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Comparaison avec l’inversion de la carte à 8 µm

Dans le document Coreshine, un phénomène et un outil (Page 127-134)

absorption et diffusion : L183

4.1 Présentation de L183 .1Description du nuage

4.2.3 Comparaison avec l’inversion de la carte à 8 µm

La carte à 8 µm est vue, contrairement au coreshine, en absorption glo-bale par rapport au fond de ciel, Ibg (Figure 2.9). L’extinction différentielle lorsque l’on soustrait le fond de ciel est de la même forme que l’équation décrivant le coreshine (Équation 2.11), soit :

∆=Isca+Ibg(eτ8

≠ 1) (4.7)

Les études précédentes basées sur ce signal différentiel à 8 µm pour diffé-rentes sources (Bacmann et al. 2000, Stutz et al. 2009, Butler et Tan 2012) ont choisi de négliger la diffusion et de supposer :

∆=Ibg(eτ8

≠ 1) (4.8)

Cette hypothèse semblait justifiée par le fait que la longueur d’onde mise en jeu est beaucoup plus importante que la taille présumée des grains dans le nuage. A l’aide de cette dernière relation et en connaissant la valeur de Ibg, on pensait pouvoir obtenir ·8 à partir de la mesure de ∆. En utilisant ensuite les coefficients de conversion provenant d’une loi d’extinction, ainsi que la relation ·8= 0.921A8, on espérait pouvoir en déduire directement AV. La première étape consiste à soustraire le fond de ciel et les étoiles afin d’obtenir le signal ∆. Cette étape est strictement identique à celle décrite pour obtenir le signal de coreshine et je renvoie le lecteur à l’Annexe C.2 pour plus de détails. On signale simplement ici que la valeur minimale est atteinte à la position du PSC avec ∆ = ∆min = –0.35 MJy sr≠1. La deuxième étape requiert d’évaluer l’intensité du fond de ciel, et ce, compte tenu du fait qu’il est impossible de la mesurer directement à partir des observations (voir Section 3.2).

J K 3.6 µm 4.5 µm 5.8 µm 8.0 µm 88 ±20 52 ±22 51 ±14 53 ±22 604 ±3 1832 ±9

Table 4.3 – Intensité de l’émission diffuse pour L183 (Idiff, en kJy sr≠1). On rap-pelle ici la moyenne des neuf pixels DIRBE (d’une taille de 13.7’) correspondants à la ligne de visée de L183 et aux pixels environnants. La dispersion autour de la moyenne pour ces 9 pixels est indiquée ici comme incertitude. On rappelle que cette valeur Idiff doit être multipliée par la proportion de la matière située derrière le nuage bg, que l’on a évaluée entre 50 et 75%. Ces valeurs sont extraites de l’Article I.

La Table 4.3 rappelle les différentes valeurs issues de l’Article I pour l’émission diffuse (Idiff). A l’aide de notre méthode, c’est–à–dire à partir de la soustraction de l’émission stellaire sur les lignes de visées DIRBE, j’avais évalué cette contribution à ≥1.8 MJy sr≠1 dans la bande à 8 µm. La valeur calculée à partir de cette méthode est largement dépendante de la conversion entre la carte DIRBE à 12 µm et la carte IRAC à 8 µm. On rappelle que cette conversion est tirée de Flagey et al. (2006) et qu’elle est consignée dans la Table 3.1. Alors qu’un facteur 3 entre l’émission diffuse à 5.8 µm et celle à 8 µm semble en accord avec le profil Galactique tel que présenté par Flagey et al. (2006), nous tenons à rappeler que ces valeurs sont très dépendantes de la ligne de visée et notamment de la quantité de PAH présents. De plus, d’autres estimations plus récentes, obtenues à partir des observations du ciel complet par WISE à 12 µm, ont déterminé une émission diffuse de l’ordre de ≥0.6 MJy sr≠1dans la direction de L183 (Meisner et Finkbeiner 2014, Figure 4.12).

Figure 4.12 – Emission diffuse à 12 µm déduite par Meisner et Finkbeiner (2014)

d’après WISE. L’échelle de gris est en MJy sr≠1. La coupe a été prise horizontale-ment en passant par le PSC, elle est graduée en degrés. Le 0 marque la position du PSC le long de la coupe.

coefficients de conversion, nous semble donc importante avant de pouvoir inverser la carte à 8 µm pour la convertir en extinction12. Le fond de ciel ne peut pas être directement mesuré dans l’image Spitzer à cause de l’incerti-tude sur la lumière zodiacale (voir Partie 3.2). La seule mesure fiable reste donc la mesure différentielle ∆. Par conséquent, pour déduire Ibg, il faut connaître ·8à une position où l’on est capable de mesurer ∆ (voir la relation 4.8). Pour cela, on peut utiliser une région dans le nuage où l’extinction est connue et la convertir en opacité à 8 µm en considérant un modèle de poussière.

Comme je souhaitais comparer le résultat à la carte en extinction présen-tée Figure 4.11, j’ai volontairement ignoré la valeur de ·8 que l’on pourrait déduire de la carte d’extinction. A la place, j’ai choisi de faire usage des étoiles pour lesquelles je disposais avec précision de l’excès de couleur sur la ligne de visée (Table 4.1). L’ensemble de ces étoiles est présenté sur la Figure 4.13, superposé à la carte ∆ en coordonnées galactiques.

Figure 4.13 – Carte de l’extinction différentielle ∆ à 8 µm. Les étoiles indiquées

par des lettres sont celles provenant de Whittet et al. (2013) et correpondent à celles présentées Table 4.1. L’échelle est en MJy sr≠1.

L’étoile A se situe en dehors du champ de la carte Spitzer et les valeurs de ∆ au voisinage des étoiles C, E, F et G sont dominées par le bruit et nettement inférieures au seuil de 3‡ qui vaut ≥60kJy sr≠1. Enfin, le signal de l’étoile H est bien trop étalé sur les images originales (voir Figure 2.9 ou Figure C.3 pour une orientation similaire) pour qu’on puisse l’utiliser. En effet, l’idée est de mesurer la valeur de ∆ très près de l’étoile et de supposer que cette valeur est identique au niveau de l’étoile pour laquelle on connaît E(J–K). Nous n’avons donc retenu que les étoiles B, D et I afin de calculer 12. Cet effet est important à 8 µm du fait de la prépondérance des PAH et de la différence majeure entre le filtre DIRBE 12 µm et IRAC 8 µm. Les conversions pour les filtres IRAC 1 et 2 qui sont plus proches des filtres DIRBE, avec des coefficients de conversion de l’ordre de l’unité (Table 3.1), ne sont pas remis en question ici.

le fond de ciel.

Etoile E(J–K) ·8 ·8 ∆ Ibg,min Ibg,max

mag 3.1 5.5B kJy sr≠1 MJy sr≠1 MJy sr≠1

B 0.62 0.067 0.15 –64 ± 6 0.42 1.08

D 0.70 0.076 0.17 –62 ± 6 0.36 0.93

I 2.49 0.27 0.60 -80 ± 8 0.16 0.37

Table 4.4 – Valeurs de fond de ciel calculées au voisinage des étoiles. Les notations

(3.1) and (5.5B) se réfèrent aux coefficients de conversion pour les deux modèles de poussière de Weingartner et Draine (2001). La Table est extraite de l’Article II.

L’opacité à 8 µm ·8 a été calculée à partir de E(J–K) et des coefficients de conversion de Weingartner et Draine (2001) pour les modèles WD01 3.1 et WD01 5.5B. Ibg a été ensuite calculé en inversant la formule 4.8 soit :

Ibg =

(eτ8≠ 1). (4.9)

La valeur maximale de Ibg est obtenue pour le plus petit ·8 qui est celui calculé avec le modèle WD01 3.1 et la valeur minimale de Ibg est obtenue avec le plus grand ·8, associé au modèle WD01 5.5B. Ces valeurs tiennent compte de l’incertitude sur ∆.

La Table 4.4 nous indique une valeur de Ibg comprise entre 0.42 et 1.08 MJy sr≠1 pour l’étoile B, 0.36 et 0.93 MJy sr≠1pour l’étoile D et 0.16 et 0.37 MJy sr≠1 pour l’étoile I. Un premier constat révèle que les étoiles B et D sont relativement compatibles avec des valeurs proches de celles de Meisner et Finkbeiner (2014). Cependant, les valeurs de Ibg déduites de l’étoile I sont quasiment incompatibles avec celles des deux autres étoiles et pire encore elles ne sont pas physiquement acceptables. En effet, d’après la formule 4.9 même si ·8 tendait vers l’infini, la valeur minimale que pourrait prendre Ibg serait ≠∆min, soit 0.35 MJy sr≠1. On ne peut pas non plus décider d’adopter une valeur de ≥0.35 MJy sr≠1 pour respecter la compatibilité entre les trois étoiles car elles ne sont pas obtenues avec les mêmes coefficients de conversion. Tandis que le 0.37 MJy sr≠1 de l’étoile I est obtenu avec le modèle WD01 3.1, ceux les plus bas pour l’étoile B et D sont obtenus avec le modèle WD01 5.5B. Une évolution des poussières et l’utilisation de différents coefficients n’a a priori rien de gênant, seulement l’étoile I est beaucoup plus rougie que les étoiles B et D et devrait donc être celle pour laquelle on utilise le coefficient de conversion avec le plus grand RV. Il existe donc un problème notable sur l’évaluation fournie par l’étoile I auquel je reviendrai dans la Partie 4.4.1. En ce qui concerne la valeur de Ibg choisie pour inverser la carte à 8 µm , j’ai décidé de conserver les valeurs compatibles avec les deux étoiles B et D soit entre 0.42 MJy sr≠1Æ Ibg Æ 0.93 MJy sr≠1.

Une fois une valeur de Ibg adoptée il suffit d’inverser la relation 4.8 :

·8 =≠ln(Ibg

∆ +1) (4.10)

choisies, soit A8/AV= 0.02 pour WD01 3.1 et A8/AV = 0.045 pour WD01 5.5B, on obtient des cartes d’extinction directement comparables à celle de la Figure 4.11. Les deux cas extrêmes Ibg = 0.42 MJy sr≠1(5.5B) et Ibg = 0.93 MJy sr≠1(3.1) sont présentés dans la Figure 4.14.

Figure 4.14 – Cartes d’extinction obtenues à partir de l’inversion de l’extinction

diffuse à 8 µm pour deux valeurs de Ibg. Les contours à 15, 25 et 50 magnitudes de la carte en extinction de la Figure 4.11 sont tracés respectivement en rouge, bleu et noir à titre de comparaison. A gauche : Ibg = 0.93 MJy sr≠1 et à droite Ibg = 0.42 MJy sr≠1.

On constate que les valeurs d’extinction obtenues à partir de l’inversion de la carte à 8 µm sont globalement trop faibles. Une valeur de Ibg de 0.93 MJy sr≠1 conduit à une valeur au pic de 34 magnitudes et pour Ibg = 0.42 MJy sr≠1 on atteint à peine 82 magnitudes d’extinction dans le visible. Ces valeurs sont présentées à la résolution de Spitzer avec une taille de pixel de 1.2" et une résolution d’environ 2.8". Lorsque l’on les transpose à la même résolution que les cartes présentées dans la Figure 4.11, l’inver-sion de la carte à 8 µm donne des valeurs systématiquement plus faibles que les valeurs obtenues par l’extinction stellaire ou à l’aide du profil des raies de N2H+ (Figure 4.15). Cette incompatibilité ne se limite pas au pic d’extinction puisqu’elle est présente dès 25 magnitudes d’extinction dans la partie du nuage correspondant au filament nord (Figure 4.14). Or des valeurs aussi faibles que celles données par l’inversion de la carte à 8 µm ne pourraient pas expliquer la disparition apparente des étoiles au travers du filament nord, impliquant une extinction dans le visible au moins égale à 40 magnitudes.

Le seul moyen d’expliquer une telle différence est de remettre en question l’équation 4.8. En effet, si la diffusion n’est pas négligeable, même à 8 µm, alors l’équation 4.9 devient :

·8 =≠ln( Ibg

∆≠ Isca

+1) (4.11)

En incluant Isca on peut atteindre des valeurs de ·8 plus élevées et ainsi trouver une extinction compatible avec les autres traceurs. Puisque la diffu-sion n’est visiblement pas négligeable, il faut caractériser son intensité par la modélisation et trouver une distribution de poussière compatible avec les

Figure 4.15 – Mise en évidence de l’incompatibilité entre l’inversion de la carte

à 8 µm et les autres méthodes d’estimation de l’extinction dans le visible (Lefèvre et al. 2015). Le trait rouge représente la première bissectrice sur laquelle devrait se trouver tous les points.

observations. Dans la partie suivante, je vais illustrer comment il est pos-sible d’obtenir des modèles de poussières efficaces à diffuser à 8 microns et je décrirai dans la partie 4.4.1 comment il est possible d’expliquer nos observations avec ce type de poussière et un modèle de nuage construit à partir de la carte en extinction de la Figure 4.11 tout en incluant un cœur compatible avec le profil de la Figure 4.6.

4.3 Construction des agrégats

La construction des modèles de poussière ne fait pas partie intégrante du travail de la thèse. Cependant, j’ai souhaité détailler la démarche afin de mieux comprendre les modèles utilisés. Les méthodes exactes sont très coûteuses en temps de calcul13. Cependant, il est possible de faire quelques tests à l’aide des méthodes approchées. En comparant méthodes approchées et méthodes exactes à partir de la littérature, il est possible de choisir la méthode approchée la plus représentative. Cela permet de s’attarder sur l’impact de la physique microscopique sur nos modélisations et de mieux comprendre l’origine d’une contribution importante de la diffusion à 8 µm. La modélisation pourra alors bénéficier de modèles de grains construits à l’aide des méthodes exactes tout en comprenant les implications d’éven-tuelles modifications de ces modèles grâce aux méthodes approchées.

La première étape consiste à s’interroger sur l’intensité de la contribution de la diffusion attendue à 8 µm. Cette contribution peut facilement être déduite de la formule 4.7. On estime alors Isca par :

Isca =∆≠ Ibg(eτ8

≠ 1), (4.12)

13. Les calculs des propriétés optiques peuvent prendre plusieurs mois pour les plus gros grains, dont la taille devient comparable à la longueur d’onde à considérer.

avec ·8 = 0.921AV◊ 0.045 ≥ 5.5 et Ibg = 0.42 MJy sr≠1 si on choisit le modèle 5.5B plus proche des observations. Cela donne une intensité pour Iscad’environ 0.4 MJy sr≠1, soit plus qu’à 3.6 µm (≥ 0.1 MJy sr≠1). Bien sûr, cette estimation est très dépendante des propriétés des poussières et j’ai adopté pour la modélisation une valeur de Ibg ≥ 0.6 MJy sr≠1 compatible à la fois avec Meisner et Finkbeiner (2014) et avec les valeurs déduites des étoiles B et D. En effet, on ne s’attend pas à ce que la contribution de la diffusion soit importante aux alentours des étoiles B et D vue leur faible extinction.

Il nous faut alors trouver des modèles de poussières efficaces à diffuser à 8 µm. Nous avons vu pour les distributions en taille de grains de forme sphérique que l’efficacité de diffusion s’effondre assez rapidement avec la longueur d’onde (Partie 2.2.2 et Annexe D). Nous avions pu également constater, pour le coreshine que les agrégats étaient plus efficaces à diffuser que les grains sphériques à volume occupé équivalent. C’est donc naturelle-ment vers cette piste que j’ai choisi de me tourner.

L’utilisation d’agrégats dans nos modélisations découle de plusieurs évidences observationnelles. Nous savons que les grains grossissent dans les cœurs denses, ce qui est à la fois constaté grâce au phénomène de coreshine (Steinacker et al. 2010) mais aussi par l’émission des poussières dans le domaine submillimétrique (Stepnik et al. 2003). La glace acquise par les grains dès le bord du nuage (AV ≥ 3 mag) accélère cette croissance. La mesure de la polarisation dans le milieu diffus nous laisse penser que les grains possèdent au moins une direction privilégiée et ne sont pas sphé-riques. Pour les cœurs denses, la coagulation conduit donc naturellement à des structures irrégulières telles que peuvent être les poussières interpla-nétaires14. Enfin, dans les étapes ultérieures de la formation stellaire et planétaire, les grains sont censés rester sous forme d’agrégats même dans les disques proto–planétaires (Mulders et al. 2013, Testi et al. 2014). C’est leur forme, combinée à leur composition, qui leur donnent des propriétés de diffusion particulières que je vais présenter dans les sections 4.3.1 et 4.3.2. J’ai déjà abordé l’influence de la composition des grains sur les propriétés optiques au Chapitre 2 et le lien entre les propriétés optiques et les coeffi-cients diélectriques dans l’Annexe B. Les agrégats que je vais "construire" ne seront pas homogènes mais constitués d’un mélange de silicates, de grains carbonés et éventuellement de glace d’eau, il ne seront pas totalement com-pacts non plus et il faudra prendre en compte le remplissage du volume. Tous ces éléments possèdent des indices diélectriques différents qui peuvent être trouvés dans des bases de données comme celle d’Heidelberg

(Heidel-berg - Jena - St.Petersburg - Database of Optical Constants HJPDOC15, Henning et al. 1999). Je vais décrire les deux théories permettant d’obtenir un indice de réfraction effectif meff en tenant compte de la forme, de l’irré-14. Hormis les collectes in situ, ces poussières interplanétaires ont été remodelées par leur entrée dans l’atmosphère. Il faut donc être prudent quant à la comparaison de leur structure. Cependant, on constate bien un modèle global de grain assez chahuté et non compact.

gularité et du mélange des différents éléments dans les grains : la Théorie des Milieux Effectifs (EMT) et l’Approximation Dipolaire Discrète (DDA). Dans les deux cas, l’agrégat est constitué d’un ensemble de cellules considé-rées comme des dipôles. C’est dans le calcul de l’interaction avec les autres dipôles (et donc le champ électrique induit) que les deux méthodes se dif-férencient : la méthode DDA procède au calcul exact tandis que l’EMT s’appuie sur une représentation moyenne de la géométrie caractéristique de l’environnement de chaque dipôle.

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