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Le cartilage de croissance se localise aux deux extrémités des os longs en croissance à deux niveaux : la plaque de croissance (à la jonction entre la diaphyse et l’épiphyse) et le cartilage de croissance épiphysaire (où se situera le cartilage articulaire mature). La chondrogenèse est intimement liée au phénomène d’ossification endochondrale qui est à l’origine de la croissance en longueur des os. Le cartilage hyalin joue un rôle primordial dans la formation des os car il sert de matrice ou support initial et sera ensuite dégradé et remplacé par les ostéoblastes qui formeront l’os. La Figure 13 reprend les principales étapes de l’ossification endochondrale.

Figure 13: Ossification endochondrale

1. Formation du collier osseux autour de la matrice de cartilage hyalin. 2. Formation d’une cavité dans la partie moyenne de la matrice cartilagineuse, ce qui induit l’hypertrophie et la dégénérescence des chondrocytes. 3. Invasion des cavités internes par le bourgeon de périoste (périchondre) suite à la calcification du cartilage et formation d’os spongieux. 4. Formation de la cavité médullaire par les chondroclastes dans le cartilage calcifié. Apparition d’un site d’ossification secondaire au niveau de l’épiphyse. 5. Ossification de l’épiphyse. A la fin du processus d’ossification endochondrale, le cartilage hyalin persiste uniquement au niveau de la plaque de croissance et à l’extrémité de l’épiphyse (cartilage articulaire). La plaque de croissance disparait à l’âge de la vingtaine. (https://scoehealth.wikispaces.com/Bone+Formation)

Dans un premier temps, nous allons décrire les composants chondrogéniques lors de l’ossification endochondrale (schématisées dans la Figure 14). Ensuite, nous nous focaliserons sur le cartilage épiphysaire qui formera le cartilage articulaire mature.

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Figure 14: Différentes étapes de la chondrogenèse

Schéma temporel de la croissance, de la différenciation et des changements morphologiques qui aboutissent à la formation de chondrocytes différenciés. Adapté de (Gadjanski et al., 2012).

La différenciation des CSMs en chondrocytes matures et hypertrophiques implique des changements dans le microenvironnement local afin de guider les cellules (Figure 14), (Gadjanski et al., 2012) :

Etape 1. Condensation du pré-cartilage : Les CSMs secrètent une MEC riche en acide hyaluronique et collagène de type I. Ces cellules commencent à s’agréger ce qui induit leur arrêt de prolifération. Les CSMs remplacent l’expression de collagène de type I par des molécules d’adhésion type N-cadherin et N-CAM qui leur permettent de s’agréger. Cette étape est initiée par le facteur TGF-β1 (Transforming Growth Factor). C’est le début de la condensation du pré-cartilage qui est marquée par la baisse de synthèse d’acide hyaluronique aboutissant à la réduction de mouvements cellulaires et l’augmentation des interactions intercellulaires. Ces interactions induisent des signaux de transduction qui initient la différenciation chondrogénique. La condensation des CSMs est considérée comme l’évènement majeur dans l’engagement de ces cellules dans la lignée chondrogénique. Par ailleurs, Sox-9 est le facteur de transcription essentiel à la différenciation chondrocytaire et la formation de cartilage.

Etape 2. Détermination (en chondro-progéniteur) et différenciation précoce : Les cellules au cœur du pré- cartilage arrêtent d’exprimer les molécules d’adhésion, prolifèrent de nouveau et initient la production de MEC et le processus de différenciation chondrogénique précoce (qui se déroule de manière centrifuge). En parallèle, les CSMs périphériques forment le périchondre (qui produit de nouveaux chondrocytes). A cette étape interviennent également de nombreux facteurs : FGF, Sox, BMP (Bone Morphogenic Protein) et TGF qui coordonnent de manière spatiotemporelle le destin de chaque type cellulaire.

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Etape 3. Différenciation proprement dite : Durant cette étape, la production de fibronectine baisse et celle des collagènes de type II, IX et XI augmente. Les voies de signalisation Wnt, FGF, Shh (Sonic HedgeHog) et BMP agissent de manière séquentielle pour coordonner la différenciation de manière spatiotemporelle. En effet, durant la chondrogenèse, la balance entre les voies de signalisation BMP et FGF détermine le taux de prolifération ce qui ajuste la vitesse de différenciation. Les facteurs BMPs jouent un rôle très important car ils permettent d’initier la détermination en cellule chondro-progénitrice mais également la différenciation et les étapes plus tardives comme la maturation des chondrocytes et la différenciation terminale en chondrocyte hypertrophique.

Les hormones jouent également un rôle très important dans la prolifération des chondrocytes dans la plaque de croissance. L’hormone de croissance ou GH (Growth Hormone) induit la sécrétion d’IGF-1 (Insulin-like

Growth Factor-1) par les chondrocytes de la plaque de croissance ce qui augmente la prolifération des

chondrocytes mais est également responsable de l’augmentation de la taille cellulaire des chondrocytes hypertrophiques. L’IGF-1 est produit par les chondrocytes puis stocké au niveau de la MEC. En plus de la GH, l’hormone PTHrP (Parathyroid Hormone-related Peptide) joue un rôle primordial lors de la chondrogenèse à l’étape embryonnaire. Cette hormone agit sur les mêmes récepteurs que l’hormone parathyroïdienne (PTH). Les cellules du périchondre et les chondrocytes en prolifération sécrètent la PTHrP qui a pour rôle principal de retarder la transformation des chondrocytes prolifératifs en chondrocytes pré- hypertrophiques et chondrocytes hypertrophique.

A la fin de l’étape 3, la matrice de cartilage s’allonge. La signalisation entre le périchondre et les chondrocytes différentiés au centre permet d’initier la maturation chondrocytaire et de préparer le premier site d’ossification (voir Figure 13). Ces chondrocytes passent par plusieurs phases de prolifération rapide puis arrêtent leur cycle cellulaire (chondrocytes post-mitotiques).

Etape 4. Hypertrophie : Les chondrocytes post-mitotiques changent leur morphologie, l’expression de leurs gènes et remodèlent leur MEC afin de se transformer en chondrocytes hypertrophiques. Les cellules qui sont en passe de devenir hypertrophiques augmentent en taille et synthétisent une matrice calcifiée riche en collagène de type X et phosphatase alcaline (AP), à la différence des chondrocytes articulaire et des chondrocytes en prolifération qui synthétisent principalement du collagène de type II. Les chondrocytes hypertrophiques expriment des gènes spécifiques incluant MMP-13 (Matrix Metalloproteinase-13) et Runx2/3 qui influencent la minéralisation et répriment d’autres gènes tels que Sox9. La voie de signalisation PTHrP/Ihh (Indian HedgHog) est responsable de la transformation des chondrocytes prolifératifs en hypertrophiques. Sa régulation spatiotemporelle fine lors du développement prénatal et postnatal permet d’atteindre un niveau significatif de chondrocytes en prolifération avant la phase d’hypertrophie. Les chondrocytes en phase d’hypertrophie terminale entrent enfin en apoptose. Les mécanismes de régulation épigénétiques sont également impliqués dans la chondrogenèse. A titre d’exemple, l’histone désacétylase

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HDAC-4 empêche l’hypertrophie prématurée des chondrocytes par l’inhibition de l’activité des facteurs Runx2/3 suggérant que la modification d’histone peut influencer le processus d’ossification endochondrale.

Tout comme la chondrogenèse qui se déroule lors du processus d’ossification endochondrale, la formation de chondrocytes articulaires matures (au niveau de l’épiphyse) se déroule en plusieurs étapes et nécessite l’expression coordonnée de voies de signalisation qui permettent de guider la différenciation cellulaire. L’articulation synoviale ou diarthrose se développe de manière concomitante aux éléments qu’elle articule. La première étape appelée « détermination » comprend la transformation de cellules mésenchymateuses (même pool de cellules que les chondrocytes de la plaque de croissance et les ostéoblastes) en progéniteurs articulaires. La voie de signalisation TGF-βr2 (récepteur)/Wnt/GDF-5 (Growth Differentiation Factor-5) est nécessaire et suffisante pour diriger de manière définitive les progéniteurs articulaires vers cette voie de différenciation. La deuxième étape appelée « morphogenèse » comprend la différenciation des cellules de l’articulation et le développement de structures spécifiques.

Quelle que soit l’étape du développement, les chondrocytes du cartilage de croissance (plaque de croissance ou cartilage épiphysaire) sont organisés en zones distinctes avec une stratification particulière qui reflète les différentes phases de différenciation chondrocytaire. Une description plus détaillée de ces zones dans le cartilage articulaire mature se trouve plus loin (Figure 15).

En résumé, les facteurs TGF-β, FGF et IGF sont considérés comme les facteurs clé qui régulent la prolifération chondrocytaire, tandis que d’autres facteurs comme la BMP et la GH régulent la différenciation terminale. L’hormone PTHrP contrôle la transition de chondrocytes prolifératif à chondrocyte hypertrophique. Le déséquilibre de ces voies de signalisation pourrait perturber le développement et la croissance osseuse.