• Aucun résultat trouvé

MARQUEURS DE COHESION REFERENTIELLE R1 – Introduction de nouveaux référents

4.1 RESULTATS AUX EPREUVES EN LSF

4.1.4. Compréhension morphosyntaxique LSF-C2 (sous-test 4 du TELSF)

4.1.4.1. Performance des sujets

Le score moyen du groupe expérimental à cette épreuve est de 5.8 points (maximum pour cette épreuve : 10 points), avec un écart-type de 1.47. Tous les sujets ont pu effectuer la tâche proposée et ont réussi au moins deux des dix items. Aucun sujet n’a obtenu le maximum de points pour cette épreuve; les résultats obtenus vont de 2 à 8 points. Les performances des sujets se répartissent sur l’ensemble de cet intervalle selon une courbe légèrement décalée par

rapport à la courbe normale attendue (voir Figure 4.1.4). La médiane, proche de la moyenne, se situe à 6 points. Cette épreuve paraît suffisamment sensible pour discriminer la population étudiée.

Figure 4.1.4 : Résultats du groupe expérimental à l’épreuve LSF-C2 (en nombre de points)

4.1.4.2. Résultats par items

Quatre items (items 1, 7, 9, 10) ont été réussis par au moins 2/3 des sujets, avec un pourcentage de réussite allant de 69% à 85%. Cinq autres items (items 2, 4, 5, 6, 8) ont été réussis par au moins un tiers des sujets (taux de réussite de 38% à 62%). Le dernier item (item 3) a été réussi par seulement 23% des sujets (voir Tableau 4.1.4). Il semble donc que les items de cette épreuve présentent des degrés de difficultés différents.

Tableau 4.1.4 : Nombre et pourcentage de réponses correctes par item à l’épreuve LSF-P2 pour le groupe expérimental (N=39)

Item n° 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

rép. corr. 32 24 9 16 19 24 28 15 27 33

82% 62% 23% 41% 49% 62% 72% 38% 69% 85%

4.1.4.3. Validité interne

Le coefficient de validité alpha est de .10. Cette valeur extrêmement faible indique que la réussite à l’un des items n’a pas de lien avec la réussite aux autres items, comme si chacun mesurait des dimensions différentes des capacités des sujets. D’autres analyses ont été réalisées en prenant en compte seulement certains des items, qui corrèlent entre eux, et en laissant de côté les items qui corrèlent le moins avec les autres. Malgré ces diverses tentatives, le coefficient de validité ne dépasse pas dans le meilleur des cas .54 (en supprimant les items 3, 4 et 8)27.

L’analyse des résultats à cette épreuve nous pousse à considérer les scores des sujets avec précaution. En effet, si les performances des sujets se répartissent selon une courbe de type normale, elles se situent sur un intervalle restreint de 6 points seulement (scores de 2 à 8 points). Plus déconcertant, les réussites aux différents items ne semblent présenter aucun lien entre elles.

Ce problème de validité se retrouve dans les données récoltées aux Etats-Unis auprès des enfants sourds de parents Sourds et entendants par Strong et Prinz et laisse encore perplexes les experts consultés du Centre of Education, Policy, Organization, Measurement

27 Nous tenons à remercier José Favrel, Université de Genève et IUFM de Dijon, et John Gargani, U.C.

Berkeley, pour leur collaboration et leurs recommandations concernant les analyses de validité effectuées.

and Evaluation de l’Université de Californie à Berkeley (John Gargani, communication

personnelle, 2003).

Les douze adultes Sourds ayant participé à la version pilote du TELSF ont très bien réussi cette épreuve, obtenant un score moyen de 9 points sur 10 avec peu de variations inter-individuelles (minimum 7 points et maximum 10 points). Ils ont relevé quelques aspects problématiques, comme certains distracteurs insuffisamment différenciés ou des expressions faciales trop communicatives qui ont conduit à de légères rectifications de l’épreuve dans la version définitive. La nouvelle version des items a ensuite été présentée à un groupe composé de professionnels Sourds et d’interprètes LSF/français qui ont confirmé l’adéquation des items et des distracteurs choisis. En outre, certains sujets du pilote ont noté également que certaines planches illustrées n’étaient pas très claires quant à ce qu’elles représentent (item 3 (lampadaire de rue), item 4 (pagode chinoise), item 5 (classe avec un enseignant et ses élèves) (voir Annexe B13). Nous nous sommes donc assurés lors de la passation que les sujets identifiaient correctement les représentations avant de donner leurs réponses.

A notre connaissance, ce type d’épreuve n’a pas été utilisé avant les travaux de Prinz et Strong auprès d’enfants sourds. Le peu de données disponibles concernant la compréhension des classificateurs par les enfants sourds révèlent que ces derniers peuvent avant l’âge de 4 ans comprendre certains classificateurs dans une situation de description spatiale où ils doivent sélectionner l’objet approprié (Lindert, 2001), alors que dans une situation expérimentale la compréhension de Body Classifiers est encore partielle entre 6 et 9 ans et tend à être maîtrisée dans la tranche d’âge supérieure de 9 à 12 ans (Morgan & Woll, 2003).

Suite à ces résultats déconcertants et en l’absence de piste explicative, les collaborateurs du TELSF ont ré-analysé en profondeur les items et ont interrogé cinq nouveaux sujets (âgés de 9, 11, 12, 16 et 23 ans), de manière plus clinique, tous enfants entendants de parents

Sourds et ayant la LSF comme première langue28. Il ressort de leurs réponses et commentaires que la planche représentant la pagode chinoise (item 4) est étrange et qu’il n’est pas clair qu’il s’agit d’un objet en 3 dimensions, ce qui conduit à la majorité des erreurs, les informateurs choisissant souvent le distracteur avec la configuration « L », adapté pour un objet en deux dimensions, comme les sujets du groupe expérimental (38% des réponses). Par contre, les items 5 (classe) et 8 (cheveux frisés), difficiles pour les sujets du groupe expérimental, paraissent clairs pour les cinq informateurs, qui peuvent également facilement justifier leur choix et refuser les distracteurs (« c’est bizarre de signer ça comme ça », « ils sont assis, pas debout », « c’est pas 2 cheveux », « ce ne sont pas des boucles anglaises »). Le dernier item problématique (item 3 – lampadaire), reste difficile pour les jeunes informateurs, qui choisissent comme 49% des sujets du groupe expérimental le distracteur avec la configuration

« D », adéquat pour un objet en deux dimensions, au lieu du classificateur avec la configuration « B » propre aux objets en 3 dimensions, que l’un d’entre eux refuse en expliquant que « c’est comme quelque chose de plat ». Les informateurs plus âgés cependant n’ont aucune hésitation par rapport à cet item.

Ainsi, il semble que différents facteurs contribuent à ces résultats inattendus. La qualité d’une partie du matériel paraît mise en cause; à un autre niveau, les erreurs consistantes des sujets semblent indiquer que certaines propriétés linguistiques des classificateurs ne sont pas maîtrisées dans cette tranche d’âge chez les enfants sourds de parents entendants, notamment la distinction entre objets de deux et trois dimensions. Toutefois, il faudrait poursuivre les recherches dans ce domaine précis pour en savoir davantage. Il convient donc de rester prudent quant aux conclusions que l’on peut tirer des résultats à cette épreuve.

28 Nous remercions vivement Monique Aubonney et Claire Dunant-Sauvin pour le temps qu’elles ont consacré à ces analyses supplémentaires.