des données et des outils d’analyse a permis d’obtenir des résultats très encourageants.

De façon générale, la conclusion que l’on peut tirer de l’ensemble des traitements décrits dans les paragraphes précédents est la nécessité d’une caractérisation plus poussée de la chaîne de détection β employée. Il est vrai que les compteurs à gaz de type Geiger sont des détecteurs de conception simple. Reste que leur réponse peut être instable. Le changement dans certaines conditions peut engendrer des modifications importantes dans la réponse du détecteur et donc affecter la mesure effectuée. Cette caractérisation permettra une meilleure compréhension des fluctuations observées au sein des durées de vie individuelles déterminées,

197 3.5 Conclusion et perspectives voire même leur maitrise s’il s’avère que celles-ci peuvent être évitées (ou contrôlées). L’erreur systématique sur la mesure de la durée de vie induite par les phénomènes de dérives pourrait ainsi être diminuée de manière significative. En revanche, une telle procédure ne pourra être entreprise qu’à la condition de s’appuyer sur des données de simulations fiables. Les effets présentant une source potentielle d’erreur systématique peuvent être mis en évidence en menant une série de tests, à l’aide d’une source radioactive par exemple.

Les tests suggérés devraient portés sur tous les paramètres susceptibles d’influencer la détection des particules β émises, telle la haute tension appliquée aux compteurs Geiger ou encore le seuil de discrimination du fond. En ce qui concerne la variation du taux de comptage, on pourrait penser à interposer des plaques d’épaisseurs variables entre l’entrée du détecteur et la source de rayonnement β, afin de créer un changement dans le taux de comptage auquel est exposé le détecteur. L’utilisation de sources émettrices β avec des activités différentes permettrait aussi de produire cet effet. Dans ce même esprit, il serait utile de réfléchir à la conception d’un support annexe qui rendrait possible le déplacement rapide des sources ou plaques afin d’explorer le comportement du détecteur vis-à-vis d’un changement subite dans le taux de comptage. Il conviendrait, par ailleurs, d’étudier la réponse des compteurs à gaz sur un long terme afin de voir si des effets de dérives peuvent se produire dans le temps. Ces tests devraient permettre, en principe, de comprendre l’origine de l’incompatibilité observée entre les mesures de la présente expérience et serviront, en cas de nécessité, dans l’analyse des données des prochaines expériences.

L’analyse des runs mesurant la décroissance β de l’isotope 39Ca apportera des renseignements utiles quant à la présence et l’ampleur des effets systématiques diagnostiqués d’après l’étude des données enregistrées pour le 38Ca. En ce qui concerne la question des contaminants, l’analyse des spectres d’énergie γ permettrait de s’assurer de la pureté de l’échantillon mesuré. Dans le cas contraire, c’est-à-dire si des impuretés s’avèrent présentes, l’identification de celles-ci est rendue possible.

Enfin, la présente étude pourrait être complémentée en considérant les données de simulation générées par le programme d’analyse. En effet, pour chacun des cycles sélectionnés, le programme employé est chargé de simuler un cycle de décroissance. Toutes les caractéristiques de ce dernier, à l’exception de la demi-vie, sont déterminées à partir du cycle expérimental associé. À ces données de décroissance simulées est ensuite imposé un temps mort fixe prédéfini avant qu’elles ne soient enregistrées sur disque, cycle par cycle. La comparaison aux résultats expérimentaux obtenus permettra de vérifier la consistance de l’analyse en même temps qu’elle validera la durée de vie expérimentalement établie.

Conclusion générale

Ce manuscrit a présenté les résultats obtenus à la suite de deux expériences de haute précision concernant les transitions β+ de Fermi super-permises dans les noyaux riches en protons 62Ga (Z = 31, TZ = 0) et 38Ca (Z = 20, TZ = −1). L’intérêt des études menées est de mettre à l’épreuve les prédictions de modèles théoriques rattachés à la description des interactions fondamentales opérant à l’échelle subatomique. La détermination expérimentale des durées de vie comparées (ƒt) pour ces transitions permet de vérifier directement l’hypothèse de conservation du courant vectoriel (CVC) hadronique dans les processus régis par l’interaction faible. La comparaison systématique des valeurs corrigées Ft (0+ → 0+, T= 1) associées à de telles transitions donne une valeur à l’élément Vud de la matrice de mélange de saveur des quarks (CKM) du Modèle Standard et demeure aujourd’hui l’outil le plus précis pour tester l’unitarité de cette matrice. Par ailleurs, ces émetteurs β (62Ga, 38Ca) s’avèrent des candidats de choix dès lors qu’il s’agit de valider la modélisation théorique des interactions ne conservant pas la symétrie de l’isospin dans les noyaux situés loin de la stabilité. Plus généralement, c’est la fiabilité des corrections calculées pour rendre compte de ces effets sensibles aux détails de la structure nucléaire qui est questionnée.

L’étude de la décroissance β−γ de 62Ga visait la détermination précise du rapport d’embranchement de la transition de Fermi reliant les états isobarique analogues (0+, T = 1) dans les noyaux partenaires. L’expérience JYFL05 a été réalisée auprès du séparateur en ligne IGISOL à l’Université de Jyväskylä. La sélection isotopique opérée à l’aide du piège magnétique de type Penning (JYFLTRAP) a permis de disposer d’un faisceau secondaire de haute pureté durant une partie de la prise de données. L’emploi d’un dispositif expérimental de détection adéquat a permis la mesure absolue et précise du rapport d’embranchement recherché.

L’exploitation des spectres en énergie γ s’est avérée une tâche particulièrement délicate du fait des phénomènes de dérive constatées et surtout de l’absence de raies γ de référence à haute énergie. La mise en place d’une procédure d’analyse spécifique a permis de résoudre certaines des difficultés rencontrées. Par ailleurs, le recours à la technique add-back lors de la sommation des énergies γ a permis de gagner en efficacité de détection photopic et a conduit à une amélioration significative du rapport signal/bruit. L’ensemble de ces traitements a rendu possible l’observation de raies γ consécutives à l’émission β de 62Ga de très faible intensité. Ainsi, quatre raies γ identifiées aux énergies : 851, 1388, 1852 et 2227 keV, d’une intensité typiquement de l’ordre de 0.020 %, ont été assignées au schéma de niveaux excités dans le

62Zn. Les intensités mesurées pour ces transitions ont servi à l’évaluation de l’intensité totale des branches β non-analogues et donc à l’établissement du taux d’alimentation de l’état analogue 0+ dans le 62Zn : B.R.A(62Ga) = 99.893 (24)%. La nouvelle force de transition corrigée déterminée : Ft(62Ga) = 3071.4 (72) s atteint désormais une précision égale à 2.34‰. Elle est en accord appréciable avec les 12 autres valeurs étudiées avec précision et recensées dans la littérature. L’ensemble des informations issues de la désintégration β nucléaire valide l’hypothèse CVC à une excellente échelle de précision 2.6×10−4 et ne semble pas indiquer, du moins à l’état actuel des connaissances, la violation de l’unitarité de la matrice de Cabibbo-Kobayashi-Maskawa.