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Partie 2 : Mise en évidence du mécanofluorochromisme et polymorphisme

II.3 Cas du DFB-Amide

Pour ce composé, comme pour le DFB-Ester, on retrouve deux polymorphes : un polymorphe avec une émission dans le vert (CVA) et un second polymorphe avec une émission dans le jaune/orangée (CJA) avec un maximum d’émission à 512 nm. On les retrouve combinés au sein des poudres (Figure 82B). En effet sur l’image présentée Figure 82B, réalisée sur une poudre isolée après synthèse, on distingue des microcristaux de la phase cristalline CVA avec par endroit des cristaux plus importants associés à la phase CJA.

La phase amorphe obtenue après broyage affiche un maximum d’émission autour de 540 nm, le spectre est très large et recouvre en majeure partie le spectre de la phase cristalline CJA. Le caractère mécanofluorochrome est donc beaucoup plus marqué et facile à mettre en évidence à partir de la phase CVA.

Contrairement au DFB-Ester la DSC nous a donné des valeurs de fusion et de solidification constantes, respectivement 176°C et 142°C. Cependant, au cours du premier cycle de chauffage, on peut voir un pic endothermique à 96°C. Cet effet pourrait être expliqué par un phénomène de transition de phase cristalline ou par la cristallisation d’un fond amorphe présent initialement dans la poudre. Cet effet n’apparaîssant pas au cours du deuxième cycle, après recristallisation de l’échantillon au cours de la première phase de refroidissement, l’hypothèse la plus probable est la présence d’un fond amorphe dans la poudre initialement utilisée.

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Figure 82 : A Spectres d’émission de la phase cristalline CJA ainsi que de la poudre issue de synthèse. B Cliché de poudre de DFB-Amide obtenue après purification. C. Mesures DSC sur le DFB-Ester en poudre.

Pour ce composé seule la structure de CJA a pu être isolée et résolue par diffraction aux rayons X. Ce polymorphe cristallise dans un groupe d’espace monoclinique (P 21/n). Les expériences de diffraction sur poudre ont permis de confirmer le caractère cristallin du second polymorphe CVA. sans pouvoir remonter au groupe d’espace. L’étude du polymorphe CJA révèle une fois de plus une géométrie non plane de la molécule au sein de la maille cristalline :

CJA : Le cycle p-methoxyphényle et le centre dioxaborinine sont coplanaires alors que le cycle p-benzamidophényle forme un angle de 12,49° avec le centre dicétone. Dans le cas du polymorphe CJA les molécules sont aussi organisées selon un seul type de paire (Figure 83B), mais cette fois elles sont disposées tête-tête : les bores sont orientés dans le même sens de même que les substituants. Au sein d’une paire les centroïdes des deux molécules sont plus espacés avec une distance de 8,80 Å et le cycle p-méthoxyphényle d’une des molécules se superpose avec le cycle p-benzamidophényle de l’autre. On observe également la présence de liaisons hydrogènes N-H···F (Figure 83C).

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Figure 83 : A. Géométrie du DFB-Amide au sein de la structure cristalline CJA. B. Type de paire rencontrée dans les cristaux CJA. C. Mise en évidence des interactions de type N-H···F rencontrées dans les cristaux (atomes impliqués entourés en orange avec la liaison hydrogène soulignée en bleu).

Des mesures de déclins résolus en temps ont été effectuées sur une des poudres de synthèse. Les optimisations réalisées sur le logiciel Globals nous donnent accès à un système complexe à 4 exponentielles (Tableau 9), comme dans le cas du DFB-H, avec à nouveau :

 Une constante de temps longue, 20,10 ns, qui participe de manière importante à la fluorescence pour des longueurs d’onde élevées (>550 nm),

 Une constante de temps médiane, 7,45 ns, qui est une des composantes principales de notre système avec un coefficient pré-exponentiel qui augmente en parallèle des longueurs d’onde d’émission.

 Deux constantes de temps plus courtes, 2,82 ns et 0,45 ns dont la dernière affiche des temps de montée. Nous avons donc une fois de plus des transferts d’énergie ou la formation d’excimère à l’état excité dans le cas d’une des phases cristallines au minimum.

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Tableau 9 : Durées de vie de fluorescence mesurées sur poudre cristalline du composé DFB-Amide

a Tous les déclins ont été mesurés avec λexc = 390 nm. b Longueur d’onde en émission auxquelles ont été enregistrés les déclins

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Conclusion

De nouveaux composés ont été synthétisés avec des rendements allant de corrects à bons. Leurs propriétés en solution, coefficient d’absorption molaire, rendement quantique de fluorescence, durée de vie et solvatochromisme, ont été investiguées et sont en accord avec la littérature.

Des modélisations théoriques, en accord avec l’expérience, ont permis d’avoir accès aux orbitales frontières et d’identifier lesquelles sont impliquées dans les transitions électroniques observées. Les valeurs d’énergies obtenues pour les longueurs d’ondes d’absorption et d’émission sont proches de celles mesurées expérimentalement.

Nous avons également démontré le caractère mécanofluorochrome de nos composés et nous avons aussi exposé les cas de polymorphisme rencontrés avec études approfondies des structures cristallines obtenues. Selon le polymorphe majoritaire qui constitue les poudres le caractère mécanofluorochrome peut-être plus ou moins difficile à démontrer. En effet les phases cristallines possédant une fluorescence jaune/orangée (CJE, CJA) ne permettent pas d’obtenir un effet mécanofluorochrome avec un contraste satisfaisant. Ces différences d’émission entre les polymorphes ne reposent que sur des différences au niveau des interactions intermoléculaires présentes au sein des cristaux.

Au cours du chapitre suivant nous allons étudier plus en détail le phénomène de mécanofluorochromisme, non sur les poudres, mais sur des films minces sur papier ou lamelle de verre. Ce type de substrat nous permet une manipulation et une caractérisation plus aisée des différentes phases cristallines et principalement de la phase amorphe (échantillon papier). Les échantillons sur lamelles de verre permettront également de mettre en évidence la morphologie des phases cristallines et amorphes, par AFM, et de suivre l’évolution de la phase amorphe au cours du phénomène de retour tout en permettant la mesure en parallèle de spectre d’émission pour pouvoir corréler précisément fluorescence et morphologie.

Des études par spectroscopie résolue en temps préliminaires ont été effectuées et révèlent que les transitions en émission sont issues de processus complexes, avec dans certaines occurrences la formation d’excimère et/ou la présence de transfert d’énergie à l’état excité.

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Chapitre 3

Études détaillées du