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Le jeu est une expérience créative et spontanée qui s’inscrit dans le temps et l’espace et qui est réel pour l’enfant. Dans le contexte du Gribouillis, le jeu offre une aire intermédiaire d’expérience (Winnicott, 1971) qui assure une transition entre l’enfant et sa mère. Les interactions qui prennent place dans le jeu sont le reflet de la dynamique relationnelle mère- enfant.

Le tableau qui suit met en évidence ce qu’est la capacité à jouer (colonne A) versus ce qui n’est pas la capacité à jouer (colonne B).

A B La mère manifeste une bonne capacité à

jouer lorsqu’elle :

La mère ne manifeste pas de capacité à jouer lorsqu’elle :

Vit le jeu interactionnel mère-enfant comme une activité mentale centrée sur l’enfant

Vit le jeu interactionnel mère-enfant comme un espace où elle s’abandonne à ses propres fantaisies, se laisse aller et joue pour elle- même (i.e., le Gribouillis est considéré comme une activité ludique).

Garde une distance par rapport au jeu de l’enfant, c’est-à-dire qu’elle ne s’excite pas dans le jeu. Elle utilise plutôt la situation de jeu pour échanger avec l’enfant et apprendre à le connaitre. La mère peut manifester du plaisir lorsqu’elle est en situation de jeu avec son enfant, mais le plaisir relève de la joie qu’elle a à découvrir l’enfant à travers le jeu plutôt que de l’excitation pure.

Est excitée par le jeu (i.e., faire des dessins) et cela peut devenir hypomaniaque. Il est à noter que la mère ne peut pas à la fois se laisser exciter par le jeu et s’intéresser au monde interne de l’enfant.

Ex. La mère prends un temps considérable à produire son dessin, semble éprise d’un intérêt inapproprié pour sa création ou ne cesse de rajouter des détails à son dessin pour le rendre meilleur.

Ex. La mère n’est pas particulièrement expressive par rapport aux dessins de l’enfant, mais lorsqu’elle-même dessine, elle s’exclame : « Wow, il est beau mon dessin. C’est joli! J’suis pas pire »

Reconnait qu’essentiellement le jeu du Gribouillis est une forme de communication au sein de la relation mère-enfant. La mère comprend que l’enfant dit quelque chose à travers son jeu. Le jeu devient ainsi une création de l’enfant.

Exécute le jeu du Gribouillis de façon machinale et sans saisir les occasions de communication.

A pour objectif de soutenir un espace où l’on suspend la réalité. En ce sens, elle n’introduit pas inutilement d’éléments de sa réalité ou de la réalité externe puisque le Gribouillis doit demeurer un jeu.

Ne considère pas le jeu comme étant un espace où l’on suspend la réalité.

Ex. L’enfant dessine une sorcière et la mère réagit en disant : « Tu penses que je suis une sorcière! »

Ex. La mère ramène des éléments et

situations de la réalité dans le jeu de façon constante, ce qui empêche l’enfant de se laisser aller dans la fantaisie.

Reconnait que l’activité demeure le jeu de l’enfant et non le sien.*

S’ingère dans le jeu de l’enfant.

Ex. L’enfant dessine un ciel et dit : « C’est le ciel. »

Mère : « Ben là, tu peux faire quelque chose en dessous. »

Enfant : « Ben c’est le ciel avec des étoiles. »

Mère : « Ben fais quelque chose d’autre, c’est la nuit, on fait du camping, je sais pas moi. »

Enfant : « Ok, le camping. » Elle ajoute une scène de camping à son dessin.

Ex. La mère raconte son histoire en

changeant la signification d’un dessin (elle dit poisson au lieu de tambour). L’enfant lui souligne son erreur et la mère

répond : « Ben moi j’appelle ça un poisson, c’est mon histoire à moi! »

*L’espace d’expérience qu’offre le jeu est décrite par Winnicott comme l’espace transitionnel à laquelle contribuent simultanément la réalité intérieure et la vie extérieure. Au sein de la relation mère-enfant, et plus spécifiquement lors de l’activité du Gribouillis, ceci signifie que la mère doit maintenir, à la fois séparées et reliées l’une à l’autre, sa réalité intérieure, c’est-à-dire son monde subjectif, et la vie extérieure, c’est-à-dire sa représentation du monde subjectif de l’enfant.

La capacité à jouer réfère à la mesure dans laquelle la mère est disposée à jouer avec son enfant, ce qui se reflète par sa capacité à entrer dans un monde de fantaisie (le jeu ou le faire semblant) en complétant les dessins, racontant une histoire et, plus généralement, en participant aux échanges de façon à enrichir le contenu symbolique du jeu a. À cet égard, la mère peut enrichir le contenu symbolique du jeu en explorant les fantaisies de l’enfant au- delà des indices concrets (verbalisations, dessins) ressortant de l’activité afin de saisir et de rendre plus vivant ce que l’enfant tente d’exprimer.

a Ex. Afin de favoriser le jeu, la mère peut questionner ou faire évoluer les éléments de

fantaisie tels que les états mentaux (ex : affects, pensées, intentions) des personnages ou encore les aspects relationnels dans les dessins ou l’histoire.

0 = Absence de capacité à jouer; la mère semble déconnectée et non disposée à jouer avec l’enfant. Elle éprouve de la difficulté à élaborer un dessin à partir d’un barbeau ou raconter une histoire à partir des dessins. La mère exprime verbalement son manque d’idées ou modifie ce que les dessins représentent dans son histoire par manque d’inspiration. La mère peut manifester certaines difficultés à se concentrer sur l’activité, s’impatienter ou se décourager facilement. Elle ne manifeste aucun plaisir, même dans le contexte où l’enfant exprime du plaisir. Ou encore, à l’opposé, elle semble en hypomanie a et tout aussi

déconnectée que si elle était non disposée à jouer avec l’enfant. Pratiquement, aucun élément composant la colonne A n’est présent et plus d’un élément de la colonne B sont présents au sein de l’interaction.

a Ex. L’hypomanie peut être observée chez les mères qui veulent bien paraitre et par conséquent exagèrent leurs réactions positives et semblent quasi agitées ou encore les mères anxieuses qui ont des petits rires nerveux fréquents qui s’inscrivent dans un état d’excitation généralisé.

2 = Faible capacité à jouer; la mère semble très peu disposée à jouer avec l’enfant. Les dessins de la mère sont collés au barbeau (peu d’effort imaginatif) et ses dessins/barbeaux peuvent être répétitifs. Quant à elle, l’histoire est, de façon générale, collée aux dessins et elle est construite simplement en les nommant. Elle peut accomplir l’activité de façon expéditive et sembler minimiser les échanges avec son enfant. Si la mère semble avoir du plaisir, celui-ci apparait peu authentique a ou non lié à la relation mère-enfant b. Les éléments de la colonne B sont plus présents que les éléments de la colonne A. a Ex. Les manifestations de plaisir sont répétitives ou fausses.

b Ex. Les manifestations de plaisir chez la mère sont associées à l’exécution d’un dessin (i.e., la mère s’emballe face à son propre dessin) ou à la réussite d’un dessin à partir d’un barbeau complexe.

4 = Capacité à jouer modérée; la mère manifeste une certaine disposition à jouer. Les dessins sont effectués sans difficulté, mais ils demeurent simples et communs. Les dessins ne sont pas connectés symboliquement à ceux de l’enfant. À ce stade, la mère accepte (i.e., pas d’attitude critique, rejetante ou méprisante) les différents niveaux de complexité de barbeau que l’enfant lui présente a. Elle essaie de deviner son enfant sans imposer sa vision b. L’élaboration de l’histoire va au-delà de la nomination des dessins; cependant il y a peu d’ajouts et de complexité. La mère semble avoir un plaisir authentique à découvrir l’enfant à travers le jeu. Les éléments de la colonne A et B sont représentés assez également au sein de l’interaction.

a Ex. L’enfant fait un barbeau et dit : « Je vais essayer de te faire ça moins difficile. » La mère répond : « C’est comme tu veux. » L’enfant fait un barbeau complexe et la mère dit en souriant : « Wow, c’est quelque chose… Je te dis que je fais mon possible! »

b Ex. L’enfant présente son dessin à la mère et lui dit : « Devine c’est quoi! » La mère fait un effort considérable pour deviner ce que l’enfant a dessiné, même si ce n’est pas évident, sans toutefois explorer davantage.

6 = Capacité à jouer considérable; la mère manifeste une bonne disposition à jouer. Les dessins sont complexes et le coteur peut déceler une certaine connexion symbolique entre les dessins de la mère et ceux de l’enfant. La mère est disposée à naviguer dans un monde de fantaisies en accompagnant l’enfant de façon spontanée dans le jeu a. Quant à elle, l’histoire est cohérente et structurée. La mère semble être en mesure d’intégrer l’ensemble des dessins dans son histoire en élaborant minimalement sur les liens qui les unissent. La mère manifeste un franc plaisir à découvrir l’enfant à travers le jeu. Les éléments de la colonne A sont plus présents que les éléments de la colonne B.

a Ex. La mère tente des commentaires qui font référence à l’intentionnalité des

personnages ou elle décrit de façon tentative des relations entre eux; L’enfant dessine une pente de ski et la mère lui demande : « Est-ce une pente difficile ou facile? »; L’enfant dessine une araignée dans un bocal et la mère commente avec un ton amusé en disant: « Eh bien, elle ne risque pas d’en sortir celle-là! »; L’enfant dessine un oiseau et la mère lui demande : « C’est quelle sorte d’oiseau? »; L’enfant dessine un bonhomme et la mère lui demande : « C’est qui la petite fille? »

8 = Capacité à jouer marquée; la mère manifeste une excellente capacité à jouer avec l’enfant. Les dessins de la mère sont originaux et variés, en plus d’être connectés symboliquement à ceux de l’enfant ou à son vécu a. La mère a la capacité de stimuler l’imagination de son enfant et ainsi créer un monde symbolique autour de l’activité. Elle navigue très facilement dans le monde de la fantaisie et peut même tenter de le faire évoluer b. Quant à elle, l’histoire est cohérente, élaborée (ex : liens complexes entre les dessins) et elle peut même sembler liée aux thèmes amenés par l’enfant dans le jeu. Le plaisir de la mère à découvrir l’enfant à travers le jeu réside dans la relation plutôt que dans le bon déroulement de l’activité c. La mère a du plaisir, mais ce n’est pas de la surexcitation ou de l’hypomanie. Aucun élément composant la colonne B n’est présent et plus d’un élément de la colonne A sont présents au sein de l’interaction.

a Ex. Dessin de la mère connecté au vécu de sa fille : La mère dessine une clé de sol à partir du barbeau de son enfant tout en lui expliquant qu’elle dessine cela parce que la petite lui avait enseigné comment le faire au cours de la semaine. Une conversation au sujet de ce moment mère-fille s’ensuit.

b Ex. La mère suggère de nouvelles idées, personnages ou solutions tout en respectant la créativité de l’enfant.

c Ex. L’enfant présente un barbeau difficile à la mère et celle-ci reconnait que l’enfant lui rend la tâche difficile avec humour, sans démontrer d’irritabilité. Malgré le défi, elle demeure pleinement engagée dans la relation et en retire du plaisir.

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