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B - Les atouts du numérique pour l'avenir du commerce de proximité

Si la numérisation du commerce fait peser de lourdes contraintes sur les acteurs, elle ouvre aussi des champs d’opportunités nouveaux qui sont autant d’atouts pour les consommateurs, les professionnels (commerçants et artisans) et les territoires157, singulièrement les territoires peu denses.

1. Le pouvoir au consommateur : accessibilité, connaissance

Selon la FEVAD (chiffres clés 2019), 38,8 millions de Français et de Françaises achètent sur Internet, soit 87 % des internautes. La vente par mobile poursuit sa progression et représente 22 % du chiffre d'affaires des sites d'e-commerce. En quelques années, ce qui n’est au fond qu’un outil, un moyen aux multiples facettes, s’est donc imposé de manière probablement définitive dans l’univers du commerce.

L’une des raisons, et l’un des atouts de ce nouveau moyen de commercer, est qu’il donne, en apparence au moins, des pouvoirs nouveaux aux consommateurs : ceux de savoir, de comparer, de choisir...

Ainsi, le développement de bases de données et de labels définis par les consommatrices et consommateurs ou leurs associations, est un phénomène récent.

Les applications se multiplient qui revendiquent des approches éthiques prônant une information objective des consommateurs. A titre d’exemple, l’application «Yuka », qui propose à ses utilisateurs de « faire les bons choix pour [leur] santé », se revendique indépendante et sans publicité. De même, réticents, voire hostiles au départ, distributeurs et industriels se rallient désormais d’eux même aux systèmes des "Nutri-score" encore mal vus il y a peu. Certains modifient leur marketing mais aussi leurs pratiques (cf. infra). Ces évolutions suggèrent que les rapports de force ont nettement changé pour une partie des biens vendus.

Le développement de la vente de particuliers à particuliers connaît aussi une croissance significative qui donne des possibilités inédites à la vente d’occasion, au réemploi, à une seconde vie des produits, comme le montre l’exemple déjà cité de Vinted, qui illustre une forme de massification de la relation directe de consommateur à consommateur.

Les outils permettant aux utilisateurs de formuler leurs avis sur les produits offrent, sous réserve de fiabilité et de véracité naturellement, aux consommateurs des possibilités inédites de partager leurs expériences et ressentis. Là encore le moyen numérique peut renforcer le pouvoir des consommateurs au bénéfice d’une amélioration générale du commerce, de la qualité des produits comme des services qui y sont liés. Cependant, cela dépend de la capacité du consommateur à savoir faire le tri dans le flot d’informations accessibles et à identifier les informations fiables.

A cet égard, il est nécessaire de pouvoir exercer une régulation voire des contrôles sur les informations délivrées afin de protéger les consommateurs et particulièrement celles et ceux peu ou pas formés à l’utilisation des outils numériques.

Avis

En donnant accès à l’information, à toutes les informations (vraies ou fausses d’ailleurs), 24/24, 365 jours/an, l’outil numérique devient une forme de vitrine permanente qui modifie les rapports de force entre les consommateurs et les vendeurs et producteurs.

2. De la vente en ligne à la place de marché : « l’omnicanal » est un atout nécessaire

Si la vente en ligne a pu apparaître comme une menace quasi définitive sur le commerce physique dans un premier temps, force est de constater que la réalité est désormais plus nuancée. D’abord parce que 90 % des commerces ne sont pas en ligne. Mais aussi parce que les modèles des grands opérateurs ont évolué et surtout que les commerces de proximité, notamment indépendants, s’approprient de plus en plus et de mieux en mieux les outils numériques au bénéfice de la relation directe.

En ce qui concerne les grands opérateurs, Amazon comme Cdiscount ont fait évoluer leur modèle de la vente en ligne vers la place de marché, sans que les consommateurs en aient toujours conscience d’ailleurs. Le modèle évolue dans un sens qui permet à des acteurs modestes d’accéder aux outils marketing les plus visibles et aux solutions logistiques les plus abouties. Ainsi, Amazon annonce avoir pour client de sa place de marché 11 000 entreprises françaises et Cdiscount 14 000 vendeurs dont une majorité de TPE. Le chiffre d’affaire du géant américain est désormais majoritairement réalisé à travers ses fonctionnalités de place de marché. Cdiscount revendique en outre une stratégie fondée sur une relation client qui considère le consommateur comme un citoyen (sous-entendu pas un simple client mais un client acteur de son environnement).

Parallèlement aux jeux des grands acteurs, les commerces indépendants et les artisans s’organisent. Le développement du format retrait en magasin et du Drive, (en alimentaire ou non), permet aux commerçantes et commerçants de compléter leur offre de vente. Le développement de places de marchés locales est facilité par la multiplication des solutions offertes par des opérateurs nationaux, de la start-up à la filiale de grands groupes comme La Poste avec son offre « Ma ville Mon Shopping ».

En offrant tout à la fois le potentiel d’une zone de chalandise (géographique et temporelle) illimitée et une réactivité à la proximité sans égale (grâce à la géolocalisation, aux offres limitées dans le temps et l’espace, à la fidélisation personnalisée), le numérique impose de plus en plus aux commerces le principe de l’omnicanal158 : il permet au commerce et à sa clientèle d'être en même temps sur un canal et sur un autre, dans le magasin et sur le web de manière complémentaire159. Le commerce doit désormais être capable d’exister numériquement (si ce n’est de vendre au moins de montrer ce que l’on vend) pour se développer physiquement.

Selon une étude "Commerce Statista France et Europe", "un commerce est économiquement viable s'il est bien adossé à une pratique du numérique".

Cette nouvelle donne est une opportunité à explorer afin qu'elle profite au mieux aux territoires et à la proximité.

AVIS DECLARATIONS/SCRUTINANNEXES

3. Commerce et numérique : la revanche de la proximité ?

Le numérique permet, dès que les obstacles structurels (ceux des infrastructures et de l’inclusion) sont levés, la revanche de la proximité. Places de marchés, retrait en magasins, drive et drive piéton apparaissent ainsi comme les nouveaux outils de la proximité permise par le numérique.

La question n’étant plus celle de l’intérêt du consommateur à utiliser les outils numériques, c’est du côté de l’offre, et singulièrement de l’offre de proximité, que se situe le défi.

La prise de conscience du commerce indépendant et de l’artisanat du défi numérique qu’ils doivent relever est la première étape qui leur permettra d’engager leur transformation numérique. Les 10 000 diagnostics gratuits que les deux réseaux consulaires se sont engagés à faire avec le soutien de l'État dans le cadre du Plan de relance, comme noté dans le chapitre I, auprès des commerçants et artisans de leur territoire, vont renforcer cette tendance. Évaluant la maturité numérique des entreprises ces diagnostics doivent permettre l'élaboration de plans d'action individualisés autour des diverses thématiques liées au numérique : visibilité en ligne, marketing digital, vente en ligne, sécurité, RGPD…

Les Opco et notamment l'OPcommerce et l'OPCO des Entreprises de Proximité jouent en ce domaine un rôle important. Il s'est appuyé sur l'Engagement de Développement de l'Emploi et des Compétences (EDEC commerce 2017-2020), signé par les 13 branches professionnelles du Commerce et de la Distribution avec le ministère du Travail, centré sur l'anticipation et l'accompagnement en matière d'emplois et de compétences des mutations numériques pour les entreprises et les salariées et salariés160. Pour les chefs d’entreprise, indépendants et leurs conjoints collaborateurs, des actions similaires ont également été mises en place par les Fonds d’Assurance Formation (FAF), en particulier le Fonds d’Assurance Formation du Commerce, de l’Industrie et des Services (AGEFICE) et le fonds d’assurance formation des entreprises artisanales (FAFCEA). Leur promotion et leur déploiement sont des enjeux importants.

Trop souvent en effet, les actions d'accompagnement à la transformation numérique des commerces sont surtout orientées vers la maîtrise et l'appropriation de l'outil Internet par les commerçantes et les commerçants ou la rationalisation des emplois. Mais, comme le note la Fédération de l'épicerie et du commerce de proximité (FECP), "elles ne traitent que de manière trop partielle la finalité de cette maîtrise, c'est-à-dire le développement d'une offre omnicanale, qui est un enjeu vital pour le commerce physique"161.

Avis

Chapitre 3 - Le défi de la transition

écologique pour le commerce