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Vers la compr´ehension de la dynamique

J’ai jusqu’ici expos´e la r´esolution des ´etapes du programme de quantification canonique en m’arrˆetant avant la troisi`eme et derni`ere contrainte, la contrainte scalaire, ou hamiltonienne. Cette contrainte est associ´ee `a la sym´etrie de diffeomorphismes dans le sens du temps, et contient donc la dynamique de la th´eorie. C’est aussi la contrainte la plus difficile `a r´esoudre ! La r´esolution d’une contrainte exige d’une part de d´efinir celle-ci correctement comme un op´erateur au niveau quantique, puis de trouver les solutions de l’´equation de contrainte, et enfin d’´equiper l’espace des solutions d’un produit scalaire convenable. Enfin on souhaiterait pouvoir trouver des solutions ayant des interpr´etations semi-classiques.

Dans le cas de la contrainte hamiltonienne, mˆeme la d´efinition correcte de l’op´erateur de contrainte pose de nombreux probl`emes d’ambiguit´e. Une d´efinition convaincante a ´et´e propos´ee

4.3. Vers la compr´ehension de la dynamique... 63 j j k k l l 1 2 k + 12 l−1 2

Fig. 4.3 – Exemple d’action de la contrainte hamiltonienne : elle agit au niveau des vertexs en ajoutant une arˆete portant 1/2, et en modifiant les spins qui se trouvent autour. L’action totale de la contrainte hamiltonienne est une combinaison lin´eaire d’actions de ce type.

par Thiemann[70]. L’op´erateur de contrainte scalaire est correctement d´efini et exempt d’infinis. Pour comprendre quelles peuvent en ˆetre les solutions, on peut observer l’action de la contrainte hamiltonienne H sur un ´etat de r´eseau de spin. Tout d’abord, on a en g´en´eral

H|Γ, c >6= 0. (4.41)

Cela signifie que les ´etats de r´eseau de spin ne sont malheureusement pas des solutions de la contrainte hamiltonienne. Une exception notable concerne les ´etats dont les graphes sont des boucles, c’est `a dire qui ne contiennent pas de vertexs. Ceci est manifeste dans le fait que la contrainte hamiltonienne agit aux vertexs de Γ. En effet l’action de H sur un ´etat|Γ, c > produit un nouvel ´etat qui est une superposition de r´eseaux de spin qui diff`erent de |Γ, c > au niveau des vertexs. Cette modification prend la forme g´en´erale suivante, qui est d´ecrite `a la figure 4.3 : on ajoute des arˆetes portant le label 1/2 au niveau des vertexs, on modifie les labels des arˆetes adjacentes par±1/2. L’entrelaceur est lui aussi modifi´e en cons´equence.

Malgr´e une d´efinition convaincante de la contrainte hamiltonienne et une compr´ehension de son action sur les r´eseaux de spin, il n’a pas ´et´e possible `a ce jour d’obtenir une compr´ehension globale des solutions. On ne dispose pas non plus d’´etats solutions poss`edant une interpr´etation semi-classique claire. Cependant on comprend que la contrainte hamiltonienne fait ´evoluer les r´eseaux de spin en en modifiant la structure. Intuitivement, on obtient donc une ´evolution du type repr´esent´e figure 4.4. C’est ici qu’interviennent les mousses de spin. La philosophie de cette approche est de d´efinir le projecteur sur les solutions par des arguments d’int´egrale de chemin, en les connectant `a la notion d’´evolution de r´eseaux de spin que la contrainte hamiltonienne nous donne. Cette approche se veut une solution aux trois probl`emes :

1. il n’est pas besoin de d´efinir directement l’op´erateur de contrainte C, puisque seul l’op´erateur de projection Π nous importe ;

2. l’op´erateur de projection fournit une machine `a fabriquer les solutions ; 3. l’op´erateur de projection fournit le produit scalaire sur l’espace des solutions.

Il est `a noter que la naissance du programme de mousses de spin ne signifie pas l’arrˆet des recherches dans la direction canonique. On peut mentionner par exemple le programme de Thiemann[71], dont le but est de passer outre les probl`emes de contrainte hamiltonienne, en

00 00 00 11 11 11

Fig. 4.4 – Evolution de r´eseaux de spin

approchant le probl`eme sous un angle diff´erent, dont le but est de r´eunir toutes les contraintes en une contrainte maitresse.

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La gravit´e quantique en 2+1

dimensions

Cette th`ese est centr´ee autour de l’´etude des mod`eles de mousses de spin en 2+1 dimension. Cette partie pr´esente donc plusieurs aspects de la gravit´e classique et quantique en 2+1 dimen-sions, afin de motiver cette approche et de r´eunir les bases n´ecessaires `a l’´etude des mousses de spin. La r´ef´erence pour le sujet de la gravit´e 2+1 est le livre de Carlip [33]. Je m’int´eresserai essentiellement dans cette partie au cas euclidien, c’est `a dire pour un m´etrique de signature (+, +, +).

5.1 Pourquoi la gravit´e 2+1 ?

Une mani`ere optimiste de consid´erer la gravit´e 2+1 comme un mod`ele jouet serait de dire qu’elle poss`ede toutes les difficult´es conceptuelles de la gravit´e 3+1, sans les difficult´es techniques. En effet, dans le cas particulier de la relativit´e g´en´erale en 2+1 dimensions, l’´equation d’Einstein dans le cas sans mati`ere

Rµν1

2Rgµν+ Λgµν = 0, (5.1)

se simplifie par le fait qu’en 2+1 dimensions le tenseur de Riemann est une fonction du tenseur de Ricci

Rµνρσ = gµρRνσ+ gνσRµρ− gνρRµσ− gµσRνρ1

2(gµρgνσ− gµσgνρ)R. (5.2) En 2+1 et pour Λ = 0, l’´equation d’Einstein implique que le tenseur de courbure s’annule et toutes les solutions sont donc plates. Pour une constante cosmologique non-nulle, les solutions sont de courbure constante. La g´eom´etrie des solutions est donc compl`etement d´etermin´ee et il ne reste plus de dynamique gravitationelle, en particulier pas de gravitons. Il ne reste plus de degr´es de libert´e locaux et seulement des degr´es de libert´e globaux, li´es `a la topologie de l’espace-temps. Cette propri´et´e est la source de la ”simplicit´e technique” de la gravit´e 2+1. En revanche on peut restaurer des degr´es de libert´e par l’ajout de mati`ere. Le couplage `a la mati`ere permet donc d’obtenir un nombre ´eventuellement infini de degr´es de libert´e physique en gravit´e 2+1.

Malgr´e cette relative simplicit´e, la gravit´e 2+1 souffre des mˆemes difficult´es conceptuelles que la gravit´e 3+1, en ce sens que c’est une th´eorie covariante g´en´erale, donc poss`edant la sym´etrie par diff´eomorphismes. La construction d’une th´eorie de gravit´e quantique 2+1 doit donc ´egalement r´epondre aux questions comme la construction d’observables au niveau quantique, le 65

probl`eme de la limite semi-classique, le rˆole des trous noirs, le couplage `a la mati`ere, l’effet de la constante cosmologique, la question de la topologie et de ses changements, le probl`eme du temps. En particulier, la gravit´e 2+1 est une th´eorie des champs en apparence non-renormalisable que l’on peut n´eanmoins quantifier de mani`ere exacte [72]. C’est l’espoir de pouvoir mieux comprendre ces questions dans un cadre techniquement simplifi´e qui motive l’´etude de la gravit´e quantique en 2+1 dimensions.

La simplicit´e technique de la gravit´e 2+1 rend possible l’utilisation et la comparaison de plu-sieurs approches diff´erentes de quantification [73]. La gravit´e 2+1 constitue donc un laboratoire id´eal pour la confrontation des diff´erentes approches.