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2. La gestion de l’employabilité

2.1. Le cas des salariés cadres

L’employabilité des salariés cadres relève, depuis les années 1990, d’une responsabilité partagée entre le salarié et l’organisation (Thierry, 1995 ; Finot, 2000 ; Dany, 1997, 2001 ; Jacot et al., 2001 ; Gazier, 2003 ; Danvers, 2003 ; Evéquoz, 2004 ; St. Germes, 2004a ; Baruel-Bencherqui, 2005 ; Le Boterf, 2010). Ce constat s’explique notamment par les mutations de la relation d’emploi (Danny, 1997 ; Finot, 2000 ; Roehling et al., 2000). En effet, les organisations demeurent incapables de fournir aux salariés une sécurité d’emploi à long terme (Danvers, 2003), mais tout de moins, « elles doivent faire en sorte que ces derniers

puissent trouver un emploi à l’extérieur de l’entreprise » (Baruel-Bencherqui, 2005 : 13).

Finot (2000 : 28) conseille alors les firmes et les salariés à s’adapter à une nouvelle forme de relation d’emploi : « fondée sur un contrat moral ne garantissant pas l’emploi à vie, mais un

moyen de développement personnel permettant de garantir l’employabilité ». Roehling et al.

(2000) note que le « top trois » des obligations de l’employeur associées à la nouvelle relation d’emploi sont les suivantes : la formation et le développement de compétences, l’implication de l’employé dans la prise de décision, une communication bidirectionnelle directe.

En revanche, certaines organisations renvoient la responsabilité de l’employabilité à leur personnel puisqu’elles estiment que celle-ci reste davantage à usage externe qu’interne. Plusieurs auteurs observent l’intérêt d’intégrer ce concept dans les politiques sociales de l’entreprise. Ce dernier permet de disposer des salariés flexibles, réactifs : « développer

l’employabilité est une nécessité pour l’entreprise car la recherche d’une flexibilité de compétences permet de favoriser les reconversions professionnelles internes en fonction des besoins qui évoluent » (Barjou, 1997), et plus fidèles (Finot, 2000 : 27). Ainsi, l’amélioration

de l’employabilité des salariés accroîtra, d’après Baruel-Bencherqui (2005 : 27), la compétitivité et la performance des firmes.

Il convient dès lors de préciser la responsabilité du salarié (2.1.1.) et celle de l’entreprise (2.1.2.) dans la gestion de l’employabilité.

2.1.1. La responsabilité du salarié cadre

La gestion de l’employabilité reste en premier lieu à la charge du salarié (Barkatoolah, 2000). Elle demeure une nécessité pour sécuriser les parcours professionnels (Saint-Germes, 2007 ; Le Boterf, 2010). En effet, la plupart des compétences acquises au début de la vie active risque de devenir obsolètes au fil du temps. Le salarié doit donc veiller à ajuster et améliorer tout au long de la carrière, son patrimoine de compétences en vue d’une adaptation permanente aux besoins du marché du travail (Jacot et al., 2001). Dany (2002 : 50) souligne que, outre le développement des compétences professionnelles, l’individu doit améliorer les autres éléments constitutifs de l’employabilité, en particulier « la capacité de traiter

l’information sur soi, sur le marché, sur la pertinence de son projet », mais aussi « la capacité à s’inscrire dans des cercles vertueux, c'est-à-dire intégrer très tôt des postes qui conviennent parfaitement à leurs titulaires et qui vont donc permettre à ceux-ci de faire preuve de leur potentiel ».

L’entreprise joue, bien entendu, un rôle essentiel dans l’amélioration de l’employabilité.

2.1.2. La responsabilité de l’entreprise

Afin d’assurer au mieux sa responsabilité en tant qu’acteur de l’employabilité, l’entreprise doit, dans un premier temps, incorporer le concept au sein de ses politiques RH tout en activant une communication interne sur les véritables objectifs de l’employabilité. En effet, ce terme véhicule des représentations négatives chez les salariés du fait qu’il est souvent employé lors des plans sociaux : « leur parler employabilité, c’est les positionner vers l’extérieur » (Finot, 2000 : 36). Dans un second temps, elle doit mettre en place les outils estimés indispensables au développement de « la capacité à être employé » : « si l’individu est le premier responsable de son employabilité, il demeure de la responsabilité de l’organisation de lui fournir les conditions favorables et de créer une culture d’employabilité » (St. Germes, 2004a).

Les gestionnaires et les consultants en management des organisations (Thierry, 1995 ; Finot, 2000 ; Hategekimana, Roger, 2002 ; Saint-Germes, 2004a) identifient cinq conditions de GRH propices à l’employabilité : les modalités d’organisation du travail (a), la gestion de compétences (b), les actions de formation continue (c), les dispositifs d’aide à la mobilité (d), l’entretien d’évaluation annuel (e).

a) Les modalités d’organisation du travail

Saint-Germes (2004a) invite les entreprises à éviter les tâches routinières et à suivre les évolutions des modes d’organisation du travail afin de libérer les initiatives et la créativité des salariés. Finot (2000) propose de multiplier les situations professionnelles apprenantes afin d’élargir le champ de compétences du personnel.

La gestion de compétences reste nécessairement complémentaire de nouvelles formes d’organisation du travail (Colin et Grasser, 2003).

b) La gestion de compétences

Zarifian (1999 : 68-80) définit la compétence comme « la prise d’initiative et de

responsabilité de l’individu sur des situations professionnelles auxquelles il est confronté […] La compétence est une intelligence pratique des situations qui s’appuie sur des connaissances acquises et, les transforment avec d’autant plus de force que la diversité des situations augmente […] La compétence est la faculté à mobiliser des réseaux d’acteurs autour des mêmes situations, à partager des enjeux, à assumer des domaines de coresponsabilité ». La

gestion de compétences s’avère donc nécessaire pour le maintien et le développement de l’employabilité. Selon un modèle finalisé sur cette dernière, Finot (2000 : 34-35) préconise d’orienter la gestion des compétences vers une nouvelle logique : « il faut que le curseur se

déplace d’une optimisation des compétences internes pour le besoin de l’entreprise, vers l’optimisation des conditions pour conserver un emploi ou accéder à un autre » ainsi « cette démarche doit s’inscrire dans une logique de long terme qui doit permettre à l’individu d’être à court terme prêt à accéder à un nouveau emploi ».

La gestion de compétences doit s’accompagner par la mise en place d’une politique de formation (Colin et Grasser, 2003).

c) Les actions de formation continue

Les entreprises font souvent recours à la formation continue pour accroître les compétences des salariés. Elle est souvent considérée comme un moyen d’adaptation à l’environnement interne et externe de l’entreprise : « la formation professionnelle est un ensemble d’actions

[…] planifiées à l’aide desquelles les salariés sont incités à améliorer leurs connaissances […] leurs compétences nécessaires à la fois pour atteindre les objectifs de l’organisation et ceux qui leur sont personnels pour s’adapter à leur environnement […] La formation apparaît comme une condition de l’employabilité pour le salarié » (Peretti, 1998 : 99).

En partant du rapport du « Club de Réflexion Patronal Entreprise et Progrès », Finot (2000) observe deux types de formation :

Formation d’adaptation, à caractère technique, qui se fait a priori au bénéfice de

l’entreprise ;

Formation-employabilité censée élargir les champs de métiers et de compétences du salarié, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’entreprise. « On y trouve les

formations aux langues étrangères, aux nouvelles technologies […] Elle contribue à l’information, à l’ouverture des salariés » (ibid. :22).

Seul le deuxième type de formation est considéré comme une condition suffisante de l’employabilité. La mobilité professionnelle en constitue la quatrième.

d) Les dispositifs d’aide à la mobilité

Saint-Germes (2004a) note que les différents types de mobilité améliorent la position du salarié sur le marché d’emploi puisqu’ils développent la capacité d’adaptation, les compétences techniques et relationnelles. On observe plusieurs formes de mobilité :

« la mobilité dynamique ». Elle est considérée comme un changement volontaire d’établissement (Cadin et al., 2000) qui s’appuie sur la notion de « carrières nomades » dans lesquelles il revient au salarié de « se prendre en mains » et d’assurer, entre autres via sa mobilité, son employabilité ;

« la mobilité statique ». Pour Vardi (1980), il s’agit des : « mouvements vécus par des

salariés qui passent d’un rôle organisationnel à l’autre » ;

« la mobilité-employabilité ». Elle est liée à la facilité de changer d’emploi au sein d’une même entreprise : « la mobilité professionnelle peut se définir comme une

facilité liée soit à un contexte favorable où les possibilités de changement sont importantes, soit à des atouts personnels » (Roger, Ventolini, 2004).

L’entretien annuel d’évaluation constitue le dernier outil de GRH favorable à l’employabilité.

e) L’entretien annuel d’évaluation

Thévenet et al. (2008) le définissent comme : « un système d’appréciation qui permet

d’évaluer la performance et les compétences du salarié ainsi que d’optimiser la gestion des hommes ». Les enjeux de l’entretien de l’évaluation pour le salarié sont les suivants :

 gérer au mieux sa vie professionnelle et son employabilité externe et interne ;

 comprendre sa place dans l’organisation et donner un sens à son travail ;

 faire un point sur son expérience et d’identifier les compétences à acquérir pour mener à bien son travail ;

 faire un bilan de sa carrière et de pouvoir construire un projet professionnel.

Les cinq outils de GRH développés ci-dessus sont adoptés dans certaines grandes organisations disposant d’une culture organisationnelle favorisant le développement de l’employabilité externe. On souligne toutefois la difficulté des petites structures, notamment les entreprises artisanales et les TPE, à mettre en place ces outils du fait de leur taille, du manque des moyens managériaux et de l’absence d’un service RH. De facto, ces structures

« apparaissent comme étant moins bien positionnées su le terrain de l’employabilité »

(Fredy-Planchot, 2010 : 263).