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La communication de la MONUSCO au service de la protection des civils

CHAPITRE II- LA PROTECTION DES CIVILS DANS LA PRATIQUE DE LA MONUC/MONUSCO

Section 1. Le mandat de la MONUC/MONUSCO pour la protection des civils : un engagement prometteur

1. La communication de la MONUSCO au service de la protection des civils

Dans les activités de protection des civils, l‟image d‟une MONUSCO protectrice s‟est

révélée un instrument de communication d‟une grande importance. La Division de

l‟Information Publique de la MONUSCO promeut les activités de la Mission à travers des publications telles que les Echos de la MONUSCO, des éditions hors-série, des communiqués de presse, des expositions, des conférences hebdomadaires, la mobilisation des réseaux

535 S/RES/1906 (2009), 23 décembre 2009, §22.

171 sociaux, la radio des Nations Unies (Radio okapi), l‟affichage aux portes de ses bases ou la distribution de photos et prospectus validant une protection assumée537. Tout cela contribue à assurer la visibilité de la Mission, à montrer son engagement et à créer au sein de l‟opinion nationale et internationale un imaginaire collectif autour de son mandat. La brochure, « la

protection de la MONUSCO en faveur des civils », diffuse les actions des Casques bleus en faveur des civils congolais au moyen des dessins didactiques qui expose et détaille les actions entreprises : des patrouilles pendant les jours de marché, les patrouilles nocturnes pour chercher les groupes armés qui pourraient attaquer et rassurer les populations par sa présence. Le travail et la rencontre avec des populations locales permettent de connaitre leurs besoins, leurs préoccupations et de convenir des mécanismes de protection en collaboration avec les unités de police et des FARDC538. Toutes ces activités présentées sur des dépliants sont régulièrement affichées sur la place publique. Pour Charles Antoine Bambara, Directeur de la Division de l‟Information Publique/MONUSCO, la protection des civils est au cœur de la mission de la MONUSCO539.

La présence de la MONUSCO dans les zones à risque constitue aussi un outil de communication rassurant pour la population. La collaboration avec les unités de la police et des forces armées pour sécuriser les sites des personnes déplacées. La fourniture des escortes pour les agences onusiennes et les ONG qui apportent assistance à la population sont autant d‟activités présentées dans des brochures et prospectus. Dans des dépliants, sont indiqués à la population la façon de contacter la MONUSCO, les actes de violence à rapporter et les premières précautions à prendre pour se protéger en cas d‟attaque armée. La diffusion des informations via la Radio okapi ne manque pas de mettre en avant la tâche de protection des civils dans ses émissions quotidiennes.

Le magazine de la Mission, les Echos de la MONUSCO illustre bien la place de la protection des civils dans la communication du mandat. Dans ses différents numéros de publications, l‟assistance aux civils est utilisée comme un véritable leitmotiv et instrument de communication, tel un service public diffusant une brochure sur ses activités540. En 2012, alors que la presse nationale et internationale s‟attardait à la passivité des Casques bleus lors de la prise de la ville de Goma par le M23, les Echos de la MONUSCO rapportaient les faits

537Ibid

538Ibidem

539 Echos de la MONUSCO, édition hors-série, 22 mai 2015, pp. 8-9.

172 en ces termes : « Durant cette période d’occupation, la MONUSCO est restée engagée et vigilante dans sa mission de protection des civils, conformément à son mandat. Des blindés ont été positionnés partout dans la ville, à des endroits stratégiques, notamment devant certains édifices de l’Etat, pour en assurer la protection et éviter les pillages. Des patrouilles motorisées et pédestres diurnes comme nocturnes ont été organisées, 24 heures sur 24 pour empêcher que l’on s’en prenne aux populations civiles ou à leurs biens »541.

Devant certaines situations, la protection des civils apparaît comme le fer de lance idéal exploité parfois jusqu‟à l‟exagération, voire à la désinformation. Les Echos de la MONUSCO relatent à nouveau les évènements de 2012 de Goma en ces termes : toutes les portes des bases de la MONUSCO ont été ouvertes pour accueillir toutes les populations en besoin de protection. Sur initiative et à la demande du chef de Bureau de la MONUSCO, Hiroute Guèbre-Sellasie, la brigade du Nord-Kivu a exfiltré de centaines de civils directement menacés notamment les autorités politiques, civiles et militaires, les fonctionnaires de l‟Etat.

Cette image idéaliste de protection véhiculée par le magazine onusien selon laquelle, les portes de la MONUSCO étaient ouvertes sans discrimination masque la réalité, seul le personnel travaillant pour l‟ONU, les ONG internationales et les organisations internationales comme EUFOR ou EUPOL ont été prioritairement accueillis dans ses bases opérationnelles ou rapatriés vers l‟Ouganda542. Alors que le personnel onusien non essentiel était prié de quitter le pays à l‟approche de M23 et la majorité confinée dans les bases de la MONUSCO, les images véhiculées par les photographes de la MONUSCO montrant les Casques bleus patrouillant près des populations locales cherchent à masquer les lacunes de la Mission. Elles visent plus à publier une image positive de la Mission plutôt qu‟à une action efficace de protection. Les photos dans lesquelles les Casques bleus côtoient les responsables du M23 ou apparaissent à côté des criminels de guerre comme B. Tangana, Makenga et Scheka sans les arrêter ne sont jamais publiées. Les images des véhicules de l‟ONU interceptés qui transportent des minerais congolais vers le Rwanda ne sont jamais diffusées543. Dans certaines crises, la protection des civils devient un prétexte et une excuse pour relativiser les défaillances de la Mission. Les images positives de la Mission participent à la propagande, à susciter la confiance de la population et le soutien de la communauté internationale.

541 Les Echos de la MONUSCO, n°16, novembre 2012

542 DI RAZZA (N), La protection des civils par les opérations de maintien de la paix de l’ONU, op.cit., p.282.

543 Human Right Watch, « ONU : les Casques bleus impliqués dans la contrebande au Congo (RDC) doivent être tenus responsables », 23 juillet 2007.

173 Pour justifier l‟échec de la MONUSCO à empêcher la prise de Goma par le M23, le Secrétaire Général adjoint aux opérations de paix H. Ladsous, mais aussi les chefs exécutifs de la MONUSCO Roger Meece, et Martin Kobler expliquent l‟inaction supposée de la MONUSCO par le fait que son rôle n‟était pas de s‟opposer militairement à l‟avancée d‟un groupe armé mais de protéger les civils en appui aux FARDC544. Alors même que dans la résolution 2076 (2012), le Conseil condamne le M23 et se déclare profondément préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire du fait de ses activités déstabilisatrices545. L‟inaction et la passivité des Casques bleus de la MONUSCO face aux rebelles ont été défendues sous le prétexte qu‟intervenir aussi en pleine ville aurait mis en danger la population civile de Goma et accru les dommages collatéraux546. Pour laver l‟affront, les Casques bleus se sont contentés de bombarder les lignes des rebelles jusqu‟à Kibumba sans aucune efficacité notable.

Plaçant la communication de la MONUSCO au centre de la protection des civils, l‟image de la mission et son omniprésence dans les zones à risque ont contribué à améliorer davantage les rapports avec la population locale et à augmenter la confiance envers son personnel. La protection des civils constitue le credo justifiant toutes les actions et tous les choix de la Mission. Pour Di Razzia, « chaque section de la MONUSCO justifie la mission,

l’initiative, le programme y compris les opérations militaires conjointes par sa contribution à l’objectif de protection des civils ». De ce fait, la sauvegarde des civils devient ce concept

fédérateur légitimant toutes les activités de la MONUSCO. Si les politiques et les médias peuvent encore stimuler le réinvestissement de la communauté internationale, l‟émulation de la protection des civils par la stratégie globale de la Mission a dépassé le système réaction à la crise pour intégrer un véritable programme assuré par un personnel formé à la tâche. La protection des civils est devenue une activité quotidienne de la Mission. En tant qu‟une activité des professionnels assumés, la protection des civils par la MONUSCO se fait dorénavant de façon organique, mécanique et ordinaire, preuve de l‟intégration normative du concept dans toutes les sections de la Mission où elle a acquis finalement une priorité absolue547.

544Echos de la MONUSCO, n°15, 21 novembre 2014.

545 S/RES/2076 (2012), 20 novembre 2012, §§1-4.

546 Echos de la MONUSCO, 21 novembre 2014.

547 DI RAZZA (N), La protection des civils par les opérations de maintien de la paix de l’ONU, op.cit., p. 282;

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2. La promotion de la protection des civils pour assurer son propre dynamisme et

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