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acrylamides chiraux

IV.1. Diastéréosélectivité dans le cas d'acrylamides substitués

IV.1.2. Cas des acrylamides β,β-disubstitués

Nous avons vu que cette réaction était compatible avec des acrylamides substitués en position α ou β, nous avons donc ensuite envisagé le cas des acrylamides β,β-disubstitués. En effet, on retrouve dans la littérature que peu de références concernant l'addition de composés aromatiques sur des accepteurs portant deux substituants en position 4.115

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a) Tanaka, Y.; Kanai, M.; Shibasaki, M. J. Am. Chem. Soc. 2010, 132, 8862-8863. b) Mazet, C.; Jacobsen, E. N. Angew. Chem. Int. Ed. 2008, 47, 1762-1765. c) Chen, I. -L.; Wang, T. -C.; Chen, Y. -L.; Tzeng, C. -C. J.

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Alkylation utilisant le β,β-diméthylacrylamide

Nous avons, dans un premier temps, envisagé l'addition de pyrroles sur le diméthylacrylamide 58 dérivé de l'ester méthylique de la phénylalanine.

Comme dans les cas précédents, nous avons tout d'abord testé le pyrrole simple dans cette réaction d'alkylation. Un rapide criblage d'acides de Lewis a été réalisé (Schéma 62). Il est apparu que la réaction entre le diméthylacrylamide 58 et le pyrrole simple n'a pas été possible dans les conditions testées, après 76 heures de réaction. Une augmentation de la température réactionnelle à 40 °C n'a pas non plus permis d'obtenir les pyrroloamides attendus.

Schéma 62

Nous avons ensuite envisagé l'utilisation d'un composé pyrrolique à la nucléophilie accrue, le 2,4-diméthylpyrrole 24. Nous avons donc soumis ce pyrrole à notre criblage d'acides de Lewis (Schéma 63). Une fois encore, les conditions réactionnelles testées ne nous ont pas permis d'obtenir le pyrroloamide souhaité, après 3 jours de réaction, quel que soit l'acide de Lewis utilisé ou la température du milieu réactionnel.

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A la vue de ces échecs, nous avons alors utilisé le pyrrole considéré comme le plus nucléophile par l'échelle empirique et expérimentale développée par Mayr.27 Nous avons donc soumis le 2,4-diméthyl-3-éthylpyrrole 16 et le diméthylacrylamide 58 à la réaction d'alkylation de type Friedel-Crafts en présence de différents acides de Lewis (Schéma 64). Dans ces conditions, le criblage d'acides de Lewis a révélé que seul AlCl3 a présenté une réactivité intéressante, fournissant le pyrroloamide portant un système gem-diméthyle 59 avec 67% de rendement. La même réaction réalisée à 40 °C n'a pas permis d'abaisser le temps de réaction nécessaire à la conversion totale de l'acrylamide partenaire.

Schéma 64

Au cours de cette addition, nous avons observé une nette augmentation du temps de réaction nécessaire à la réalisation de cette réaction. Cette cinétique très lente laisse penser à des considérations d'ordre stérique. Il existe dans les composés carbonylés α,β-insaturés un équilibre entre deux conformères liées à la disposition géométrique de l'alcène par rapport au carbonyle, les formes cisoïdes et transoïdes. L'équilibre de ces conformations dépend de la force de l'interaction entre le carbonyle et le proton vinylique de la position β. Dans le cas d'acrylamides non substitués ou substitués de configuration trans, seule la forme cisoïde existe en solution.116 Dans notre hypothèse de mécanisme, c'est cette forme cisoïde qui subit l'attaque du pyrrole nucléophile. Dans le cas du diméthylacrylamide, il n'existe pas de proton β-vinylique, de ce fait l'équilibre entre les deux formes est très fortement déplacé vers la forme transoïde en raison d'interactions défavorables entre le méthyle en position cis et le carbonyle (Schéma 65). Ce fait peut expliquer les temps de réaction observés dans ce cas.

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Schéma 65 : Equilibre entre les formes cisoïde et transoïde de l'intermédiaire réactionnel.

Alkylation utilisant le β-trifluorocrotonamide

Après avoir observé la réactivité de nos pyrroles vis-à-vis d'un acrylamide portant deux groupements méthyle en position β, nous nous sommes intéressés au cas d'acrylamides portant deux groupements différents sur cette position β. Notre choix s'est porté sur le β-trifluorométhylcrotonamide 60 rapidement accessible à partir du précurseur acide commercial. De plus, on recense, à ce jour, très peu de publication traitant de l'addition de pyrroles sur des structures portants des groupements trifluorométhyle.89a De la même manière, on retrouve un seul exemple où un pyrrole est utilisé dans une réaction de Friedel-Crafts créant un carbone quaternaire chiral.117

Les réactions réalisées en utilisant le pyrrole 15 et le 2,4-diméthylpyrrole 24 ont mis en évidence l'absence de réactivité dans ces conditions. Nous avons alors focalisé nos efforts sur la réaction entre l'accepteur 60 et le 2,4-diméthyl-3-éthylpyrrole 16. Un rapide criblage d'acides de Lewis a été réalisé afin de déterminer les conditions optimales pour cette réaction. Il est tout de suite apparu que le fait d'utiliser TESOTF ou TiCl4 pour réaliser cette réaction ne permet pas l'obtention du produit désiré (Tableau 26, entrées 2 et 5). De même, BF3●OEt2

présente un rendement très faible de 11% après 3 jours de réaction (Tableau 26, entrée 1). L'utilisation d'AlCl3, nous a permis de pouvoir isoler le pyrroloamide 61, portant un carbone quaternaire lié à un groupement trifluorométhyle, avec 62% de rendement (Tableau 26, entrée 3). La version catalytique de cette réaction s'est avérée peu efficace en fournissant le produit qu'en faible quantité (Tableau 26, entrée 4). Nous avons été agréablement surpris de constater un rapport diastéréoisomérique de l'ordre de 3:1 dans cette réaction.

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84 Entrée A.L. Quantité d'A.L. Rdt. (%) r.d.

1 BF3●OEt2 1 équiv. 11 1,5:1

2 TESOTf 1 équiv. 0 /

3 AlCl3 1 équiv. 62 3:1

4 AlCl3 10 mol % 37 3:1

5 TiCl4 1 équiv. 0 /

Tableau 26 : Criblage d'acides de Lewis dans le cas d'acrylamides disubstitués.

Dans le but de confirmer ce résultat prometteur, nous avons utilisé nos conditions réactionnelles optimisées sur des β-trifluorométhylcrotonamides dérivant d'acides aminés et portants des chaînes latérales différentes. Dans ce cas, nous nous sommes intéressés à l'évolution de la diastéréosélectivité suivant la nature des groupements présents sur les résidus d'amino esters.

Les résultats concernés sont rassemblés dans le Tableau 27. Toutes les réactions d'alkylation de type Friedel-Crafts ont présenté un taux de conversion semblable à celui observé dans le cas du β-trifluorométhylcrotonamide 60 dérivé de la leucine. Les rendements isolés pour ces pyrroloamides présentant un carbone quaternaires sont également du même ordre de grandeur et s'échelonnent de 62% dans le cas d'une dérivé de la phénylalanine (Tableau 27, entrée 2) à 67% pour une chaîne latérale soufrée constitutive de la méthionine (Tableau 27, entrée 4). Les diastéréosélectivités obtenues s'avèrent très intéressantes et présentent leur maximum dans le cas d'une chaîne latérale i-Pr contenue dans la valine (Tableau 27, entrée 3). Les résultats obtenus semblent confirmer un transfert de chiralité au moment de l'addition du pyrrole sur ces alcènes électrodéficients. Malheureusement, malgré plusieurs tentatives, aucun cliché de diffraction aux rayons-X n'a pu être réalisé à ce jour, permettant de déterminer la stéréochimie des pyrroloamides majoritaires à l'issue de cette réaction d'alkylation.

85 Entrée R Rdt. (%) r.d. Produit 1 i-Bu (60) 62 3:1 61 2 Bn (62) 62 3,5:1 65 3 i-Pr (63) 64 4:1 66 4 CH2CH2SMe (64) 67 3,5:1 67

Tableau 27 : Synthèses de pyrroloamides trifluorométhylés portant un carbone quaternaire.