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Chapitre 3 Conception du LSM VeCSEL 163

3.1.1 Conception

Comme nous l’avons introduit précédemment, la largeur spectrale d’un laser sans mode est limitée principalement par largeur du gain net (gain - pertes). Or, dans le cas d’un laser sans mode VeCSEL, la cavité est pratiquement vide, les seuls éléments optiques qui peuvent avoir une sélection spectrale, et par conséquent limiter la largeur spectrale du laser sans mode, sont le modulateur acousto-optique et la structure 1/2 VCSEL1. Étant donné que la largeur spectrale du modulateur est fixe (de l’ordre de ∼ 20 THz), il est important que la structure 1/2 VCSEL puisse fournir un gain le plus large possible. Cependant, l’utilisation du décaleur de fréquence intra-cavité impose une forte contrainte sur l’amplitude du gain à fournir pour atteindre le seuil laser, à cause de son efficacité limitée (typiquement de l’ordre de ∼ 90 − 92% sur l’ordre ±1 de diffraction à chaque passage2). Ainsi, la structure 1/2 VCSEL doit répondre à deux critères simultanément, à savoir,

fournir un gain large spectralement et d’amplitude élevée (de l’ordre de

10%). Ceci présente une forte contrainte pour le VeCSEL car le milieu à gain est basé sur des puits quantiques de faible épaisseur (∼ 8nm) en configuration verticale (ce qui limite beaucoup le gain du matériau, par exemple pour un puits quantique en GaAs/InGaAs/GaAs, le gain du matériau est typiquement de l’ordre de ∼ 0, 2% par passage).

Dans le cas du VeCSEL, deux possibilités s’offrent pour accroitre le gain modal de la puce 1/2 VeCSEL (cf.§ 1.2.3.2).

La première possibilité consiste à augmenter le facteur de résonance de la

micro-cavité, Γµcafin d’augmenter l’amplitude du gain modal. Ceci est possible par l’utilisation de structures 1/2 VeCSEL résonantes intégrant un Bragg de quelques paires à l’interface air/semi-conducteur de la zone active(figure 3.1-a).

1. Étant donné que les miroirs diélectriques de haute réflectivité sont souvent large bande ∼ centaine de nm.

164 Chapitre 3. Conception du LSM VeCSEL a) ZA Air Bragg HR ... Distance z (nm)

Intensité du champ stationaire |E(z)|² 0 -500 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 4 8 12 16 Bragg LR b) 9 9 6 9 9 8 1 0 0 0 1 0 0 2 1 0 0 4 0 1 0 2 0 3 0 4 0 5 0 Fa ct eu r d e r és on an ce Γµc ) L o n g u e u r d ’ o n d e ( n m ) 9 p a i r e s 7 p a i r e s 5 p a i r e s 3 p a i r e s

Figure 3.1 – a) Exemple de distribution de l’intensité du champ dans une structure résonante comportant un Bragg secondaire dans l’interface air/ semi-conducteur de la zone active. –b) Facteur de résonance de la micro-cavité en fonction de la longueur d’onde pour différents nombres de paires de Bragg secondaires.

Cependant, ceci va considérablement limiter la largeur spectrale de la courbe de gain à cause de la dépendance du facteur de résonance à la longueur d’onde (figure 3.1-a). En outre, cette solution est trop contraignante d’un point de vue technologique car il faut faire coïncider la résonance de la micro-cavité avec le maximum d’émission des puits, ce qui nécessite une bonne maîtrise des matériaux. De plus, la largeur spectrale réduite du facteur de confinement de la micro-cavité rend la structure très sensible aux effets thermiques. Cette solution n’est donc pas adaptée pour atteindre une émission laser large bande.

La deuxième possibilité consiste à augmenter le gain de la puce 1/2 VCSEL

en augmentant le nombre de puits quantiques dans la zone active. Ici, le cas idéal est d’atteindre le gain nécessaire avec une structure traitée anti-reflet afin d’éviter tout filtrage spectral. Sur la figure3.2 nous avons simulé l’évolution du gain modal d’une structure 1/2 VCSEL en fonction du nombre de puits quantiques à partir des paramètres typiques d’une structure à base de GaAs données dans le tableau 1.1. Sachant que dans le cas du VeCSEL sans mode, les pertes dominantes dans la cavité sont l’efficacité de l’AOM (∼ 8 − 10% par passage), d’après cette simulation, dans le cas d’une structure avec un traitement anti-reflet, il semble nécessaire d’utiliser un grand nombre de puits quantiques (>20) pour atteindre le seuil laser tout en maintenant une excitation raisonnable.

Cependant, cette solution est limitée par plusieurs facteurs :

— Tout d’abord, la simulation de la figure3.2suppose une excitation uniforme de tous les puits quantiques dans la zone active. Or, dans le cas des struc-tures 1/2 VCSEL pompées optiquement, le profil spatial des porteurs photo-générés n’est pas uniforme suivant l’axe de croissance à cause de l’absorption exponentielle de la pompe. Ceci nécessite l’optimisation de la répartition spa-tiale des puits quantiques sur les maximas du champ afin de garantir une

a) 0 2 4 6 8 10 12 14 0 2 4 6 8 10 12

Densité de puissance incidente (kW/cm²)

Gain modal (%) 6 QW 10 QW 12 QW 24 QW b) 0 2 4 6 8 10 12 14 0 5 10 15 20 25 30 35 40

Densité de puissance incidente (kW/cm²)

Largeur

à

mi

hauteur

(nm)

Figure 3.2 – a)Évolution théorique du gain modal en fonction du nombre de puits quantiques en GaAs/InGaAs. La simulation ne tient pas compte des effets ther-miques et doit être pondérée par le facteur de confinement longitudinal des puits qui dépend de leur positionnement dans la zone active.–b) Largeur de la courbe de gain dans l’approximation du gain parabolique[Laurain 2010a].

excitation uniforme des puits quantiques. De plus, même si on peut placer jusqu’à 3 puits quantiques sur un maximum du champ, ces derniers doivent être suffisamment espacés pour éviter tout effet de couplage, ce qui se tra-duit par un effet de filtrage spectral[Laurain 2010a], et une diminution de l’amplitude du gain modal atteignable.

— Limitation technologique à cause du désaccord de maille avec le substrat. En effet, dans les structures 1/2 VCSEL, le désaccord de maille le plus im-portant se situe au niveau des puits quantiques (de l’ordre de ∼ 1.4 % pour des puits contraints en InGaAs/GaAs émettant à 1.06 µm). Sans compen-sation de contrainte, l’épaisseur critique est de l’ordre de ∼ 30 − 40 nm, ce qui limite le nombre de puits quantiques dans la zone active à < 5 afin de garantir une bonne qualité cristalline de la structure. Cependant, il est théori-quement possible d’augmenter le nombre de puits quantiques si la contrainte accumulée dans la structure est compensée. Pour les puits quantiques en InGaAs/GaAs, généralement on remplace les barrières en GaAs entourant les puits quantiques par du GaAs1−xPx, ainsi , jusqu’à 10 puits quantiques ont été épitaxiés dans une structure 1/2 VeCSEL [Laurain 2010a]. On notera que pour un nombre de puits encore plus élevé (> 12), comme nous allons le voir par la suite, on est confronté à la nécessité de placer un grand nombre de puits quantiques au plus proche de la surface pour garantir une excitation efficace des puits. Dans ce cas, le nombre de puits quantiques par unité de longueur devient trop élevé, de sorte que malgré une contrainte compensée sur la totalité de la structure 1/2 VCSEL, des structures contenant plusieurs puits quantiques (>9 d’épaisseur de 8nm chacun) regroupées sur des dis-tances de l’ordre du ∼ µm vieillissent rapidement et ne sont plus utilisables en fonctionnement laser (cf.§3.1.2).

166 Chapitre 3. Conception du LSM VeCSEL

— Augmentation du seuil laser à cause de l’augmentation de la densité de puissance nécessaire pour atteindre la transparence des puits quantiques. Ceci peut engendrer un échauffement important qui augmente les effets non-radiatifs et diminue le gain optique.

On notera aussi que lors de l’approximation de l’amplitude du gain d’un puits quantique par une fonction logarithmique (cf.§ 1.2.1.2), nous n’avons pas pris en compte les effets thermiques qui augmentent avec la densité d’excitation. En effet, au-dessous du seuil laser, le rendement quantique d’un puits (le gain optique) aug-mente avec la densité d’excitation pour atteindre sa valeur maximale pour des densi-tés proches de la transparence (Nthou Itr), puis diminue à cause des effets Auger qui deviennent plus importants à forte excitation. La figure3.3présente l’évolution théo-rique des durées de vie radiative, non-radiative des différents processus de recom-binaison et le rendement quantique d’un puits quantique en GaAs/InGaAs/GaAs. D’après cette simulation, au-dessous du seuil laser, et afin de garantir un rende-ment quantique des puits proche de l’unité, il faut limiter la densité de puissance d’excitation à des valeurs inférieures à 10 kW cm−2.

100 101 102 103 104 105 106 100 101 102 Densité d'éxcitation (W/cm2) Durée de vie (ns) 100 101 102 103 104 105 106 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 Densité d'éxcitation (W/cm2) Rendement quantique (a) (b) τr τnr τeff

Figure 3.3 – a) Simulation des durées de vie des recombinaisons radiatives, non-radiatives et effectives en fonction de la densité d’excitation pour des puits quan-tiques en InGaAs/GaAs. –b) Rendement quantique interne calculé avec l’équa-tion (1.14).

Pour résumer, compte tenu des différentes contraintes liées à la technologie VeC-SEL, la réalisation d’une structure 1/2 VCSEL pour un laser sans mode nécessite un compromis entre le nombre maximal de puits quantiques qui peuvent être introduits dans la zone active tout en gardant une bonne qualité cristalline de la structure, et un minimum de filtrage spectral (facteur de confinement de la micro-cavité) qui

serait nécessaire pour augmenter la valeur du gain modal de la structure.