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mécanofluorochromes Introduction

Partie 1 : modulation du ligand et du groupement chélatant

II. Modulation du centre dioxaborinine

II.2 Étude de l’influence des substituants du bore

Cette étude s’est inscrite dans le cadre d’un stage d’immersion de L3 réalisé par Yann Arribart a raison d’une demi-journée de travail en laboratoire par semaine pendant 6 mois. Nous nous sommes

193 intéressés à l’importance de la présence des substituants fluor dans le phénomène de mécanofluorochromisme.

Dans la littérature le groupe de Zhang et al13 a présenté la synthèse et l’étude d’un dérivé possédant des groupement phényles en lieu et place des fluors. Il met en évidence au cours de cette étude un comportement mécanofluorochrome particulier avec différentes réponses en fonction du type de forces appliquées.

Nous avons donc cherché à remplacer les atomes de fluor par des phényles et à analyser le changement de comportement induit par cette modification (Figure 132).

Figure 132 : Molécules ciblées pour déterminer l’influence des atomes de fluor dans la réponse mécanofluorochrome.

A. Synthèse des molécules cibles

La synthèse des composés DPB-H, DPB-Ester et DPB-Amide est analogue à celle des dérivés DFB-H, DFB-Ester et DFB-Amide. Seule l’étape finale diffère, les précurseurs P-H, P-Ester et P-Amide sont mis à réagir avec un excès de triphénylborane dans le dichlorométhane à chaud. Les différents composés ont pu être obtenus après purification avec des rendements satisfaisants (Schéma 5).

Schéma 5 : Synthèse des composés cibles DPB-H, DPB-Ester et DPB-Amide.

B. Études spectroscopiques en solution

Les propriétés photophysiques des dérivés présentés Figure 132 ont été étudiées dans le THF. Les trois dérivés ont des comportements analogues entre eux, en absorption et en émission avec un

194 décalage hypsochrome du dérivé DPB-H par rapport aux dérivé DPB-Ester et DPB-Amide (Figure 133). Tous les dérivés DPB présentent un maximum d’absorption décalé dans le rouge comparé à leur homologues DFB. Dans tous les cas on remarque un faible déplacement de Stokes faible impliquant un recouvrement non négligeable (DPB-Amide, DPB-Ester) voir important (DPB-H) des spectres d’absorption et d’émission. On remarque également une diminution d’environ de moitié des coefficients d’absorption molaire accompagnée d’une perte de la fluorescence. Les rendements quantiques des composés DFB-Amide et DPB-Amide sont respectivement de 0,86 et 0,03. Cependant la substitution des atomes de fluor par des cycles phényles n’affecte ni l’allure des spectres d’émission ni leur maxima (Tableau 19).

Figure 133 : Spectres d’absorption (ligne pleine) et de fluorescence (pointillés) des dérivés DPB-H, DPB-Ester et

DPB-Amide dans le THF. λexc = 390 nm.

Tableau 19 : Récapitulatif de maxima mesurés en absorption et en émission pour les composés DBP-H, DBP-Ester et DPB-Amide, accompagnés de la valeur des coefficients d’absorption molaire et rendements quantiques de fluorescence, et comparaison avec les valeurs obtenues pour les dérivés DFB-H, DFB-Ester et DFB-Amide.

a Ref sulfate de quinine dans H2SO4 0.5 M.

Pour mieux comprendre l’origine de cette perte de fluorescence, nous avons réalisé des calculs théoriques de modélisation. Comme précédemment la méthode DFT a été appliquée avec la

195 fonctionnelle B3LYP et la base 6-31 G(d,p) pour l’optimisation de géométrie et calcul de fréquence. Le solvant, THF, a été modélisé par la méthode IEFPCM. La transition Franck-Condon a été calculée par TDDFT avec la fonctionnelle B3LYP en base 6-311+G(d,p).

La géométrie calculée des dérivés présente une structure tétraédrique avec les deux phényles se situant dans un plan perpendiculaire au ligand dicétone. Les transitions électroniques sont purement de type HOBV avec l’orbitale haute occupée HO de type π et l’orbitale BV de type π*; en revanche, contrairement aux cas précédents, l’orbitale HO n’est plus localisée sur la dicétone mais presque exclusivement sur les substituants phényles tandis que la nature de l’orbitale BV n’a pas été modifiée (Figure 134).

Figure 134 : Transitions électroniques (en absorption) obtenues par TDDFT avec la fonctionnelle B3LYP en base 6-311 G(d,p) et représentation orbitales frontières HO/BV des différents dérivés DPB-H, DPB-Ester et DPB-Amide.

Dans tous les cas, les calculs théoriques permettent de modéliser fidèlement le comportement en absorption de l’ensemble des dérivés. Exceptée la HO du DPB-Amide, toutes les autres orbitales frontières ont des niveaux énergétiques supérieurs à ceux calculés dans le cas des dérivés DFB (Tableau 20).

L’augmentation des niveaux énergétiques des orbitales frontières est accompagnée du changement de nature de l’orbitale HO des dérivés DPB, qui est toujours à caractère π mais localisée sur les phényles ce qui peut expliquer la perte de fluorescence observée. Une conclusion similaire a été proposée dans l’article de Chujo et al.18 avec comparaison du comportement émissif de dérivés de type DPB et d’autres systèmes où les fluors sont substitués par des groupements pentafluorobenzènes. De manière comparables ils observent une perte de fluorescence lors de la substitution des groupements fluors par des phényles, mais ils retrouvent un fort caractère émissif avec les substituants pentafluorobenzènes. Avec ces derniers, l’orbitale HO est de nouveau localisée sur la dicétone.

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Tableau 20 : Récapitulatif des niveaux énergétiques des orbitales frontières des dérivés DPB et de leur analogue DFB avec les valeurs des transitions Franck-Condon théorique et expérimentale ainsi que l’écart entre les deux.

L’écart mesuré entre les valeurs théoriques et expérimentales :

exp exp

theo

A l’avenir une modélisation préalable de la nature et de la localisation des orbitales frontières pourrait permettre d’augmenter les chances, avant synthèse, d’obtenir de futurs dérivés possédant un caractère émissif en solution.

C. Étude cristallographique et mécanofluorochromisme

En passant à l’état solide nous avons noté une légère augmentation de la fluorescence dans le cas du DPB-H dû à des effets d’exaltation de fluorescence par agrégation décrits au chapitre 1. Le rendement quantique du DPB-Ester n’est pas impacté par le changement de phase et reste environ égal à 0,01. Quant aux dérivés DPB-Amide, il semble se produire des effets d’extinction de fluorescence avec un rendement quantique qui passe de 0,03 à 0,01. Cependant, à des valeurs aussi basses il est difficile de conclure de manière certaine.

Des essais de cristallisation ont été réalisés, seuls des cristaux du composé DBP-H ont été isolés et leur structure a été résolue par diffraction aux rayons X.

Le composé DPB-H cristallise en triclinique P-1 avec un désordre statistique lié à l’incertitude sur la position du méthyle. Deux molécules sont présentes par maille, chaque molécule suit une géométrie tétraédrique déformée avec les phényles orientés de manière perpendiculaire à la dicétone (Figure 135A). Les molécules sont organisées selon deux types de paires alternées, où les molécules sont orientées de manière antiparallèle avec les groupements bore diphényle en position opposée (Figure 135B).

Au sein du premier type de paire, α, la distance inter-centroïde est de 5,57 Å. Toutefois, les centroïdes sont situés au niveau du centre dioxaborinine et sont assez éloignés les uns des autres. Pour avoir une idée plus précise de la distance intermoléculaire nous nous sommes intéressés aux plans dans lesquels chaque molécule s’inscrit. Nous avons cette fois une distance de 2,48 Å entre deux molécules d’une même paire. Cette proximité, accompagnée d’un fort recouvrement des cycles phényles du ligand, démontre la présence de fortes interactions π entre les molécules des paires α.

Au sein de la seconde paire, β, les molécules sont plus espacées avec une distance inter-centroïde de 7,92 Å et une distance inter-planaire de 4,74 Å et de faibles interactions du fait d’un recouvrement peu important entre les deux molécules.

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Figure 135 :Structure cristalline du DPB-H. A. Géométrie mise en évidence avec position du centroïde indiquée en rouge. B. Type d’empilement rencontré au sein de la maille avec les deux types de paires α et β présentes de manières alternées.

Le comportement mécanofluorochrome des composés a été testé sur poudres et sur films minces, obtenus par drop casting à partir d’une solution de dichlorométhane concentrée, mais aucune variation de l’émission n’a pu être mise en évidence (Figure 136).

Figure 136 : Spectres de fluorescence des dérivés DPB-H (à gauche), DPB-Ester (milieu) et DPB-Amide (à droite) à partir des poudres isolées de synthèse (IS) et après broyage (CM).

198 Comme dans le cas du DFB-adaAmide un large encombrement, du fait de la présence des groupements phényles, vient perturber le comportement mécanofluorochrome de nos composés. Les interactions issues du glissement et du rapprochement des molécules provoqué par le cisaillement ne peuvent pas se créer et aucun phénomène de mécanofluorochromisme ne se produit ou bien elles n’ont tout simplement plus d’impact sur la fluorescence observée.

Il pourrait être intéressant à l’avenir de soumettre ces composés à de fortes pressions tout en suivant la réponse en émission pour pouvoir la comparer à celle obtenue par Zhang et al.13 sur un dérivé analogue.

Partie 2 : Introduction de groupements chiraux et analyse par