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superstructures et configurations localisées

3.1. Une comparaison des processus de revalorisation urbaine en France et en Allemagne Allemagne

S’il constitue souvent un rapprochement entre deux ou plusieurs entités, le terme de comparaison revêt une forte polysémie qui révèle des approches très différentes au sein des sciences sociales. Or, notre travail pose pour objet d’analyser les modalités contemporaines de la revalorisation urbaine par la comparaison de quatre quartiers situés dans des contextes différents, français et allemands. Si les différences de contextes peuvent servir à dégager des généralités fortes (Fournier et Sabot, 2001), la comparaison peut constituer un exercice

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périlleux puisse qu’elle représente de manière aigüe la tension entre dynamiques structurelles et dynamiques locales, qui anime ce travail depuis l’introduction. Elle contient en effet l’écueil d’une montée en généralité trop rapide, qui viendrait surimposer au local des dynamiques globales modélisées a priori. À l’inverse, la tentation d’une autonomisation irréductible de l’échelle locale peut être forte. Les prochains paragraphes visent à construire la démarche comparative qui organise ce travail.

Une approche processuelle de la comparaison

Dans le langage courant, effectuer une comparaison suppose une hiérarchisation autour de facteurs d’évaluation, souvent quantitatifs et en lien avec une norme préétablie. Ainsi, comparer les prix d’un produit revient à hiérarchiser le plus ou moins cher quand une course de vitesse, par exemple, constitue une comparaison des performances de différents concurrents. Ainsi, la comparaison conduit à exprimer un résultat en termes de plus ou de moins. Elle s’axe donc prioritairement sur la recherche de différences en s’attachant à mesurer les qualités intrinsèques d’un objet ou d’un individu pour les porter ensuite à un autre. En ces termes, la comparaison est souvent stricte et termes à termes. En géographie, une comparaison de la sorte conduit à la production de monographies confrontées les unes aux autres en venant à comparer des lieux en tant que lieux alors que ces derniers sont par essence différents. La plupart des approches de la comparaison s’accordent ainsi sur le fait, qu’en sciences sociales, une comparaison n’est jamais absolue et qu’elle nécessite d’être construite précisément pour avoir une validité analytique. Elle implique pour cela la « construction de comparables » (Detienne, 2002), c‘est-à-dire la sélection de questionnements ou de facteurs transposables d’un espace à un autre : « une catégorie de départ » (Jacquot, 2007). Ces comparables peuvent se baser sur les situations locales et effectuer, par exemple, le rapprochement entre les formes et les pratiques d’un champ (comparaison internationale de politiques publiques, etc.) dans différents contextes, ou analyser la différence du rapport culturel à une pratique ou à « une catégorie

d’action similaire » dans des pays différents (Barbier, 2015). Dans ce type de cas, cette

approche conduit souvent, dans le cadre d’une comparaison internationale, à identifier des points-communs et des différences dans la définition et les pratiques qui se rattachent à ces catégories. Ainsi, en urbanisme ou en droit par exemple, de nombreux travaux s’attachent à effectuer des études approfondies, mais indépendantes les unes des autres, des traditions

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disciplinaires des différents pays pour ensuite les mettre en rapport afin d’en distinguer les points de divergence et de convergence, à l’instar des monographies thématiques comparées autrefois pratiquées en géographie. Ce type d’approche conduit à reprendre des thématiques déjà largement balisées (comme le renouvellement urbain, le patrimoine, etc.) afin de comparer de manière peu problématisée le rapport de différents espaces locaux à ces dernières. Cela aboutit souvent à singulariser les contextes locaux a priori en se basant sur des notions mal définies ou qui véhiculent des sens différents selon les contextes culturels/nationaux, etc. (Jacquot, 2007).

Dans une optique plus généralisante, certaines comparaisons hypothético-déductives visent à comparer la conformité des configurations particulières à des modèles théoriques fixés en amont (Ibid.). Les espaces étudiés sont alors questionnés au prisme du modèle, le chercheur visant à identifier ce qui est conforme et ce qui s’écarte du modèle sur lequel il se base en vue de le valider, l’invalider ou le modifier. Les espaces étudiés deviennent alors des laboratoires de la mise en œuvre d’un protocole expérimental, qui a pour but de dégager des lois générales du rapport des sociétés à la catégorie de départ. Une telle approche de la comparaison se construit donc par rapport à un système d’appréhension causale, établi en amont, qui vise à construire une certaine manière de percevoir, d'analyser, de coordonner, commune à « [un

groupe, une civilisation...] Quels que soit les choix différenciés de telle ou telle de ses branches » (Detienne, 2002, p. 70).

Notre travail s’inscrit dans la lignée de ces démarches modélisantes. Il se base en effet sur une hypothèse de travail dont la construction théorique de notre objet et l’analyse épistémologique ont permis de dresser les contours et de poser les questionnements, c’est-à-dire les facteurs d’analyse et de comparaison. Cette hypothèse se base sur un processus (Jacquot, 2007), c’est-à-dire sur une phase spatio-temporelle et conceptuelle identifiée à priori : le réaménagement des anciens quartiers industriels péricentraux prend la forme de doubles processus de disparition/destruction et d’investissements/création de différentes formes de valeurs à différents moments historiques. Ces processus reconfigurent localement les différentes dimensions de l’espace social (conception, représentation et appropriation) et traduisent une évolution des modes de production de l’espace urbain, donc des valeurs qui fondent le rapport des sociétés à la ville. Dans le même temps, l’organisation économique et

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politique des sociétés contemporaines se caractérise par une importance toujours plus forte des principes néolibéraux qui ne peuvent manquer de s’inscrire localement et d’influencer ces processus de valorisation.

Défini avec cet angle d’approche, les impératifs géographiques de la construction de notre comparaison se limitent à la présence d’anciens quartiers à forte concentration industrielle qui ont connu ou connaissent des processus de « régénération urbaine ». L’objectif de la comparaison n’est pas d’opérer une hiérarchisation normative d’espaces entre eux. Il s’agit plutôt d’interroger, de manière combinée, les formes et les configurations (Ibid.) de ces processus de dévalorisation/revalorisation pour en identifier les similarités et les particularités dans l’optique d’analyser le degré de pénétration des principes liés au caractère néolibéral des grandes structures de la production et de la reproduction sociale dans les espaces locaux. Les processus analysés localement feront ainsi l’objet de croisements perpétuels afin que chaque cas puisse servir à la compréhension des autres. Ces derniers feront ensuite l’objet d’une comparaison avec les référentiels construits lors de l’état de l’art des deux chapitres précédents

Ces comparables ne peuvent être des localisations ou des catégories socio-spatiales strictes, comme la taille de la ville ou le nombres d’habitants puisque ces variables n’apparaissent nullement déterminantes dans la présence25 de tels processus visibles aussi bien dans des villes mondes que dans des petites villes, voire des bourgs ruraux. De même, la présence de ce type de processus dans une grande variété de contexte, nationaux et régionaux semble indiquer l’existence de facteurs explicatifs structurels dont il faudra déterminer l’importance. Ainsi, l’approche processuelle n’implique nullement de comparer des espaces aux caractéristiques géographiques similaires (même place dans la hiérarchie urbaine ou nombre d’habitants identique, même contexte culturel ou régional, etc.) mais permet au contraire de dépasser, voire de remettre en cause ces différences (Rebotier, 2010) afin de rechercher des résultats plus généraux en multipliant et en croisant les contextes d’études pour identifier les permanences et les mutations. Cette approche structurée autour des généralités et des particularismes évacue largement, de fait, les raisonnements autour des catégories strictes d’identique ou de différent. En effet, si les analyses des mutations contemporaines de l’espace

25 Nous insistons sur le fait que les variables quantitatives n’interviennent pas dans l’existence de processus même de dévalorisation/revalorisation, pas qu’elles n’ont aucune incidence sur ses formes et son intensité.

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urbain pointent une tendance à la standardisation des pratiques et des objectifs de la production urbaine, aucune, même les plus structuralistes d’entre elles, n’en vient à dégager des lois à ce point générales – sur le modèle des sciences dites dures – qu’elles puissent être productrices d’espaces locaux strictement identiques. De ce fait, les espaces locaux sont intrinsèquement différents. Mais s’arrêter à ces différences n’aurait pas plus de sens que de postuler la possibilité d’espace locaux strictement identiques. Raisonner autour de catégories aussi figées entraîne à invalider la dimension opératoire de toute démarche comparative en sciences sociales (Rebotier, 2010). Ainsi, les espaces locaux ne seront pas considérés dans ce travail comme des objets d’études en soit mais comme des cas d’étude, c’est-à-dire des configurations localisées, des manifestations d’un phénomène spécifique (le processus de dévalorisation/revalorisation), véritable objet de cette étude.

Des contextes français et allemands en question

Cas d’étude des manifestations d’un phénomène plus vaste, nos quatre quartiers n’en sont pas moins placés dans des contextes géographiques, historiques et culturels différents, qui ne sont pas sans influencer les formes spécifiques prisent localement par les processus de dévalorisation/revalorisation. L’interrogation centrale de ce travail portant les différentes formes prises par la néolibéralisation de la production urbaine, il nous a semblé pertinent de sélectionner des espaces d’études dans deux pays européens, la France et l’Allemagne, qui font couramment l’objet de comparaisons sur des critères économiques et qui ont un rapport historique profondément différent au néolibéralisme.

La comparaison franco-allemande est un exercice très à la mode dans le champ politique et médiatique français. Les comparaisons tournent souvent autour de la glorification de la réussite économique d’un « modèle allemand » basé sur le contrôle des déficits publics et la faiblesse de la fonction publique, dont il faudrait s’inspirer en France (Strassel, 2013). Au contraire, certaines comparaisons dénoncent les propensions importantes des politiques budgétaires et économiques allemandes, profondément néolibérales, à creuser les inégalités de richesse, contrairement à un système redistributif français qui garantirait une plus forte justice sociale. Dans ces deux cas, les comparaisons sont des outils politiques qui visent à hiérarchiser un modèle social par rapport à un autre autour de valeurs défendues par celui qui les mobilise

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(schématiquement, la croissance à tout prix contre la justice sociale). Toutefois, au-delà de ces modèles nationaux idéalisés (Ibid.), la généralisation de la comparaison basée sur l’organisation respective des modes de production français et allemands traduit des enjeux importants pour qui souhaite analyser les évolutions des dynamiques locales du capitalisme contemporain. En effet, l’analyse économique suggère depuis longtemps que le capitalisme, même mondialisé, prend des formes d’organisation politique différentes selon les contextes nationaux et régionaux. À ce titre, malgré leur proximité géographique et leur inscription dans l’Union Européenne, la France et l’Allemagne se sont construit autour d’un rapport entre État et Marché très différents.

- Le système allemand s’est construit, après la fin de la seconde guerre mondiale, sur une « économie sociale de marché » basée sur l’acceptation par le plus grand nombre du rôle de l’économie privée dans le fonctionnement de la société. Cette doctrine est basée sur les préceptes de l’ordolibéralisme qui considère la concurrence comme l’expression d’un régime de liberté au fondement même de la souveraineté politique allemande (Foucault, 2004)26. À ce titre, celle-ci doit être sauvegardée et coordonnée par des règles stables garanties par l’État dans le but d’éviter les distorsions et la création de monopoles en assurant, entre autres, la stabilité monétaire nécessaire à la confiance des agents économiques. Cette forme historique particulière de néolibéralisme (Ibid.) prévoit que la mission de stabilité de l’économie doit être sortie de la délibération démocratique et confiée à des autorités indépendantes pour éviter toute tentation d’intervention de la part de l’État (Strassel, 2013). L’État joue donc un rôle d’appui a certaines dynamiques du capital plus qu’il n’impulse ou régule des politiques économiques et sociales.

- Au contraire, le modèle social Français, construit à partir de la même période, se caractérise par une action étatique forte, y compris économique et monétaire. La constitution de monopoles industriels ou publics est largement favorisée pour augmenter l’efficacité de certains domaines stratégiques comme le transport ou l’aménagement du territoire. De même, l’État agit comme un régulateur des déséquilibres économiques à travers des politiques de redistributions sociales importantes, au moins jusqu’au début des années 1990. Ainsi, en France,

26 Voir la leçon du 31 Janvier 1979 dans naissance de la biopolitique pour une généalogie et une analyse des préceptes de ce que M. Foucault appelle le néolibéralisme allemand.

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traditionnellement, l’État joue plutôt un rôle d’impulsion et de régulation des dynamiques du Capital.

Ces différences structurelles dans l’organisation des deux pays posent des questions cruciales pour notre analyse. Dans quelle mesure les configurations localisées des productions urbaines françaises et allemandes reflètent-elles ces modèles d’organisation nationaux ? Malgré les dynamiques de standardisation urbaine contemporaine, quelle est le poids de ces héritages structurels (ou Path-dependancy, Théodore et Brenner, 2002) dans la définition des trajectoires urbaines contemporaines et leur néolibéralisation ?

Étonnamment, alors que la comparaison franco-allemande est couramment pratiquée dans le champ médiatique ou économique, ainsi que dans l’analyse des politiques publiques, elle reste relativement rare dans le champ de la géographie et des études urbaines. Les rares travaux posant explicitement le but d’une comparaison nationale autour de thématiques urbaines pointent un faisceau de différences dans l’organisation et la culture institutionnelle de la production urbaine. Ainsi, de manière générale, les acteurs locaux allemands bénéficieraient d’une plus grande souplesse dans la définition, l’élaboration et la mise en œuvre des projets urbains (Blanc, 2006 ; Godillon, 2012) liée à une nature moins interventionniste de l’État qu’en France. En effet, en France, l’État s’est longtemps fortement impliqué dans l’aménagement, considéré comme un outil stratégique au service du développement économique et de l’égalité sociale. Au contraire, en Allemagne, l’aménagement a été rapidement décentralisé après la deuxième guerre mondiale, en réaction à l’importance des théories des géographes et des aménageurs dans la définition de la doctrine nationale-socialiste du Lebensraum (Baudelle et Kunzmann, 2004) et semble faire l’objet d’un relatif désintérêt à l’échelle fédérale (Ibid.). De même, ces quelques travaux insistent sur le caractère moins bureaucratique et plus intégré du développement urbain allemand (Godillon, 2012), organisé autour de grandes politiques sectorielles d’échelles clairement définies (le Bund, le Land et la commune) qui intègrent les nombreuses dimensions de l’intervention sur l’espace urbain quand les collectivités françaises sont souvent organisées sur un modèle plus éclaté, avec de multiples niveaux et échelles de compétences qui peuvent parfois mettre en œuvre des actions non concertées (Ibid.). La plus forte liberté des acteurs locaux allemands aurait notamment pour effet de permettre une plus forte capacité d’innovation locale et de prise en compte des problèmes spécifiques posés à cette échelle (Blanc, 2006 et 2013) quand le caractère centralisé de l’urbanisme français aurait plutôt

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tendance à développer nationalement des dispositifs applicables ensuite dans une grande variété de contextes (Godillon, 2012). Cela conduirait par exemple le renouvellement français à privilégier avant tout la démolition de l’ancien et la reconstruction alors que l’Allemagne se porterait sur des solutions de réhabilitation négociées localement (Blanc, 2006). Ainsi, devant la réputation allemande d’efficacité dans l’invention de solutions locales, plusieurs travaux s’interrogent sur la possibilité d’importer en France des catégories d’actions ou des systèmes d’organisation mis en place outre-Rhin (Baudelle et Kunzmann, 2004 ; Dubeaux, 2017). Là encore, les comparaisons effectuées à cette échelle tendent à exprimer une certaine fascination des chercheurs et des aménageurs français pour l’urbanisme allemand (Baudelle et Kunzmann, 2004), considéré comme plus innovant et plus démocratique, facilitant l’implication des acteurs locaux et des habitants dans la définition de projets urbains qui consacreraient notamment le quartier comme « un espace d’autonomie, avec un certain pouvoir » reflétant une « culture du

consensus » quand la France se caractériserait plutôt par une « culture de la confrontation »

(Blanc, 2013, p. 51). En dépit de ces comparaisons nationales explicites, souvent basées sur des traditions ou sur des dispositifs réglementaires et juridiques, les comparaisons entre villes ou quartiers spécifiques sont bien rares.

Au-delà de ces approches de la comparaison, souvent figées sur la dimension nationale et les spécificités qui en découlent, au mépris « des convergences à l’œuvre et des phénomènes

transnationaux (européens et mondiaux) qui affectent, de façon croissante, les politiques publiques et qui les rendent aussi de plus en plus interdépendantes » (Hassenteufel, 2005, p.

121), le choix de mettre en regard des espaces situés en France, dans une région périphérique aux grandes dynamiques de production, avec d’anciens espaces fortement industrialisés situés en Allemagne, et qui plus est en ex République démocratique d’Allemagne, pose plusieurs questions. L’angle de ce travail interroge les trajectoires localisées, c’est-à-dire des processus qui, en première analyse, sont bien reliées à des particularités nationales ou locales. Pour les résumer, la France, longtemps considérée comme un pays d’économie mixte fortement redistributive, a connu une crise industrielle progressive qui n’a pas touché aussi brutalement les espaces urbains qu’elle ne l’a fait en ancienne Allemagne de l’Est, où la transition d’un état socialiste planificateur, qui possédait les entreprises et les logements, vers un État peu interventionniste et déjà largement néolibéralisé a entraîné une crise industrielle massive dont les effets n’ont pas été prévenus par les pouvoirs publics. De même, si les héritages de la ville socialiste sont très peu prégnants dans les anciens quartiers industriels, dont l’urbanisation est

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plus ancienne et traduit une organisation très proche de celles des villes fordistes (contrairement aux quartiers de grands ensembles ou aux anneaux de centre-ville), les régimes urbains est-allemands sont passés d’une logique socialiste de planification et d’organisation étatique de l’ensemble de la vie sociale urbaine à des logiques plus individualistes et néolibérales de partenariats et d’organisation locale. C’est-à-dire une autre forme de tradition de production de l’espace qui ne manquera pas de s’inscrire dans l’espace en le bouleversant et d’introduire des nuances dans les cycles de valeurs et les justifications qui en sont données.

Au-delà des contextes locaux : une diversification des cas de comparaison visant une montée en généralité

Si les questionnements liés aux différents contextes nationaux de nos espaces d’étude jouent un rôle important dans la compréhension empirique des processus de dévalorisation/revalorisation que nous avons observé sur nos terrains respectifs, ce travail n’a pas pour objet d’effectuer une comparaison nationale franco-allemande des processus de revalorisation urbaine (figure 2). Une telle approche aurait pour corollaire d’isoler deux groupes dans la comparaison en confrontant les processus de revalorisation urbaine en France avec des processus identiques en Allemagne, postulant a priori l’intérêt conceptuel d’une comparaison effectuée sur critères de localisation géographique. Une telle démarche implique aussi de postuler une quelconque représentativité régionale, voire nationale des quartiers étudiés, dont nous avons vu qu’elle était nécessairement illusoire. Au contraire, et sans pour autant empêcher l’identification de différences nationales fondamentales dans l’organisation du rapport à la valeur urbaine, le choix d’étudier de manière combinée deux anciens quartiers industriels en revalorisation dans chacun des pays poursuit un double objectif plus large.

Premièrement, il s’agit d’une diversification des cas d’études qui doit permettre d’augmenter la représentativité de notre travail. La compréhension de chacun des cas de dévalorisation/revalorisation étudiés doit permettre d’étendre notre compréhension des trois autres cas mais aussi, et surtout, celle du phénomène global dans l’optique d’aboutir à une modélisation. À ce titre, la comparaison d’espaces aux traditions nationales, économiques, démographiques et historiques différentes constitue un moyen de dépasser les contraintes liées aux contextes afin « de mettre en lumière des tendances plus globales » (Margier, 2015, p. 58).

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Pour ce faire, plus les cas sont nombreux et différents, plus il est possible d’en tirer des généralités plus fortes (Fournier et Sabot, 2001).

Deuxièmement, le fait d’opérer la comparaison en miroir de manière combinée (figure 2), non pas à l’échelle nationale mais à l’échelle de quatre quartiers pris indépendamment les uns des autres, doit nous permettre, le cas échéant, de nuancer le poids des contextes, régionaux