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INDUITS PAR LA TRANSITION ECOLOGIQUE A - Incidences environnementales du commerce

1. Evolutions du commerce et artificialisation

L'encadrement par les CDAC n'a pas permis de réguler l'extension continue des surfaces commerciales en milieu périurbain, alors même que le rythme de cette extension excède la progression de la demande, qui est elle-même limitée en raison de la progression modeste du pouvoir d'achat des ménages. Cette situation contribue à aggraver la hausse de la vacance commerciale en centre-ville et en périphérie.

Selon l'enquête Teruti, 9 % des sols en France sont artificialisés162.

Le commerce et les services marchands ne sont entre 2006 et 2015 que le sixième facteur d'artificialisation, très loin derrière l'habitat individuel et l'extension des réseaux routiers. Toutefois, la création et l'extension de surfaces commerciales y contribuent aussi indirectement à travers les voies de raccordement qui relient les routes aux nouvelles surfaces commerciales créées. Si le nombre de créations de supermarchés dans l'alimentaire s'est beaucoup réduit, comme le note la FCD, il continue de s'en créer dans d'autres secteurs du commerce (articles de sports, jardinage, etc.). Enfin, au strict plan du commerce lui-même, l'enjeu est aujourd'hui davantage d'investir pour moderniser les magasins existants et donner envie à la clientèle d'y venir, comme le relève aussi la FCD163, que de créer de nouveaux magasins physiques ou d'en étendre la surface.

Le développement de l'e-commerce suscite la création ou l'extension de vastes plateformes logistiques, même si la part des entrepôts strictement dédiés à ce type de commerce reste très minoritaire.

Le débat sur l'impact des secteurs commerciaux et logistiques sur l'artificialisation du territoire et la destruction des milieux naturels, par hypothèse en périurbain, a été stimulé par la proposition de la Convention citoyenne pour le climat de prononcer un

"moratoire" sur la construction de grandes surfaces commerciales, proposition bien plus ancienne des associations, et reprise dès 2017 par des réseaux d’élus locaux.

Le CESE a traité de cet aspect dans plusieurs de ses avis récents164. Il n'en reste pas moins que la future loi portant traduction des propositions de la Convention citoyenne pour le climat devrait à la fois acter l'objectif d'une réduction par deux du rythme d'artificialisation dans les dix ans qui suivent la promulgation du texte, et fournir une définition de l'artificialisation165166. Ces orientations cadrent cependant mal avec des stratégies sectorielles qui, pour l'heure, n'intègrent pas ou mal ces objectifs : c'est le cas des 16 mesures approuvées par le Comité interministériel de la logistique (Cilog)

AVIS DECLARATIONS/SCRUTINANNEXES le 7 décembre dernier, ou encore du programme "Sites clés en mains", qui vise à

faciliter l'installation d'entrepôts et de sites productifs dans les zones d'activités, non pas forcément en "recyclant" des locaux existants mais en investissant des parcelles encore vierges de construction dans les sites concernés, au risque de surdimensionnement.

2. Bilan carbone du commerce

Le commerce contribue notamment aux émissions de gaz à effet de serre (GES) et aux pollutions à travers le chauffage et la climatisation des locaux, la cuisson et les équipements électriques et gaziers, les transports liés aux flux de personnes et de marchandises qu'il suscite (véhicules individuels et surtout camions), ainsi que via la consommation énergétique liée au numérique et en particulier au e-commerce, qui nécessiterait d'être mieux appréhendée.

Les émissions de GES du secteur des transports en France en 2018167 représentent, hors émissions des transports internationaux aériens, maritimes ou fluviaux, 31 % des émissions nationales. Elles proviennent à hauteur de 53 % des voitures particulières, de 22 % du transport par poids lourds (camions ou cars), de 20 % des véhicules utilitaires légers et de 5 % du transport aérien, maritime, ferroviaire et fluvial intérieur. Il s'agit pour l'essentiel du CO2 émis par les moteurs thermiques, diesel ou essence.

Si les émissions nationales globales de la France diminuent (- 15 % en 2018 par rapport à 2010) celles du secteur des transports augmentent (+ 12 %).

L'automobile est le principal moyen de mobilité pour accéder aux zones commerciales, et en particulier aux surfaces commerciales périphériques, créées à proximité des échangeurs, la fragmentation des flux de personnes qui les fréquentent défavorisant leur desserte par les transports en commun. Selon le CGEDD, "le recours très majoritaire à la voiture conduit à une empreinte carbone plus élevée pour les produits commercialisés en périphérie que pour ceux des commerces de proximité. (Selon le) ministère de l'Environnement, la part modale de la voiture pour l'accès à un centre commercial ou à un hypermarché de périphérie est de 95 %"168.

De même, les personnes qui travaillent dans ces centres commerciaux, du fait de la position excentrée de ceux-ci, utilisent surtout la voiture pour leurs trajets domicile-travail, faute souvent d'autres solutions.

Les flux de marchandises liés au commerce sont une autre source d'émissions de GES et de pollutions (particules fines, nuisances sonores...). D'après Géo Post, un tiers des émissions de CO2 en zones urbaines est lié aux transports de marchandises. Le transport de marchandises est aussi un facteur de congestion liée à la circulation des poids-lourds ou à l'arrêt des véhicules de livraison, alors que, selon l'ADEME, les poids lourds entrant dans les villes sont aux deux tiers vides169.

L'essor de l'e-commerce, qui bouleverse distribution et logistique, y contribue : avec des flux plus fragmentés, des colis plus nombreux et plus petits, la distribution est moins massifiée et palettisée que la livraison des magasins. La livraison passe d'un seul canal (entrepôt vers le magasin) à une multitude de canaux pour des destinataires finaux variés : magasins, clients particuliers, consommateurs professionnels ou points relais et consignes. L'instantanéité des commandes, le

Avis

pilotage des flux en temps réel, la gestion des retours impliquent une logistique pointue. Elle engendre un risque d'individualisation des livraisons qui a des incidences en matière d'environnement

La logistique urbaine permet aux professionnels du transport, de la logistique et de la distribution, mais aussi aux TPE/PME, artisans et commerçants, d'assurer plus efficacement la distribution de leurs marchandises sur les vingt derniers kilomètres170. Pour le CESE, la maîtrise de l'immobilier logistique urbain par la collectivité publique pourrait être un levier, complémentaire de l'outil réglementaire, pour agir sur la transformation des pratiques des professionnels : aménagement et équipement des sites pour accueillir des flottes adaptées de transport de marchandises (multimodal, installation de bornes électriques), insertion de clauses dans les baux exigeant des preneurs l'utilisation de flottes décarbonées en contrepartie d'un emplacement en cœur de ville ou aux portes de l'agglomération.

L'un des enjeux en terme environnemental est de donner une dimension plus importante au transport des divers types de marchandises (colis, produits frais, palettes, etc.) en mode "décarboné", notamment en zone urbaine.

3. Aménagement durable des territoires, proximité, centralité

Comme déjà mentionné supra, au cours des dernières décennies, la vacance commerciale avait progressé dans les centres de nombreuses villes et de bourgs en lien notamment avec l'extension des grandes surfaces en périphérie. Ces évolutions du commerce posent la question de la ville, des bourgs, des territoires que l'on veut demain. Pour le CESE, il importe, en termes d'aménagement et de maillage du territoire, que les centres villes et les centres-bourgs continuent de jouer leur rôle de lieu de vie : à la fois espaces d'échange et de convivialité, de culture et de loisirs, ils doivent marier résidence, emploi, accès aux services publics et privés. Dans ce cadre les commerces doivent continuer de tenir une place importante.

Cette nécessité de centralités de proximité se trouve renforcée par les évolutions de la pyramide des âges : la clientèle âgée, davantage encore sans doute que celles des autres catégories d'âge, est à la fois moins mobile et de plus en plus attachée à une relation individualisée avec ses commerces. Les personnes âgées recourent moins à la voiture et plus à la marche à pied que les autres catégories d'âge171, et, en vieillissant, leur rayon d'action, notamment pour faire leurs courses du quotidien, se réduit172. A l'autre bout de la pyramide des âges, la population jeune, qui accorde à l'alimentation et à l'automobile moins d'importance et une moindre part de son budget, est sans doute moins spontanément attirée par le commerce de périphérie, qui nécessite un déplacement en voiture173.

Un grand nombre de commerces indépendants diversifiés (boulangeries, boucherie-charcuteries, primeurs, salons de coiffure…) sont de longue date installés dans les centres des villes et de beaucoup de bourgs ainsi que dans des quartiers périphériques où ils jouent aussi un rôle de proximité. Depuis une dizaine d'années, leur nombre et leur taille en effectif de salariés tend en moyenne à s'accroître174.

La grande distribution a dans la période récente ouvert de petites surfaces de proximité dans de nombreuses villes, notamment les plus grandes.

AVIS DECLARATIONS/SCRUTINANNEXES La mise en place d'une politique de circulation et de stationnement organisée par

les communes et les intercommunalités (stationnement minute, etc.) est importante pour assurer l'accès aux commerces de proximité.

B - Des choix politiques qui marquent une prise de