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Chapitre II - Matériels et Méthodes

4. Conclusion

Notre étude est la première à étudier en conditions in situ la relation entre les dynamiques

saisonnières des composés carbonés et azotés et l’âge de l’arbre.

Les dynamiques des composés carbonés et azotés ont des schémas chronologiques distincts, et

impliquent des compartiments de l’arbre différents selon l’âge de l’arbre. Les variations des

composés azotés entre le débourrement et le jaunissement d’une part, et entre le jaunissement

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et l’hiver d’autre part confirment que le stockage de l’azote apparait plus tardivement que la

formation des réserves carbonées, comme montré précédemment par l’étude de Bazot et al.

(2013).

Nos résultats soulèvent un schéma général du fonctionnement carboné et azoté des chênes

sessiles chez tous les âges : i) une remobilisation des réserves carbonées au débourrement

pour la croissance ; ii) suivie par une formation des réserves carbonées durant la saison de

végétation ; iii) ces réserves sont utilisées pendant l’hiver pour l’entretien des tissus ; iv) les

dynamiques des composés azotés présentent moins d’amplitude que celles des composés

carbonés ; v) le stockage de l’azote sous forme de protéines dépend fortement de la

remobilisation de l’azote et de l’absorption racinaire à l’automne.

Des différences notables entre les classes d’âge d’arbre sont toutefois mises en évidence dans

cette étude. Le métabolisme racinaire demande plus de carbone au printemps chez les arbres

du fourré que chez les arbres de la futaie, en lien avec un investissement plus grand dans la

croissance racinaire. Les schémas de stockage du carbone changent également avec l’âge de

l’arbre : les arbres juvéniles allouent préférentiellement le carbone à la croissance durant la

période de végétation, tandis que les arbres matures stockent le carbone juste après le

débourrement. La localisation des stocks de carbone peuvent également changer avec l’âge de

l’arbre, en particulier, avec le rôle important des racines moyennes et fines chez les arbres

juvéniles. La taille des compartiments peuvent expliquer quelques différences dans les

concentrations en composés entre les âges puisque les arbres matures présentent généralement

des concentrations en acides aminés plus fortes, quel que soit le compartiment. Cette tendance

est interprétée comme étant le résultat d’un plus grand système racinaire chez les arbres

matures qui permet une meilleure absorption racinaire de l’azote du sol.

Ces résultats soulignent que les fonctionnements physiologiques et développementaux varient

avec l’âge de l’arbre, ce qui, en prenant en compte les conditions environnementales,

influencent les dynamiques du carbone et de l’azote chez le chêne sessile. Cette étude est une

première étape pour une meilleure compréhension des effets de l’âge de l’arbre sur les

dynamiques saisonnières des composés carbonés et azotés des arbres. Il est également

nécessaire de considérer les biomasses de chaque organe pour établir les effets de l’âge sur les

stocks de réserves de l’arbre et du peuplement et leur répartition entre les différents organes.

Ces données permettront d’avoir de nouveaux outils pour une meilleure compréhension du

déclin de la productivité avec le vieillissement des peuplements forestiers.

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Chapitre IV - Effet de l’âge sur les quantités de

composés carbonés et azotés de l’arbre dominant et

du peuplement, et leur répartition au sein de la

biomasse

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1. Introduction

Chez les espèces caducifoliées comme le chêne sessile, les réserves sont stockées au cours de

la saison de végétation et sont fortement remobilisées au printemps lors de l’ouverture des

bourgeons et du développement foliaire (Tromp, 1983 ; Chapin et al., 1990 ; Tagliavini et al.,

1998 ; Millard et Grelet, 2010 ; Bazot et al., 2013 ; Gilson et al., 2014). Les espèces ligneuses

ont par ailleurs la capacité de stocker des réserves carbonées et azotées dans l’ensemble de

leurs organes (Millard et Grelet, 2010). Cependant, le rôle de chacun des organes de l’arbre

dans le stockage des réserves et leur remobilisation printanière dépend de plusieurs

paramètres comme leur position au sein de l’arbre, leur taille en terme de capacité de

stockage, le niveau de concentration des réserves mais aussi de la capacité de mobilisation des

réserves de l’organe par l’arbre. De ce fait, certains organes ont une fonction de stockage plus

importante que d’autres, comme les jeunes tiges qui jouent un rôle particulièrement important

lors de l’ouverture des bourgeons du fait de leur proximité, permettant ainsi une

remobilisation printanière plus rapide (Matsuura et al., 2001 ; Cerasoli et al., 2004 ; Bazot et

al., 2013), ou bien le tronc dont la biomasse importante en fait un organe de stockage

prépondérant (Barbaroux, 2002 ; Huet et al., 2004).

L’âge de l’arbre peut également être un facteur déterminant dans les fonctions de stockage des

différents organes, comme souligné par les résultats du chapitre précédent. En effet, une

utilisation précoce des réserves carbonées pour la croissance, suivie par un stockage tardif, a

lieu chez les arbres juvéniles, tandis que les arbres plus âgés réalisent ces deux processus de

manière simultanée. De plus, selon l’âge de l’arbre, les organes n’ont pas le même rôle dans le

stockage des réserves, comme le suggère l’augmentation à l’automne de la concentration en

amidon des racines moyennes et fines observée au stade juvénile, qui n’a pas lieu aux stades

matures de l’arbre (chapitre III).

L’âge de l’arbre aura également un effet sur les quantités absolues de réserves, et la

contribution relative de chaque organe à la quantité totale de réserves de l’arbre ou du

peuplement pourrait varier avec l’âge. En effet, cette contribution est déterminée à la fois par

la concentration de chacun des composés de réserve au sein de la biomasse de l’organe et par

cette biomasse. Les biomasses des organes sont alors le plus souvent déterminantes dans le

calcul des quantités de réserves (Kozlowski, 1992). Ainsi, le tronc et les grosses racines sont

généralement les principaux organes de stockage du C et de l’N (Barbaroux, 2002 ; Ludovici

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et al., 2002 ; Valenzuela Nunez, 2006 ; El Zein, 2011). Toutefois, cette affirmation doit être

relativisée selon l’âge de l’arbre. En effet, il est bien connu que la biomasse des organes

augmente avec l’âge (Bond-Lamberty et al., 2002 ; Peichl et Arain, 2007), alors que le rapport

entre les biomasses ligneuses racinaire et aérienne diminue avec l’âge de l’arbre. Par exemple,

chez le chêne, ce rapport diminue exponentiellement avec l’âge puis se stabilise après 90 ans

(Genet et al., 2010). Cette évolution dans l’allométrie pourrait être corrélée avec une

modification de l’allocation des réserves entre les différents organes de l’arbre.

Peu de travaux se sont intéressés aux effets de l’âge des arbres sur les quantités de réserves

carbonées et azotées et leur répartition entre les organes de l’arbre. Seule l’étude de Genet et

al. (2010) considère une chronoséquence pour étudier l’effet de l’âge sur les quantités de

réserves carbonées à l’échelle du peuplement. Les données issues de ces travaux montrent que

la quantité de TNC du peuplement ne varie pas avec l’âge chez le chêne sessile. L’approche

de ces auteurs se limite toutefois aux concentrations en TNC du tronc et des grosses racines et

ne considère pas les réserves azotées. Ainsi, il n’existe pas à notre connaissance d’étude de

l’effet de l’âge sur les quantités de réserves carbonées et azotées à l’échelle de l’arbre ou du

peuplement en considérant l’ensemble des organes de l’arbre. Or, la quantification précise de

la biomasse et des réserves et le passage à l’échelle du peuplement forestier semblent

indispensables pour mieux estimer la production et le bilan de C et d’N des parcelles

forestières, éléments-clé pour la compréhension des fonctionnements du cycle du C et de l’N

d’une forêt (Saugier, 1999).

L’objectif principal de ce chapitre est donc d’étudier l’effet de l’âge sur les quantités de

réserves carbonées et azotées, et sur les schémas de répartition des réserves au sein de l’arbre

pour trois peuplements de chênes sessiles d’âges différents (fourré, gaulis, futaie). Pour cela,

nous avons tout d’abord quantifié, pour les trois classes d’âge les biomasses totales, les

biomasses vivantes et les réserves pour chaque organe de l’arbre aussi bien pour les arbres

dominants échantillonnés que pour l’ensemble du peuplement. Nous avons également étudié

l’effet de l’âge de l’arbre sur la répartition des biomasses et des quantités de réserves entre les

différents organes de l’arbre à l’échelle de l’arbre dominant et à l’échelle du peuplement. Pour

cette étude, deux dates phénologiques clés ont été retenues : le 08 juin 2011 et le 1

er

février

2012. La première date correspond à la maturité foliaire et à une période où les réserves

carbonées et azotées sont en cours de formation, et la seconde correspond à la période

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hivernale suivant la fin du stockage des réserves, durant laquelle les réserves azotées sont

stables et les réserves carbonées décroissent lentement (voir chapitre III).

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