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3.1 CHOIX MÉTHODOLOGIQUES

3.1.3 Choix du support didactique à la formation plurilingue

Dans l’ensemble des expérimentations qui seront présentées ultérieurement, différents documents-supports seront utilisés pour les formations. Pour ce qui est des formations en français, les choix seront explicités dans les parties concernées, mais il semblait essentiel d’expliciter dès à présent les raisons qui ont motivé le choix de la plate-forme Galanet comme support didactique à la formation plurilingue, dans l’ensemble des protocoles.

Comme nous l’avons mentionné dans le chapitre précédent, l’IC représente une des branches des approches plurilingues. Mais à l’intérieur même des approches intercompréhensives, les projets sont variés et tous ne prennent pas en compte les interactions plurilingues dans leur dimension interactionniste, comme élément fondamental pour le développement et l’acquisition de compétences.

Les nombreux projets en IC peuvent se distinguer selon différents critères17. Tost (2010) propose une classification selon les caractéristiques suivantes : les objectifs généraux (sensibilisation versus apprentissage intégral), les documetns-supports privilégiés (documents papier versus utilisation des TICE), la perspective (diachronie versus synchronie), la portée (le nombre de langues en jeu et le caractère simultané ou successif de l’enseignement-apprentissage de ces langues), les contenus (niveau de compétences visé), le canal privilégié (écrit vs. oral), la zone couverte (aspects linguistiques, pragmatiques, et/ou socioculturels), les centres d’intérêt thématique ou encore le régime d’apprentissage (présentiel, semi-présentiel ou à distance). Mais c’est

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sur le plan des approches pédagogiques (ibid.), que la typologie nous semble le plus pertinente. Ainsi, les projets peuvent être répartis dans trois catégories :

- les ensembles pédagogiques basés sur l’exploitation de textes écrits (Eurom4/5, EuroComRom par exemple),

- les projets qui associent des écrits, des photogrammes (images,

photographies…) ou des enregistrements audiovisuels comme déclencheurs d’apprentissage (Itinéraires Romans, Galatea, VRAL, Minerva par exemple - les projets qui utilisent des plate-formes et exploitent les interactions

plurilingues des utilisateurs (Galanet, Galapro par exemple). Ces projets se distinguent également par la diversité des publics visés et des terrains dans lesquels ils se développent (Degache : 2008)

Les interactions plurilingues ont alors clairement leur place dans la troisième catégorie. Dans la situation de communication particulière de la plate-forme Galanet, les apprenants sont en contact avec d’autres qui partagent de manière partielle au moins leur(s) langue(s) et interagissent avec eux de manière libre mais structurée par la présence d’un scénario prédéfini de forums de discussion suivis d’une tâche finale collaborative et coopérative à réaliser. Cet ensemble de contraintes favorise alors l’émergence d’interactions entre les apprenants, qui évoluent en fonction des phases de ce scénario et des besoins des apprenants, tantôt dans la communication libre, tantôt dans une communication plus ciblée en rapport avec la tâche, sans pourtant qu’aucune règle stricte ne contraigne réellement ces interactions. L’authenticité de la situation, le capital langagier et interactionnel apporté directement par l’ensemble des participants et dans lequel chacun peut puiser en fonction de ses propres besoins, le rôle de chacun dans la situation interactionnelle (pas exolingue) sont alors des éléments constitutifs de la particularité de ce support didactique qui sont autant de pistes pour déterminer comment les interactions ayant lieu lors de la session permettent des transferts et quelle est la nature de ces transferts (transferts de connaissances et de compétences (interactionnelles, langagières, interculturelles…).

Dans le cas précis de Galanet, qui a été choisi en raison du scénario pédagogique basé sur des interactions plurilingues, l’enjeu est de définir quelles sont les interactions favorisées par le scénario qui se déroule en quatre phases distinctes menant à une tâche finale, la rédaction d’un dossier de presse plurilingue. Les apprenants, chacun

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s’exprimant dans sa (ses) langue(s) maternelle(s), interagissent avec les autres et les interactions plurilingues se réalisent donc de manière naturelle, favorisée par le scénario et les outils de communication à disposition des apprenants. Ces outils se distinguent par leur modalité d’échange instantané (synchrone) ou différé (asynchrone) et dont nous reprenons la classification proposée par Déprez (2010) :

Emetteur Destinataire Mode temporel

Courrier électronique individu individu asynchrone

Forum de discussion individu groupe asynchrone

Clavardage individu individu ou groupe synchrone

Tableau 2 : Classification des outils de communication

Ces outils sont à la disposition des participants qui pourront choisir l’un ou l’autre en fonction de leurs préférences personnelles, de la phase du scénario ou encore des nécessités de la session. Certains de ces outils sont plus adaptés à des situations particulières, tels que le clavardage pour une décision finale et commune, mais d’autres choix peuvent être envisagés par les participants pour des raisons organisationnelles (comme le décalage horaire, par exemple). Mais dans ce cas, le choix d’un outil particulier modifiera les interactions.

Dans le cadre interaction biplurilingue propiolinguale, les interactions se réalisent en langue source et l’analyse des phénomènes de transfert n’y est donc pas aussi visible et donc pas aussi facilement analysable que dans le cadre de situations interactionnelles avec production en L2 (ou L3 etc…). Dans cette seconde situation, il est relativement aisé d’identifier les opérations de transfert, l’interaction permettant à l’apprenant de tester ses hypothèses sur la transférabilité des formes linguistiques, sur leur accessibilité sociolinguistique et pragmatique. Les traces de ces opérations de transfert sont visibles et on trouvera par exemple des sollicitations, des reformulations, des facilitations, des réparations, des marques d’accord ou de négociation etc. C’est d’ailleurs dans ce sens que va la citation ci-dessous dans laquelle Auer (1987) présente le transfert comme une stratégie conversationnelle davantage que des opérations mentales relavant de transferts de contenus structurés.

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« Mais au lieu de formuler cette perspective en termes psycholinguistique, ('quel est le processus mental sous-jacent à l'organisation de l'énoncé par le locuteur ?') j'aimerais proposer une définition interactive ('que fait le locuteur lorsqu'il procède au transfert pour/dans l'interaction ?'). Au lieu d'être quelque chose qui se passe 'dans les têtes des participants', le transfert devient une stratégie conversationnelle, une stratégie compréhensible et visible pour les autres participants (et, dans cette mesure, pour nous également en tant qu'observateurs extérieurs), au moyen de laquelle les locuteurs réalisent certains effets de communication. »

[Auer, 1987]

Lors du déroulement du scénario de Galanet, les interactants transfèrent pour comprendre. Et bien que les stratégies conversationnelles présentes lors de l’interaction ne soient pas aussi visibles, elles ne seront cependant pas différentes mais plus difficilement accessibles et restreintes à l’expression explicite, aux manifestations métalangagières.

Cette partie a permis d’expliciter les raisons méthodologiques du choix de la plate-forme Galanet comme support à la formation plurilingue de la recherche. Les interactions y sont bien présentes et leur analyse, bien que d’un premier abord plus complexe, permettra la mise en évidence d’opérations de transfert.