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objectifs de la thèse

3.3. La conception des interventions

Le déroulement des séances préparatoires

L’élaboration des actions par les pairs concepteurs, encadrés par les intervenants professionnels, a eu lieu au sein des établissements, dans une pièce décidée par la direction de

143 l’établissement (local de la MDL, salle de classe vide, etc.). Cette phase d’élaboration s’est déroulée en séances hebdomadaires (hors vacances scolaires) de Janvier à fin Mars 2014.

Le déroulement des séances a varié d’un lycée à l’autre, en fonction de la difficulté à constituer un groupe stable, du manque ou au contraire du trop grand nombre d’idées des lycéens, de la complexité de leur réalisation, mais également des difficultés dans certains établissements à dégager des créneaux horaires libres à l’avance. Il était néanmoins fixé que tous les lycéens pairs seraient accompagnés durant un minimum de 6 séances de 1h au moins chacune.

Si tous les groupes n’ont pas exactement progressé au même rythme, la succession d’étapes a cependant été la même pour tous et a suivi le plan d’avancement général suivant :

Séance 1

· Présentation de l’équipe, des objectifs de l’étude et du protocole. · Constitution du groupe de pairs-éducateurs volontaires

Séances 2, 3, 4

· Recueil des propositions d’interventions créées par les jeunes de la MDL · Vérification de la faisabilité (matérielle, humaine, éthique, légale)

· Vérification de l’application correcte et entière de la TPB

· Estimation des budgets prévisionnels par action et ajustements si nécessaire · Validation des interventions

Séances 5, 6

· Mise à disposition des moyens (matériels, financiers) nécessaires

· Apports de connaissances et compétences pour élaborer les outils si nécessaire · Accompagnement dans l’élaboration des outils

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Le contenu des séances préparatoires

Pour le travail avec les pairs, nous avons suivi le rapport de l’ONUDC (2004) sur le pair à pair afin de respecter les 5 principes clés des bons programmes de prévention par les pairs :

- Être approprié du point de vue culturel. - Être approprié au stade du développement. - Fournir des informations exactes.

- Être fondé sur l'apprentissage expérimental, notamment la modélisation et la pratique des techniques de communication, de négociation et de refus.

- Disposer de personnel faisant preuve de professionnalisme.

Les intervenants professionnels avaient l’habitude de travailler avec des lycéens et savaient adapter leurs discours aux connaissances et représentations des jeunes de cet âge. Ils ont donc fait attention à ce que ces derniers puissent exprimer leurs opinions et leurs idées dans leurs actions tout en veillant à ce que les actions élaborées ne soient pas discriminatoires. Tous les intervenants professionnels étaient également déjà expérimentés dans la prévention du tabagisme et avaient donc déjà des connaissances précises à ce sujet. Certains ont dû négocier avec les pairs dont ils avaient la responsabilité afin d’éviter des exagérations que les jeunes voulaient véhiculer pour « faire le buzz». Les intervenants professionnels ont également été mis à contribution par les jeunes afin de les aider dans des tâches qu’ils ne savaient pas faire (de la mise en page, du montage vidéo, etc.), ou bien de leur expliquer certaines techniques utilisées en prévention. Dans l’ensemble cependant, la majorité des pairs éducateurs ont fait appel à leurs connaissances propres, y compris aux compétences développées dans leur formation.

La stratégie d’implémentation de la TPB

La TPB bénéficie de recommandations sommaires faites par son créateur Ajzen, dans l’objectif de l’appliquer aux interventions de changement de comportements. Ces recommandations que

145 nous nous sommes employés à suivre consistent premièrement à cibler le niveau des croyances dans le contenu des actions (Ajzen, 2006a, 2011a, p. 74̻ 101). L’auteur explique également que les croyances ayant le plus forts potentiel de modifier le comportement sont celles qui ont la plus forte taille d’effet du point de vue prédictif. Il ajoute néanmoins que certaines croyances peuvent avoir un effet important sur le comportement mais ne pas ressortir dans les études prédictives puisque, selon son exemple, un échantillon composé d’un grand nombre de sujets ayant un faible sentiment de contrôle sur leur alimentation en produit gras produiront statistiquement une corrélation faible, par manque de variance entre les sujets, alors qu’une intervention permettant de modifier cette croyance de contrôle est tout à fait susceptible d’avoir un effet important sur le comportement des individus (Ajzen, 2011a, p. 74̻ 101). Les études observationnelles mesurant l’ajustement de la TPB face au tabagisme n’ont pas fait ressortir avec constance un déterminant comme plus important que les autres. L’implémentation de la TPB pour ce projet visait donc à cibler les croyances liées aux 3 déterminants du modèle.

Afin de modifier les comportements, Ajzen (2011a, p. 74̻ 101) stipule également que l’intervention peut cibler aussi bien la force que la valeur28 des croyances ciblées . Il indique

également qu’une action peut chercher à modifier des croyances existantes ou bien en apporter de nouvelles.

Le processus d’implémentation de la TPB

L’implémentation de la TPB s’est déroulée tout au long du processus de création des actions et à différents niveaux. Le but étant de faire appel à la créativité des jeunes pour développer leur propre intervention, il s’agissait de ne pas leur fixer un cadre trop restrictif. La TPB a l’avantage d’offrir un cadre assez simple et parcimonieux particulièrement adapté à ce contexte.

28 La « force » et la « valeur » des croyances correspondent aux 2 aspects des croyances de la TPB, selon le principe

de l’expectancy-value. La force étant l’expectancy et la valeur étant la value. Par exemple, pour les croyances normatives injonctives, la force est la croyance dans le niveau d’attente des autres et la valeur est le niveau de motivation à s’y conformer.

146 L’équilibre entre liberté de créativité laissée aux pairs concepteurs et respect de la TPB a dû faire l’objet de décisions. L’une d’elles, prise en concertation entre tous les membres du projet P2P et intervenants professionnels, a été de favoriser la créativité des jeunes en priorité.

Lors de la présentation du projet aux pairs intéressés, les intervenants professionnels avaient pour tâche de leur présenter les 3 axes à aborder (attitudes, normes subjectives, contrôle perçu), sous une forme simplifiée et dans un vocabulaire adapté. Après cela, les jeunes avaient toute liberté pour proposer leurs idées. Les intervenants professionnels, au fait du fonctionnement de la TPB, pouvaient leur suggérer d’ajouter des éléments ou des actions complémentaires (sans en diriger le contenu), s’ils estimaient le modèle incomplet. Ensuite, à la fin de chaque séance, nous leur demandions un compte-rendu de son déroulement ainsi que l’avancement des actions envisagées, afin d’en évaluer l’adéquation en terme d’implémentation de la TPB. Des retours en conséquence leur étaient faits par l’équipe de recherche avant la séance suivante (Figure 28).

Figure 28 : Schématisation du processus d'implémentation de la TPB à la conception des actions

Ces retours de la part des intervenants professionnels n’ont cependant pas eu lieu de façon systématique malgré nos demandes. Le niveau d’implémentation de la TPB a donc varié d’une action à l’autre. De plus, la validation de la TPB ayant été effectuée sur la base des projets en cours, nous avons évalué a posteriori le niveau de son implémentation sur la base des actions menées.

Les lycéens proposent une idée

Les éducateurs valident la faisabilité

Les chercheurs valident la TPB

Les lycéens concrétisent l’idée

Validation

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