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1. LA STRUCTURATION DU SYSTÈME RÉGIONAL D’AIO

1.2. La dynamique de réseau

1.2.3. La communication entre les structures

La question de l’accessibilité aux services peut aussi dépendre de la diffusion d’une culture commune aux différentes structures de l’AIO, qui permet une prise en charge globale et permanente des bénéficiaires potentiels durant l’ensemble de leur vie professionnelle. Ainsi les mêmes postures, les mêmes manières de traiter les problèmes et de les résoudre, permettent la mise en œuvre d’un parcours unique et cohérent, gage d’une meilleure efficacité des actions et d’une sécurité renforcée des individus.

Dans le même sens, il s’avère utile de développer la collaboration et le transfert d’informations entre les structures par des échanges réguliers et organisés, et / ou par la mise en œuvre d’espaces collaboratifs pour les renforcer.

Une communication renforcée

Il s’avère que de telles pratiques existent. Ainsi, les relations entre Mission locale et CIO préexistaient à la mise en place des plateformes de lutte contre le décrochage. Ces structures ont développé certains réflexes dans la pratique des conseillers :

« Un jeune qui émet le désir de quitter l’école, la réponse réflexe est "hop, visite CIO !" » (Entretien Mission locale)

« Quand un conseiller reçoit un jeune au CIO et qu’on le renvoie vers la Mission locale, on a une fiche qui permet d’exposer le projet du jeune, c’est une fiche de présentation qui sert de navette entre le CIO et la Mission locale. Ça permet de sécuriser le parcours. » (Entretien CIO)

De la même manière, les Missions locales entretiennent avec les autres acteurs des relations de partenariat : par exemple avec Pôle emploi : signature de conventions de cotraitance et accès aux dossiers des jeunes demandeurs :

« Les Missions locales ont accès ainsi au dossier individuel de suivi des demandeurs d’emploi à Pôle emploi. Elles peuvent consulter mais pas le modifier. » (Entretien Mission locale)

« Aujourd'hui la Mission locale a amélioré ses relations avec ses partenaires et on a donc plus de facilité à communiquer […]. Avant il n’y avait peut-être pas cette communication entre nous. On est plus sur du concret. On n’est pas dans le vague. Et ça c’est important pour les jeunes ; ils savent maintenant qu’on sait de quoi on parle. » (Entretien Mission locale)

Un manque de communication humaine, une utilisation partielle de l’outil collaboratif

Cependant, certains conseillers regrettent que les systèmes d’information aient tendance à se substituer à une communication humaine plus informelle, qu’ils jugeaient plus efficace pour résoudre certaines questions. Ils vont même jusqu’à dénoncer des prestations proposées par d’autres structures dont ils n’ont pas toujours connaissance et qu’ils jugent parfois redondantes, voire même dans certains cas concurrentes :

« Les conseillers n’ont pas toujours connaissance des actions, des propositions des autres institutions, alors que des outils collaboratifs inter-institutions existent. Il peut

malgré tout parfois arriver que le travail d’un conseiller avec un jeune soit court-circuité par l’intervention contradictoire d’un autre partenaire. » (Entretien Mission locale)

« Par exemple, avant on travaillait main dans la main dans les mêmes locaux avec Pôle emploi. Maintenant, c’est 3949. On ne peut plus les joindre aussi facilement. Les équipes changent de plus en plus rapidement. Les relations personnelles sont moins fréquentes, moins développées. Et tout le monde est soumis à ses objectifs, "la tête dans le guidon" et oublie de communiquer, de transmettre l’information. Le résultat est que parfois, les institutions ont vis-à-vis du public des interventions redondantes voire contradictoires.

Les jeunes peuvent en jouer de ce manque de concertation. » (Entretien Mission locale)

Un autre frein apparaît lorsque l’on s’intéresse aux relations entre structures. Si pour la majorité des structures les relations semblent paisibles et les échanges fructueux et dans l’intérêt des bénéficiaires ; des conflits entre certaines structures sont apparus et peuvent directement nuire aux bénéficiaires de l’AIO.

Par exemple, les relations peuvent être en tension entre une Mission locale et un CIO. Ces deux structures ont un public jeune mais ne travaillent pas ou peu ensemble. Sur certains territoires, on peut observer une concurrence entre ces deux structures, notamment en termes de valeur des formations dispensées : voie continue vs voie scolaire. La non-connaissance des dispositifs et des structures a renforcé cette concurrence. Ici, apparaît un frein à l’individualisation : lorsque les acteurs se connaissent, ils peuvent avoir tendance à vouloir garder leurs publics. Les attentes du bénéficiaire ne sont pas totalement prises en compte, les acteurs ne raisonnent pas en termes de « qu’est-ce que les structures d’AIO pourraient faire pour aider ce jeune ? » mais plutôt « qu’est-ce que ma structure peut faire pour aider ce jeune ? ».

« On sait bien que dans les CIO, pour un COP, un jeune qui a une solution c’est en formation initiale. Si on le met sur l’apprentissage, on va le diriger vers la Mission locale et après les jeunes reviennent. On va leur vendre un contrat d’avenir mais après il n’est pas plus qualifié. Il y a quand même un problème de culture, on n’est pas toujours sur même longueur d’onde. » (Entretien CIO)

« Il y a, il existe toujours un peu de suspicion entre les différentes structures, d'un air de dire "les Missions locales gardent leurs jeunes, ils ne veulent jamais les donner". Et puis les CIO ne parlent pas forcément bien de la Mission locale parce que "leurs formations ne servent à rien alors que dans l'Éducation nationale on a une structure et on a des diplômes qui valent quelque chose etc. " […] Quand on connaît l'autre on en a moins peur, des fois on a l'impression que : "ah non, ils vont le mettre dans une formation Mission locale qui débouche à rien, moi je peux le mettre dans un lycée scolaire". Mais on ne se pose pas la question, au bout de trois mois, le gamin il ne tiendra pas dans un lycée scolaire. Il faut qu'on arrive à avoir une représentation, quel que soit le donneur d'ordre ou celui qui offre la formation, peu importe son statut. Il faut qu'on démystifie tout ça, qu'on arrive à avoir une connaissance de l’autre. » (Entretien IEN-IO)

« Maintenant quand on parle avec les CIO, oui, oui, ils nous connaissent ! Mais alors, faut voir comment ils parlent de nous auprès des jeunes ! » (Entretien Mission locale)