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La composition des dessins

B. Égypte

5. La composition des dessins

Les dessins peuvent être triés en cinq types de composition différents : - les deux coupes en demi-lunes avec les médaillons en partie inférieure ;

- une sorte de carafe décorée avec la mythologie égyptienne (une interprétation du XIXème siècle du cycle du jour et de la nuit, de la vie et de la mort autour des dieux) ;

- la coupe ou vide-poche à anses, illisible par la tâche d’humidité ; - la coupe rectangulaire dans les tons bleus ;

- les trois jardinières à forme d’Horus.

L’esquisse MOD 142 reprend le modèle classique du scarabée monté sur un support, avec une aile déployée de chaque côté. Cette composition n’est pas renouvelée par Gallé dans le corpus du MEN ; ce modèle sert d’entraînement pour reproduire un motif. L’hypothèse s’appuie sur la disposition du scarabée sur une espèce de support ou de médaillon, comme s’il était monté en bijou.

Il existe le dessin suivant, dans les collections du musée d’Orsay.

Le motif du scarabée avec le détail des écailles sur les ailes est le même que la petite ébauche ; ce dessin inclut plus de couleurs, qui doivent sans doute finir sur une œuvre. La silhouette de l’objet à destination du motif n’est pas spécifiée, mais sont identifiables plusieurs frises déco-ratives. Sans doute que le petit objet (un vase, un bol ou un cache-pot) dessiné sur la partie supérieure à gauche du dessin correspond à l’objet à décorer.

Toujours est-il que sur la droite de la même feuille, le scarabée volant au milieu des lotus est un motif qui est dénombré deux fois : une fois en dessin et une fois sur la jardinière en forme de faucon du MO. La supposition autour de ce dessin serait que l’artiste a désiré organiser une thématique égyptienne autour de la faune et de la flore, modèles qui ont été repris de façon indépendante, mais qui ont plu au moins au directeur des ateliers. Les couleurs sont les mêmes pour les deux motifs, alors ce fait appuie l’hypothèse d’une conception d’une série pour ce projet.

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Fig. 118 : Atelier Gallé, sans titre, crayon, aquarelle et rehauts d’or, musée d’Orsay, (C) RMN-Grand Palais (musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski.

Pour MOD 603, bien qu’uniquement crayonné, les motifs disposés sur le calque veulent former une iconographie similaire à une fresque hiéroglyphique antique. Le dessin s’axe autour de la plante qui rythme la hauteur de la composition et qui dispose de part et d’autres les mêmes éléments décoratifs. Ces motifs ne sont pas appliqués en miroir : les figures et les animaux dessinés suivent le même sens d’un côté de l’axe et de l’autre.

Les deux coupes en demi-lune sont un motif connu du corpus Gallé. Il existe notamment dans le corpus grec ; les coupes sont des modèles très produits dans l’usine, de cette forme ou d’une autre. Ici, l’ensemble est cerné sur son contour, pour souligner la demi-lune, le médaillon et le pied composé de plusieurs rayons achevés par des cercles, ressemblant aux mé-dailles antiques étudiées précédemment. Le report de la couleur est le même sur les parties supérieures et inférieures de l’objet, pour créer un dynamisme visuel avec une alternance de coloris. Cette technique rend l’ensemble très cohérent et unifié, notamment avec le style des insectes qui est reproduit d’un objet à l’autre.

Entre ces deux modèles, le décor varie quelque peu sur la demi-lune : le décor est allégé pour MOD 133, avec des spirales plus fines et plus simples. Le motif des médaillons est identique, en revanche, de l’insecte aux formes géométriques. La différence de cet élément est l’inversion de la couleur.

MOD 407 semble plus abouti que son pendant. En plus de la structure générale, la demi-lune est ornée d’une frise inspirée des motifs des carapaces des insectes. L’alternance de trois cou-leurs sur la base de l’objet permet d’ajouter des détails supplémentaires en variant les motifs appliqués dans les médaillons. Ils reprennent les détails de l’ensemble de la composition, en alternant les mêmes coloris.

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Gallé reprend un modèle qu’il maîtrise en appliquant un nouveau décor dessus.

La coupe ou le vide-poche est malheureusement peu visible.

Cet exemplaire est une proposition entre les demi-lunes à médaillons – que l’on devine en tant que base de l’objet dessiné –, le principe d’axe de symétrie autour des lotus égyptiens et des enroulements symétriques formant les anses.

Ce modèle paraît plus grossier dans sa structure que les autres ; les enroulements qui forment le col et les anses sont très épais, alors qu’il ne semble pas y avoir d’autres éléments décoratifs que ces volutes et les décors des médaillons (illisibles). Tout cela encadre avec lourdeur l’in-crustation centrale, sans doute dans les tons bleus à l’origine, d’autant plus que l’ensemble (à part le supposé emploi de bleus) est coloré dans des tons bruns très similaires. La couleur ne porte pas de reliefs à l’ensemble.

MOD 137 est la forme la plus originale de cette thématique.

Cet objet est sans plus décoratif qu’usuel, mais il se rapproche d’une carafe ou d’une cruche ; le bec verseur est suggéré par la partie supérieure du dessin avec l’aile poursuivie à son extré-mité par le taureau dans un cercle.

La structure d’ensemble fait penser à plusieurs éléments :

- il y aurait en premier lieu l’idée d’un totem à l’effigie des dieux égyptiens. Les dieux du jour et du soleil sont représentés en haut ; ceux de la nuit et de la mort sur la partie inférieure. La sensation du monde souterrain est apportée par l’inclusion des animaux sacrés au milieu des sortes de racines très fournies ;

- ensuite, le col et le bec de la silhouette rappellent des colonnes et des chapiteaux de temples égyptiens. Les écailles blanches et rouges participent de l’ornement architectural, tan-dis que le chapiteau s’évasant semble supporter l’oiseau qui le surplombe.

Sans doute qu’un tel objet fut difficilement réalisable, pour délimiter les couleurs sans les fondre les unes dans les autres ; mais surtout pour recréer un relief aussi complexe. Notamment à hauteur de la panse de l’objet, qui semble composer de cercles en relief, à la façon d’émaux fondus dans la masse.

Les trois jardinières Horus exploitent la biologie de l’animal pour inventer la forme de l’objet : devant ou derrière les corps, les ailes sont déployées, refermées à leur extré-mité par leurs plumes les unes contre les autres, ou par un disque solaire. L’ingéniosité des modèles repose sur la mise en abyme du sujet sur une forme en trois dimensions.

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6. Dans les collections d’objets et d’arts graphiques du MEN et du MO.